IV. JEUNESSE ET SPORTS
Au cours de la session 2018-2019, une seule nouvelle loi a été promulguée dans ce domaine : la loi n° 2019-812 relative à la création de l'Agence nationale du sport et à diverses dispositions relatives à l'organisation des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 appelait la publication d'une série de décrets dont la plupart n'ont pas été pris. Elle affiche ainsi un taux d'application de 25 %.
Le bilan de l'application de la loi de 2017 visant à préserver l'éthique du sport, à renforcer la régulation et la transparence du sport professionnel et à améliorer la compétitivité des clubs reste inchangé.
A. LOI N° 2019-812 DU 1ER AOÛT 2019 RELATIVE À LA CRÉATION DE L'AGENCE NATIONALE DU SPORT ET À DIVERSES DISPOSITIONS RELATIVES À L'ORGANISATION DES JEUX OLYMPIQUES ET PARALYMPIQUES DE 2024
Cette loi avait pour objectifs initiaux :
- de ratifier l'ordonnance n° 2019-207 du 20 mars 2019 relative aux voies réservées et à la police de la circulation pour les jeux Olympiques et Paralympiques de 2024, prise en application de l'article 24 de la loi n° 2018-202 du 26 mars 2018 relative à l'organisation des jeux Olympiques et Paralympiques.
- et d'insérer dans le code du sport des dispositions relatives à l'Agence nationale du sport.
Sur ce dernier point, il faut rappeler que le Gouvernement avait prévu de créer l'Agence nationale du sport par voie réglementaire. La convention constitutive du groupement d'intérêt public fut ainsi approuvée par arrêté du 20 avril 2019. Cependant le Conseil d'État a relevé que plusieurs dispositions de la convention constitutive nécessitaient de recourir à la loi, en particulier au regard de la délégation de compétence à l'Agence en matière de soutien au sport de haut niveau et à la haute performance sportive, d'une part, de développement de l'accès à la pratique sportive, d'autre part. Le Conseil d'État a ainsi souhaité mentionner que cette délégation de compétence s'exerçait dans le cadre de la stratégie définie par l'État dans une convention d'objectifs signée entre l'Agence et l'État. Il était nécessaire de passer par la loi pour rappeler le rôle du Gouvernement dans la détermination de la politique publique du sport et la stratégie nationale et internationale en matière de sport de haut niveau, de haute performance sportive et de développement de la pratique sportive.
Toutefois, première assemblée saisie du projet de loi, le Sénat a estimé que la sécurisation juridique ainsi opérée en actant dans la loi la création de l'Agence nationale du sport était insuffisante et ne permettait pas « de clarifier son organisation, encore moins d'associer le Parlement à son fonctionnement ».
À l'initiative de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication et de son rapporteur, le Sénat a précisé la gouvernance, l'organisation territoriale et les moyens de l'Agence nationale du sport.
Afin de répondre aux incertitudes sur les financements publics de l'agence, il a d'abord prévu que l'agence pourra collecter tout type de ressources auprès de personnes morales de droit privé.
Il a ensuite circonscrit le rôle du préfet de région comme délégué territorial au développement du sport pour tous dans les territoires carencés et à la gestion des crédits de l'agence. Le Sénat a, ensuite, inséré dans le texte les principes de la gouvernance territoriale de l'Agence nationale du sport avec la création d'une conférence régionale du sport, chargée d'établir un projet sportif territorial, et des conférences des financeurs.
Les présidents des conférences régionales du sport et des conférences des financeurs seront élus parmi les élus locaux ou les représentants du mouvement sportif. Le nombre de conférences des financeurs pourra varier au sein de chaque région selon les spécificités territoriales. Les associations d'élus seront chargées de désigner les élus au sein des conférences des financeurs.
Le Sénat a également prévu que le Parlement soit associé en amont - à travers un avis des commissions compétentes - à la convention d'objectifs qui définirait les moyens publics mis à disposition de l'agence dans un cadre pluriannuel.
Quatre décrets doivent permettre la mise en application complète de la loi n° 2019-812.
Or, un seul décret est paru à ce jour : il s'agit du décret en Conseil d'Etat n° 2020-288 du 20 mars 2020 relatif au contrôle et à certains concours financiers de l'Agence nationale du sport . Il a pour objet de soumettre l'Agence au contrôle d'un commissaire du Gouvernement et au contrôle économique et financier de l'État. Il détermine les modalités d'exercice des attributions du commissaire du Gouvernement et l'autorité chargée de l'exercice du contrôle économique et financier de l'État placés auprès de l'Agence. Le décret précise également les structures attributaires des concours financiers qui peuvent être accordés par l'Agence dans le cadre de conventions d'objectifs : les fédérations sportives agréées, les collectivités territoriales et leurs groupements, et les associations.
À la demande des représentants des collectivités territoriales, de nombreux aspects de la gouvernance territoriale n'ont pas été tranchés dans le cadre de la loi afin de préserver une nécessaire souplesse et de laisser du temps pour la concertation entre les acteurs. Il revient ainsi aux décrets d'application prévus par les nouveaux articles L. 112-14 et L. 112-15 du code du sport de déterminer le détail des modalités d'application de la gouvernance territoriale (conférences régionales du sport et conférences des financeurs du sport) . Par ailleurs, l' article L. 112-12 du code du sport prévoit un décret sur les conditions de désignation du représentant de l'État comme délégué territorial de l'Agence .
Attendue début 2020, la publication de ces trois décrets devrait finalement intervenir à l'été 2020. Leur contenu sera d'autant plus essentiel qu'il reviendra à clarifier dans les faits les modalités de l'exercice coordonné de la compétence partagée dans le sport tant à travers la définition de la stratégie territoriale que des modalités d'attribution des subventions.
MM. Claude Kern et Christian Manable ont conduit en 2019 un travail de suivi attentif de l'application de la loi n° 2019-812 à travers leur mission d'information sur les nouveaux territoires du sport 308 ( * ) . Ils ont notamment fait des préconisations afin que le pilotage des conférences régionales du sport et des conférences des financeurs soit organisé à l'initiative des collectivités territoriales dans le cadre de leur compétence partagée.
En effet, si la loi précise que les conférences régionales des sports et les conférences de financeurs élisent leurs présidents, la loi n'a pas déterminé sur quelles structures permanentes elles pourront s'appuyer. Or, il n'est pas indifférent, selon les rapporteures, que le secrétariat général de ces conférences soit assuré par les services de l'État ou des moyens mobilisés par les collectivités territoriales.
De même, les contours des conférences des financeurs du sport n'ont pas été arrêtés afin de laisser de la souplesse. Pour autant, il semble difficile d'imaginer que la création de ces conférences ne réponde à aucune règle précise et que les structures se multiplient pour répondre à chaque demande locale. L'organisation de la compétence partagée justifie précisément de structurer le territoire afin en particulier, de clarifier les règles du jeu pour les petites communes et les petits clubs qui avaient du mal jusqu'à présent à se situer aux carrefours des flux de subventions.
* 308 Rapport d'information n° 102 (2019-2020) de MM. Claude Kern et Christian Manable (5 novembre 2019) : « Les politiques territoriales du sport : de l'indépendance revendiquée à une coordination respectueuse de la diversité locale ».