C. LA PROTECTION FONCTIONNELLE
La protection fonctionnelle est un volet significatif du statut des élus locaux. Sa consécration législative a eu lieu à partir d'un soubassement construit progressivement par la jurisprudence administrative.
Il en existe deux catégories : la protection des élus faisant l'objet de poursuites pénales et civiles ; la protection des élus victimes de menaces dans l'exercice de leurs fonctions.
? La protection des élus faisant l'objet de poursuites pénales et civiles a été introduite dans la législation par la loi Fauchon du 10 juillet 2000. Celle-ci a complété l'article L. 2123-34 du CGCT en y insérant un alinéa disposant que « la commune est tenue d'accorder sa protection au maire, à l'élu municipal le suppléant ou ayant reçu une délégation ou à l'un de ces élus ayant cessé ses fonctions lorsque celui-ci fait l'objet de poursuites pénales à l'occasion de faits qui n'ont pas le caractère de faute détachable de l'exercice de ses fonctions. »
La décision du Conseil d'Etat du 30 décembre 2015 commune de Roquebrune-sur-Argens précise que « présentent le caractère d'une faute personnelle détachable des fonctions de maire des faits qui révèlent des préoccupations d'ordre privé, qui procèdent d'un comportement incompatible avec les obligations qui s'imposent dans l'exercice de fonctions publiques ou qui, eu égard à leur nature et aux conditions dans lesquelles ils ont été commis, revêtent une particulière gravité ».
La demande de protection par l'élu poursuivi ne s'inscrit pas dans un délai. L'octroi du bénéfice de la protection est un pouvoir de l'organe délibérant de la collectivité concernée, qui statue sur la demande et définit les modalités de la protection.
La protection consiste généralement en une prise en charge des frais d'avocat par la collectivité.
? La protection des élus victimes de menaces dans l'exercice de leurs fonctions, de son côté, a été instituée par la loi du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité. Celle-ci a inséré dans le CGCT un article 2123-35 qui dispose que « la commune est tenue de protéger le maire ou les élus municipaux le suppléant ou ayant reçu délégation contre les violences, menaces ou outrages dont ils pourraient être victimes à l'occasion de leurs fonctions et de réparer, le cas échéant, le préjudice qui en est résulté. » Si tous les élus ne sont pas mentionnés dans la loi, le Conseil d'Etat a eu l'occasion de préciser que celle-ci ne faisait que réaffirmer un principe général du droit selon lequel tout agent public, quel que soit le mode d'accès à ses fonctions, doit bénéficier de la protection de la collectivité publique dont il dépend.
Cette protection a été étendue par la loi du 18 mars 2003 pour la sécurité intérieure « aux conjoints, enfants et ascendants directs des maires ou des élus municipaux les suppléant ou ayant reçu délégation lorsque, du fait des fonctions de ces derniers, ils sont victimes de menaces, violences, voies de fait, injures, diffamations ou outrages. »
La collectivité est tenue de protéger ces élus contre les violences, menaces et outrages dont ils pourraient être victimes à l'occasion de leurs fonctions, et de réparer, le cas échéant, le préjudice qui en est résulté. Si l'article L.2123-35 du CGCT ne mentionne que les violences, menaces ou outrages, cette liste n'est pas limitative, le législateur ayant expressément entendu aligner le régime de protection des élus sur celui des fonctionnaires. Sont donc également visées les diffamations ou injures.
La protection reste due après la cessation du mandat, dès lors que les attaques ont trait à des faits commis ou des propos tenus au cours du mandat.
Une décision du Conseil d'État n° 380377 du 9 juillet 2014 précise « qu'il appartient dans chaque cas à l'assemblée délibérante de la commune concernée, sous le contrôle du juge et compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, d'une part, de vérifier que les conditions légales énoncées à l'article L. 2123-35 sont remplies et qu'aucun motif d'intérêt général ne fait obstacle à ce que le bénéfice de la protection fonctionnelle soit accordé au maire ou à un élu municipal et, d'autre part, de déterminer les modalités permettant d'atteindre l'objectif de protection et de réparation qu'elles énoncent ; que, dans l'hypothèse où la commune décide d'assister le maire ou un élu municipal dans les procédures judiciaires que celui-ci aurait décidé d'entreprendre pour sa défense, à la suite de faits dont il aurait été victime à raison de ses fonctions, en prenant en charge les frais exposés à ce titre, les dispositions contestées n'ont en tout état de cause pas pour effet de contraindre la commune à prendre à sa charge, dans tous les cas, l'intégralité de ces frais ».