COLLOQUE
FEMMES
RÉSISTANTES
Salle Clemenceau
Programme du colloque |
Ouverture du colloque : M. Jean-Pierre Bel, Président du Sénat |
Mes chers collègues,
Mesdames et Messieurs,
Je voudrais vous dire à nouveau l'émotion qui est la nôtre - et notre fierté - d'accueillir au Sénat cette première célébration de la Journée nationale de la Résistance, après la cérémonie d'hommage aux sénatrices résistantes à laquelle nous venons de procéder, et qui, je le sais, a touché beaucoup d'entre nous.
Pour ceux qui n'ont pas assisté à cette cérémonie, il me faut peut-être souligner que nous devons ce colloque à deux initiatives sénatoriales particulièrement bienvenues.
Tout d'abord, il y a bien sûr à l'origine de ce colloque une loi, la « loi Mirassou », du nom de notre collègue Jean-Jacques Mirassou, ici présent au premier rang et que je salue, qui l'a proposée à notre assemblée en 2013. Une loi en vertu de laquelle on commémorera, chaque 27 mai à partir d'aujourd'hui, la réunion historique du 27 mai 1943. Ce jour-là, vous le savez, Jean Moulin a pour la première fois réuni, tout près d'ici rue du Four, le Conseil national de la Résistance. Cet acte fondateur a tant fait pour la libération de notre territoire !
Un petit mot personnel : ceux qui me connaissent savent combien j'attache d'importance à la Résistance, à son histoire, à son souvenir, à ses combattants et au modèle que ceux-ci représentent pour chacun d'entre nous.
Lorsque j'ai été élu Président du Sénat, il y a bientôt trois ans, le 1 er octobre 2011, mes premiers mots ont été pour la Résistance, pour mon père et ses frères et soeur, officiers des Forces françaises de l'Intérieur qui, dès le début de l'Occupation, se sont trouvés en première ligne des combats de la Résistance. Vous comprendrez donc que pour moi, les Résistants ont toujours été des références absolues. Ces femmes et ces hommes se sont engagés au péril de leur vie, et l'ont souvent chèrement payé. Ils se sont dressés contre le nazisme au nom de nos valeurs, à commencer bien sûr par une valeur essentielle : la défense des libertés. Ils ont combattu avec héroïsme l'ennemi qui occupait notre pays et lui imposait sa terrible conception d'une société fondée sur le racisme, l'antisémitisme, la haine, l'oppression et la répression de tous ceux qui ne répondaient pas au modèle insupportable que voulait nous imposer le III ème Reich.
Leur magnifique combat, porté par la conviction de vaincre la « peste brune », ne se limitait pas à un refus. Il s'inscrivait dans le projet de construire une société plus harmonieuse, où le progrès et la liberté iraient de pair avec plus d'égalité, avec davantage de solidarité. Cet engagement au service d'un idéal a débouché sur l'élaboration du programme du Conseil national de la Résistance, qui fut à l'origine d'importantes réformes économiques et sociales mises en oeuvre à parti de la Libération. C'est peu dire que de souligner combien ce programme a durablement marqué de son empreinte les orientations, les avancées de la France d'après-guerre.
Ce colloque, nous le devons aussi - et surtout - à une autre initiative, celle de la délégation aux droits des femmes, qui par la voix de sa présidente Brigitte Gonthier-Maurin a souhaité consacrer aux femmes résistantes ce premier 27 mai depuis l'adoption de la « loi Mirassou ». Je ne pouvais que soutenir avec enthousiasme ce projet. Comment en effet ne pas éprouver une admiration particulière pour les résistantes, pour ces femmes anonymes dont l'engagement a souvent commencé par de petits actes du quotidien : loger, nourrir un fugitif, parfois même tout simplement lui fournir des vêtements ?
Il ne faut pourtant pas s'y tromper, ces femmes ont été des « combattants, au sens plus entier du terme » , comme le soulignait à l'occasion d'un colloque à la Sorbonne, en novembre 1975 1 ( * ) , Léo Hamon, résistant éminent lui-même et grande figure du Sénat de la IV ème République.
Je voudrais évoquer le souvenir de Marthe Simard, qui fut la première parlementaire, et qui a largement contribué au droit de vote des femmes dans cette période.
Il n'est pas question, bien entendu, de minimiser le rôle des hommes dans la Résistance ! Il s'agit simplement de rendre justice à ces femmes, à ces « combattantes de l'ombre » , comme les a désignées Margaret Collins Weitz dans l'ouvrage qu'elle leur a consacré 2 ( * ) . Force est de constater que ces combattantes sont restées, pour une très large part, au seuil d'une histoire qui, il faut le reconnaître, s'écrit le plus souvent au masculin...
Des spécialistes reconnus - et parmi eux des membres de notre assemblée que je remercie de nous faire partager leur savoir - nous exposeront tout à l'heure la variété et l'ampleur des missions accomplies par les femmes dans la Résistance et nous présenteront des portraits dont nous tirerons tous, j'en suis sûr, un grand enseignement.
Des témoins, qui ont fait l'effort de nous rejoindre, et je veux leur dire à quel point nous leur en sommes reconnaissants, nous raconteront ce qu'a été leur combat, y compris dans l'expérience terrible de la détention et de la déportation.
Mais la démarche que nous propose la délégation aux droits des femmes va plus loin. Elle vise à montrer que, pour les femmes comme pour les hommes, quoique - je le répète - de manière moins connue, la Résistance ne s'est pas arrêtée avec la guerre. Car beaucoup de femmes - nous le verrons au cours de nos échanges - ont poursuivi sur d'autres fronts un engagement entamé contre l'occupant nazi, comme l'exprime si bien le titre de ce merveilleux livre de Marie-José Chombart de Lauwe, que je salue à nouveau : Toute une vie de Résistance 3 ( * ) .
Quel meilleur exemple donner aux citoyens, et en particulier aux jeunes d'aujourd'hui ?
Je vous remercie. Je donne sans plus tarder la parole à Brigitte Gonthier-Maurin, présidente de la délégation aux droits des femmes.
* 1 Actes du colloque Les Femmes dans la Résistance tenu les 22 et 23 novembre 1975 à Paris (Grand Amphithéâtre de la Sorbonne) à l'initiative de l'Union des Femmes françaises, Ed. du Rocher, p. 300.
* 2 Collins Weitz, Margaret, Les combattantes de l'ombre : histoire des femmes dans la Résistance, 1940-1945 , Paris, Albin Michel, 2007, 416 p.
* 3 Chombart de Lauwe, Marie-José, Toute une vie de Résistance , Paris, FNDIRP, Pop Com, 2007, 195 p.