III. LES CONCLUSIONS DE LA DÉLÉGATION
Au terme de ce travail sur les violences faites aux femmes, la délégation présente dix constats et des points de vigilance et formule 36 recommandations.
A. DIX CONSTATS ET POINTS DE VIGILANCE EN MATIÈRE DE VIOLENCES FAITES AUX FEMMES
1. La délégation est convaincue que les violences faites aux femmes sont la première des inégalités entre femmes et hommes et que les événements de 2016-2017 doivent constituer l'occasion d'une prise de conscience de la nécessité de renforcer l'égalité entre les femmes et les hommes .
Elle estime que ces violences sont encouragées par une généralisation inquiétante de comportements sexistes qui menacent les femmes dans tous les aspects de leur vie (au travail, dans les transports et dans l'espace public, à l'école...) et par la diffusion préoccupante d'une conception du rôle des femmes dans notre société qui s'appuie sur la conviction erronée de l'infériorité des femmes, contraire aux valeurs de notre République.
2. Convaincue que la dénonciation du sexisme ne doit pas être réduite à la prétendue « guerre des sexes » dont le spectre a été agité de manière récurrente depuis le début de l'« affaire Weinstein », elle appelle les hommes à rejoindre le combat contre les violences faites aux femmes et la dénonciation du sexisme .
3. Elle insiste sur l'importance de la prévention , dimension essentielle de ce combat, qui implique :
- un effort de sensibilisation au respect et à l'égalité entre filles et garçons, entre femmes et hommes, dès le plus jeune âge ;
- et la mise en oeuvre effective de l'obligation légale d'éducation à l'égalité et à la sexualité .
4. La délégation affirme sa préoccupation constante de protéger les enfants , non seulement des violences sexuelles , mais aussi des conséquences des violences intrafamiliales , car elle estime qu' un enfant témoin est un enfant victime.
5. La délégation exprime sa profonde considération à tous les acteurs et actrices de la lutte contre les violences faites aux femmes , dont elle salue l'engagement et l'implication.
Elle rappelle que les associations sont le véritable « bras armé » de la politique publique de lutte contre les violences faites aux femmes ; elle tient à rendre hommage à leurs responsables et à leurs bénévoles .
Elle souligne l' importance cruciale des moyens qui doivent leur être attribués , et notamment des subventions aux associations . Elle estime que, faute de crédits suffisants sur le programme 137 « Égalité entre les femmes et les hommes », la lutte contre toutes les violences faites aux femmes risque de ne pas être à la hauteur de la « Grande cause du quinquennat » .
6. La délégation manifeste son soutien aux institutions où sont accueillies et soignées les femmes victimes de violences , comme La Maison des femmes de Saint-Denis , structure exemplaire dont elle considère que le modèle devrait être largement diffusé dans d'autres territoires .
7. Alertée par la gravité des conséquences des violences sur les victimes, qu'il s'agisse des menaces sur leur santé ou du risque de précarité sociale qui en est indissociable, la délégation est persuadée que la prévention et la lutte contre les violences faites aux femmes passent aussi :
- par une meilleure connaissance statistique de l'ampleur du phénomène ;
- et par une évaluation rigoureuse du coût économique et social de ces violences .
8. Soucieuse de garantir aux victimes un accompagnement adapté à leur fragilité et à leurs souffrances et de faciliter leur parcours judiciaire , la délégation :
- souhaite que soient réprimées à leur juste mesure des infractions qui portent atteinte à la dignité des femmes et qui menacent leur sécurité ;
- réaffirme l'importance décisive de la formation de tous les professionnels susceptibles de se trouver en contact avec des victimes de violence ;
- souligne la nécessité d'une prise en charge pluridisciplinaire des femmes victimes de violences, dans un cadre partenarial associant les services hospitaliers - dont les Unités médico-judiciaires (UMJ) - et les autres acteurs du territoire (collectivités, professionnels de santé, associations).
9. Attachée à un traitement égal de ces violences sur l'ensemble du territoire , qu'il s'agisse de l' accueil des victimes, de leur accompagnement ou de la condamnation des violences , la délégation :
- affirme son attachement à une politique publique ambitieuse de lutte contre les violences faites aux femmes dans les Outre-mer ;
- salue l'ambition du 5 ème plan de mobilisation et de lutte contre toutes les violences faites aux femmes , et se félicite qu'il traite les violences faites aux femmes dans leur globalité , sans omettre la prostitution et la traite des êtres humains ;
- rappelle l'importance de la continuité des politiques publiques de prévention et de lutte contre les violences faites aux femmes, au-delà des gouvernements et des personnes qui les portent ;
- plaide pour un renforcement des moyens de la justice , de façon à garantir des délais de jugement raisonnables aux victimes et à éviter que le recours à la correctionnalisation des viols soit la seule réponse possible à l'encombrement des cours d'assises.
10. La délégation insiste une nouvelle fois sur l'importance de la Convention d'Istanbul dans la lutte contre les violences faites aux femmes et appelle tous les pays du Conseil de l'Europe qui n'y auraient pas encore procédé à une ratification rapide de ce texte essentiel pour la protection des femmes.