B. DES INITIATIVES ORIGINALES
1. Le recours au modèle des « coûts standards » pour l'évaluation quantitative des charges
Les Pays-Bas ont été parmi les pionniers à recourir, dès 2002, au modèle des « coûts standards » afin de mesurer les coûts résultant pour les entreprises des décisions des pouvoirs publics. Cette méthode, utilisée concomitamment par quelques États membres de l'OCDE, a montré qu'à cette époque 16,4 milliards d'euros, soit 3,6 % du PIB néerlandais, étaient absorbés par l'ensemble des charges administratives. L'encadré ci-après, tiré du rapport de l'OCDE intitulé Éliminer la paperasserie , publié en 2007, présente les grands traits de cette méthode.
Méthodologie du modèle de coûts standards Source : OCDE, Éliminer la paperasserie : Des stratégies nationales pour simplifier les formalités administratives , 2007, p. 48. Le modèle des coûts standards (MCS) mesure les coûts administratifs imposés aux entreprises par les réglementations du gouvernement central. Les coûts sont principalement déterminés par des entretiens avec les entreprises. Grâce à ces entretiens, il est possible de préciser en détail le temps que les sociétés passent pour respecter les réglementations du gouvernement. 1 Le MCS décompose la réglementation en composantes gérables que l'on peut mesurer : obligations d'information, données exigées et activités administratives. 2 Le MCS estime ensuite le coût que représente chaque activité sur la base de quelques paramètres de coûts simples : le prix : le prix est composé d'un tarif, des salaires et des frais généraux consacrés aux activités administratives en interne ou des coûts horaires pour les services externes ; le temps : le temps requis pour accomplir l'activité administrative ; la quantité : la quantité est composée de la taille de la population d'entreprises concernées et de la fréquence à laquelle cette activité doit être effectuée chaque année. 3 L'association de ces éléments donne la formule de base du MCS : Coût par activité administrative = Prix x Temps x Quantité Les obligations d'information sont des obligations de fournir des informations et des données au secteur public ou à des tiers (par exemple rapports sur les conditions de travail, fourniture d'étiquetage). Une « exigence de données » représente chaque élément d'information qui doit être fourni pour respecter une obligation d'information. Chaque obligation d'information est composée d'au moins une « exigence de données » (par exemple numéro de TVA, identité de l'entreprise). Pour fournir des informations pour chaque « exigence de données », un nombre donné d'activités administratives doit être réalisé. Ces activités peuvent être faites en interne ou être sous traitées. Elles peuvent être mesurées (par exemple description, calcul, archivage des informations). |
2. Le cadre d'évaluation intégral de la politique et de la réglementation : la démarche « IAK »
La démarche dénommée « Cadre d'évaluation intégral de la politique et de la réglementation » (Integraal Afwegingskader voor beleid en regelgeving, IAK) résulte de l'initiative prise, en 2008, par les directeurs chargés de la législation dans les différents ministères. Démarche inspirée du Regulatory Impact Assessment (RIA) mis en oeuvre dans plusieurs pays, elle repose sur l'utilisation des technologies de l'information pour la préparation des politiques publiques et des textes normatifs. Elle fut, initialement, aussi destinée à éviter la multiplication des instruments d'évaluation, des manuels de procédure et de coordination des processus administratifs dans et entre les ministères, puisqu'elle concerne tant les politiques publiques que la préparation de la législation par les ministères.
Le Gouvernement a présenté, dans une lettre du 14 avril 2011 du ministre de la Justice au président de la Seconde chambre des États Généraux (tweede Kamer) , l'homologue de l'Assemblée nationale française, sa démarche en matière de réduction des coûts administratifs. Elle fait suite à une initiative du précédent Gouvernement communiquée au Parlement en décembre 2009.
La politique qui repose sur l'utilisation systématique de la procédure dénommée « cadre d'évaluation intégral de la politique et de la réglementation » tend à ce que « seule voie le jour une réglementation qui soit vraiment nécessaire et proportionnée, caractérisée par une pression normative (regeldruck) , la plus faible possible » 16 ( * ) .
La démarche concerne les textes soumis au Parlement par le Gouvernement. Ceux-ci doivent être accompagnés par les réponses à sept questions destinées à mettre en évidence le caractère adéquat des solutions proposées par le projet en question. Ces questions sont les suivantes :
1. Quelle est l'origine du projet ?
2. Qui concerne-t-il ?
3. Quel est le problème posé ?
4. Quel est l'objectif poursuivi ?
5. Qu'est-ce qui justifie l'intervention des autorités ?
6. Quel est le meilleur instrument en termes de légalité, d'efficacité et d'« exécutabilité » ?
7. Quelles sont les conséquences des mesures pour les citoyens, les entreprises, les pouvoirs publics et l'environnement ?
Le ministère de la Sécurité et de la Justice gère le programme au niveau national, fournissant une aide à distance (helpdesk) , un correspondant « IAK » étant de surcroît désigné dans chaque ministère. Ces questions sont traitées par le biais d'un dossier d'examen (afwegingsdossier) numérique, mis en partie (les administrations peuvent échanger des informations non accessibles à tout un chacun) à la disposition du public sur Internet ( naarhetiak.nl ), qui présente les étapes de l'adoption du projet et le contenu des réponses aux questions évoquées supra .
Depuis le mois de février 2009, date de sa première utilisation, la démarche IAK a été systématisée, permettant un examen des projets selon une procédure formalisée en plusieurs phases, précisant les « points de passage obligés » de la réflexion. Progressivement amélioré en collaboration avec les ministères utilisateurs, cet instrument repose sur le respect de dix-huit « exigences de qualité » (kwaliteitseisen) et la mise à disposition des décideurs et des rédacteurs des informations destinées à la préparation des textes. Le système, accessible sur Internet, est doté de trois fonctions :
- réunir des informations et les rendre accessibles afin de permettre les échanges entre les administrations ;
- mettre en ordre les procédures, par la nécessité de répondre de façon systématique, « pas à pas », aux sept questions précitées ;
- et établir un compte rendu (rapportage) des informations conservées afin de permettre leur réutilisation.
La gestion de l'instrument - perfectionné sur la base de 22 projets-pilotes lancés en 2010 - permet d'instituer de nouvelles exigences (eisen) à respecter et de supprimer celles qui seraient devenues inutiles.
Depuis le 1 er septembre 2011, les projets dotés des effets les plus importants sont examinés par la « Commission administrative sur l'évaluation des effets » (ambtelijke commissie voor effecttoetsing, CET) , constituée sur le modèle des Impact assessment boards créés dans certains pays. Présidée par le ministre de l'Économie, cette commission réunit des représentants des différents ministères et examine, sur la base d'un programme annuel, les résultats des évaluations effectuées.
Dans son audit de l'évolution du « fardeau normatif » 17 ( * ) ACTAL a relevé qu'au cours de ses neuf premiers mois de fonctionnement, le CET n'avait étudié que 7 dossiers, sur les 269 susceptibles d'avoir un impact en la matière, dont 53 (20 %) avaient été examinés par ACTAL qui a recommandé qu'à terme, ce comité analyse au moins un quart des dossiers et que ses observations soient rendues publiques.
* 16 Tweede Kamer der Staten-Generaal, Vergarderjaar 2010-2011, 29 515, Kabinetsplan administratieve lasten , Nr. 330, Brief van de minister van Veiligheid en Justitie , p. 1.
* 17 ACTAL, Minder Haagse bureaucratie. Meer maatschappelijk effect. Aanbevelingen voor het kabinet op basis van de eerste regeldrukaudit , La Haye, 2012.