X. ROYAUME-UNI

Q1/- Les monnaies virtuelles ont-elles fait l'objet de débats, de travaux (rapports, auditions publiques, etc.), de prises de position publiques ou politiques ? Avez-vous identifié des réflexions en cours sur le sujet ? Des think-tanks sont-ils actifs sur le sujet ?

Les monnaies virtuelles, notamment les bitcoins , ont fait l'objet d'une couverture importante dans les médias, mais il n'y a pas eu pour le moment de rapport ou d'auditions parlementaires sur le sujet.

Les prises de position des autorités sont pour l'instant rares :

- HMRC a pris une décision sur le traitement fiscal des monnaies virtuelles (cf. note jointe) ;

- La Banque d'Angleterre considère que « les bitcoins ne devraient pas avoir un impact significatif à court terme sur [ses] objectifs en matière de politique monétaire et de maintien de la stabilité financière, compte tenu de la faible importance des transactions à ce stade ». Elle indique qu'elle continue à « suivre attentivement l'évolution de l'activité liée aux monnaies virtuelles et [sa] position à l'avenir dépendra de ses développements » ;

- Chris Salmon, à l'époque Chief Cashier de la Banque d'Angleterre, a souligné lors d'un colloque en novembre 2013 le caractère innovant des bitcoins , mais estimé qu'ils pourraient être remplacés par une monnaie virtuelle technologiquement plus avancée. Il a en outre estimé que la probabilité qu'une banque centrale émette des monnaies virtuelles dans la décennie à venir était à son avis proche de zéro (« exceedingly unlikely »).

Q2/- Les autorités publiques se sont-elles montrées plutôt favorables ou circonspectes sur les monnaies virtuelles, notamment le bitcoin ?

Il est difficile de trancher compte tenu de la rareté des prises de position publiques des autorités.

HMRC (direction des impôts) a pris rapidement une position sur le traitement fiscal des monnaies virtuelles, dans un sens qui apparaît favorable à leur usage (exonération de TVA pour l'échange de monnaies virtuelles contre des devises, en particulier) ;

Côté Banque d'Angleterre, l'attitude à notre sens semble plutôt être celle d'une neutralité bienveillante, comme le montrent les déclarations de Chris Salmon.

Q3/- Certains acteurs des monnaies virtuelles mènent-ils un travail de lobbying auprès des institutions publiques (administrations, Parlement, régulateurs) ? Si oui, quels sont les arguments mis en avant ? Quelles sont leurs demandes ?

Oui. Les acteurs de l'industrie souhaiteraient être régulés, afin d'obtenir le « sceau » du régulateur qui permettrait de convaincre le grand public de leur solidité et de leur sérieux.

Q4/- Les monnaies virtuelles font-elles l'objet d'une définition légale ? Des évolutions légales ou règlementaires sont-elles envisagées ? Si oui, préciser les principales dispositions.

Non, il n'y a pas de définition légale à ce stade, hormis celle qui serait implicite dans la décision de HMRC (cf. note jointe).

La Prudential Regulation Authority pourrait avoir à prendre position si une entité affirmant recevoir des dépôts en bitcoins cherchait à obtenir une licence bancaire.

Q5/- Les régulateurs sont-ils intervenus pour encadrer l'utilisation des monnaies virtuelles ? Les plateformes dédiées à l'utilisation de ces monnaies sont-elles soumises à des obligations spécifiques ?

Non, les régulateurs ne sont pas intervenus (hormis HMRC) et aucune obligation supplémentaire spécifique n'est mise en place à ce stade (mai 2014).

Q6/- Les administrations fiscales ont-elles pris position sur la nature des monnaies virtuelles et, partant, sur les conséquences fiscales qui y sont attachées ?

Cf. note jointe pour la position prise le 3 mars 2014 par HRMC.

Q7/- Les autorités publiques ont-elles entrepris des actions d'information ou de prévention vis-à-vis des épargnants ou des consommateurs ?

Non, aucune pour le moment (mai 2014).

Q8/- Constate-t-on une progression des investissements (publics ou privés) en matière de monnaies virtuelles ?

Pour l'instant les investissements sont faibles, même si l'on constate le développement aux Etats-Unis (mais pas au Royaume-Uni pour l'instant) de plusieurs plateformes d' Exchange Traded Funds permettant d'investir en bitcoins (notamment Winklevoss Bitcoin ETF , qui a fait l'objet d'une demande d'agrément auprès de la SEC).

ANNEXE

NOTE

OBJET : règles fiscales applicables aux bitcoins au Royaume-Uni.

Les autorités britanniques ont publié le 3 mars 2014 56 ( * ) des commentaires concernant les règles applicables aux bitcoins en matière de TVA, d'impôt sur les sociétés, d'impôt sur le revenu et de plus-values. Elles indiquent par ailleurs qu'un certain nombre de commerçants, tels que les opérateurs du commerce électronique, les pubs ou encore les restaurants utiliseraient déjà les bitcoins comme moyens de paiement. Ces commentaires, notamment en ce qu'ils font référence à la notion de monnaies virtuelles (« cryptocurrencies ») n'ont pas vocation à s'appliquer en dehors du domaine de la fiscalité.

1- TVA

Comme le rappelle l'administration fiscale (HMRC), les règles de TVA étant régies au niveau européen, le traitement des opérations portant sur les bitcoins adopté par le Royaume-Uni doit être cohérent avec celui qui pourrait éventuellement être mis en oeuvre au niveau de l'Union européenne.

Dans cette attente, la position exprimée par ces commentaires n'a qu'un caractère provisoire :

- l'activité de création de bitcoins bitcoin mining ») est placée hors du champ de la taxe, dès lors que cette activité ne constitue pas une activité économique au sens de la TVA ;

- en revanche, les prestations de services qui seraient rendues dans le cadre d'autres activités par les créateurs de bitcoins miners »), telles que pour la fourniture de services dans le cadre de la vérification de transactions spécifiques pour lesquels des frais sont facturés, seront exonérés de la TVA en vertu de l'Article 135-1(d) de la directive TVA 2006/112/CE dès lors que ces opérations doivent être considérées comme répondant à la définition des opérations qui sont visées par ces dispositions à savoir, « les opérations, y compris la négociation, concernant les dépôts de fonds, comptes courants, paiements, virements, créances, chèques et autres effets de commerce » ;

- lorsque les bitcoins sont échangés contre des livres sterling ou d'autres monnaies étrangères (comme les euros ou les dollars), aucune TVA n'est due sur la valeur des bitcoins eux-mêmes ;

- les frais facturés en sus de la valeur des bitcoins en vue de négocier ou d'effectuer toute transaction concernant les bitcoins sont exonérés de la TVA en application des dispositions de l'article 135-1 (d) de la directive précitée.

En revanche, dans tous les cas, la TVA est due de façon normale sur les biens ou les services qui sont vendus en échange de bitcoins ou de toute autre monnaie virtuelle identique (« cryptocurrency »). La valeur du bien ou du service sur lequel la TVA est due correspond à la contrevaleur des bitcoins exprimée en livres au moment où la transaction a lieu.

2- Impôts directs

Comme pour toute autre activité professionnelle, les produits et les charges constatés à raison d'activités qui seraient en lien avec les bitcoins ou d'autres monnaies virtuelles doivent être soumis aux règles applicables en matière d'impôt sur les sociétés, d'impôt sur le revenu et de plus-values.

La question de savoir si un profit imposable ou si une perte déductible doivent être constatés dépend des circonstances de chaque espèce.

Les autorités britanniques notent toutefois qu'une opération, en raison de son caractère hautement hypothétique (« speculative »), pourrait ne pas être taxable (ou engendrés des pertes déductibles), à l'instar des gains sur les jeux et paris qui ne sont pas taxables et dont les pertes ne peuvent venir en déduction d'autres profits imposables 57 ( * ) .

Pour les entreprises qui acceptent d'être payés en bitcoins , il n'y a aucune modification engendrée dans la façon de déterminer leurs profits imposables.

La taxation des opérations portant sur les bitcoins résulte à ce stade de l'application des règles de droit commun en matière d'impôts directs, tant pour les entreprises que pour les particuliers.

Impôts sur les sociétés

Les profits et les pertes constatés sur des opérations de change entre monnaies sont habituellement à prendre en compte pour la détermination du résultat imposable.

Ce principe n'est pas remis en cause en cas d'opération de change entre bitcoins et une autre monnaie (celle notamment dans laquelle la comptabilité de l'entreprise est retracée).

Les règles de droit commun applicables en matière de monnaies étrangères 58 ( * ) et de relations de prêt 59 ( * ) sont par conséquent applicables en cas d'utilisation de monnaies virtuelles tels que les bitcoins .

Impôt sur le revenu

Les profits et les pertes d'une entreprise engendrés à raison de transactions portant sur les bitcoins doivent être retracés en comptabilité et sont soumis aux règles de droit commun applicables en matière d'impôt sur le revenu.

Plus-values imposables ( capital gains tax ou « CGT » et impôt sur les sociétés)

Les autorités britanniques estiment que les règles actuelles en matière de plus-values, tant pour les particuliers que pour les professionnels (« capital gains tax » pour les personnes physiques ou « chargeable gains » pour les entreprises soumises à l'impôt sur les sociétés) permettent d'appréhender les gains réalisés sur les cessions de bitcoins .

Plus-values des professionnels

En principe, si un profit ou une perte à raison des transactions portant sur les bitcoins n'entraient pas dans la détermination du résultat courant de l'entreprise ou n'étaient pas dégagés dans le cadre d'une opération de prêts, ce profit ou cette perte auraient vocation soit à être soumis à l'impôt sur les sociétés en tant que plus-value ou moins-value 60 ( * ) , soit à être soumis à la « CGT » pour les entreprises individuelles (modalités identiques à celles applicables au particulier décrites ci-après, avec possibilité d'une taxation réduite à 10% notamment en cas de cession ou cessation d'activité 61 ( * ) .

Plus-values des particuliers

Rappel : l'imposition des plus-values des particuliers fait l'objet d'une imposition forfaitaire spécifique au taux de 28 % (ce taux est ramené à 18 % pour les personnes qui ne sont pas imposées à un taux supérieur au taux de base 62 ( * ) de l'impôt sur le revenu).

Les gains nets ne sont soumis effectivement à l'impôt que pour la fraction de la plus-value qui excède 10 900 £ (5 450 £ pour les trustees qui ne sont pas en charge de personnes handicapées).

Par ailleurs, les cessions de biens personnels, en principe soumis à la « CGT », ne sont pas imposables lorsque leur valeur unitaire est inférieure à 6 000 £ 63 ( * ) .


* 56 http://www.hmrc.gov.uk/briefs/vat/brief0914.htm

* 57 Selon HMRC, en principe, les gains sur les paris et les jeux ne sont pas imposables au niveau du joueur, sauf si ce dernier est un joueur professionnel qui exerce de façon habituelle cette activité dans un but commercial, en vue d'en retirer des profits. Il en va de même des personnes (bookmakers) qui sont impliqués dans l'organisation des jeux et des paris.

* 58 http://www.hmrc.gov.uk/manuals/cfmmanual/CFM61030.htm

* 59 http://www.hmrc.gov.uk/manuals/cfmmanual/cfm30170.htm

* 60 http://www.hmrc.gov.uk/ct/managing/company-tax-return/returns/chargeable-gain.htm#3

* 61 http://www.hmrc.gov.uk/helpsheets/hs275.pdf

* 62 Pour un exemple de calcul : http://www.hmrc.gov.uk/rates/cgt.htm.

* 63 http://www.hmrc.gov.uk/cgt/possessions/basics.htm.

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