COMPTES RENDUS DES DÉPLACEMENTS EFFECTUÉS PAR LA DÉLÉGATION AUX ENTREPRISES
A. COMPTE RENDU DE LA RÉUNION DU 25 OCTOBRE 2018, SUITE AU DÉPLACEMENT DANS LE DOUBS LE 18 OCTOBRE 2018
M. Martial Bourquin . - Chers collègues, j'ai eu le plaisir d'accueillir jeudi 18 octobre notre présidente, Élisabeth Lamure, Jackie Pierre et Jérôme Durain, venus en voisins des Vosges et de Bourgogne, mais également Michel Canevet et Guillaume Arnell.
Bien qu'il soit difficile de passer à côté de PSA lors d'un déplacement dans le Pays de Montbéliard, la présidente avait tenu à donner la priorité aux équipementiers, puisque notre délégation a surtout vocation à porter la voix des entreprises de taille petite, moyenne ou intermédiaire.
Trois thèmes ont dominé durant cette journée : l'automobile, la filière du cuir, le BTP, lesquels se conjuguent pour souligner la mixité du Doubs, département à la fois très industriel et rural.
La délégation s'est d'abord rendue sur le site historique de l'usine Peugeot à Sochaux où elle est implantée depuis 1912. Il s'agit du troisième site industriel de France occupant 235 hectares dont la moitié de surface utile développée.
Le groupe automobile veut libérer 50 hectares d'ici
2023. Il met en place une modernisation impressionnante en changeant les flux,
c'est-à-dire en passant d'une usine de production à une usine
d'assemblage.
Ce changement est indispensable pour la survie du site de
Sochaux et pour le Pays de Montbéliard mais il provoquera des
modifications importantes de taxes foncières pour les
collectivités. L'objectif de Peugeot est de ramener la surface
bâtie utile de 700 000 à 230 000 m2 pour
réduire son « coût d'environnement » de
50 voire 75 %. Cette réduction des surfaces s'effectue en
produisant autant, voire davantage, de voitures qu'aujourd'hui, soit au moins
350 000 par an, avec 8 000 salariés, auxquels
s'ajoutent 2 200 intérimaires, contre 48 000 au plus
haut il y plusieurs années.
C'est donc un bassin d'emploi en pleine
restructuration. Cela donne la mesure des progrès de la
productivité et soulève des interrogations sur les façons
de produire dans l'automobile. Nous avons pu y voir des chaînes de
production entièrement robotisées, une cellule de R&D
très active comptant 2 200 salariés, et une
démarche de recherche du « défaut zéro ». Pour
ces raisons, le groupe PSA est passé pour la première fois de son
histoire devant le groupe Volkswagen.
En somme, le projet « Sochaux 2022 » va bouleverser
de fond en comble un site de plus de 200 hectares,
30 kilomètres de routes et presque autant de voies ferrées,
développé de manière empirique au fil des décennies
et en milieu urbain. Ce site consomme aujourd'hui 800 tonnes d'acier par
jour. L'objectif est d'en faire une « usine du futur », aux
meilleurs standards mondiaux. La famille Peugeot, très attachée
au Pays de Montbéliard, tenait à ce que le groupe garde l'usine
de Sochaux ce qui a prêté à débats.
La
décision a été finalement prise de le garder mais à
la condition d'un changement radical : cette transformation unique d'un site
industriel, peu adapté et moins compétitif que les autres,
représente un projet d'une ampleur sans équivalent dans
l'industrie automobile. Alors qu'il fallait parcourir 830 mètres
entre le point de déchargement des camions et le point de consommation,
la distance ne sera plus que de 130 mètres.
Les 200 millions investis doivent permettre de passer de deux à une seule ligne d'assemblage, pour produire d'ici à 2024, 400 000 unités, le tout avec une grande flexibilité. À terme en effet, il devrait être ainsi possible de fabriquer six silhouettes différentes sur place (des SUV aux véhicules de catégorie C), de monter des systèmes d'aide à la conduite et des moteurs hybrides sur plusieurs véhicules.
La libération de 50 hectares a déjà permis de réaffecter 26 hectares aux collectivités locales pour réaliser un projet de réaménagement urbain, sur une autre partie du site au nord, qui doivent être connectés au tissu urbain de Sochaux, ville de 3 500 habitants, et de sa voisine Montbéliard. Ces villes vont pouvoir réinvestir ces sites et ont pour ambition d'accueillir des fournisseurs au pied des lignes de fabrication. L'idée serait d'en faire une chaîne unique, robotisée et digitalisée avec les équipementiers à proximité.
L'originalité de cette mutation industrielle est l'association du public et du privé, au sein d'une société d'économie mixte, la SEM PMIE. Cette SEM a été créée en avril 2011 par le Pays de Montbéliard Agglomération (plus ancienne intercommunalité de France, datant de 1945) et ses partenaires publics et privés, afin de mettre en oeuvre une politique de développement économique par la mise en place de solutions de portage immobilier. Elle a bouclé, en 2016, sa première augmentation de capital, un premier doublement de 7 à 14 millions d'euros et prépare un second doublement, de 14 à 28 millions d'euros en 2019. Elle héberge au total une trentaine d'entreprises employant 850 salariés. Sur le site de Sochaux, l'agglomération lui a cédé en juillet 2015 une partie des locaux rétrocédés par Peugeot, environ 100 000 m². La SEM a installé les premiers fournisseurs du groupe automobile dès octobre 2015. Le modèle économique de ce partenariat public - privé ne se fonde pas sur des subventions : les investissements de la SEM dans ces usines seront remboursés par des loyers.
J'ai proposé à la délégation sénatoriale de rencontrer trois fournisseurs, établis dans d'anciens hangars autrefois occupés par Peugeot :
- EUROFIT , entreprise conjointe de Michelin et Continental qui assemble les roues. Elle emploie plus de 1 000 salariés sur 20 sites répartis sur quatre continents. Elle a ouvert à Sochaux son cinquième site français. On y produit des roues, à la cadence d'une toutes les quatre secondes, avec trois équipes, soit 3,5 millions par an. Son dirigeant nous a indiqué qu'un arrêt de ligne de production coûtait 1 170 euros la minute ;
- TI Automotive , qui fabrique des systèmes de fluides automobiles. Ce fournisseur pratique les mêmes cadences élevées, produisant un réservoir à la minute. Il doit s'adapter, d'une part, à la mutation du déclin du diesel et, d'autre part, à la variété extrême des configurations pour dessiner un réservoir d'essence le mieux adapté possible et le plus protecteur des émissions de polluants volatils ;
- Géodis enfin, qui est la quatrième entreprise européenne de logistique, de messagerie et de transport routier et qui emploie 30 000 salariés dans 120 pays. Son rayonnement international s'appuie sur une présence directe dans 67 pays et un réseau mondial qui relie plus de 120 pays. L'entreprise profite d'une économie dans laquelle les pièces des produits manufacturés viennent du monde entier. Géodis réalise 8 milliards d'euros de chiffre d'affaires. Le plus original est qu'il s'agit d'une filiale du groupe SNCF (dont elle est une « pépite financière » mal connue), ainsi installée dans l'usine d'un constructeur automobile afin d'assembler des portières avant qu'elles ne soient réinjectées dans la chaîne de montage final. Cette entreprise de logistique fait donc aussi de l'assemblage.
Quelles conclusions tirer de ces visites de terrain ?
Les changements que l'on peut constater à Sochaux vont se produire dans beaucoup d'autres sites si notre industrie veut rester compétitive. Nous avons face à nous l'industrie du futur. Les entreprises doivent s'atteler à ces changements si nous voulons continuer à produire sur le sol français.
Pour l'entreprise PSA, on voit le gain évident en productivité et en baisse des coûts d'un rapprochement physique avec ses fournisseurs. C'est pourquoi l'entreprise PSA produit encore 40 % de sa production en France contre 12 % pour Renault, alors que la production de Volkswagen, elle, dépasse les 50 % sur le sol allemand. Ce projet vise à donner encore plus de souplesse et d'adaptabilité à la production automobile qui va être confrontée à de gigantesques mutations, comme le mix électrique, qu'elle doit réussir sous peine d'obsolescence. Rappelons que Peugeot a frôlé la faillite en 2012-2013 et a été sauvé par l'État (qui a participé au capital à hauteur de 13 % et qui a réussi à amener DongFeng, participant également à 13 %.
Par ailleurs, un Pôle de Compétitivité Véhicule du Futur est en train de se constituer autour de l'innovation et des nouvelles mobilités pour fédérer des entreprises, des unités de recherche et des centres de formation, tous engagés dans une synergie autour de projets collaboratifs innovants et d'une taille critique permettant une visibilité internationale.
Un problème récurrent a été signalé à la délégation : ces trois fournisseurs nous ont confirmé la difficulté de mobiliser de la main d'oeuvre locale et indiqué recourir à des salariés venant de toute l'Europe et même au-delà. Pourtant, ces équipementiers, à la différence de PSA, embauchent souvent en CDI. Ces difficultés ne sont pas propres à l'industrie automobile puisque nos interlocuteurs nous en ont fait part également pour la filière cuir.
On mesure la responsabilité croissante des collectivités locales dans le développement économique : non seulement pour gérer l'immobilier d'entreprise, mais également pour améliorer les infrastructures d'accès aux sites industriels, afin précisément de soutenir le rythme de production.
Mais le rapprochement entre l'entreprise et ses fournisseurs conduit ces derniers à quitter d'autres sites qu'ils occupaient, laissant derrière eux des friches industrielles que des communes, souvent de taille modeste et certainement moins armées, doivent ensuite gérer. La résorption des friches et la perte de ressources fiscales qui en résulte représentent un défi pour ces collectivités.
La délégation a ensuite visité le centre de formation des apprentis des métiers du cuir , appelée également école Boudard, à Bethoncourt, où nous avons été chaleureusement accueillis. L'atelier, qui a commencé dans le garage de Monsieur Boudard, a pris progressivement de l'importance.
La demande de cuir augmente, grâce à la
vitalité de la maroquinerie de luxe française,
appréciée internationalement. Le savoir-faire en matière
de coupe et de couture du cuir s'est développé dans la
région autour de l'horlogerie et de l'automobile, en s'appuyant sur
l'élevage des meilleures races de vaches françaises, telles que
la Montbéliarde. Or, seulement 10 % des peaux sont actuellement
exploitées après l'abattage et le dépeçage.
La
filière d'élevage et la filière cuir pourraient se
rapprocher pour mieux valoriser les peaux : des amendements pourrait
être déposés au Sénat pour y contribuer, une
exploitation de 10 % de peaux supplémentaires serait, selon les
artisans, un extraordinaire apport.
Face à ces perspectives de développement de la filière, l'État a dû adapter son appareil de formation, créer de nouvelles certifications de la filière maroquinerie et accélérer les recrutements, avec, je l'évoquais, une difficulté pour y intéresser la jeunesse locale malgré un taux de chômage élevé. Avec l'aide du Programme Investissements d'Avenir, piloté par le commissariat général à l'Investissement, le CFA, qui assure un débouché à 95 % des jeunes formés en filière cuir, a acquis en juillet 2017 et pour 900 000 euros un local où un atelier de formation à la découpe du cuir a été installé -avec des machines-outils, soit allemandes soit italiennes. La filière cuir se développe vraiment : on compte aujourd'hui trois sites Hermès dans un rayon de 10 km², représentant 600 emplois.
Nous avons terminé cette visite de terrain avec la présentation d'un groupement des entrepreneurs du bâtiment et des travaux publics de l'aire urbaine de Montbéliard, le CRRI 2000 Nord/Franche-Comté créé en 1957 sous la forme d'une association de loi 1901.
Il comporte 33 entreprises adhérentes regroupant
1 250 salariés et un volume consolidé de
178 millions d'euros de chiffre d'affaires.
Ce regroupement leur
permet de répondre à des appels d'offre de tous types pour tous
les corps d'État, pouvant atteindre plusieurs millions d'euros.
Il
aide donc des PME voire des TPE à accéder à des chantiers
jusqu'alors exclusivement attribués à de grandes entreprises du
BTP.
La commande publique compte pour 30 % de l'activité locale du BTP. Elle s'élève à 68 millions, en hausse dans le Doubs de 9,6 % contre + 6,8 % en moyenne régionale, essentiellement du fait des communes et des EPCI (57 millions) et dans une moindre mesure des syndicats de communes (8 millions) et du département (5 millions).
Le CRRI, qui se présente comme entreprise générale, est en fait un groupement de PME doté d'une infrastructure d'entreprise générale, si bien que les marchés sont préparés par des ingénieurs, des comptables, etc.
Le groupement d'entreprises se heurte cependant à une difficulté, imputée aux règles d'allotissement des marchés publics. En théorie, l'allotissement est particulièrement approprié lorsque l'importance des travaux, fournitures ou services à réaliser risque de dépasser les capacités techniques ou financières d'une seule entreprise. Il est destiné à permettre aux entreprises, quelle que soit leur taille, d'accéder à la commande publique.
Or, nos interlocuteurs nous ont fait part de difficultés qu'ils auraient d'accéder désormais à la commande publique en raison de leur forme originale. Si ce point juridique est à vérifier, nous leur avons suggéré de se présenter en tant que groupement de PME et non en tant qu'entreprise générale. Contrairement aux grosses entreprises, ce groupement de PME ne sous-traite pas. Sachant que nos PME et nos TPE sont notre avenir, faisons en sorte que lorsqu'elles parviennent à se regrouper, leur succès ne soit pas remis en question par les règles sur l'allotissement, qui sont conçues pour permettre à nos PME de ne pas être sous-traitants mais titulaires des marchés.
Je remercie tout particulièrement nos collègues qui ont effectué ce déplacement et bien voulu consacrer une journée à la rencontre des acteurs économiques d'un département industriel et rural, ancré dans ses traditions et, en même temps, entré résolument dans la nouvelle révolution industrielle.
Mme Élisabeth Lamure , Présidente de la délégation sénatoriale aux entreprises . - Je vous remercie pour cet accueil. J'ai pour ma part été impressionnée par les cadences de travail des équipementiers, ainsi que par leur dépendance vis-à-vis de leurs « donneurs d'ordres ». L'équipementier fait donc face à beaucoup d'incertitudes concernant l'organisation de son travail. Je tiens néanmoins à souligner la passion et l'enthousiasme dont ils ont fait preuve lors de nos échanges.
Concernant la filière cuir, on ne peut que regretter que 90 % des peaux soient importées alors même que la matière première est disponible en France. Nous avons été interpellés sur ce sujet : comment avoir des peaux de qualités, travailler avec les éleveurs, et avoir un cahier des charges particulier et exigeant. On note également des difficultés de recrutement pour la formation dans cette filière, alors que le territoire connaît un fort chômage des jeunes. Même constat pour la filière automobile : j'ai ouï dire que le groupe PSA avait ouvert un bureau de recrutement au Portugal alors même que Mulhouse compte 12 % de chômeurs. Ce sujet que nous avons pu identifier dans nos précédentes visites se trouve donc illustré ici également.
M. Michel Canevet . - Je remercie Martial Bourquin pour l'intérêt de ces visites. J'en ressors avec le sentiment qu'il reste encore un outil industriel dans notre pays or nous en avons besoin. La difficulté réside dans l'inéquation entre les offres d'emplois et les demandeurs d'emplois. Il faut mieux répondre à la demande des entreprises par la formation notamment, et j'ai pu apprécier, comme à Montbard en Côte d'or, le lien entre les outils de formation et les besoins de certains industriels. Dans la filière cuir du CFA, nous avons pu rencontrer des personnes très épanouies en reconversion.
La question de l'accès des PME aux marchés publics me rappelle les velléités de Small Business Act . Nous avons besoin de soutenir nos territoires afin d'éviter que des grandes entreprises ne préemptent les marchés publics avec une main-d'oeuvre extérieure au détriment des PME locales, qualifiées et aptes sur ces mêmes chantiers.
Mme Pascale Gruny . - Je remercie Martial Bourquin pour le compte-rendu de ces visites, auxquelles je n'ai malheureusement pas pu assister faute de temps.
Cela m'évoque l'entreprise de mécanique générale dans laquelle j'ai fait une immersion. Il s'y trouvait un ouvrier fraiseur, de plus de 65 ans, ne pouvant prendre sa retraite car personne d'autre que lui ne savait manier une fraiseuse, ce maniement ne s'apprenant plus. Vous nous avez parlé du maniement du cuir « à l'ancienne » dans la filière cuir au CFA et, effectivement, les robots ne pourront remplacer le savoir-faire de l'homme dans certaines activités, notamment les réparations. Il faut donc veiller à préserver ce savoir-faire.
Concernant les équipementiers, je ne peux que faire le rapprochement avec l'antenne de Faurecia à Saint-Quentin qui doit affronter régulièrement des difficultés. On ne peut que constater la place centrale qu'occupent les constructeurs automobiles vis à vis des équipementiers mais aussi des concessionnaires qui subissent parfois des achats forcés. Néanmoins, ces constructeurs sont aujourd'hui confrontés à des difficultés liées au développement des voitures autonomes.
M.
Michel Vaspart
. - Je vous remercie pour ce compte-rendu fort
intéressant. Nous avons, avec quelques autres sénateurs,
été reçus au Salon de l'Automobile par des dirigeants de
Peugeot. Ils nous ont fait part de leurs inquiétudes face à
l'évolution technologique liée aux véhicules hybrides et
électriques et nous ont expliqué qu'il fallait aujourd'hui dix
fois moins de temps pour produire un moteur électrique qu'un moteur
à explosion.
On peut imaginer les conséquences sociales que
cela représente, ne serait-ce qu'en France.
M. Martial Bourquin . - Pour revenir sur l'intervention de Madame Gruny, je confirme qu'Hermès ne cherche que le savoir-faire, le « geste » et rien d'autre. D'ailleurs, Hermès considère qu'il n'emploie pas d'ouvriers, seulement des « artisans ».
À propos de l'évolution technologique dans l'automobile, prenons garde à la puissance du lobbying concernant l'électrique. Au cours d'un déplacement au Japon avec la Commission des Affaires économiques, nous avons pu constater que les constructeurs y misaient sur la voiture à hydrogène. Ils déclaraient envisager de déployer d'ici trois ou quatre ans, sur l'ensemble du territoire japonais, des pompes à hydrogène. Passager dans un prototype, je ne peux qu'affirmer que ces voitures ont les mêmes qualités de confort et de puissance que nos voitures classiques, avec la particularité d'être « zéro émission ». Or, en matière électrique, non seulement les piles sont extrêmement coûteuses, mais force est de constater qu'une voiture électrique, avant d'avoir parcouru 50 000 kilomètres, a autant pollué qu'une voiture classique. La France ne doit pas délaisser l'hydrogène alors que l'électricité risque de manquer.
M. Daniel Laurent . - En effet. Valéo prépare actuellement la voiture à l'hydrogène. Beaucoup de raisons (d'efficience, de durabilité) plaident en faveur de l'hydrogène. Au-delà de la technique, il faut également prendre en compte les infrastructures à mettre en place pour les produire, qui sont considérables et qui coûteraient très cher aux collectivités. Nous sommes dans une pleine transformation de la mobilité, tâchons de ne pas nous lancer à corps perdu.
Mme Élisabeth Lamure . - Il est vrai que les bouleversements rapides et profonds que nous traversons nous donnent peu de visibilité sur l'avenir et il est difficile d'y préparer nos concitoyens.
Mme Martine Berthet . - À propos de l'hydrogène, je pense qu'il y aura d'ici deux ans beaucoup plus d'entreprises spécialisées dans ce secteur. À Savoie Technolac, que nous avons visité, se trouve une start-up qui produit des bornes mixtes à hydrogène pour voitures et vélos. Une autre entreprise va construire une usine à hydrogène dans le nord de la Chine.
M. Éric Jeansannetas . - Les propos de Pascale Gruny sur les relations constructeurs-équipementiers font écho aux difficultés, ayant défrayé la chronique, de GM&S Industries à la Souterraine. Le combat se joue désormais sur le plan judiciaire : le plan social a été annulé (ce qui est une première victoire). La responsabilité du constructeur dans la faillite de l'équipementier est mise en cause. Le droit pourrait évoluer à la faveur de cette affaire. À noter que GM&S Industries est passée de 20 millions d'euros de commande à 10 et de 650 salariés à 150 en dix ans. La dernière industrie d'un territoire rural doit absolument être sauvée.
En ce qui concerne l'hydrogène, j'ai eu l'occasion, en me rendant au Salon de l'Automobile, d'aller sur le stand Toyota et d'y recevoir la visite du Président de Toyota. Il a tracé les perspectives d'avenir de Toyota : la voiture électrique rechargeable, la voiture autonome, la voiture à hydrogène. En termes de recherche automobile, nous ne sommes pas en retard mais il m'a semblé que les Japonais montraient un très grand enthousiasme.
Mme Élisabeth Lamure . - En effet, la situation de GM&S Industries illustre parfaitement la dépendance de l'équipementier envers les constructeurs. On comprend l'exigence des constructeurs, se trouvant dans un milieu extrêmement concurrentiel, mais on doit constater que leur emprise sur les équipementiers est difficilement soutenable pour ces derniers.