C. DES RISQUES LIÉS AU CLIMAT ET À LA GÉOGRAPHIE DES TERRITOIRES
1. Tempêtes et cyclones
À l'exception de la Guyane et Saint-Pierre-et-Miquelon, tous les territoires ultramarins sont situés en zone tropicale ou inter-tropicale , ce qui les expose à des tempêtes tropicales ou à des ouragans, typhons ou cyclones , et ce de manière régulière.
Il existe une saisonnalité du risque cyclonique : la période cyclonique s'étend dans l'hémisphère sud de novembre à mars - Nouvelle-Calédonie, Polynésie française et La Réunion -, et de juillet à octobre aux Antilles françaises. Cependant, les cyclones peuvent frapper toute l'année dans le nord-ouest du Pacifique et la partie nord de l'océan Indien.
Différents cyclones ont profondément marqué les territoires et leurs populations. Les Antilles ont connu historiquement des cyclones très meurtriers en septembre 1776, octobre 1780 et septembre 1928 par exemple. Dans la période récente, Hyacinthe , en janvier 1980, à La Réunion, Hugo et Luis en septembre 1989 et septembre 1995 en Guadeloupe et dans les Îles du Nord, ou encore Alan en avril 1998 en Polynésie française demeurent des événements qui ont marqué les esprits.
Concernant l'influence des changements climatiques sur les phénomènes cycloniques, Météo France 4 ( * ) émet, en l'état des connaissances, l'hypothèse que les cyclones seront à l'avenir moins nombreux, à l'exception de cyclones intenses, de catégories 4 et 5, qui risquent de se multiplier .
Septembre 2017 aux Antilles : Irma-Jose-Maria Le mois de septembre 2017 a été marqué aux Antilles par un enchaînement exceptionnel de trois ouragans majeurs en moins de deux semaines ; c'est la première fois depuis 1850 que 3 ouragans majeurs menacent et impactent l'arc Antillais sur une même saison. Irma a ainsi frappé le nord de l'arc Antillais les 5 et 6 septembre, José est passé au plus près le 9 et Maria a traversé le centre des Petites Antilles les 18 et 19. Irma : un ouragan exceptionnel Le 30 août 2017, la tempête tropicale Irma naît à l'ouest des îles du Cap Vert. Pendant 24 heures, Irma va suivre une trajectoire ouest-nord-ouest et s'intensifier rapidement en ouragan catégorie 2 puis 3 le 31 août, ce qui en fera le 2 e ouragan majeur de la saison 2017 après Harvey. Aux environs du 40 ° degré de longitude et à plus de 19 degrés de latitude, Irma infléchit sa route vers l'ouest-sud-ouest en faiblissant légèrement (catégorie 2). Il devient alors une menace sérieuse pour l'arc Antillais. Irma va alors se renforcer continuellement pour atteindre la catégorie 5 le 5 septembre et son maximum d'intensité dans l'après-midi du 5 avec des vents moyens de l'ordre de 295 km/h. Il gardera cette incroyable intensité à son passage sur Barbuda, Saint-Barthélemy, Saint-Martin/Anguilla et les îles Vierges jusque dans la nuit du 6 au 7 septembre. Il longe ensuite les côtes nord de Puerto-Rico, de la République Dominicaine et d'Haïti à une distance de plusieurs dizaines de kilomètres, ce qui limitera un peu l'impact sur ces pays. En revanche, il n'épargnera pas Cuba, surtout le littoral nord du centre de l'île. Son virage vers le nord plus tardif que ce qui avait été anticipé le fera atterrir sur les côtes ouest de la Floride (Naples - Fort Meyers) et non à proximité de Miami. Selon Météo France et d'après les données répertoriées depuis 1851, il n'avait jamais été observé d'ouragan avec des vents aussi forts affectant les Petites Antilles. Des ouragans aussi puissants, voire un peu plus, se sont déjà produits dans le bassin Atlantique mais uniquement en mer des Caraïbes et dans le Golfe du Mexique. Il s'agit du premier atterrissage d'un ouragan de catégorie 5 sur une île des Petites Antilles . Les plus forts, inscrits dans la mémoire collective, de type Hugo (1989 Guadeloupe) ou Luis (1995 Saint-Barthélemy et Saint-Martin) étaient de catégorie 4 lors de l'atterrissage avec des vents moyens jusqu'à 220-230 km/h. Irma a été considéré comme générant des vents moyens jusqu'à 290-295 km/h. Une mission d'un avion « chasseur de cyclones » a même mesuré une valeur de rafales (10 secondes) à 317 km/h au niveau de vol de l'avion, soit entre 2 500 et 3 000 m d'altitude. Irma a été un ouragan majeur catégorie 5 , avec des vents moyens sur une minute de 150 kt ou plus (sup à 275 km/h) durant 3 jours et demi, ce qui constitue un record mondial selon l'établissement. L'oeil de l'ouragan Irma est passé précisément sur les deux îles françaises de Saint-Barthélemy puis Saint-Martin au petit matin le 6 septembre : l'oeil a abordé Saint-Barthélemy peu avant 5 heures et a quitté Saint-Martin vers 8 heures. |
Source : Délégation sénatoriale aux outre-mer d'après les documents fournis par Météo France - Images Météo France
Seul territoire ultramarin à ne pas être situé en zone tropicale ou équatoriale, Saint-Pierre-et-Miquelon est cependant exposé régulièrement à de fortes tempêtes pouvant conduire à de fortes houles et provoquer des phénomènes de submersion.
2. Des inondations caractérisées par des débordements brutaux de cours d'eau
Les territoires ultramarins connaissent pour nombre d'entre eux des phénomènes de crues, qui se distinguent de ceux connus dans l'hexagone. Ces inondations à cinétique rapide sont liées la plupart du temps à des événements climatiques en zone tropicale ou en zone équatoriale.
Les épisodes d'inondation liés à la conjugaison des fortes précipitations et de reliefs escarpés sont fréquents. Le cyclone Berguitta a ainsi produit des effets dévastateurs en janvier 2018 à La Réunion . Lors de leur déplacement à la Martinique , les sénateurs ont pu constater dans la ville de Saint-Pierre plusieurs exemples de cours d'eau sujets à des crues soudaines : ils ont pu observer la vulnérabilité du quartier Clitandre, des abords de la rivière aux écrevisses, ainsi que la rivière des Pères, notamment, qui sort régulièrement de son lit, coupant la route entre le Prêcheur et Saint-Pierre, ce qui donne lieu à la revendication récurrente d'un aménagement adapté.
3. Feux de forêts
Plusieurs territoires ultramarins sont concernés par les feux de forêts, notamment La Réunion ou, dans le Pacifique, la Nouvelle-Calédonie et la Polynésie française.
On les retrouve essentiellement en saison sèche dans les territoires ; aux effets conjugués de la sécheresse et d'une faible teneur en eau des végétaux s'ajoute une forte fréquentation de ces espaces. Un feu de forêt peut être d'origine naturelle (dû à la foudre ou à une éruption volcanique) ou humaine : soit de manière intentionnelle, soit de manière accidentelle (barbecue, mégot de cigarette, feu d'écobuage ou de feux de déchets verts mal contrôlé, travaux,....).
À La Réunion , comme l'a souligné M. Sébastien Audebert, directeur de cabinet du préfet 5 ( * ) , les feux de forêt « font partie des aléas principaux » qui affectent le territoire. En octobre 2011, un incendie qui n'a pu être maîtrisé qu'au bout d'un mois a ainsi ravagé 2 800 hectares du Parc national, alors même que la route du Maïdo avait déjà été sinistrée l'année précédente. M. Sébastien Audebert a fait valoir que les mesures de prévention telles que l'aménagement des chemins prévus par les plans de défense contre l'incendie entraient souvent en contradiction avec les exigences de conservation imposées par le classement du coeur de l'île au Patrimoine mondial de l'Unesco. Depuis ces épisodes de 2010-2011, un avion bombardier d'eau est dépêché de septembre à décembre sur l'île de La Réunion pour couvrir le risque saisonnier et protéger la biodiversité des forêts endémiques.
En Nouvelle-Calédonie , le risque incendie, également très présent, fait l'objet depuis 2012 d'une déclinaison spécifique du plan ORSEC. Comme l'a indiqué M. Éric Backes, directeur de la sécurité civile et de la gestion des risques de la Nouvelle-Calédonie 6 ( * ) , « le risque principal auquel les sapeurs-pompiers sont confrontés est l'incendie puisque les feux de forêt ravagent régulièrement la brousse calédonienne » et des campagnes d'information sont régulièrement mises en oeuvre à destination du grand public comme pour le risque cyclonique. Au cours des deux dernières saisons, plus de 10 000 hectares sont ainsi partis en fumée chaque année, suscitant en 2017 l'envoi de renforts de l'hexagone à la demande du gouvernement calédonien.
En Polynésie française , les reliefs escarpés des îles hautes sont un frein à l'intervention des équipes de lutte ; un calcul d'indicateurs prédictifs de risque de feux de forêt a été expérimenté par Météo France sur la zone de Faa'a, mais le manque d'historique sur les événements d'incendie n'a pas permis à ce jour de valider ces indicateurs.
* 4 M. Marc Pontaud, directeur de la recherche, déplacement à Toulouse le 9 mars 2018.
* 5 Visioconférence du 15 mars 2018.
* 6 Visioconférence du 5 avril 2018.