Deuxième table ronde Tissu entrepreneurial et moyens de développement des entreprises
Animateur de la table ronde Jean-Pierre PHILIBERT, Président de la Fédération des entreprises d'outre-mer (Fedom)
Hervé GONSARD, Directeur général de l'Institut d'émission des départements d'outre-mer et de l'Institut d'émission d'outre-mer (IEDOM-IEOM)
L'IEDOM est, comme vous le savez, la banque centrale déléguée - agissant « au nom, pour le compte et sous l'autorité de la Banque de France » - des départements et collectivités d'outre-mer dont la monnaie est l'Euro. Il est attentif à l'évolution du tissu entrepreneurial dans ses géographies d'intervention, à deux titres principalement :
- d'abord, sur un plan opérationnel, dans le cadre de la conduite de la politique monétaire de la zone Euro, il cote les entreprises, permettant ainsi aux banques de sélectionner les créances éligibles au refinancement de l'Eurosystème ;
- ensuite, il conduit une enquête de conjoncture auprès des chefs d'entreprises et dispose d'un observatoire économique et financier. Dans ce cadre, il produit des données propres et utilise des données externes, au premier rang desquelles celles de l'Insee.
De fait, l'IEDOM n'est pas, en effet, lui-même producteur de données sur la démographie des entreprises. Il s'appuie pour ce faire sur l'Insee (pour les départements français d'Amérique - DFA), ainsi que sur les chambres de commerce locales de Saint-Martin, Saint-Barthélemy et Saint-Pierre-et-Miquelon.
Il est d'ailleurs important de noter que ces chiffres sont souvent révisés et qu'il n'est pas exclu que des radiations ne soient pas prises en compte.
Ces avertissements méthodologiques énoncés, j'en viens au vif du sujet, à savoir la démographie des entreprises.
À la vue des données disponibles, trois constats peuvent être dressés.
Premier constat : le tissu productif des départements et collectivités français des Amériques est dense . Malgré le ralentissement économique consécutif à la crise de 2009, on constate - au sein des activités marchandes hors agriculture - une augmentation du nombre d'entreprises dans l'ensemble des géographies étudiées.
La Guadeloupe, Saint-Barthélemy et la Guyane ont connu les progressions les plus significatives. La hausse la plus importante, observée en Guyane, s'explique principalement par une forte démographie et le rôle du secteur spatial, vecteurs importants de dynamisme économique.
En comparaison avec l'Hexagone, les collectivités et départements français d'Amérique (DFA) possèdent apparemment, à l'exception de la Guyane et de Saint-Pierre-et-Miquelon, un tissu productif plus dense.
Un tissu d'entreprises relativement dense
Sources : INSEE, CEM, CCISM, CACIMA
À Saint-Barthélemy, on constate à la fois une forte augmentation du nombre d'entreprises et surtout une densité entrepreneuriale atypique (61 entreprises pour 100 habitants). Cela s'explique par la très forte hausse du nombre d'auto-entrepreneurs - régime simple et souple adapté aux activités saisonnières - qui a accompagné le développement de l'économie, notamment celui du secteur du tourisme et des services en général. Saint-Barthélemy attire chaque année de nombreux saisonniers se constituant en entreprises individuelles.
Deuxième constat : les activités des entreprises des départements et collectivités français des Amériques sont concentrées dans les services . La répartition sectorielle des entreprises dans les DFA s'avère ainsi très proche de celle de la France métropolitaine. Elle est dominée par le secteur des services. Viennent ensuite la construction et les industries.
Une forte concentration dans les services à l'instar de l'Hexagone
Sources : INSEE, CEM, CCISM, CACIMA
Toutefois, les DFA comptent, en moyenne, relativement plus d'entreprises dans les secteurs de la construction et de l'industrie.
Deux géographies se distinguent de ce point de vue : la Guyane avec une part relativement plus élevée pour la construction et l'industrie que les autres DFA et que la France métropolitaine, reflétant une forte demande de logements et d'infrastructures, en cohérence avec la forte expansion démographique que connaît le territoire et Saint-Pierre-et-Miquelon qui compte une part relativement importante d'entreprises dans le secteur de la construction (27,7 %) soutenu par une commande publique relativement élevée dans l'archipel.
Les données de Saint-Martin et Saint-Barthélemy - provenant de sources différentes, aux nomenclatures imparfaitement comparables - font ressortir des répartitions relativement similaires à celles des autres DFA.
Troisième et dernier constat : les économies des départements et collectivités français des Amériques se caractérisent par un nombre prépondérant de micro-entreprises . Le tissu entrepreneurial s'y caractérise en effet par l'importance des entreprises unipersonnelles. La répartition des entreprises par tranche de salariés montre notamment l'importance des petites structures unipersonnelles sans salariés.
Un nombre prépondérant de micro-entreprises
Source : INSEE
Par ailleurs, les entreprises de moins de 10 personnes représentent 97 % des entreprises recensées dans les DFA, contre 95,2 % en France métropolitaine. Le nombre d'entreprises décroît ensuite rapidement avec le nombre de salariés et on ne compte aucune entreprise de plus de 500 personnes.
L'IEDOM adapte ses services à ce tissu entrepreneurial particulier . Le Gouverneur de la Banque de France a insisté sur la volonté de la Banque centrale de devenir un interlocuteur privilégié pour les TPE. La Banque de France mettra ainsi en place un « correspondant TPE » dans chacune de ses succursales à l'automne 2016. Au regard de l'importance du tissu des TPE dans les géographies ultramarines, l'IEDOM va relayer cette initiative en désignant un correspondant TPE dans chacune de ses six agences.
Le rôle du correspondant TPE sera d'être un premier point de contact, avec pour missions d'accueillir et d'écouter les responsables de TPE en qualité de tiers de confiance, de diffuser des outils d'information, ainsi que de comprendre, dans leurs grandes lignes, la nature des besoins exprimés. Il orientera ensuite, autant que de besoin et si les dirigeants de TPE le souhaitent, vers les réseaux professionnels qui, eux, délivreront le support adapté : centres de gestion agréés, ordre des experts-comptables, associations d'accompagnement du microcrédit, etc.
La Banque de France a également pour ambition de procéder à l'ouverture, dès l'automne 2016, d'une prestation en ligne d'analyse des entreprises, à travers le dispositif OPALE, dont le positionnement tarifaire sera compatible avec les moyens des TPE (à hauteur de quelques centaines d'euros).
Pour plus d'informations sur les économies ultramarines nationales, je vous renvoie aux publications de l'IEDOM.
PREMIÈRE SÉQUENCE - CAPITAL HUMAIN ET ACCOMPAGNEMENT DES
ENTREPRISES
Pierre MARIE-JOSEPH,
Président d'honneur de l'Association martiniquaise pour la promotion de
l'industrie (AMPI)
L'enjeu se trouve être effectivement de nourrir nos ressources humaines, par le recrutement et la formation, pour en faire un levier de la performance économique et un moteur du dialogue social dans nos territoires.
Permettez-moi tout d'abord de faire miens, en préambule, les propos du Président du Sénat, dans l'introduction de son rapport sur la formation professionnelle :
« Notre économie vit des mutations extrêmement rapides. Les changements techniques, technologiques et organisationnels sont continus et nécessitent des adaptations constantes selon des cycles de plus en plus courts.
Tout le monde en est convaincu : face aux pays a` bas coût de main d'oeuvre, notre compétitivité ne se joue pas essentiellement sur les prix mais aussi sur la qualité de nos produits et services, sur notre capacité à innover et donc au bout du compte sur la compétence et la qualification des femmes et des hommes dans chacune de nos entreprises.
Développer la compétence de tous, donner la possibilité à chacun d'accéder à une qualification certifiée, voilà l'un des défis majeurs que nous devons relever.
Le maintien d'un taux de chômage élevé n'est pas inéluctable. Il le devient si l'on ne met pas en place les moyens pour les demandeurs d'emploi d'acquérir ou d'actualiser leurs compétences et leurs qualifications, permettant de postuler aux emplois disponibles.
La formation permet d'augmenter les compétences et de maintenir l'employabilité de ceux qui ont un emploi ou qui en recherchent un. Elle donne une seconde chance à ceux qui sont sortis de l'école sans qualification ou certification reconnue.
Ce n'est pas la formation qui crée l'emploi. Mais sans formation, aujourd'hui, il est clair qu'il est très difficile d'accéder à l'emploi . »
Ces propos s'appliquent parfaitement à nos économies insulaires. Toutefois, nous devons les replacer dans nos contextes bien spécifiques, à la lumière des chiffres qui viennent de nous être donnés par le directeur général de l'IEDOM.
Les problématiques nationales sont exacerbées en outre-mer. En effet, si l'on prend le cas de la Martinique, d'après les chiffres les plus récents de l'Insee, pour une population de 385 000 habitants, on dénombre, du côté des entreprises : 55 000 établissements actifs, dont 82 % sans salarié, 14 % de moins de 10 salariés et 4 % de plus de 10 salariés. Du côté des actifs, on dénombre : 125 000 salariés, dont 85 % dans le secteur tertiaire et 15 % dans les secteurs de l'industrie, de la construction et de l'agriculture. 8,5 % de ces salariés sont des cadres (contre 15,5 % en métropole). Le taux de chômage, quant à lui, atteint 19,4 % et croît jusqu'à 50 % chez les jeunes de moins de 25 ans.
Il est à noter que ce taux de chômage a sensiblement diminué mais demeure relativement élevé par rapport aux moyennes nationales. Malgré ce taux de chômage élevé, les entreprises martiniquaises connaissent d'importantes difficultés à recruter - difficultés autant quantitatives (en lien avec le nombre de candidats) que qualitatives (en lien avec le profil des candidats).
Cette tension sur le marché du travail cristallise en réalité les problématiques profondes de la Martinique, et sans doute d'autres DOM, portées par les acteurs institutionnels mais subies par les entreprises, contraintes d'être réactives et de trouver des solutions pour développer leurs activités, d'une part, et préserver l'équilibre du dialogue social, d'autre part.
On peut citer quelques-unes de ces problématiques. L'illettrisme y est deux fois plus important qu'en métropole et quatre fois plus important chez les jeunes.
Le niveau de qualification global nécessite encore d'être amélioré par endroit. Et il en est de même pour l'orientation des jeunes et des actifs, qui nécessiterait d'être plus ciblée sur les besoins.
L'offre de formation en poursuite d'études n'est pas suffisamment riche et ne s'avère pas toujours adaptée aux besoins des entreprises. À cet égard, les efforts de l'Agence de l'outre-mer pour la mobilité (LADOM) sont intéressants mais peut-être trop récents pour être visibles sur le terrain.
Les entreprises recherchent la polyvalence et ont des besoins spécifiques combinant parfois différentes fonctions pour le même poste, s'éloignant ainsi des profils standards.
Enfin, une anticipation des besoins s'avère être difficile au regard de la conjoncture économique donnant peu de visibilité.
En pratique, qui dit anticipation des besoins dit gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC). Le tissu économique étant composé essentiellement de TPE, il lui est difficile de mobiliser à lui seul les moyens nécessaires au déploiement d'une démarche de GPEC.
Pourtant, la GPEC permet, à un niveau collectif, l'adéquation de l'emploi et des compétences dans la mise en place des projets d'entreprise et, à un niveau individuel, de rendre les salariés acteurs de l'élaboration et de la mise en oeuvre de leur projet d'évolution professionnelle.
Cette GPEC des entreprises doit aller de pair avec une GPEC territoriale. Cette dernière recouvre des enjeux à un triple niveau : celui des entreprises, celui des territoires et celui des salariés et des populations. Les entreprises y gagnent une meilleure connaissance des ressources territoriales et de leurs évolutions. Le territoire renforce ainsi sa capacité d'anticipation des mutations économiques. Les individus en retirent des outils de sécurisation de leur parcours.
La GPEC permet également d'interroger un secteur économique et social donné, pour apporter des pistes de solutions à travers une stratégie de formation. De fait, la formation professionnelle reste un moyen de pallier l'écart entre les besoins en compétences et le niveau réel des actifs (salariés et demandeurs d'emploi).
Le plan de formation, la professionnalisation, l'apprentissage, la validation des acquis de l'expérience, l'ex- droit individuel à la formation (DIF), le compte personnel de formation et la GPEC sont autant de dispositifs conçus pour qualifier les actifs, développer leurs compétences et leur permettre d'accompagner le développement de l'entreprise. En somme, ces dispositifs convergent vers un renforcement de l'employabilité des actifs.
Pourtant, force est de reconnaitre que nos entreprises connaissent mal ces dispositifs, lesquels demeurent sous-utilisés par les salariés pourtant rendus acteurs de leur parcours professionnel par les dernières réformes. Trop d'entreprises martiniquaises n'intègrent pas encore suffisamment la formation professionnelle à leur stratégie de développement, alors même que, dans un contexte insulaire où les entreprises doivent réagir vite et s'adapter en permanence, celle-ci constitue un levier de pérennité et de performance économique.
En Martinique, les services publics de l'emploi, de l'orientation et de la formation se structurent essentiellement pour mieux servir l'objectif d'accompagner et de qualifier les publics les plus éloignés de l'emploi, avec la mise en route du Comité régional pour la formation et l'emploi (CREFOP) de Martinique notamment. Il appartient donc aux entreprises d'utiliser au mieux la formation professionnelle pour améliorer la performance économique.
Pour favoriser cette démarche et résoudre les problématiques logistiques (en lien avec les absences des salariés notamment) et financières, il pourrait être intéressant d'amener la pédagogie au coeur de l'entreprise, de corréler la formation, le poste et l'entreprise en favorisant les formations en situation de travail, de promouvoir et construire la formation interne à l'entreprise, de stimuler et valoriser la fonction tutorale (de manière à accueillir plus facilement des alternants et favoriser ainsi l'apprentissage et la professionnalisation), de mieux sectoriser l'offre de formation (en l'élargissant à la zone Antilles-Guyane pour bénéficier de volumes d'activités plus importants et ainsi garantir une rentabilité minimum des organismes de formation) et d'utiliser le compte personnel de formation comme un moyen pour les employeurs et les salariés de co-investir dans les projets de formation.
Il nous reste donc un immense travail d'évangélisation de nos pairs, de conviction envers les actifs et sans doute de simplification des dispositifs. La carte des possibles nous tend les bras. À chacun d'entre nous de la saisir et de s'en emparer. Facteurs de compétitivité et d'expansion de nos économies obligent !
En conclusion, je voudrais préciser que, si nous visons la performance économique, nous oeuvrons aussi et surtout dans le cadre de la responsabilité sociale des entreprises (RSE). Telle est aussi notre contribution au développement durable. Enrichir notre capital humain est essentiel, autant pour la performance économique que pour le développement de nos territoires ultramarins et de nos concitoyens.
Frédérique RACON, Directrice générale de l'Opérateur public régional de formation (OPRF) de Guyane
Les DOM conservent, d'après les données de l'Insee, des taux d'activité moyen, de l'ordre de 51 % en Guadeloupe, 58 % en Martinique et 56,4 % en Guyane.
Les situations en matière de chômage, d'emploi et d'insertion professionnelle des jeunes et des adultes y sont comparables. Alors que la Martinique concentre un taux de chômage avoisinant les 19 % en 2015, la Guadeloupe et la Guyane enregistrent des taux un peu plus importants, avec respectivement 23,7 % et 22 %. Bien qu'en légère diminution, ces chiffres mettent en exergue la problématique de l'emploi dans les DOM, qui a un impact sur la situation sociale des jeunes, des femmes et des publics les moins qualifiés.
Les enjeux de qualification et les difficultés à obtenir un emploi expliquent les taux d'emploi très bas observés dans ces territoires chez les moins de 25 ans. Le diplôme demeure ainsi un facteur discriminant pour devenir actif dans les départements français d'Amérique (DFA). Lorsque 30 diplômés y sont actifs, seulement 10 non diplômés y trouvent un emploi.
La mission sénatoriale réalisée en 2008-2009 dressait déjà un certain nombre de constats. Le système universitaire français, tel que décliné dans les DOM, apparaissait complexe, très cloisonné et insuffisamment orienté vers le monde professionnel et les entreprises, avec des formations trop académiques ne développant pas suffisamment l'expérience professionnelle, la connaissance du tissu économique local et des filières porteuses notamment et, par là même, l'employabilité des jeunes.
Au-delà du constat d'un taux de chômage des jeunes très élevé dans les DOM, cette organisation de la formation professionnelle était pointée comme à l'origine d'un recours massif des entreprises locales aux cabinets de recrutement pour opérer des recrutements extérieurs, d'une « fuite des cerveaux », ainsi que d'une certaine frustration des jeunes Domiens souhaitant travailler « au pays » ou aspirant à y revenir après leur formation et vivant l'impossibilité de le faire comme une discrimination.
Pour faire face à cette problématique, la proposition n° 81 du rapport de la mission sénatoriale 2 ( * ) était de « faire de l'insertion professionnelle des jeunes dans l'économie et l'administration locales l'objectif prioritaire de l'enseignement supérieur dispensé dans les DOM ».
Dans cette optique, la loi du 5 mars 2014 a permis la mise en place de dispositifs de formation professionnelle plus adaptés aux besoins des jeunes et des entreprises, autour de quatre enjeux.
Tout d'abord, le compte personnel de formation a été créé, en vue de sécuriser les parcours professionnels en améliorant l'accès à la formation professionnelle, en particulier pour les publics les moins qualifiés.
L'objectif était également de favoriser un nouvel équilibre de la formation au sein de l'entreprise, en faisant de la formation professionnelle un réel investissement en matière de compétitivité, avec des plans de formation évolutifs et mieux corrélés aux besoins, aux modalités d'élaboration, de suivi et de financement adaptées, dans les TPE et PME notamment.
De nouvelles gouvernances des politiques en matière de formation professionnelle, d'emploi et d'orientation ont été créées, au niveau national comme au niveau local, avec des organismes tels que le Conseil national de l'emploi, de la formation et de l'orientation professionnelles (CNEFOP) et les comités régionaux de l'emploi, de la formation et de l'orientation professionnelles (CREFOP), le comité interprofessionnel pour l'emploi et la formation (COPANEF) et les comités paritaires interprofessionnels régionaux pour l'emploi et la formation professionnelle (COPAREF), permettant de porter les partenariats indispensables à la mise en cohérence de la formation professionnelle avec le tissu économique et le développement des entreprises.
Enfin, pour structurer un système de formation professionnelle plus performant, des services publics régionaux de la formation professionnelle (SPRFP) ont été instaurés.
Les trois collectivités de Guyane, de Guadeloupe et de Martinique ont été précurseurs en la matière. Le SPRFP de Guadeloupe a été créé dès 2011. Celui de la Martinique a été inscrit dans la loi du 5 mars 2014, conduisant à la création de l'Office territorial de formation de la Martinique, en cours d'installation. Celui de Guyane a été mis en place en 2013.
En Guyane, pour relever le défi de la « bataille » de l'emploi, l'Opérateur public régional de formation (OPRF) a ainsi été constitué, sous la forme d'un EPIC, ayant pour objectif de satisfaire les besoins fondamentaux des individus au regard de la formation tout au long de la vie, tout en convergeant vers les objectifs de cohésion sociale et de développement endogène du territoire. Cet organisme a vocation à permettre la formation de jeunes, dans le cadre d'un service public.
L'OPRF de Guyane applique ainsi dix principes fondamentaux, parmi lesquels un principe d'équité d'accès à la formation et de gratuité (pour tous les publics, y compris salariés, avec une gratuité de la formation selon le statut), un principe de continuité de l'offre de formation (entrées et sorties permanentes, du CAP au niveau ingénieur ; adaptabilité et individualisation de l'offre de formation en Master 2), un principe d'accompagnement social renforcé (à travers la mise à disposition d'une assistante sociale), un principe d'accompagnement et d'insertion dans l'emploi (passerelle vers l'emploi, aide au recrutement), ainsi qu'un principe de co-construction d'une offre de formation territorialisée et adaptée aux besoins du tissu économique.
Les formations proposées, composées d'unités d'enseignement ou de modules spécifiques tous qualifiants, permettent de sécuriser les parcours de formation en les adossant au projet professionnel des bénéficiaires et aux besoins du tissu économique guyanais.
L'OPRF de Guyane dispense aussi des formations en présentiel, présentées sous forme modulaire et préparant à des certifications ou diplômes dans des secteurs porteurs d'emplois tels que le bâtiment, l'électronique, la mécanique automobile, la restauration, l'informatique, la gestion, la comptabilité et le social. Onze filières clés du tissu économique guyanais sont ainsi adressées.
L'accompagnement renforcé prend la forme d'un accompagnement social et logistique : possibilité d'accès au transport, à l'hébergement, à la restauration et à des prestations sociales, avec l'appui de nos partenaires.
Un suivi psychopédagogique est également proposé aux stagiaires, sous forme de progression suivie et de séances régulières d'entretien.
L'OPRF de Guyane dispose par ailleurs de quatre salles préparatoires, qui mettent en oeuvre, tout au long des parcours, un renforcement personnalisé des savoirs de base.
Aujourd'hui, l'OPRF de Guyane adresse plus de 4 000 jeunes en recherche de formation, avec 800 stagiaires inscrits en formation pour une capacité d'accueil de 600 places. Cette capacité d'accueil demeure toutefois limitée au regard des 9 000 jeunes de 16 à 25 ans en recherche d'emploi que compte le territoire. L'OPRF gère ainsi une liste d'attente de plus de 200 jeunes inscrits, qui attendent parfois plus de 8 mois pour entrer en formation. Un accompagnement renforcé est par ailleurs délivré à 60 % des stagiaires inscrits en formation.
Le taux de réussite aux examens diplômants des jeunes accueillis est de plus de 80 % et leur taux d'insertion dans l'emploi dépasse les 85 %. La moitié des jeunes sortants signent ainsi un CDI, très souvent avec l'entreprise d'accueil en formation.
Le taux de satisfaction des entreprises accueillantes s'avère très encourageant, avec plus de 55 % des entreprises satisfaites des compétences réelles des stagiaires accueillis.
La passerelle vers l'emploi du SPRFP de Guyane complète cette offre de formation, avec pour objectifs de mettre en relation les jeunes diplômés et les entreprises en vue de favoriser le recrutement local, d'accompagner ces jeunes vers une insertion durable dans le monde du travail (à travers des ateliers de recherche d'emploi, du coaching , du « job dating », etc.) et d'accompagner les entreprises dans leur recrutement en identifiant les besoins en emploi et en formalisant les besoins en qualification notamment.
Complémentairement à son offre de formation, l'OPRF de Guyane emporte également les objectifs annuels suivants : contribuer à la réduction durable du chômage, garantir la continuité territoriale en contribuant à un maillage plus efficient des acteurs du réseau, contribuer à la montée en compétences des populations locales et au développement de leur environnement et affiner la stratégie politique du territoire par l'apport d'éléments mesurables et toujours plus pertinents reflétant la réalité du terrain.
Pour permettre aux entreprises de trouver un appui lorsqu'elles recherchent localement certaines compétences nécessaires à leur développement - et ainsi leur éviter de s'orienter vers d'autres territoires - l'État, la région et les partenaires sociaux de Guyane ont par ailleurs validé, dans le cadre du Schéma régional de l'emploi, la création d'une plate-forme de suivi des parcours et des besoins en emplois. Cet outil a fait l'objet d'une commande à l'OPRF par le préfet de région.
La mise en place de cette plateforme devra répondre aux objectifs suivants :
- recenser les besoins en compétences et leur traduction en typologies d'emploi et de qualifications, pour une meilleure connaissance des besoins en emploi par secteur et par filière ;
- anticiper et qualifier les compétences qui devront être disponibles en réponse aux projets de développement et aux grands chantiers identifiés en amont ;
- traduire ces besoins en temps utile en termes de parcours de formation et de programmes pédagogiques optimisés ;
- mobiliser plus efficacement les acteurs de l'orientation, de la formation et de l'emploi en vue de mieux coordonner leurs interventions.
En conclusion, je reprendrai les préconisations du rapport d'information du Sénat n° 583 (2013-2014) du 4 juin 2014 autour du thème : « Quels emplois pour demain ? ». Ce rapport définit les orientations suivantes pour le développement de la formation professionnelle dans les DFA :
- rendre plus lisibles les perspectives immédiates en partageant les projections en matière d'emploi, en augmentant la capacité d'accueil et en améliorant l'orientation professionnelle, ainsi qu'en renforçant le lien entre le monde du travail et les structures de la formation et du placement ;
- favoriser la « réindustrialisation » en anticipant les tendances et en continuant à promouvoir la féminisation des emplois ;
- préparer l'employabilité des générations futures en généralisant le recours aux nouvelles technologies, en ajoutant aux savoirs à transmettre l'acquisition de compétences transversales et en confortant la politique en faveur de la formation professionnelle duale via l'intégration en priorité des décrocheurs scolaires ;
- promouvoir des carrières évolutives en veillant à l'efficacité du dispositif législatif dédié à la formation professionnelle dans le sens de l'adaptabilité des carrières et en encourageant la mobilité des travailleurs.
Didier VALLON, Directeur outre-mer Eau France Suez
Le groupe français SUEZ est un des leaders mondiaux dans le domaine de l'environnement, avec des activités dans l'eau, l'assainissement et la valorisation des déchets. Employant plus de 80 000 salariés, ce groupe fonctionne dans les collectivités d'outre-mer comme une fédération de PME, avec des entreprises très ancrées localement.
Les entreprises du groupe Suez partagent un certain nombre de valeurs d'excellence technique, de service public, de protection des personnes et d'engagement vis-à-vis de l'ensemble des parties prenantes.
Elles mettent en oeuvre une politique de responsabilité sociétale des entreprises (RSE) reposant sur deux piliers principaux : celui de l'environnement et celui de la formation des jeunes et de l'emploi.
À titre d'exemple, en Martinique, nous participons depuis plusieurs années à l'attribution des bourses Alizés, qui viennent récompenser des lycéens aux profils exceptionnels. Au-delà de l'aspect financier, nous accompagnons ensuite ces jeunes dans leur parcours de formation. Nous avons ainsi accueilli en Chine un étudiant martiniquais qui, après ses classes préparatoires, a intégré l'École polytechnique.
Pour favoriser l'insertion, nous venons également de signer un partenariat avec l'Association pour le droit à l'initiative économique (ADIE).
En Guyane, une initiative a été prise par le directeur général de la Société guyanaise des eaux, Benoît Biret. Celui-ci, confronté à la pyramide des âges de l'entreprise et aux difficultés à effectuer localement les recrutements nécessaires, du fait des formations pointues exigées par nos métiers, a lancé en septembre 2015 une première opération pilote visant à former en alternance, en métropole, de jeunes Guyanais.
Maxonne Ravillus, élève du lycée Jean-Marie Michotte de Cayenne, a pu ainsi être sélectionné pour préparer un BTS électrotechnique en se formant au métier de technicien de maintenance à la station d'épuration de Carpentras. Il témoigne de son expérience dans le film qui suit.
Un film est projeté en séance.
Maxonne Ravillus s'est trouvé confronté à toutes les difficultés pratiques qu'implique une mobilité hors du territoire, avec des problématiques de logement, d'intégration à un nouvel environnement de travail, etc.
Pour surmonter ces difficultés, nous avons été appuyés par la Collectivité territoriale de la Guyane et l'Agence de l'outre-mer pour la mobilité (LADOM), ainsi que par les équipes de Suez qui l'ont accueilli à Carpentras.
L'expérience a été très positive et sera reconduite, avec une organisation plus structurée, en vue de permettre des recrutements directs ou après une expérience en métropole, permettant ainsi de développer des connaissances, des savoir-faire, un réseau, etc...
Cette approche s'avère bénéfique, pour l'entreprise, la collectivité et les jeunes sélectionnés.
Katia ROCHEFORT, Directrice du Pôle agroalimentaire régional de Martinique (PARM)
Le Pôle agroalimentaire régional de Martinique (PARM) constitue, depuis 2003, un levier pour l'innovation et le développement des entreprises et des filières du secteur agroalimentaire de Martinique.
Le PARM est un centre technique, qui met à disposition des outils performants et opérationnels pour accompagner la création de valeur ajoutée des productions de l'agriculture, de l'élevage et de la pêche en Martinique, mais aussi pour appuyer les entreprises du tissu économique local afin qu'elles maintiennent leurs parts de marché et créent de l'activité en Martinique.
Le PARM résulte d'une initiative régionale lancée en 2000. Il est constitué en association de loi 1901 et associe l'ensemble des acteurs du secteur agroalimentaire, des acteurs de la recherche et de la formation, ainsi que des acteurs institutionnels et professionnels du territoire. Depuis 2009, le PARM est également membre partenaire du Réseau national de coordination des centres techniques des industries agroalimentaires, l'ACTIA. Il est ainsi adossé à un solide réseau mobilisant des partenaires scientifiques et techniques, des pôles de compétitivité, des technopôles, etc.
Les objectifs du PARM sont de conduire des programmes de recherche et de développement collaboratifs pour impulser de nouvelles voies de valorisation des productions primaires et créer de la valeur ajoutée, de renforcer la compétitivité des entreprises du secteur par la mise à disposition de services et de ressources technologiques, d'accompagner le développement de projets innovants de l'idée à la commercialisation, de soutenir l'émergence et le développement de filières stratégiques sur le territoire, d'accompagner la formation des professionnels et des étudiants du secteur, ainsi que de construire et d'animer un réseau solide de partenaires des filières du secteur.
Le PARM intervient ainsi à travers différentes modalités : des actions collectives d'assistance aux filières et aux entreprises (avec le soutien au cluster INOVAGRO et les projets AMYLVAL et PAMVAL notamment), des actions d'animation (diffusion de veille réglementaire, scientifique et technique et appui technique au secteur), des programmes de recherche et développement collaboratifs, l'accompagnement de projets innovants, ainsi que des prestations sur mesure répondant aux besoins des entreprises, pour les TPE et PME notamment.
Les secteurs d'intervention du PARM recouvrent l'ensemble des agro-ressources locales, à savoir les fruits et légumes, les amylacées tropicales, les produits de la mer, les produits d'élevage et les plantes aromatiques et médicinales.
Les domaines de compétence du PARM, regroupés en cinq pôles d'activités, recouvrent quant à eux l'expertise technologique liée aux produits et aux processus - pour l'agroalimentaire, les cosmétiques et les phyto-ingrédients -, l'assistance qualité individuelle ou collective, le conseil technologique, les formations technologiques et stratégiques, les études sensorielles des aliments et tests marketing, les analyses des aliments et études de conservation, l'accompagnement dans le marketing alimentaire, le processus d'innovation de la conception à la commercialisation, ainsi que les préséries et l'accueil de productions d'activités en lancement.
Pour mener à bien ses missions, le PARM dispose de ressources technologiques : une halle technologique alimentaire de 250 m² équipée de machines pilotes, un laboratoire pour l'analyse des produits alimentaires doté d'une salle de microbiologie et d'une salle de physico-chimie équipées, notamment pour les aspects nutritionnels, une plateforme d'éco-extraction équipée de technologies innovantes pour la valorisation des bio-ressources et une salle d'analyse sensorielle équipée de 16 cabines de dégustation.
L'équipe du PARM est constituée de 21 salariés permanents et accueille de nombreux stagiaires et doctorants dans un cadre de collaboration scientifique avec des unités de recherche.
Les financements du PARM sont mobilisés essentiellement auprès de la collectivité territoriale de Martinique et dans le cadre des fonds structurels européens - les recettes liées aux prestations de services assurant une faible part du budget.
Aujourd'hui, le PARM se positionne comme un centre de référence pour les prestations de services aux entreprises du territoire dans le secteur agroalimentaire. Il permet en effet à ceux qui le sollicitent d'avoir accès à de l'expertise, pour dynamiser leur production et structurer leurs projets, de l'idée jusqu'à la mise sur le marché de nouveaux produits.
Le PARM a récemment été labellisé en tant que centre de ressources technologiques (CRT) par le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche (MESR). Cette labellisation constitue une reconnaissance du professionnalisme du PARM dans la conduite de ses prestations aux entreprises. C'est aussi une reconnaissance de la qualité des activités de recherche et de développement menées par le PARM en collaboration avec les professionnels et les organismes de recherche.
L'enjeu essentiel pour le PARM demeure ainsi de faire en sorte que les retombées des projets de recherche bénéficient au développement et à la dynamique d'innovation du secteur agroalimentaire en Martinique.
L'accompagnement des TPE et PME du secteur dans l'amélioration de leur niveau de performance constitue un autre axe majeur de l'activité du PARM. Le PARM intervient pour cela à travers des actions ciblées, auprès de petites entreprises aux moyens souvent limités.
On observe, de fait, une forte évolution de la demande d'accompagnement des entreprises du secteur. Les demandes formulées sont ainsi en progression de 263 % depuis 2012, avec plus de 160 sollicitations en 2015, contre 61 en 2013. En 2015, 85 entreprises, dont 35 nouvelles entreprises ou porteurs de projets, ont été conseillées hors prestations de services, à travers des actions collectives ou des conseils gratuits. Une véritable dynamique entrepreneuriale semble ainsi à l'oeuvre sur le territoire - les entreprises ayant constitué 76 % des clients du PARM en 2015.
Évolution de la demande de prestations privées sur mesure
Source : Parm
Le PARM intervient dans le cadre d'actions collectives auprès des TPE et PME du secteur pour les accompagner, par exemple dans la mise en place d'un plan de maîtrise sanitaire, dans l'amélioration de leur niveau de performance en production ou dans la labellisation régions ultrapériphériques (RUP) de leur production.
Par ailleurs, le PARM conseille des entreprises souhaitant créer ou développer une activité de transformation. Notre intervention porte notamment sur la mise au point des produits, la définition et l'élaboration du cahier des charges des équipements utiles au développement des processus, la consultation des fournisseurs et l'assistance au choix des offres répondant le mieux aux attentes.
Deux entreprises ont notamment été accompagnées dans le développement d'activités nouvelles sur le territoire : l'entreprise Carib Fruit (qui produit des pétales de fruits, produit innovant obtenu par la technologie de la friture sous vide) et l'entreprise Sérénade des Saveurs (qui élabore des produits haut de gamme à base de fruits).
Le PARM joue également un rôle essentiel pour l'information des entreprises du secteur. Une veille technologique, règlementaire et commerciale est ainsi assurée, à travers des séminaires et des ateliers techniques. En 2015, une intervention de Bpifrance a notamment été organisée, ainsi qu'un séminaire sur les tendances de l'innovation sur le marché agroalimentaire. La revue biannuelle PARM Infos apporte également ce type d'informations, à travers ses dossiers techniques et ses rubriques « Innovation produit » et « Innovation Process ».
Depuis 2011, l'accompagnement du seul cluster agroalimentaire de Martinique, le cluster INOVAGRO, constitue aussi un soutien important aux TPE et PME du territoire. Ce sont ainsi 24 entreprises fédérées qui, en mutualisant leurs projets de développement, bénéficient de l'expertise et des supports d'innovation du PARM, avec des retombées concrètes en termes d'amélioration de la performance et de la qualité des productions, de compétitivité et de développement commercial.
L'émergence de la plateforme d'éco-extraction du PARM, nouvel outil de transfert de technologies pour dynamiser la valorisation des extraits des plantes d'intérêt de Martinique dans les productions innovantes positionnées sur des marchés porteurs (compléments alimentaires, phyto-ingrédients cosmétiques ou alimentaires, etc.), est aussi l'illustration de l'engagement du PARM auprès des entreprises du territoire. Cet outil, opérationnel depuis 2016, favorisera la dynamique de valorisation économique d'éco-extraits de plantes, fruits, légumes et épices issus de la biodiversité végétale locale. Il permettra également de réaliser efficacement le transfert des procédés étudiés, au bénéfice des entreprises, à travers l'incubation de projets et le développement de produits innovants.
En 2016, le PARM s'attachera à poursuivre et renforcer la mise en place de services adaptés aux besoins des TPE et PME du secteur agroalimentaire et des bio-ressources, ainsi qu'à favoriser les retombées concrètes des projets de R&D collaboratifs au bénéfice de ces entreprises.
Parmi les actions phares du PARM au bénéfice des TPE et PME en 2016 figurent ainsi :
- le projet Stimul'Inov, pour la diffusion d'informations stratégiques pour l'innovation (connaissance des marchés, marketing alimentaire, Prix de l'innovation du PARM) ;
- la plateforme d'éco-extraction du PARM, pour enclencher une dynamique de valorisation des éco-extraits de Martinique ;
- le transfert de technologies, avec la cession en cours de licences exclusives à deux entreprises et la valorisation économique des projets PAMVAL (connaissance du potentiel de 24 plantes de la pharmacopée traditionnelle) et AMYLVAL (innover avec les légumes du pays) ;
- le cluster INOVAGRO, avec un accompagnement autour de la performance en production, de la qualité et de la labellisation RUP ;
- l'accompagnement à la maîtrise des risques sanitaires, dans une optique de maintien des parts de marché et de rehaussement du positionnement commercial ;
- la diversification de l'offre de formation aux professionnels.
SECONDE SÉQUENCE - LE FINANCEMENT DES ENTREPRISES
Alain ROUSSEAU,
Préfet, Directeur général des outre-mer
Les caractéristiques spécifiques des entreprises des outre-mer en matière de financement et de positionnement économique ont été évoquées. Pour soutenir ces entreprises, l'action de l'État et des pouvoirs publics en général consiste d'abord à les aider à trouver des clients et à les solvabiliser. Une politique de la demande spécifique aux outre-mer est ainsi conduite, sous autorisation de l'Union Européenne. Ces dispositifs sont très substantiels et participent de manière conséquente au développement des économies ultramarines.
Pour la solvabilisation de la demande des particuliers, on peut citer la contribution du taux réduit de TVA qui est ainsi évaluée à 1,3 milliard d'euros, celle de la surrémunération des fonctionnaires à plus d'un milliard d'euros et celle des abattements sur l'IRPP à plus de 0,4 milliard d'euros.
L'appui aux collectivités vient également soutenir la commande publique, avec des dotations qui demeurent conséquentes bien qu'affectées par l'effort national de réduction des déficits publics. En matière d'investissement, le contrat de plan État-région (CPER) représente 527 euros par habitant dans les outre-mer, pour une moyenne nationale de 179 euros par habitant. La répartition des fonds européens demeure également favorable aux outre-mer, à hauteur de 25 % du total accordé à la France.
En parallèle, une politique de l'offre est conduite au bénéfice de l'investissement et du fonctionnement des entreprises ultramarines, avec des exonérations de charges (à hauteur d'un milliard d'euros, des zones franches d'activités, le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE) renforcé, des aides à l'investissement plus conséquentes (avec un cumul de la défiscalisation des investissements productifs et de la ligne budgétaire unique (LBU) à hauteur de 0,8 milliard d'euros) ainsi que la taxe sur la valeur ajoutée non perçue récupérable (TVA NPR) à hauteur de 0,1 milliard d'euros.
Les politiques spécifiques sont-elles suffisantes au regard des besoins de financement des entreprises ultramarines ? Faisant face à des besoins en fonds de roulement plus importants en lien avec des charges spécifiques, pour le stockage notamment, les entreprises ultramarines demeurent confrontées à des problématiques de capitalisation et de trésorerie. De surcroît, cette situation est aujourd'hui aggravée par un allongement des délais de paiement des collectivités locales, retards qui se diffusent dans l'ensemble du tissu économique.
Pour faire face à ces enjeux, des outils existent à l'échelle nationale, avec le CICE, le dispositif Avance Plus de la BPI et le dispositif de nantissement auprès des organismes de sécurité sociale. Un dispositif spécifique à l'outre-mer est également porté par l'Agence française de développement (AFD), permettant de préfinancer les subventions publiques pour les petites collectivités.
Des outils sont également en discussion au niveau interministériel, de nature à répondre aux préoccupations affichées par les professionnels. La mise en place d'un fonds de garantie pour le préfinancement des subventions publiques est ainsi envisagée, de même que la mise en oeuvre d'un dispositif de préfinancement du crédit d'impôt pour l'investissement productif. Une amélioration du dispositif Avance Plus est par ailleurs à l'étude, avec pour ambition de se rapprocher d'un système d'affacturage plus sécurisant pour les entreprises.
Des outils régaliens existent par ailleurs. La loi du 14 octobre 2015 engage l'IEDOM à produire chaque année un rapport sur les délais de paiement, afin d'objectiver l'impact des retards de paiement des collectivités locales sur l'économie des DOM. Le mandatement d'office sur saisine du préfet est également prévu par la législation. Toutefois, il s'agit d'un instrument complexe et qui ne garantit pas nécessairement un paiement rapide, compte tenu du stock de mandatements d'office dans les directions régionales des finances publiques (DRFIP).
Le débat à venir sur l'égalité réelle en outre-mer permettra également d'aborder ces questions, avec très certainement des discussions sur les plans de convergence, les dispositions sociales et les moyens de mieux appuyer le développement des entreprises.
Stéphane LAMBERT, Président du MEDEF Guyane
Devant le récapitulatif des aides accordées aux économies ultramarines, j'ai été tenté de culpabiliser. Je me suis néanmoins rappelé nos handicaps réels sur le terrain.
Compte tenu du niveau de dépendance de nos économies à l'égard de la commande publique, les délais de paiement constituent effectivement une préoccupation majeure. En Guyane, d'après une enquête du MEDEF Guyane, le délai de paiement des collectivités et des donneurs d'ordre publics - dont 80 % sont dans l'incapacité d'investir, voire en situation de cessation de paiement - atteint souvent 9 mois.
Une enquête de la fédération régionale du bâtiment et des travaux publics (BTP) de Guyane auprès de ses membres a par ailleurs mis en évidence, en avril 2016, des retards de paiement de l'ordre de 27 millions d'euros, malgré une diminution de 50 % des volumes de la commande publique. Rapportés aux salariés de ces mêmes entreprises, ces retards de paiement correspondent à l'équivalent de 6 mois de salaires, à financer par les entreprises elles-mêmes.
Face aux difficultés engendrées, nous demandons aujourd'hui à la BPI de prendre le relais des entreprises pour financer les collectivités. Nous souhaiterions ainsi pouvoir subroger nos créances vis-à-vis de l'État. Ceci pourrait s'avérer complexe. Néanmoins, le rôle des entreprises ne devrait pas être de financer les collectivités mais de créer de la richesse sur le territoire.
La situation des encours est également symptomatique en Guyane. Le montant des financements, hors immobilier, accordés aux entreprises guyanaises était, fin 2014, de 530 millions d'euros, contre 1 670 millions d'euros pour les Antilles. Les taux d'emprunt en Guyane demeurent par ailleurs supérieurs à ceux de la métropole, souvent de plus d'un point et demi.
Cette situation s'avère d'autant plus dommageable au regard des besoins de financement de l'économie guyanaise. La Guyane recèle d'importants potentiels qu'elle ne peut aujourd'hui exploiter pleinement : 40 à 50 milliards d'euros d'or dans le sous-sol, un tiers de la forêt de la République (dont la valeur en bois d'oeuvre pourrait atteindre plusieurs centaines de milliards d'euros), du pétrole potentiellement exploitable (entre jusqu'à 150 milliards d'euros) et une biodiversité dont le potentiel reste à découvrir.
Plusieurs projets se chiffrent ainsi en centaines de millions d'euros. Cependant, hormis dans le traditionnel domaine spatial, le financement de ces projets demeure ponctuel et repose souvent sur des multinationales étrangères au territoire. Le tissu local, quant à lui, composé de très petites entreprises (TPE) et de quelques petites et moyennes entreprises (PME) et filiales de groupes européens, reste en demande.
Face à cette problématique, les réponses bancaires locales et de la BPI semblent inefficaces. Le montage des dossiers par les emprunteurs et leur traitement par les établissements bancaires ne fonctionne guère. Les centres de décision sont hors Guyane et surtout très éloignés de la compréhension du terrain.
La Guyane fait également face à d'importants besoins de financement pour le développement de ses infrastructures (infrastructures scolaires et de formation, équipements publics et numériques, énergie, routes, etc.).
Durant les dix années à venir, vingt-cinq lycées ou collèges devront être construits, sur les seuls fonds de la collectivité territoriale. Seuls 1 500 km de routes sont aujourd'hui réalisés, soit 100 fois moins au km² et 4 fois moins par habitant qu'en métropole. L'énergie reste une préoccupation, avec un réseau instable et une capacité inférieure aux demandes économiques futures. Un port en eau profonde devrait permettre à la Guyane de disposer d'une véritable ouverture sur la mer, pour un coût de 1,5 à 2,5 milliards d'euros.
L'Agence française de développement (AFD) a financé, en 2015, 1,6 milliards d'euros de projets dans les départements d'outre-mer (DOM) dont seulement 86 millions d'euros ont été orientés vers la Guyane. La faiblesse de ce montant montre la difficulté à gérer et lancer des projets en Guyane. Il existe clairement un manque de professionnalisation et de formation, tant au niveau de l'appui aux entreprises qu'au sein même des collectivités.
Le rattrapage infrastructurel accaparera ainsi l'essentiel des financements. Cette mise à niveau des besoins primaires développera néanmoins la commande publique pour le BTP si le pacte d'avenir promis par le Président de la République en 2013 voit enfin le jour. Du reste, si le montant demandé de 4 milliards d'euros est réduit à 2 milliards d'euros, la tendance actuelle aura du mal à être inversée.
S'agissant des fonds européens, les programmes opérationnels du Fonds européen de développement économique régional (PO FEDER) en Guyane se positionnent à hauteur de 600 millions d'euros pour la période 2014-2020. Complétés par les contrats de plan État-Région (CPER) et l'engagement de la collectivité territoriale, ce sont 1,1 milliard d'euros qui viendront doper l'économie locale. Pour mémoire, seuls 16 % des PO FEDER avaient précédemment bénéficiés directement aux entreprises guyanaises, le reste étant utilisé par les collectivités.
L'autre potentiel de la Guyane se trouve être sa jeunesse. L'âge moyen y est de 24 ans, avec une croissance démographique forte, et ce capital humain doit être formé. Cependant, plus de 56,4 % des jeunes sortant du système scolaire n'ont aucun diplôme. C'est donc la formation professionnelle et les entreprises qui devront financer cette mise à niveau. Or les entreprises guyanaises sont jeunes, elles aussi, et n'ont donc pas accumulé beaucoup de réserves. Avec 4 % de croissance annuelle du produit intérieur brut (PIB) - à peine 3 % depuis 3 ans -, l'économie guyanaise double tous les 20 ans. Beaucoup d'entreprises guyanaises sont donc nouvelles et sont principalement des TPE sans capitaux. La Guyane compte aujourd'hui trois fois plus de jeunes dans ses écoles que de salariés dans ses entreprises ; de la même manière qu'elle compte autant de demandeurs d'emploi que de salariés dans ses entreprises. Avec une telle croissance démographique, la capacité d'autofinancement des entreprises ne saurait être suffisante pour à la fois créer de la valeur, investir et financer les besoins de la collectivité.
Une compensation des surcoûts est certes assurée par un niveau de charges sociales bas. Par la loi pour le développement économique des outre-mer (LODEOM) qui permet l'exonération de 28,10 % des charges de sécurité sociale jusqu'à 1,6 fois le SMIC, ajoutée à un crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE) de 9 % puis bientôt 12 %, le coût social est ramené à un niveau permettant de financer la structure des coûts des entreprises. Cependant, les dispositifs demeurent peu lisibles et fonctionnent par des remboursements les années suivantes. L'effet bénéfique ne se perçoit que peu et en différé. De plus, il conviendrait de pérenniser ces dispositifs et de les étendre aux rémunérations intermédiaires dont a tant besoin la Guyane où nous avons les rémunérations régionales les plus élevées avec l'Île-de-France, hors ouvriers et employés.
Dans ce contexte, une recapitalisation de l'économie guyanaise dans son ensemble nécessiterait d'être opérée, avec des transferts de l'État plus importants, orientés vers l'investissement, dans le capital humain et les infrastructures notamment.
L'objectif serait également d'attirer des investisseurs et fonds d'investissement. Peu d'investisseurs extérieurs, hormis ceux venant des Antilles françaises, se risquent aujourd'hui en Guyane. Pourtant, les rentabilités y sont plutôt élevées. Le taux de rentabilité de la location immobilière n'y a sans doute pas d'égal : de 6 à 9 % dans le logement et de 8 à 12 % dans l'immobilier d'entreprise. Selon une étude interne de cabinets d'expertise comptable réalisée en 2013 auprès de 600 entreprises, le ratio bénéfice net/chiffre d'affaires y est de 8 %.
La création d'un fonds d'investissement local serait de nature à impulser une dynamique pour le développement économique guyanais. Pour cela, la contribution à ce fonds devrait être défiscalisante pour tout investisseur français.
La Guyane a tout d'un eldorado. Dans quelques années, la Guyane sera perçue comme un paradis où la qualité de vie se conjuguera avec un environnement exceptionnel. Cependant, à ce jour, la réalité guyanaise est tout autre. L'image véhiculée est faible, voire négative. Finalement, si 94 % de la Guyane appartient encore à l'État, c'est parce que personne n'a encore jamais voulu y investir et donc y acheter des terres. Les capitaux et les investisseurs ne sont pas attirés par les potentiels guyanais, pourtant considérables.
À défaut d'investir dans les entreprises et l'économie, la croissance démographique exponentielle contraindra la France à financer dans de plus grandes proportions les subsides sociaux (CAF, RSA, chômage, etc.), les dépenses de fonctionnement et la paix sociale en Guyane. Une posture d'investissement nécessiterait au contraire d'être adoptée pour exploiter les potentiels de ce territoire, à même de faire la fierté de la République.
Philippe JOCK, Président du MEDEF Martinique
Le tissu entrepreneurial des entreprises ultramarines, et singulièrement celui des Antilles et de la Guyane, est composé essentiellement de très petites entreprises (TPE). Comme l'a souligné le Directeur de l'IEDOM, 97 % des entreprises des départements d'outre-mer (DOM) sont des TPE.
Mon intervention sera donc centrée sur le financement de celles-ci, étant précisé que les groupes de taille significative à l'échelle des DOM ont des problématiques de financement identiques à celles des entreprises de l'Hexagone, qui ne nécessitent pas de commentaires particuliers.
Je commencerai mon intervention par un focus sur un élément de fiscalité : le crédit d'impôt outre-mer, instauré par l'article 244 du code général des impôts pour les investissements productifs outre-mer. Les entreprises qui réalisent un chiffre d'affaires inférieur à 20 millions d'euros ont ainsi le choix entre, d'une part, la réduction d'impôts - pour les investisseurs relevant de l'impôt sur le revenu (IR) - ou la déduction d'impôts - pour les investisseurs soumis à l'impôt sur les sociétés (IS) - et, d'autre part, le crédit d'impôt.
Le taux de ce crédit d'impôt est de 38,25 % pour les entreprises soumises à l'IR. Il est porté à 45,90 % pour les investissements réalisés en Guyane et à Mayotte. Pour les entreprises soumises à l'IS, il atteint 35 %. Ce dispositif est donc avantageux par rapport à la défiscalisation traditionnelle, dite Girardin (dont le taux de 30 % était porté à 36 % en Guyane et à Mayotte).
Le succès éventuel de ce dispositif suppose néanmoins la mise en place d'un préfinancement. En effet, en cas de demande de remboursement dudit crédit, ce dernier n'est payé par le Trésor Public qu'au minimum 4 mois après l'envoi de la liasse fiscale, soit entre 8 et 20 mois après la mise en service du bien. Très concrètement, cela signifie que l'exploitant doit être en capacité de préfinancer l'avantage fiscal pour payer ses fournisseurs.
Pour les établissements financiers comme pour la BPI trois freins à la mise en place de ce préfinancement subsistent :
- le risque de défaillance de l'exploitant (la cession de créance intervenant lors de la mise en service du bien, lorsque celui-ci est déjà intégralement payé) ;
- le risque d'éligibilité (les défiscalisations de plein droit, représentant l'essentiel des investissements en outre-mer n'étant pas, comme les dossiers soumis à agrément, sécurisées en termes d'éligibilité) ;
- le risque administratif (les TPE choisissant le CIOM devant remplir des formulaires fiscaux au plus tard à la mise en service du bien).
Dans ce contexte, le MEDEF Martinique préconise : d'une part, la mise en place par la BPI ou tout autre organisme financier qui le souhaiterait d'un dispositif de préfinancement similaire à celui du CICE, avec pour fait générateur, non pas la mise en service, mais le paiement d'au moins 50 % de la commande ; d'autre part, de donner aux entreprises la possibilité, sur option, de déposer une demande d'agrément simplifié ou de rescrit permettant de sécuriser les établissements de crédit pour les projets inférieurs à 1 million d'euros (non soumis à agrément).
S'agissant des difficultés rencontrées par les entreprises en termes de financement, je commencerai par rappeler qu'il n'existe pas de « bon dossier » qui ne trouve de financement bancaire - la liquidité étant abondante dans nos territoires.
La concurrence est forte entre établissements financiers et un refus de l'ensemble des banques doit amener le porteur de projet à s'interroger sur son dossier ou sur le projet lui-même.
Parmi les principales causes de refus des dossiers, certaines sont liées au secteur d'activité. Certains secteurs d'activité présentent des niveaux de sinistralité supérieurs à la moyenne. En Martinique, le taux de sinistralité était de 6,5 % au 30 septembre 2015, soit plus du double de la moyenne nationale (3,1 %). Le bâtiment et les travaux publics (BTP), le tourisme et la restauration y affichent des taux trois fois supérieurs à la moyenne.
Ces taux de sinistralité élevés imposent la constitution de provisions filières sur les secteurs concernés, ce qui conduit les banques à être plus vigilantes et plus exigeantes vis-à-vis de l'autofinancement et des garanties. Signalons toutefois que la problématique de la garantie est rare. À cet égard, la BPI constitue un outil intéressant.
D'autres causes de refus peuvent être liées à :
- l'absence d'éléments financiers récents et fiables (lorsque les entreprises ne sont pas en mesure de présenter leurs comptes au cours du premier semestre suivant la clôture de l'exercice comptable, faute d'une attention suffisante portée au volet administratif et comptable de leur gestion) ;
- une documentation insuffisante ( business plans incomplets, incohérents ou irréalistes, plans de trésorerie absents des dossiers, études de marché trop sommaires et ne permettant pas d'apprécier le réel potentiel de développement de l'entreprise) ;
- un sous-financement (sous-évaluation des besoins en fonds de roulement découlant de l'activité et du développement de l'entreprise) ;
- une insuffisance de fonds propres.
Enfin, certaines causes de refus peuvent être liées aux porteurs de projets. Tout le monde ne peut pas être chef d'entreprise et certains projets qui peuvent paraître viables sont refusés en raison de la personnalité du porteur de projet, de son comportement, de son sens de l'entreprise ou de son absence de qualité managériale.
Face à ces difficultés, plusieurs solutions apparaissent pouvoir être mises en oeuvre. S'agissant des difficultés liées au secteur d'activité, il convient de distinguer le BTP du tourisme et de la restauration.
Le secteur du BTP, depuis la disparition de la défiscalisation dans le secteur du logement libre, est quasi exclusivement dépendant de la commande publique. Les délais de règlement des collectivités pèsent donc de façon dramatique sur la trésorerie des acteurs du secteur. Afin que les entreprises cessent d'être les banquiers des collectivités, le MEDEF préconise que leurs créances soient cédées sans recours à la BPI ou à tout autre organisme financier d'État, à l'issue du délai réglementaire de paiement (45 jours).
Par ailleurs, la commande publique diminue en raison des contraintes budgétaires. Or, les entreprises n'ont pas suffisamment de visibilité sur les programmes à venir.
Comme tel est le cas à La Réunion, il est urgent que soit activé dans nos régions un Haut conseil de la commande publique (HCCP), espace de dialogue entre tous les acteurs (commanditaires, attributaires et financeurs) et lieu de centralisation et de diffusion des informations.
Les secteurs du tourisme et de la restauration, quant à eux, rencontrent des difficultés en raison d'un modèle économique peu adapté à la concurrence de leur environnement immédiat (Sainte-Lucie et Saint-Domingue pour ce qui est de la Martinique et de la Guadeloupe). Dans ces secteurs, il est donc urgent de travailler à la réduction des coûts du travail (avec des exonérations à accentuer et un CICE majoré), ainsi qu'à la modernisation des équipements (avec les fonds européens et régionaux).
Malheureusement, les entreprises de ces secteurs ne parviennent pas à mobiliser de subventions en raison de dettes sociales et fiscales accumulées. Un financement à long terme de l'Agence française du développement (AFD), devant permettre un refinancement desdites dettes et une montée en gamme des structures, a été annoncé par le Président de la République en 2015. À ce jour, il n'a cependant pas été mis en place.
Pour ce qui est de l'insuffisance des fonds propres, force est de constater que certains projets nécessitent la levée de dettes bancaires significatives, sans que le porteur ne dispose d'un apport permettant au banquier de mesurer son implication. Une structure de capital-risque ou de capital-développement dynamique manque ainsi à nos territoires.
Il est urgent que nos élus comprennent qu'il ne s'agit pas d'un outil politique, mais d'un outil de développement économique - outil devant intervenir en amorçage/création (à partir de fonds publics) et en développement/transmission (à partir de fonds publics et privés), pour permettre aux entreprises en développement de passer du statut de TPE à celui de PME.
Le crowdfunding ou financement participatif, ainsi que le fonds d'investissement de proximité outre-mer (FIP DOM) - sous réserve que ce dernier soit étendu à l'ensemble des contribuables français et au-delà des secteurs éligibles à la défiscalisation - pourraient également constituer une réponse à la problématique de l'insuffisance des fonds propres.
Les subventions européennes participent également de manière indiscutable au financement du secteur productif. On peut néanmoins s'interroger sur le fait que la part des subventions européennes, nationales ou territoriales, dans le développement des entreprises conduise les porteurs de projet à réduire leur apport.
Les collectivités gagneraient par ailleurs à inverser le sens d'instruction des dossiers, en subordonnant leur examen à un pré-accord de financement des banques. Les collectivités bénéficieraient alors de l'expertise des services instructeurs des établissements financiers et la question du financement du besoin en fonds de roulement serait mieux appréhendée.
S'agissant d'accompagner la structuration organisationnelle, comptable et financière des TPE, le développement des groupements d'employeurs devrait permettre aux TPE de répondre aux demandes des banquiers en matière de documentation financière et comptable. Il convient d'ailleurs de saluer les initiatives de la fédération des TPE dans ce domaine en Martinique et en Guadeloupe.
En conclusion, il apparaît que le financement de l'investissement et de l'exploitation des TPE de nos territoires ne repose pas uniquement sur la seule bonne volonté ou implication des banques, ni sur celle des pouvoirs publics et politiques, mais aussi sur nos capacités d'entrepreneurs à convaincre, à partir de documents fiables et incontestables.
Dominique CAIGNART, Directeur du réseau Île-de-France et outre-mer de Bpifrance
Bpifrance est pleinement opérationnelle en outre-mer, notamment sur le versant des Amériques depuis plus de 2 ans. Le quotidien de notre directrice inter-régionale, Michèle Papalia, est ainsi de répondre aux sollicitations et demandes de financement des entrepreneurs et partenaires. Depuis sa nomination, nos chiffres ne cessent de progresser. En 2015, près de 1 200 chefs d'entreprises ont ainsi trouvé une solution pour leurs projets sur tous les secteurs d'activité, pour un montant global de près de 360 millions d'euros.
Source : Bpifrance
Bpifrance distribue aujourd'hui quatre grandes lignes de produits en outre-mer.
Tout d'abord, elle aide les chefs d'entreprises à travailler avec le secteur public en mobilisant les créances « clients publics » détenues par leurs entreprises. La part de marché de Bpifrance sur cette activité est très conséquente grâce à des règles de fonctionnement adaptées au contexte ultra marin. Pour les 560 entreprises clientes sur cette ligne produit, Bpifrance est souvent le seul ou principal partenaire pour leur financement du compte clients.
S'agissant des délais de paiement des collectivités, le délai de 9 mois évoqué lors du débat n'est pas, d'après Bpifrance, le délai moyen observé. Quelques collectivités pratiquent de tels délais mais le délai moyen constaté chez nos clients s'avère sensiblement inférieur quoiqu`en régulier dépassement avec les règles normales d'ordonnancement. Quoi qu'il en soit, nous finançons durablement ces créances atypiques qui doivent cependant être régulièrement revalidées par les collectivités, en conformité avec les exigences de l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR).
Bpifrance intervient également en apportant aux partenaires bancaires et financiers sa garantie sur des dossiers complexes ne générant souvent pas de garantie intrinsèque. Les partenaires bancaires sont ainsi rassurés et assurés pour s'engager de façon souvent plus importante sur certains projets. Ce dispositif a bénéficié à plus de 500 entreprises en 2015.
Cette année, et pour encore améliorer le processus, Bpifrance a ainsi donné aux partenaires bancaires ultramarins une délégation de décision pour engager la garantie Bpifrance sur tous leurs crédits inférieurs ou égaux à 200 000 euros, ce qui constitue une nouvelle avancée et devrait permettre de raccourcir notoirement les délais d'instruction.
Bpifrance développe aussi depuis sa création une activité classique de financement d'investissements. Au cours des deux dernières années, près de 40 millions d'euros de financements directs ont ainsi été concrétisés sur le marché ultramarin, soit une part de marché quasi équivalente à celle de Bpifrance en métropole.
De plus, les entreprises de croissance en recherche de capitaux peuvent également nous approcher pour leur recherche de capitaux propres, soit via nos interventions directes soit via les structures régionales d'investissement dans lesquelles nous sommes présents.
Enfin, début 2016, nous avons nommé sur la Guyane un manager qui va assurer avec les équipes de l'AFD qui nous représentent sur place une plus grande proximité avec les acteurs économiques guyanais.
Éric MONTAGNE, Directeur général adjoint de la BRED Banque Populaire
La BRED fait partie du groupe BPCE. Elle en constitue d'ailleurs la banque la plus importante, avec 5 000 collaborateurs sur l'ensemble des territoires au service de plus d'un million de clients Elle s'appuie sur de solides fondamentaux, ce qui lui permet d'accompagner le financement de l'économie. Ses 455 points de vente en France métropolitaine, en outre-mer et à l'international en font également une banque de proximité engagée sur ses territoires, en Île-de-France, dans l'Aisne, en Normandie, dans les départements d'outre-mer en succursale, en Martinique, Guyane, Guadeloupe, dans les Îles du Nord, à La Réunion et à Mayotte.
Le groupe BRED poursuit une croissance ciblée à travers ses filiales bancaires ou ses bureaux de représentation dans le Pacifique, la Corne de l'Afrique et en Asie du Sud-Est.
La BRED est aujourd'hui une banque de référence en outre-mer, avec 800 collaborateurs au service de près de 400 000 clients. Son organisation est orientée par typologie de clientèle pour répondre aux besoins des TPE, des PME, des grandes entreprises et des professions libérales, mais également à des besoins spécifiques liés au crédit-bail, au financement sur mesure et au patrimoine. Elle est également la seule banque à exercer en outre-mer sous un régime de succursale. Les clients multi-DOM ou ayant également des intérêts en métropole conservent ainsi un même interlocuteur. La BRED accompagne également les ultramarins en mobilité sur l'ensemble de l'outre-mer, en métropole et à l'international avec Bred Espace Outre-mer.
La BRED est aujourd'hui le groupe bancaire le plus complet à disposition des entreprises d'outre-mer, avec une banque de détail et une banque de grands comptes, mais aussi une salle des marchés - chaque matin, la BRED place ainsi 25 % des billets de trésorerie de l'ensemble des entreprises françaises - et une présence à l'international non négligeable.
La BRED s'impose ainsi comme un acteur incontournable du financement des économies ultramarines, en y soutenant les investissements, la création et le développement des entreprises, et aussi en finançant l'habitat social. Nous mettons tout en oeuvre pour assurer le financement sur mesure des entreprises de taille intermédiaire (ETI), à travers des financements alternatifs et des placements obligataires. Nous disposons par ailleurs d'une structure propre d'investissement en capital qui permet de renforcer les fonds propres d'entreprises, y compris en outre-mer. Une de nos filiales est spécialisée dans la mise en place, la commercialisation et la gestion des programmes d'investissement. Nous disposons d'une structure intervenant dans le domaine du crédit-bail. Nous sommes également reconnus comme un acteur majeur en matière de gestion des moyens de paiement (pour les certifications numériques notamment). Nous sommes le premier opérateur de la zone Antilles-Guyane en termes de flux sur le segment des institutionnels. À travers le Crédit maritime, le groupe BRED est aussi engagé aux côtés des acteurs de la pêche et de la plaisance pour soutenir le développement de l'économie bleue.
Pour accompagner et faciliter le financement des TPE, nous avons une société de caution mutuelle, la SOCAMA, proposons le Fonds de garantie spécifique agriculture et pêche (FOGAP) et distribuons également des solutions en partenariat avec la BPI.
Aujourd'hui, en outre-mer, parmi les entreprises réalisant un chiffre d'affaires de plus de 10 millions d'euros, 9 sur 10 sont clientes de la BRED, 1 TPE sur 4 est également cliente de la BRED.
Pour accompagner les plus petites entreprises, et notamment celles rencontrant des difficultés, nous avons noué des partenariats avec l'Association pour le droit à l'initiative économique (ADIE) et les Écoles de la seconde chance. Nous avons également développé un partenariat avec l'Agence de l'outre-mer pour la mobilité (LADOM) pour accompagner les jeunes en mobilité vers la métropole dans le cadre de leur apprentissage. Nous disposons également, avec BRED Espace Outre-mer, d'une structure unique, exclusivement dédiée aux ultramarins en métropole.
À l'heure où certains de nos confrères sont tentés de réduire leurs implantations en outre-mer, nous sommes fiers et heureux de travailler avec les ultramarins et nous souhaitons continuer à le faire dans la durée.
Jacques DERÉGNAUCOURT, Membre du directoire en charge du Pôle Finances de la Caisse d'épargne Provence-Alpes-Corse (CEPAC)
Déjà implantée aux Antilles et à La Réunion, la Caisse d'épargne Provence-Alpes-Corse (CEPAC) vient de racheter trois banques qui opéraient à l'outre-mer : la Banque des Antilles françaises, la Banque de Saint-Pierre-et-Miquelon et la Banque de La Réunion, ainsi qu'un portefeuille de financements d'entreprises et de projets. Elle met ainsi encore plus qu'avant sa capacité d'intervention au service de l'outre-mer qui, avant son opération de rachat, pesait un peu plus de 10 % de son activité et qui désormais en pèsera un tiers.
La Caisse d'épargne CEPAC est une banque régionale qui fait partie du Groupe BPCE et affiche 2,7 milliards d'euros de capitaux propres. Avec un ratio de solvabilité proche de 18 %, un des meilleurs coefficients d'exploitation des banques françaises nous permettant de dégager 150 millions d'euros de résultat net annuel, c'est une des entités les plus performantes du groupe.
La CEPAC, outre six départements métropolitains, était déjà implantée sur trois départements d'outre-mer : La Réunion, la Guadeloupe et la Martinique.
Et loin d'être un poids ou un boulet, fruit de l'histoire des caisses d'épargne, l'outre-mer a, et notamment dans nos deux derniers projets d'entreprise, constitué un axe stratégique de développement avec des investissements importants tant humains que dans notre réseau physique d'agences, se traduisant par une progression de notre PNB (notre chiffre d'affaires) deux fois supérieure à celle de nos activités métropolitaines.
Mais nos parts de marché à l'outre-mer, environ 8 %, restaient très en deçà de nos positions en métropole qui oscillent entre 15 et 20 %.
Aussi, lorsque l'opportunité de racheter trois banques qui opéraient à l'outre-mer s'est présentée, nous l'avons saisie :
- nous avons racheté le 18 septembre dernier : la Banque des Antilles françaises, la Banque de Saint-Pierre-et-Miquelon et la Banque de La Réunion ;
- et nous avons également racheté un portefeuille de financements d'entreprises et de projets opérant ou implantés à l'outre-mer.
C'est un « gros chèque » que nous avons fait : près d'un milliard d'euros. Cela nous permet d'intervenir désormais sur tous les territoires d'outre-mer, notamment atlantiques, sur lesquels nous disposons d'implantations physiques :
- Guadeloupe et Martinique ;
- Saint-Martin et Saint-Barthélemy ;
- Guyane ;
- Saint-Pierre-et-Miquelon ;
et en sus nous sommes également implantés sur l'Île de La Réunion et à Mayotte.
Notre bilan est passé de 30 à 35 milliards d'euros.
Notre chiffre d'affaires va passer de 630 à 800 millions d'euros : l'outre-mer qui en représentait 10 à 12 % va en représenter près d'un tiers.
De 2 800 collaborateurs nous passons à 3 500 collaborateurs.
Parce que nous croyons à notre investissement.
Nous avons acheté des résultats futurs auxquels nous croyons. Nous avons acheté des synergies futures, et notamment des synergies futures de revenus auxquelles nous croyons. S'il n'y avait rien à financer et pas d'entreprises à y accompagner nous n'y serions pas allés.
Nous visons, à un horizon de 3-4 ans, des synergies de revenus de 10 % en mettant à votre service nos compétences et nos offres de services.
En matière bancaire, à la CEPAC, nous savons tout faire ou presque et tout proposer : du particulier à la grande entreprise, du professionnel à la collectivité locale, de l'association au financement de projets complexes (le stade vélodrome, des hôpitaux, des bateaux, des unités de production d'énergie renouvelable, la gestion des flux, un accompagnement à l'international, etc...).
Les clients des trois banques que nous avons achetées ne bénéficiaient pas de toutes nos offres produits. Les trois banques que nous avons rachetées ne disposaient pas des fonds propres suffisants - et en matière bancaire, les fonds propres c'est tout juste le droit et la capacité à pouvoir faire. Leur adossement était incontournable. Le fait de les adosser et de les absorber - nous avons fusionné le 1 er mai dernier - permet de proposer à leurs clients des services et une capacité d'intervention dont ils ne disposaient pas : des services et des capacités d'intervention au service des territoires, objet de cette conférence.
On pourrait craindre que l'âme régionale des trois banques rachetées, à l'histoire intimement liée à celles des territoires où elles opéraient, ne soit perdue. Certes, des décisions seront prises depuis Marseille, des processus seront pilotés depuis Marseille. Mais la relation de proximité reste locale, la décision d'engager reste locale et nous réfléchissons à la manière de capitaliser sur les marques existantes, qui sont souvent très fortes et sur lesquelles nous devrons nous appuyer.
Et paradoxalement, la fusion-absorption de la Banque des Antilles, de la Banque de Saint-Pierre-et-Miquelon et de la Banque de La Réunion va permettre à leurs clients de s'investir beaucoup plus qu'avant dans leur nouvelle banque et de renforcer les liens de leur banque avec leur territoire.
Nous sommes une entité mutualiste détenue par ses sociétaires regroupés en sociétés locales d'épargne régionales garantes de leur ancrage territorial. Les ex-clients des trois banques rachetées peuvent, depuis le 1 er mai, devenir clients sociétaires, devenir des clients actionnaires de leur banque. Nous disposions déjà de deux sociétés locales d'épargne pour la Guadeloupe et la Martinique. Nous venons d'en créer une pour Saint-Pierre-et-Miquelon.
On parle de foi en ces territoires dans lesquels nous avons investi, de synergies à attendre, d'implication accrue des clients dans leur banque en sus de l'implication de leur banque, la CEPAC, dans leur territoire.
Mais on n'a pas parlé de l'avantage extraordinaire d'opérer à la fois en métropole et en outre-mer : à l'ère du digital et de la banque en ligne, nous disposons d'équipes qui sont en mesure de répondre à nos clients sur une plage élargie de 6 heures du matin à 23 heures.
Et, au final, ce qui compte d'abord et avant tout ce sont bien nos clients. Ainsi le décalage horaire, au lieu d'être un handicap, est au contraire une richesse pour les servir et les satisfaire.
Sébastien L'AOT, Directeur du réseau de l'Association pour le droit à l'initiative économique (ADIE)
L'ADIE est une association de loi 1901 reconnue d'utilité publique, créée en 1989 par Maria Nowak et présidée aujourd'hui par Catherine Barbaroux. L'ADIE a été créée sur le modèle de la Grameen Bank, institution pionnière du microcrédit au Bengladesh. Elle est aujourd'hui présente partout en France, y compris dans les outre-mer. Aux Antilles et en Guyane, l'ADIE dispose ainsi de six agences et s'appuie sur une équipe d'une vingtaine de salariés, complétée par une quarantaine de bénévoles.
L'ADIE développe aujourd'hui trois missions. La première est de proposer des solutions de microcrédit à des personnes exclues du système bancaire et pour lesquelles le microcrédit constitue un moyen d'accès à l'emploi (y compris salarié). La deuxième est d'accompagner ces personnes dans la pérennisation de leur activité. La troisième vise à améliorer le cadre règlementaire et légal du microcrédit et du travail indépendant.
L'ADIE propose ainsi une offre de microcrédit professionnel, d'un montant maximum de 10 000 euros, pour les personnes souhaitant créer ou développer leur microentreprise, avec un besoin de financement couvert par le microcrédit - les prêts de l'ADIE n'ayant pas vocation à intervenir en complément d'un prêt bancaire.
Source : ADIE
L'ADIE propose également une offre de microcrédit pour l'emploi salarié (MCES), d'un montant maximum de 5 000 euros. Dans ce cadre, l'ADIE finance essentiellement la mobilité (acquisition ou entretien d'un véhicule, permis de conduire, etc.).
Source : ADIE
L'activité de l'ADIE dans les outre-mer se développe, avec près de 1 500 personnes financées aux Antilles et en Guyane en 2015. Les demandes d'accompagnement progressent également fortement. Nous faisons ainsi notre possible pour qu'une offre d'accompagnement riche réponde au nombre croissant de personnes financées.
Nombre de clients accompagnés
Source : ADIE
Nombre de clients financés
Source : ADIE
Proportion du microcrédit professionnel
Source : ADIE
Le risque de crédit porté par l'ADIE apparaît mieux maîtrisé dans les outre-mer qu'en métropole. Nos clients ultramarins mettent ainsi un point d'honneur à rembourser leur microcrédit, pour se construire un historique de crédit leur permettant, à terme, d'accéder au financement bancaire.
Niveau de risque en outre-mer et en métropole
Source : ADIE
Dans le domaine associatif, l'ADIE n'est pas seule à intervenir dans le champ de la création d'entreprise. Elle se caractérise toutefois par un modèle économique original. Si l'ADIE fait appel au financement public, celui-ci demeure minoritaire dans son fonctionnement. Les microcrédits accordés sont ainsi refinancés par le biais d'emprunts auprès d'établissements bancaires ou financiers, parmi lesquels l'AFD, la BRED, le Crédit agricole, BNP Paribas, la Société générale, etc. Par ailleurs, le fonctionnement de l'ADIE est financé par les collectivités locales, mais aussi par des financeurs privés (dont le groupe Suez). Ceci illustre la volonté de l'ADIE de diversifier ses modes de financement, pour développer un modèle économique durable.
Part du refinancement en 2014 et 2015
Source : ADIE
L'ADIE se distingue également par son impact en matière d'emploi. Par définition, les clients de l'ADIE sont majoritairement des personnes en situation de forte exclusion. Plus des deux tiers ont un niveau de formation inférieur au niveau du lycée ; 40 % sont allocataires du RSA. Or, 80 % des personnes financées par l'ADIE s'insèrent professionnellement de façon durable, en pérennisant leur activité ou en accédant à un emploi salarié.
Scores d'exclusion sociale et financière
Source : ADIE
* 2 Rapport d'information de la mission commune sur la situation des départements d'outre-mer n° 519 (2008-2009).