Rapport d'information n° 695 (2013-2014) de MM. Jacques-Bernard MAGNER et Jacques LEGENDRE , fait au nom de la commission pour le contrôle de l'application des lois, déposé le 8 juillet 2014

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N° 695

SÉNAT

SESSION EXTRAORDINAIRE DE 2013-2014

Enregistré à la Présidence du Sénat le 8 juillet 2014

RAPPORT D'INFORMATION

FAIT

au nom de la commission sénatoriale pour le contrôle de l'application des lois (1) sur la mise en oeuvre de la loi n° 2009-1312 du 28 octobre 2009 tendant à garantir la parité de financement entre les écoles élémentaires publiques et privées sous contrat d' association lorsqu'elles accueillent des élèves scolarisés hors de leur commune de résidence, dite « loi Carle », ,

Par MM. Jacques-Bernard MAGNER et Jacques LEGENDRE,

Sénateurs.

(1) Cette commission est composée de : M. David Assouline, Président ; M. Philippe Bas, Mmes Claire-Lise Campion, Isabelle Debré, M. Claude Dilain, Mme Muguette Dini, MM. Ambroise Dupont, Louis Nègre, Mme Isabelle Pasquet, Vice-Présidents ; Mme Corinne Bouchoux, MM. Luc Carvounas et Yann Gaillard, secrétaires ; M. Marcel-Pierre Cléach, Mme Cécile Cukierman, M. Philippe Darniche, Mmes Catherine Deroche, Marie-Hélène Des Esgaulx, MM. Félix Desplan, Yves Détraigne, Mmes Anne-Marie Escoffier, Frédérique Espagnac, MM. Pierre Frogier, Patrice Gélard, Mme Dominique Gillot, MM. Pierre Hérisson, Jean-Jacques Hyest, Claude Jeannerot, Philippe Kaltenbach, Marc Laménie, Jacques Legendre, Jean-Claude Lenoir, Jacques-Bernard Magner, Jacques Mézard, Jean-Pierre Michel, Jean-Claude Peyronnet, Gérard Roche, Yves Rome et M. René Vandierendonck.

SYNTHÈSE DES PROPOSITIONS DES RAPPORTEURS

Tout en reconnaissant que depuis l'adoption de la loi Carle, les relations entre communes d'une part, entre communes et établissements privés d'autre part, se sont pacifiées, vos rapporteurs souhaitent qu'il soit donné réponse aux maires sur certains points méritant clarification :

- l'appréciation de la capacité d'accueil bénéficierait de la définition transparente par les autorités académiques de seuils d'ouverture et de fermeture des classes ;

- les effets d'un déménagement en cours d'année devraient faire l'objet d'une seule appréciation commune des ministères de l'intérieur et de l'éducation nationale, dans le respect de la jurisprudence administrative ;

- les modalités de prise en compte des fratries mériteraient une explicitation sur le modèle des dispositions règlementaires concernant les écoles publiques ;

- l'information en amont du maire de la commune de résidence devrait être améliorée ;

- des outils statistiques de suivi des flux financiers en jeu pourraient être mis en place, après évaluation du coût d'une telle mesure.

AVANT-PROPOS

Mesdames, Messieurs,

La participation des communes de résidence à la scolarisation d'enfants dans une école privée sous contrat d'association située sur le territoire d'une autre commune peut sembler poser un problème mineur en comparaison des grands défis éducatifs que doit relever notre pays afin de demeurer fidèle à la promesse républicaine d'égalité des chances.

Pourtant, cette question a suscité beaucoup de tensions dans les départements et beaucoup de passion dans les débats parlementaires. La raison en est qu'elle se situe à la conjonction de deux sujets qui la dépassent et qui engagent certaines orientations fondamentales de notre système politique :

- d'une part, la protection des libertés publiques et parmi celles-ci de la liberté d'enseignement et du libre choix de l'école, conformément à la jurisprudence du Conseil Constitutionnel ;

- d'autre part, la poursuite de la décentralisation et l'implication croissante des collectivités territoriales dans la politique d'éducation, comme en témoigne actuellement la réforme des rythmes scolaires.

En éludant les confrontations idéologiques dont est souvent nourri le débat sur le financement de l'école privée et sur son traitement à parité avec l'école publique, vos rapporteurs se sont attachés à dresser un bilan objectif et circonstancié de l'état d'application de la loi n° 2009-1312 du 28 octobre 2009, plus connue du nom de son auteur comme la « loi Carle ».

Pour comprendre le dispositif retenu, il était utile de remonter le fil de l'histoire et de rappeler que son adoption avait pour objectif de régler les difficultés épineuses léguées par l'article 89 de la loi du 13 août 2004 sur les libertés et les responsabilités locales.

Vos rapporteurs se sont ensuite livrés à une exégèse de la loi. Puis, ils ont examiné les textes réglementaires qui y prennent leur source, ainsi que l'évolution de la jurisprudence administrative, sans masquer les divergences d'interprétation qui pouvaient surgir et les ambiguïtés qui pouvaient subsister.

Enfin, ils n'ont pas manqué d'interroger les élus, les représentants de l'enseignement catholique et les ministères de l'intérieur et de l'éducation nationale afin d'évaluer les effets concrets de la loi sur les relations entre les communes et les établissements privés et sur les équilibres entre l'enseignement privé et l'enseignement public. Leur rapport dresse un état des lieux impartial, transpartisan et dépassionné.

UN DISPOSITIF LÉGISLATIF TRÈS CIBLÉ MAIS COMPLEXE

I. UN DISPOSITIF LÉGISLATIF TRÈS CIBLÉ MAIS COMPLEXE, QUI VISAIT À RÉDUIRE L'INSÉCURITÉ JURIDIQUE POUR LES COMMUNES ET LES ÉTABLISSEMENTS PRIVÉS

A. UN CONTEXTE D'ADOPTION PROPICE AU CONFLIT ET AU CONTENTIEUX

1. Une prise en charge des élèves non-résidents dans les écoles privées par voie d'accord entre les communes jusqu'en 2004

L'article 4 de la loi n° 59-1557 du 31 décembre 1959, dite « loi Debré », dont est issu l'article L. 442-5 du code de l'éducation, a imposé l'obligation générale d'une prise en charge des dépenses de fonctionnement des classes sous contrat dans les mêmes conditions que celles des classes correspondantes de l'enseignement public.

Par la suite, la loi de décentralisation du 22 juillet 1983 1 ( * ) a introduit un dispositif, valable pour les écoles publiques, pour répartir entre communes la prise en charge des élèves non-résidents. Aucune disposition similaire explicite n'a été prévue pour l'école privée.

En effet, en 1983 comme aujourd'hui, sous le régime de la loi Debré, le contrat d'association ne lie que l'État et l'établissement privé, sans que la commune intervienne. L'article 27-2 de la loi Chevènement du 25 janvier 1985 2 ( * ) avait tenté de réintroduire le maire dans les relations entre l'enseignement privé et la puissance publique, en soumettant la conclusion du contrat d'association à l'accord de la commune siège de l'école primaire, ainsi qu'à l'avis consultatif des maires des communes où résident au moins 10 % des élèves des classes concernées.

Cependant, le Conseil constitutionnel a censuré cette disposition dans sa décision n° 84-185 DC, en considérant que « si le principe de libre administration des collectivités territoriales a valeur constitutionnelle, il ne saurait conduire à ce que les conditions essentielles d'application d'une loi organisant l'exercice d'une liberté publique dépendent de décisions des collectivités territoriales et, ainsi, puissent ne pas être les mêmes sur l'ensemble du territoire. » En d'autres termes, le législateur ne pouvait rompre l'égalité devant l'exercice de la liberté de l'enseignement, même en s'appuyant sur la libre administration reconnue aux communes.

Toutefois, le législateur avait prévu dans la loi de 1985 précitée le cas des élèves non-résidents inscrits dans une école privée via l'alinéa premier de l'article L. 442-9 du code de l'éducation, aujourd'hui abrogé. Cette disposition écartait une transposition intégrale du régime valable entre écoles publiques mais renvoyait le règlement de la répartition des dépenses de fonctionnement entraînées par la scolarisation d'élèves non-résidents dans une école privée sous contrat d'association à un accord entre les communes d'accueil et de résidence. C'étaient ces éventuels accords qui étaient chargés d'appliquer concrètement le principe de parité prévu très généralement par la loi Debré. Aucune procédure de règlement des différends n'était prévue en cas de désaccord entre les communes. La jurisprudence administrative en avait déduit que ne pesait sur la commune de résidence aucune obligation de financement des élèves inscrits dans une école privée d'une autre commune (Conseil d'État, assemblée, 25 octobre 1991, Syndicat national de l'enseignement chrétien CFTC ).

2. Un régime juridique instable, ambigu et contesté de 2004 à 2009
a) L'article 89 de la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et aux responsabilités locales

L'article 89 de la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et aux responsabilités locales, issu d'un amendement du sénateur Michel Charasse, a provoqué une rupture du régime conventionnel amiable antérieur en transposant les règles valables pour les élèves non-résidents inscrits dans une école publique au cas des classes élémentaires privées sous contrat d'association.

Il visait aussi à s'opposer à la jurisprudence administrative qui reconnaissait un caractère purement facultatif à la participation de la commune de résidence. En particulier, à défaut d'accord entre les communes intéressées sur la répartition des dépenses, il a confié au préfet le soin de fixer la contribution de chacune des communes, de résidence et d'accueil, après avis du conseil départemental de l'éducation nationale (CDEN).

Cependant, cet article ne reprenait pas explicitement la définition des dépenses obligatoires et se contentait de poser une obligation générale de financement par la commune de résidence de la scolarisation des élèves inscrits dans une école élémentaire privée d'une autre commune.

b) Des ambiguïtés laissant ouvertes des interprétations maximalistes de l'« amendement Charasse »

Dans une interprétation maximaliste, l'article 89 de la loi de 2004 précitée pouvait signifier que le forfait communal était dû par les communes de résidence pour tous les élèves scolarisés dans une école privée sous contrat d'association située dans une autre commune.

Aucune restriction, ni à l'absence de capacités d'accueil dans des écoles publiques de la commune de résidence, ni à la démonstration apportée par les parents d'une contrainte familiale n'était requise, contrairement à ce qu'imposait l'article L. 212-8 du code de l'éducation dans le cas des élèves non-résidents dans les écoles publiques.

La difficulté de cette interprétation maximaliste, rendue possible par la lettre du texte de l'article 89 de la loi du 13 août 2004, résidait dans ce qu'elle était plus favorable à la scolarisation des élèves non-résidents dans des écoles privées que dans des écoles publiques. Or, cette disparité, injustifiée sur le fond, était contraire à la lettre de la loi Debré et au principe de parité de financement inscrite au pénultième alinéa de l'article L. 442-5 du code de l'éducation. Des divergences d'interprétation sur le sens, la portée et la cohérence du régime juridique du financement des élèves non-résidents dans les écoles privées sont donc apparues très rapidement après l'adoption de la loi de 2004 précitée, qui ne prévoyait pas de décret d'application en cette matière et paraissait donc directement applicable.

L'intention du législateur n'était pas en 2004 suffisamment claire, pour que l'on puisse trancher en faveur de l'interprétation maximaliste de l'« amendement Charasse » en appliquant le principe lex posterior derogat priori . Cependant, il n'était pas non plus nécessairement justifié de choisir la solution conciliatrice, subordonnant l'application de l' « amendement Charasse » au respect du principe de parité de financement entre l'enseignement public et l'enseignement privé, car celui-ci revêt un caractère seulement législatif et non constitutionnel. Cette possible contradiction et cette ambiguïté certaine des dispositions législatives ont noué un dilemme sérieux pour l'administration, pour les communes et pour les établissements privés.

c) Des mesures d'application tentant de rétablir la parité de financement comme base de compromis et débouchant sur une initiative parlementaire

Quelques mois après le vote de la loi sur les libertés et les responsabilités locales, le législateur a été amené à rétablir l'équilibre entre les élèves non-résidents scolarisés dans le public et dans le privé, en agissant non pas sur le champ d'extension des dispositifs mais sur le montant de la participation financière de la commune de résidence. L'article 89 de la loi du 23 avril 2005 pour l'avenir de l'école a ainsi imposé un plafond de prise en charge par la commune de résidence : le montant de la contribution ne peut dépasser celui qu'il aurait été si l'enfant avait été scolarisé dans une école publique de la commune d'accueil.

Toutefois, n'étaient toujours pas restreints expressément les cas où la participation financière de la commune de résidence revêtait un caractère obligatoire.

L'Association des maires de France (AMF) s'était fortement opposée, comme l'Association des maires ruraux de France (AMRF), à la participation systématique de la commune d'accueil déduite de l'article 89 de la loi du 13 août 2004 précitée. Un accord a été trouvé en 2006 entre l'AMF, le ministère de l'intérieur, le ministère de l'éducation nationale et le secrétariat général de l'enseignement catholique (SGEC). Un relevé de conclusions du 16 mai 2006 a été diffusé aux préfets : il proposait comme solution de compromis de transposer au cas des élèves non-résidents dans une école privée l'intégralité des conditions posées dans le cas des écoles publiques.

Cette solution de compromis pouvait paraître fragile. Même s'ils étaient peu nombreux, les recours de plein contentieux initiés par des organismes de gestion de l'enseignement catholique (OGEC) pour obtenir le paiement d'un forfait maximal au titre des élèves non-résidents n'en tenaient pas toujours compte. Certains tribunaux administratifs saisis au contentieux ont pu estimer que l'obligation de financement était générale et excluait les cas stricts d'obligation de financement par la commune de résidence délimités pour les élèves non-résidents des écoles publiques. La jurisprudence administrative n'était pas stabilisée mais des décisions ponctuelles pointaient le risque d'une prise en charge plus favorable, en extension si ce n'est en montant, des élèves non-résidents inscrits dans une école privée plutôt que dans une école publique.

En exemple de cette tendance maximaliste, on peut citer un arrêt du tribunal administratif de Montpellier du 21 décembre 2006, Préfet des Pyrénées-orientales , qui a confirmé que l'obligation de financement pesant sur la commune de résidence pour des élèves scolarisées dans une école élémentaire privée d'une autre commune demeurait contraignante, même en cas de places vacantes dans l'école publique de la commune de résidence.

Un arrêt du tribunal administratif de Dijon de 28 février 2008, Préfète de Saône-et-Loire c/Commune de Sémur-en-Brionnais a également confirmé l'asymétrie entre les élèves non-résidents scolarisés dans le public et le privé sous contrat d'association. Cet arrêt reprenait la jurisprudence constitutionnelle en matière de libre choix de l'école, mais il tendait aussi à adopter une lecture maximaliste de l'article 89 de la loi du 13 août 2004. En l'absence de disposition législative, il ne saurait en particulier être exigé des parents d'élèves d'obtenir au préalable une autorisation du maire de la commune de résidence. Autrement dit, la commune de résidence ne pouvait s'appuyer sur l'absence d'autorisation préalable à l'inscription pour refuser de régler les frais de fonctionnement qui lui étaient présentés par la commune d'accueil. En outre, la participation financière des communes de résidence à la scolarisation d'un enfant dans une école privée sous contrat d'association d'une autre commune était une obligation générale, sans que le législateur ait prévu de cas d'exonération.

Ces solutions prétoriennes ne coïncidaient pas avec l'interprétation conciliante que les ministres de l'éducation nationale et de l'intérieur privilégiaient dans les circulaires adressées à leurs services et dans les réponses aux questions des parlementaires.

Sans se prononcer sur le fond, le Conseil d'État avait annulé pour incompétence des signataires une première circulaire interministérielle d'application n° 2005-106 du 2 décembre 2005 (CE 4 juin 2007, Ligue de l'enseignement et Commune de Clermont-Ferrand ). Une nouvelle circulaire (n° 2007-142 du 27 août 2007) a repris le même contenu, moyennant une modification de la liste des dépenses à prendre en compte pour le calcul de la contribution financière. Ont été retirées de la liste les dépenses extrascolaires, de contrôle technique des bâtiments et celles relatives aux agents territoriaux spécialisés des écoles maternelles (ATSEM).

Saisi d'un nouveau recours en annulation, le Conseil d'État a finalement validé tardivement la circulaire et l'interprétation favorable à l'application du principe de parité de financement entre le public et le privé, sans privilégier un mode d'enseignement sur un autre (CE 2 juin 2010, Fédération de l'éducation UNSA ). Cette décision n'est cependant intervenue qu'après l'adoption de la proposition de loi déposée par notre collègue Jean-Claude Carle et votée en première lecture le 10 décembre 2008 au Sénat.

Les maires demeuraient donc, jusqu'à fin 2009, dans une certaine incertitude juridique sur la nature et la portée de leurs obligations. En l'espèce, en opérant une remontée du dispositif au sein de la hiérarchie des normes, la loi n° 2009-1312 du 28 octobre 2009 visait essentiellement à consolider le compromis atteint en 2006 et à accroître la sécurité juridique pour toutes les parties. Elle a consacré a posteriori la jurisprudence du Conseil d'État.

B. LE PRINCIPE DE PARITÉ DE FINANCEMENT ENTRE L'ENSEIGNEMENT PUBLIC ET L'ENSEIGNEMENT PRIVÉ COMME FONDEMENT DE LA LOI

1. Les obligations de financement des écoles élémentaires privées pesant sur la commune de résidence

La loi n° 2009-1312 du 28 octobre 2009 tendant à garantir la parité de financement entre les écoles élémentaires publiques et privées sous contrat d'association lorsqu'elles accueillent des élèves scolarisés hors de leur commune de résidence, ci-après désignée « loi Carle », comprend trois articles. Le coeur du dispositif est inséré dans l'article premier, tandis que l'article 2 prévoit une voie de règlement des litiges par le préfet et que l'article 3 abroge les dispositions préexistantes sur le même sujet, à savoir le premier alinéa de l'article L. 442-9 du code de l'éducation précité et l'article 89 de la loi du 13 août 2004, précédemment évoqués.

Le nouvel article L. 442-5-1 que l'article premier de la loi Carle a inséré dans le code de l'éducation institue un régime juridique propre au financement de la scolarisation des élèves non-résidents dans des écoles privées, distinct mais analogue à celui valable pour l'enseignement public.

Il convient de délimiter précisément son champ d'application :

- ne sont concernées que les classes privées faisant l'objet d'un contrat d'association avec l'État, à l'exclusion des classes sous contrat simple, envers lesquelles les communes n'ont aucune obligation financière, conformément à l'article L. 442-12 du code de l'éducation ;

- ne sont concernées que les classes élémentaires, à l'exclusion des classes maternelles, qui n'appartiennent pas à la scolarité obligatoire et n'ouvrent aucune obligation de financement pour les communes, comme l'a établi la jurisprudence du Conseil d'État (CE assemblée, 31 mai 1985, Association d'éducation populaire de l'école Notre-Dame d'Arc-les-Gray ) ;

- ne sont concernés que les élèves non-résidents, c'est-à-dire le cas où les communes de scolarisation et de résidence sont distinctes, d'autres dispositions du code de l'éducation prévoyant la prise en charge de la scolarisation des élèves résidents sur une base paritaire entre l'enseignement public et l'enseignement privé.

Le principe central régissant le financement à la charge de la commune de résidence est que sa contribution ne constitue une dépense obligatoire que lorsqu'une contribution similaire aurait été due au titre de la scolarisation d'un élève dans une école publique de la commune d'accueil. Il s'agit donc d'un corollaire du principe de parité inscrit dans la loi Debré de 1959.

En conséquence, la contribution de la commune de résidence n'est obligatoire que dans quatre cas limitativement énumérés :

- l'absence de capacités d'accueil suffisantes dans une école publique de la commune de résidence ;

- les contraintes dues aux obligations professionnelles des parents, lorsque la commune de résidence n'assure pas directement ou indirectement la restauration et la garde des enfants ;

- l'inscription d'un frère ou d'une soeur dans un établissement scolaire de la commune d'accueil.

- l'existence de raisons médicales.

Il convient de remarquer que lors de l'examen au Sénat de la loi du 8 juillet 2013 d'orientation et de programmation pour la refondation de l'école de la République, plusieurs amendements tendaient à ouvrir un nouveau cas d'obligation de financement, quand l'inscription dans une école privée sous contrat d'association hors de la commune de résidence résulte du souhait de poursuivre une scolarité dans une langue régionale. Ces amendements ont été rejetés.

Pour calculer le montant de la contribution obligatoire, l'article L. 442-5-1 précité demande de tenir compte :

- des ressources de la commune de résidence ;

- du nombre d'élèves de la commune de résidence scolarisés dans la commune d'accueil ;

- du coût moyen par élève calculé sur la base des dépenses de fonctionnement de l'ensemble des écoles publiques de la commune d'accueil.

Est également fixé un plafond de contribution équivalent au coût moyen de l'élève d'une école publique de la commune de résidence. Il est important de noter que ne doivent être prises en compte que les seules dépenses de fonctionnement directement liées aux activités scolaires, les subventions d'investissement aux écoles privées étant interdites aux collectivités territoriales.

En outre, malgré une imprécision rédactionnelle de la loi, il faut considérer que seuls les coûts des élèves inscrits dans des classes élémentaires publiques doivent être utilisés comme référence, en excluant les coûts des écoles maternelles publiques. C'est une restriction significative car les coûts des classes maternelles sont plus élevés. Cette interprétation est la seule cohérente avec l'objet du texte qui vise la garantie d'une parité uniquement entre les écoles élémentaires publiques et privées. Elle est confirmée par une autre disposition de l'article L. 442-5-1, qui précise qu'en l'absence d'école publique permettant de servir de référence au calcul, la contribution est fixée pour chaque commune au coût moyen des classes élémentaires publiques du département.

En dehors des cas de contribution obligatoire, la loi Carle laisse aux communes de résidence la faculté de participer volontairement aux frais de fonctionnement de l'établissement privé d'une autre commune. Comme dans le cas de la contribution obligatoire, le montant de la contribution facultative de la commune de résidence ne peut toutefois excéder le coût de la scolarisation d'un élève dans une de ses propres écoles publiques.

2. Une parité entre les enseignements publics et privés qui demeure nécessairement asymétrique
a) Les conséquences du principe constitutionnel de libre choix de l'école

La jurisprudence constitutionnelle a contribué à préciser la portée du principe de parité de financement entre les enseignements public et privé. S'il est fondé sur le principe du libre choix de l'école, qui participe lui-même de la liberté de l'enseignement au sens large, il n'est pour autant doté d'aucune valeur supérieure à la loi, si bien que l'octroi d'un soutien financier aux établissements privées intervient dans les conditions définies par la loi (CC 23 novembre 1977, Liberté de l'enseignement , n° 77-87 DC).

Dans sa décision sur la loi Carle, le Conseil Constitutionnel a rejeté les griefs avancés par les requérants qui s'appuyaient sur les principes de laïcité, de libre administration des collectivités territoriales et d'égalité devant les charges publiques pour demander la censure du texte. Il a rappelé que le législateur disposait d'un pouvoir d'appréciation en matière de financement public des écoles privées sous contrat d'association, dès lors qu'il se fonde sur des critères objectifs et rationnels et que la participation des collectivités territoriales est adaptée à la nature et l'importance de leur contribution à l'accomplissement des missions d'enseignement (CC 22 octobre 2009, Parité de financement entre écoles publiques et privées, n° 2009-591 DC).

La parité de financement ne peut toutefois être interprétée ni comme une pure identité, ni comme un pur parallélisme. Il existe plusieurs asymétries entre la situation des élèves non-résidents dans les enseignements public et privé.

La première asymétrie qu'il convient de relever résulte du principe constitutionnel du libre choix de l'école, qui empêche les maires tant de la commune de résidence que de la commune d'accueil de se prononcer sur l'inscription dans une école privée.

Dans les écoles publiques, au contraire, le maire, qui agit comme représentant de l'État, susceptible à ce titre d'engager sa responsabilité (CE 7 décembre 1990, Di Lello ), inscrit les élèves dans les écoles de sa commune. Il est amené à accorder ou à refuser une dérogation lorsque les parents souhaitent échapper à leur école de secteur. Lorsqu'il accorde une dérogation pour une scolarisation dans une école publique d'une autre commune, alors qu'il dispose sur sa propre commune de capacités d'accueil suffisantes, il s'engage par là-même à contribuer financièrement aux dépenses de fonctionnement de la commune d'accueil.

Aux termes de l'article R. 212-22 du code de l'éducation, lorsque le maire de la commune d'accueil inscrit un enfant dans une de ses écoles publiques au titre d'un des cas où la commune de résidence est tenue de participer financièrement à la scolarisation, il doit informer le maire de la commune de résidence, dans un délai de deux semaines, du motif de l'inscription. Les parents ou tuteurs légaux peuvent contester un refus de dérogation ou d'inscription devant le préfet, qui statue après avis du directeur académique des services de l'éducation nationale (DASEN), conformément à l'article R. 212-23 du même code.

On peut certes considérer que cette asymétrie est atténuée dans certaines circonstances. Pour inscrire leur enfant dans une école publique d'une autre commune, les parents ne sont pas toujours tenus d'obtenir une dérogation du maire de la commune de résidence, soit que la commune d'accueil accepte de prendre en charge financièrement la scolarisation, soit qu'elle ne possède pas de capacités d'accueil ou qu'une contrainte familiale force la scolarisation dans l'autre commune. En cas de participation obligatoire, prévue par la loi, aux dépenses de fonctionnement générées par la scolarisation dans une autre commune, le maire de la commune de résidence n'a pas plus le choix pour une école publique que pour une école privée. Il n'en demeure pas moins qu'à la différence du cas de l'enseignement privé, le maire de la commune d'accueil peut procéder à un filtrage dans le cas des élèves non-résidents dans une de ses écoles publiques.

Il ne saurait être question de subordonner l'inscription dans une école privée à l'autorisation du maire de la commune d'accueil ou de résidence, sous peine de contrevenir à la Constitution. Néanmoins, les associations de maires ont fait part à vos rapporteurs de leur regret de ne pas être informés en amont des décisions des parents. Le maire de la commune de résidence est informé de l'inscription seulement a posteriori par le chef d'établissement de l'école privée, dans les huit jours suivant la rentrée. La liste des élèves non-résidents transmise ne reprend pas les motifs de l'inscription.

b) Le règlement des litiges financiers

Par ailleurs, l'article 2 de la loi Carle a inséré un nouvel article L. 442-5-2 dans le code de l'éducation qui introduit une nouvelle procédure de règlement des litiges financiers entre les communes et les écoles privés. Cette procédure spécifique porte sur toutes les contributions obligatoires des communes, si bien qu'elle concerne aussi bien les élèves résidents que non-résidents. Le dispositif prévoit qu'en cas de litige, le montant de la contribution obligatoire est fixé par le préfet qui statue dans les trois mois suivant sa saisine par la plus diligente des parties, qu'il s'agisse de la commune ou de l'établissement privé.

En ce qui concerne le cas des élèves non-résidents, seul cas éventuellement susceptible de respecter un parallélisme, cette procédure spécifique ne se retrouve pas à l'identique dans l'enseignement public. Tout d'abord, les différends dans le public ne font pas intervenir l'école qui ne possède pas la personnalité juridique, contrairement à l'établissement privé, mais uniquement les deux communes. Ensuite, en cas de désaccord entre les deux communes, le préfet statue sur la contribution de chacune d'entre elles, alors que dans l'enseignement privé, il ne fixe que la contribution obligatoire de la commune de résidence. Enfin, il n'intervient qu'après avis du conseil départemental de l'éducation nationale (CDEN), lorsque l'école d'accueil est publique.

Une fois définie la contribution due par la commune de résidence à l'école privée, pour en assurer le paiement effectif, le préfet est invité par la circulaire d'application n° 2012-025 du 15 février 2012 à utiliser les procédures d'inscription d'office et de mandatement d'office, inscrites aux articles L. 1612-15 et L. 1612-16 du code général des collectivités territoriales, plutôt que le déféré préfectoral.

Le préfet peut saisir la chambre régionale des comptes (CRC) pour qu'elle mette en demeure la commune de résidence d'inscrire la dépense obligatoire à son budget. Si la mise en demeure est restée sans effet pendant un mois, la CRC demande au préfet d'inscrire la dépense au budget de la commune. Le préfet peut ensuite ordonner au comptable public de payer la dépense liquidée qui aura fait l'objet de l'inscription d'office.

c) La prise en compte de l'intercommunalité

Enfin, la prise en compte de l'intercommunalité n'est pas symétrique entre les écoles publiques et les écoles privées. L'article L. 212-8 du code de l'éducation qui règle le financement des élèves non-résidents dans les écoles publiques prévoit que lorsque les compétences scolaires ont été transférées à un établissement public de coopération intercommunale (EPCI), celui-ci se substitue à la commune pour trouver un accord sur le financement et pour apprécier les capacités d'accueil.

En revanche, l'article L. 442-5-1, qui en forme le pendant pour les écoles privées, ne mentionne pas les EPCI mais précise que les capacités d'accueil de la commune de résidence s'apprécient, le cas échéant, au niveau du regroupement pédagogique intercommunal (RPI). La loi Carle renvoie les conditions de prise en compte du RPI à un décret.

UN APAISEMENT CERTAIN DU CLIMAT LOCAL

II. UN APAISEMENT CERTAIN DU CLIMAT LOCAL À PORTER AU CRÉDIT DU TEXTE, MALGRÉ DES DIFFICULTÉS D'ÉVALUATION ET QUELQUES DIVERGENCES D'INTERPRÉTATION

A. DES TEXTES RÉGLEMENTAIRES EN CONFORMITÉ AVEC LA LETTRE DE LA LOI

1. La définition des capacités d'accueil de la commune de résidence

On peut conjecturer qu'une part importante des forfaits « loi Carle » est acquittée par des communes ne disposant pas d'école. Ces cas ne présentent pas de difficultés, mais devant le manque de données statistiques, sur lequel vos rapporteurs reviendront, on ne peut en rester là et il faut examiner plus avant les modalités d'appréciation des capacités d'accueil de la commune de résidence.

En effet, la définition exacte des capacités d'accueil conditionne partiellement l'obligation de financement et la portée concrète de la loi Carle sur le terrain, notamment en zone rurale. Plus une définition large est retenue, plus le nombre de communes sortant du champ d'application de la loi est important. Deux problèmes se posent : celui du périmètre géographique retenu et celui de la définition du nombre d'élèves par classe au sein du périmètre défini.

Le seul texte d'application prévu par la loi Carle est le décret déterminant les modalités de prise en compte des RPI. Le gouvernement a fait preuve de diligence et après avis du Conseil d'État, il a publié le décret n° 2010-1348 du 9 novembre 2010 qui rend pleinement applicable l'ensemble des dispositions de la loi.

La solution retenue dans le décret de 2010 précité vise à gommer l'asymétrie relevée précédemment dans la prise en compte de l'intercommunalité entre les cas de l'enseignement public et de l'enseignement privé. Le nouvel article D. 442-44-1 du code de l'éducation prévoit en effet que ne seront pris en compte dans l'appréciation des capacités d'accueil que les RPI organisés dans le cadre d'un EPCI à compétence scolaire dont la commune de résidence est membre. Est donc reprise dans le décret pour le privé, la solution retenue dans la loi pour le public.

La difficulté que rencontrait le pouvoir réglementaire résidait dans l'absence de statut juridique propre des RPI. Leur existence ne peut être rattachée à une disposition législative ou réglementaire que de façon très indirecte par référence aux dispositions de l'article L. 212-2 du code de l'éducation, qui prévoient que deux ou plusieurs communes peuvent se réunir pour l'établissement et l'entretien d'une école.

Comme l'a indiqué à vos rapporteurs, Frédéric Bonnot, sous-directeur en charge de l'enseignement privé au ministère de l'éducation nationale : « À la date du décret, les RPI concernaient environ 15 000 communes et 11 % des élèves. La moitié environ des RPI étaient adossés à un EPCI, mais l'autre moitié ne touchait qu'un peu plus de 3 % des élèves, ce qui paraissait un effectif trop faible pour rigidifier le statut juridique des RPI, qui ne repose aujourd'hui que sur une circulaire ministérielle de 2003. »

Les avis sont très partagés sur la question de savoir si ce décret respecte la volonté du législateur. Les associations de maires contestent le décret. Elles sont favorables à une prise en compte de tous les RPI et pas seulement de ceux qui sont adossés à un EPCI.

Les juristes auditionnés par vos rapporteurs ne s'accordent pas. Ainsi Bernard Toulemonde, inspecteur général honoraire de l'éducation nationale, considère que le pouvoir réglementaire a déformé le texte voté par le Sénat, en vidant de toute portée l'amendement sénatorial qui prévoyait la prise en compte des RPI pour tenir compte de la situation de nombreuses communes rurales. Antony Taillefait, professeur de droit public à l'université d'Angers, estime à l'inverse que le principe de parité doit l'emporter, par cohérence avec l'objet même de la loi Carle. C'est aussi la position du Conseil d'État dans son avis du 6 juillet 2010.

Interrogé sur ce point par vos rapporteurs, notre collègue Jean-Claude Carle auteur et rapporteur de la loi du 28 octobre 2009, a estimé que le décret de 2010 ne dénaturait pas le texte et était conforme au principe de parité.

Les débats parlementaires eux-mêmes ne permettent pas de trancher sur l'intention du législateur puisqu'en réalité, l'Assemblée nationale et le Sénat avaient adopté le même texte dans les mêmes termes mais avec des intentions divergentes. Les débats au Sénat laissent penser que l'esprit de l'amendement sur les RPI tendait à leur prise en compte globale au-delà des seuls EPCI, qui en tout état de cause devaient déjà se substituer automatiquement à la commune de résidence. En revanche, le rapporteur de l'Assemblée nationale, notre collègue Frédéric Reiss, avait clairement indiqué que la disposition adoptée au Sénat devait être restreinte par le pouvoir réglementaire aux seuls RPI adossés à un EPCI à compétence scolaire. L'absence de commission mixte paritaire, le texte ayant été adopté conforme à l'Assemblée nationale en première lecture, a empêché le débat de se poursuivre.

Après avoir déterminé le périmètre géographique de la zone de résidence, il reste à apprécier la capacité d'accueil effective dans les classes inscrites dans ce périmètre.

Faut-il se caler sur le seuil d'ouverture ou de fermeture des classes ? Certains inspecteurs d'académie - directeurs académiques des services de l'éducation nationale (IA-DASEN) n'ont pas défini de seuils fixes d'ouverture et de fermeture. Lorsqu'ils l'ont fait, les seuils varient entre 20 et 25 élèves avec de grandes variations par zones, pour tenir compte de la viabilité du tissu scolaire ou des contraintes géographiques spécifiques, notamment en zone de montagne. De façon générale, au-delà de l'application de la loi Carle, les associations d'élus souhaitent plus de clarté et de lisibilité dans la définition des seuils d'ouverture et de fermeture des classes.

Enfin, à titre exploratoire, en partant d'un arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux, Commune de la Vernelle , du 8 mars 2011 Antony Taillefait a soulevé une question supplémentaire : dans son contrôle de l'appréciation de la capacité d'accueil de la commune de résidence, le juge administratif doit-il tenir compte uniquement des écoles publiques ou également des écoles privées ? C'est potentiellement un sujet dans les communes qui ne disposent que d'une école privée.

Vos rapporteurs estiment qu'une construction prétorienne allant dans le sens d'une prise en compte des écoles privées ne respecterait pas l'article L. 442-5-1 du code de l'éducation qui précise expressément qu'il suffit de démontrer l'absence de capacité d'accueil dans une école publique de la commune de résidence pour déclencher l'obligation de financement. En tout état de cause, tenir compte des places vacantes dans des écoles privées de la commune de résidence se heurterait à des difficultés :

- d'ordre pratique : comment connaître la capacité d'accueil dans les écoles privées ?

- d'ordre général : cela n'aurait-il pas pour conséquence de restreindre le choix de l'école privée par les parents, en introduisant une forme inédite de « sectorisation » préférentielle dans la commune de résidence ?

2. Les modalités de calcul du montant de la contribution de la commune de résidence

Le calcul exact de la participation financière est un sujet complexe, largement laissé ouvert par la loi Carle, même conjuguée avec les autres dispositions du code de l'éducation. Les préfectures interrogent fréquemment la direction générale des collectivités locales (DGCL) du ministère de l'intérieur à ce propos. Le coût en termes de fonctionnaires mobilisés pour réaliser précisément le calcul dans les cas concrets qui se présentent n'est pas négligeable, quoiqu'il n'ait pas été précisément évalué par le ministère.

En outre, la jurisprudence n'est pas stabilisée, ce qui laisse subsister une marge d'insécurité juridique. Il n'est pas certain que des communes souhaitent contester un mandatement d'office portant sur de faibles sommes jusqu'en dernier ressort devant le Conseil d'État. De ce fait, les incertitudes risquent de persister, ce qui est en soi regrettable, même si elles demeurent marginales et ne menacent pas l'application de la loi, d'après le ministère de l'intérieur.

Tant que le Conseil d'État n'est pas saisi de contentieux liés aux forfaits dus au titre de la loi Carle, il faut extrapoler à partir de ses décisions sur le calcul du forfait de base pour les élèves résidents et de la contribution due au titre d'élèves non-résidents scolarisés dans une école publique. Les lignes directrices posées par la circulaire dédiée n° 2012-025 du 15 février 2012 reprennent et explicitent la jurisprudence la plus récente du Conseil d'État en la matière.

Particulièrement importantes sont les décisions concernant la prise en compte des dépenses facultatives engagées par la commune d'accueil au bénéfice de ses écoles publiques. Avant le vote de la loi Carle, le Conseil d'État s'est prononcé sur le dispositif analogue valable pour les élèves non-résidents dans l'enseignement public. Il a considéré que pour la répartition des charges entre la commune de résidence et de la commune d'accueil, il fallait partir des frais effectivement supportés par la commune d'accueil pour assurer le fonctionnement des écoles, mêmes si elles n'ont pas un caractère obligatoire, dès lors qu'elles ne résultent pas de décisions illégales (CE, 7 avril 2004, Commune de Port d'Envaux ).

Cette jurisprudence a été précisée dans le cas du forfait de base dû aux écoles privées, de sorte que les dépenses de la commune exposées dans les classes élémentaires publiques qui se rapportent à des activités scolaires, même s'il ne s'agit pas de dépenses obligatoires, doivent être prises en compte pour le calcul de la participation de la commune aux dépenses de fonctionnement des classes privées sous contrat d'association (CE, 12 octobre 2011, Commune de Clermont-Ferrand c/ OGEC Fénelon ). Sont visées par exemple les dépenses relatives au transport des élèves lors des activités scolaires, à la médecine scolaire, à la rémunération d'intervenants lors des séances d'activités physiques et sportives et aux classes de découverte.

Il convient de remarquer que la nomenclature comptable utilisée par les communes n'est pas opposable aux établissements privés. Seul importe que les dépenses en cause soient véritablement des charges ordinaires ou des investissements. La seule inscription en section de fonctionnement ou d'investissement d'une dépense engagée par la commune d'accueil au profit de ses écoles publiques ne saurait justifier son intégration ou son exclusion respectivement dans le calcul de la contribution de la commune de résidence, conformément à la décision du Conseil d'État Fédération UNSA du 2 juin 2010. En particulier, dans le cas des dépenses informatiques, l'acquisition de matériels est une dépense d'investissement, tandis que la location et la maintenance sont des dépenses de fonctionnement, de même que les frais d'amortissement liées aux matériels et aux logiciels.

Même lorsqu'ont été arrêtées les dépenses obligatoires et facultatives à prendre en compte, des difficultés pratiques de calcul demeurent. Par exemple, l'AMF s'interroge sur un item dans la liste des dépenses obligatoires annexée à la circulaire de 2012 : comment calculer « la quote-part des services généraux de l'administration communale ou intercommunale nécessaire au fonctionnement des écoles publiques » ?

3. Des demandes d'éclaircissements réitérées par les associations d'élus

De même que les questions adressées par les préfets à la direction générale des collectivités locales sur le calcul du montant du forfait ou sur l'appréciation de la capacité d'accueil dans la commune de résidence, les demandes d'éclaircissements venant des maires portent en général sur l'interprétation à la fois de l'article L. 212-8 du code de l'éducation, qui règle la question des élèves non-résidents dans les écoles publiques, et du L. 442-5-1 du même code, qui en forme le pendant pour les écoles privées.

Ce n'est donc pas uniquement la loi Carle qui laisse subsister des zones d'ombre, mais l'ensemble des normes concernant les élèves non-résidents. On pourrait certes regretter que la loi Carle n'ait pas été prise comme occasion de clarifier et de fixer les pratiques sur le terrain, mais on ne peut lui imputer l'origine du problème.

Les demandes portent sur des questions d'ordre réglementaire qui ne trouvent pas de réponses dans la circulaire d'application de 2012 : le cas des classes d'inclusion scolaire (CLIS), le cas du déménagement en cours d'année, la prise en compte des fratries.

a) Les classes pour l'inclusion scolaire

Une réponse ministérielle a été donnée aux interrogations de l'AMF sur la prise en charge des élèves handicapés accueillis dans une classe pour l'inclusion scolaire (CLIS) hors de leur commune de résidence.

Lorsque la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées (CDAPH) précise dans sa décision le lieu de scolarisation de l'enfant, sa recommandation s'impose et la commune de résidence se voit dans l'obligation de financer la scolarisation.

b) Le déménagement en cours d'année

Pour le cas de l'enseignement public, le dernier alinéa de l'article L. 212-8 du code de l'éducation accorde à l'enfant le droit au maintien dans l'école de la commune d'accueil jusqu'à la fin du cycle d'études entamé . Cette disposition s'applique en cas de déménagement de la famille en cours d'année avec le maintien de l'inscription de l'enfant dans l'école d'origine. Il n'y a pas de disposition analogue inscrite dans l'article L. 442-5-1 du code de l'éducation pour l'enseignement privé. Par extrapolation et en respectant le principe de parité, on peut transposer aux écoles privées la solution valable pour les écoles publiques.

Toutefois, une difficulté de fond demeure sur la question de savoir si la nouvelle commune de résidence après le déménagement est tenue de contribuer financièrement à la prise en charge de l'enfant dans l'école de la commune d'origine où il demeure inscrit . Autrement dit, le déménagement en cours d'année avec maintien dans l'école d'origine crée-t-il un cas supplémentaire d'obligation de financement pour la nouvelle commune de résidence ? Il existe une divergence d'interprétation entre le ministère de l'intérieur et le ministère de l'éducation nationale des dispositions mêmes concernant l'enseignement public.

Le ministère de l'intérieur, dans son guide sur la répartition intercommunale des charges de fonctionnement des écoles publiques daté de 1998 considère qu'aucune obligation ne pèse sur la nouvelle commune de résidence, même si un accord entre les communes peut être recherché.

En revanche, le ministère de l'éducation nationale, en réponse à une question écrite de notre collègue Jean-Pierre Sueur (QE n° 05421, JO Sénat du 21 mars 2013), a précisé que le maintien de l'inscription initiale dans la commune d'origine, avant le déménagement, entraîne l'obligation pour la nouvelle commune de résidence après le déménagement de financer la continuité du parcours scolaire.

L'interprétation de l'éducation nationale est plus extensive que celle du ministère de l'intérieur puisqu'elle n'examine pas si après le déménagement, les relations entre les communes de résidence et d'accueil rentrent dans un des cas de financement obligatoire prévus par le code de l'éducation. En d'autres termes, dans l'interprétation de l'éducation nationale, la nouvelle commune de résidence se substitue à l'ancienne commune de résidence dans l'ensemble de ses obligations après le déménagement.

La jurisprudence administrative n'est pas stabilisée mais dans les quelques cas où des tribunaux se sont prononcés, ils ont plutôt retenu l'interprétation du ministère de l'intérieur. Dans des arrêts significatifs Commune de La-Neuville-Saint-Pierre du 16 janvier 2002 et Commune de Goincourt du 22 janvier 2002, la Cour administrative d'appel de Douai a considéré que :

- l'obligation de financement à la charge la commune de résidence ne porte que sur les seules années au titre desquelles les cas dérogatoires sont justifiés ;

- le droit au maintien dans l'école d'origine n'entraîne pas de lui-même une obligation de prise en charge financière par la nouvelle commune de résidence.

De fait, l'imprécision résiduelle des textes réglementaires permet les deux lectures et, en attendant une décision claire du Conseil d'État, cette ambiguïté demeure une source d'insécurité juridique pour le public comme pour le privé, tant dans l'application de l'article L. 212-8 précité que dans celle de la loi Carle.

Comme l'a rappelé notre collègue David Assouline, président de la commission chargée de l'application des lois, les effets d'un déménagement en cours d'année devraient faire l'objet d'une seule appréciation commune des ministères de l'intérieur et de l'éducation nationale, dans le respect de la jurisprudence administrative, quitte à produire un texte réglementaire de clarification.

c) Le critère de la fratrie

Pour l'enseignement public, l'article R. 212-21 du code de l'éducation dispose que la commune de résidence est tenue de participer financièrement à la scolarisation maternelle ou élémentaire dans une autre commune du frère ou de la soeur d'un enfant inscrit la même année scolaire dans une école publique de ladite commune d'accueil, dans le cas où la scolarisation de l'enfant de référence dans la commune d'accueil est elle-même justifiée par une des dérogations classiques (activité professionnelle des parents, état de santé de l'enfant, capacité d'accueil insuffisante dans la commune de résidence).

Il est important de noter que l'inscription simultanée de deux frères ou soeurs n'emporte pas l'application de cette mesure, qui n'est valable qu'en cas d'inscription échelonné. Elle vaut pour un regroupement de fratrie mais pas pour une inscription groupée de fratrie .

Il n'existe pas de dispositions analogues pour l'enseignement privé et c'est par extrapolation à partir de la solution trouvée dans l'enseignement public, en recourant au principe de parité, qu'il faut interpréter les termes de la loi Carle en matière de prise en compte des fratries. La seule condition restrictive est la limitation aux seules classes élémentaires , sans tenir compte des inscriptions en classes maternelles. Une réponse orale aurait été donnée par la DGCL à l'AMF en ce sens en 2010. Dans le silence des textes, le juge administratif pourrait toutefois dégager une solution prétorienne distincte. Une clarification des textes d'application pour préciser l'utilisation du critère de la fratrie pour le financement des élèves non-résidents inscrits dans des écoles privées pourrait se révéler utile.

Le contrôle d'application du critère de regroupement de la fratrie paraît matériellement très difficile . Comme le note la préfecture d'Eure-et-Loir, sondée par la DGCL, il faudrait que chaque établissement privé concerné fasse la preuve au cas par cas que les aînés en général auraient pu bénéficier d'une dérogation à l'époque de leur inscription. En particulier, pour apprécier les capacités d'accueil au moment de l'inscription de l'aîné, il lui faudrait vérifier les statuts en vigueur à l'époque par les éventuels EPCI, ce qui s'apparente à une enquête quasi-impossible.

B. LE PARADOXE D'UNE LOI APPLIQUÉE EN PEU D'OCCASIONS, MAIS GLOBALEMENT EFFICACE ET PACIFICATRICE

1. Un constat consensuel d'apaisement

Quelle que soit la position de fond que chacun peut défendre sur le principe même de la parité de financement entre l'école publique et l'école privée, il est indéniable que la sécurité juridique des relations entre les communes et les écoles privées a été renforcée grâce à l'adoption de la loi Carle.

Les associations de maires, comme les ministères de l'intérieur et de l'éducation nationale, les parents d'élèves de l'enseignement libre (UNAPEL), le secrétariat général de l'enseignement catholique (SGEC) et les inspections générales de l'éducation nationale (IGEN) et de l'administration de l'éducation nationale et de la recherche (IGAENR) constatent que sur le terrain les relations sont apaisées et que les tensions antérieures à l'adoption de la loi se sont largement dissipées.

Le nombre de contentieux est extrêmement faible. L'action positive des préfets et des sous-préfets, qui ont réalisé un travail important de médiation en amont, doit être saluée à cet égard. La possibilité de recourir à la procédure de mandatement d'office a été très efficace. Par exemple, dans le Cantal, quatre communes seulement accueillent des élèves non-résidents d'après la préfecture. Les deux cas de communes de résidence réticentes ont été réglés après une lettre de mise en demeure du préfet avant même l'envoi d'un mandatement d'office.

D'après la DGCL, reste pendant un cas d'appel sur un jugement du tribunal administratif de Nantes déboutant la requête d'une commune réfractaire de Vendée en annulation de l'arrêté préfectoral lui imposant une participation financière. Le contentieux porte sur une faible somme, environ 3 500 euros. Le SGEC est également informé d'un différend dans les Pyrénées-Orientales.

Vos rapporteurs se félicitent de cet épuisement du contentieux, même s'il convient de l'interpréter prudemment.

D'une part, même si le financement des élèves non-résidents dans les écoles privées avait beaucoup inquiété les maires entre 2004 et 2009, le nombre de contentieux portés devant le juge administratif demeurait faible et les appels sur les jugements de première instance étaient encore plus rares.

D'autre part, il convient de relever le peu d'empressement manifesté par les établissements privés pour exiger le paiement du forfait « loi Carle ». Pour l'enseignement privé lui-même, le forfait de base prévu à l'article L. 442-5 du code de l'éducation pour les élèves résidents constitue un enjeu autrement plus important à la fois en termes de nombre et de montant des forfaits recouvrés. Les enjeux financiers de la loi Carle sont trop limités pour que les OGEC engagent le processus d'identification des élèves concernés et déclenchent une opération de recouvrement ou a fortiori un contentieux. La préfecture du Nord confirme que la part du forfait communal relevant de la loi de 2009 n'est pas la priorité de l'Union départementale des organismes de gestion de l'enseignement catholique (UDOGEC).

Aucune consigne d'aller chercher le forfait « loi Carle » n'a été adressé aux chefs d'établissement par le SGEC. La question des élèves non-résidents est globalement annexe. Elle ne touche qu'une poignée d'élèves par école, même si dans certains cas exceptionnels, en raison d'un contexte local singulier, cela peut avoir des incidences non négligeables sur telle ou telle école privée. En général, les chefs d'établissement privé n'ont aucune motivation d'aller porter une réclamation auprès de la commune de résidence. C'est ce qui explique que les réclamations soient peu nombreuses.

Néanmoins, même si les établissements privés n'entreprennent pas toujours de réclamer le forfait spécifique de la loi Carle, ils pratiquent parfois une politique d'optimisation de leur recrutement en privilégiant les élèves résidents, c'est-à-dire les élèves systématiquement pris en charge par la commune où ils sont établis. Ceci a été confirmé en audition par notre collègue députée Annie Genevard, en sa qualité de maire de Morteau, bourg-centre qui accueille nombre d'élèves des communes avoisinantes.

À cette réserve près, force est de constater que la loi Carle, alors même qu'elle n'a pas été appliquée de façon intensive et n'a déclenché que peu de paiements, a tout à fait apaisé la situation en stimulant le dialogue local et la conclusion d'accords. La loi a été pacificatrice. Lorsque quelques tensions sont apparues, la mobilisation des préfets et des sous-préfets a permis leur aplanissement. Les congrès départementaux et nationaux des maires n'abordent plus la question.

Il n'est pas rare que par souci de simplicité, les maires décident de financer tous les élèves non-résidents, sans examiner la situation de chacun d'entre eux pour savoir s'il relève ou non d'un des cas énumérés par la loi Carle. La prise en charge équivalente de tous les élèves non-résidents, et pas seulement des élèves concernés par les cas de financement obligatoire de la loi Carle, est parfaitement légale. Vos rapporteurs rappellent en effet que l'alinéa 6 de l'article L. 442-5-1 du code de l'éducation laisse la faculté aux communes de résidence, lorsque la contribution n'est pas obligatoire, de participer aux frais de fonctionnement de l'établissement privé de la commune d'accueil, dès lors que cette participation n'excède pas le montant de la contribution obligatoire.

2. L'absence de données statistiques sur les élèves concernés et sur les flux financiers

Vos rapporteurs doivent confesser un regret dans l'exercice de la tâche qui leur a été confiée, celui de n'avoir pu disposer que de très peu de données statistiques, ce qui rendait malaisée l'appréciation exacte de la portée du problème et de l'efficacité de la solution.

Les inspections générales confirment la difficulté d'obtenir des données consolidées sur les élèves relevant du dispositif de la loi Carle. Leur propre travail de contrôle s'est donc concentré sur une analyse qualitative fondée sur des visites de terrain dans quinze départements dans sept académies représentant une diversité de situations. À côté de l'enseignement catholique, elles se sont aussi penchées sur la situation des écoles juives et des écoles en langues régionales, quoique leurs effectifs soient considérablement plus faibles que ceux de l'enseignement catholique.

Globalement, l'enseignement privé accueille environ un tiers d'élèves non-résidents avec d'importantes variations selon les territoires. Parmi les élèves non-résidents, il est très ardu de déterminer le nombre d'élèves effectivement concernés par la loi Carle. Personne au niveau des communes ou des préfectures ne procède à ce recensement, et encore moins les instances nationales de l'enseignement privé et les directions centrales des ministères. S'y oppose clairement l'obstacle du défaut d'information sur les motifs d'inscription dans les écoles privées. Il faudrait procéder à une enquête auprès des familles pour savoir si elles rentrent dans un des cas de figure. Les maires des petites communes rurales n'émettent pas d'avis et ne sont pas informés d'une décision d'inscription. Leurs moyens d'identifier les élèves concernés auprès des autres maires sont aussi limités.

Même s'il n'existe aucune statistique précise qui renseigne sur le nombre d'élèves entrant dans le champ du dispositif, vos rapporteurs ont pu s'appuyer sur les estimations de la direction des affaires financières du ministère de l'éducation nationale. Il en résulte que peu d'élèves sont concernés par la loi Carle et que les flux financiers générés sont d'autant plus difficiles à repérer qu'ils sont d'ampleur marginale.

Un tiers des élèves scolarisés en primaire dans les établissements de l'enseignement catholique seraient des non-résidents, ce qui représente environ 300 000 élèves. Il faut soustraire les classes maternelles qui ne sont pas concernées par la loi Carle et ne tenir compte que des 200 000 élèves non-résidents scolarisés dans des classes élémentaires. Ensuite, il faut encore soustraire de ce total tous les élèves non-résidents qui ne rentrent pas dans un des cas de dépenses obligatoires prévus par la loi de 2009. Le ministère de l'éducation nationale estime au final que 30 000 élèves seulement rentrent dans le champ de la loi Carle.

En outre, à partir de données rassemblées et retraitées par la Cour des comptes et d'informations transmises par le SGEC, le ministère de l'éducation nationale estime le forfait communal moyen à 550 euros par élève. On aboutit ainsi à une estimation financière maximale des flux qui pourraient être générés par l'application de la loi de 2009 à 16,5 millions d'euros.

En tout état de cause, les sommes sont trop faibles et trop éparpillées sur des milliers de communes, pour que la direction générale des finances publiques entreprenne de mettre en place un système d'extraction spécifique des données financières relatives à l'application de la loi Carle. Rappelons que les coûts des systèmes d'information dans l'éducation nationale sont déjà colossaux. Il faut veiller à ce que le suivi de la loi Carle et un légitime besoin d'informations ne coûtent finalement pas davantage que la loi Carle elle-même.

Enfin, pour répondre à des inquiétudes exprimées notamment par le Comité national d'action laïque (CNAL), vos rapporteurs se sont penchés sur l'évolution de la répartition de la population scolaire entre l'enseignement public et l'enseignement privé.

Aucun flux d'élèves vers le privé n'a été déclenché par la loi Carle. Au contraire, depuis 2007, l'enseignement catholique enregistre des pertes d'élèves dans le premier degré qui, par endroit, affaiblissent son réseau. Cette perte d'élèves du privé peut s'expliquer par la crise économique qui réduit les capacités de contribution financière des parents, par des arbitrages familiaux en faveur du second degré, par une attractivité renouvelée des écoles publiques et par le verrou de l'investissement immobilier qui contraint le privé.

À l'échelon national, le premier degré élémentaire public a connu une croissance de 0,78 % de ses effectifs contre une baisse de 0,34 % dans le privé sous contrat. En termes de nombre de classes, le ministère indique une quasi-stabilité (- 0,14 %) dans l'élémentaire public contre une baisse nette dans l'élémentaire privé sous contrat (- 2 %). Il faut donc écarter toute idée d'une déstructuration du réseau national des écoles publiques sous l'effet de la loi Carle.

Les mêmes tendances sont confirmées en se limitant à l'étude de 45 départements ruraux. Ces départements ont été choisis par le ministère de l'éducation nationale sur la base du critère suivant : au moins 20 % des classes du département doivent être situées dans une commune éligible à la dotation de solidarité rurale (DSR). Les effectifs d'élèves scolarisés dans le public dans ces départements ruraux sont stables avec une très légère croissance entre 2009 et 2013, alors que ceux scolarisés dans le privé sous contrat ont enregistré une baisse de 1,8 %. En zone rurale, comme sur l'ensemble du territoire national, la fermeture des classes est également plus importante dans le privé que dans le public.

Dans sept départements de cette liste seulement, l'évolution de la scolarisation dans le privé est plus favorable que dans le public. Il s'agit de l'Aude, de la Creuse, de la Dordogne, du Gers, de la Haute-Saône, de la Moselle et de l'Yonne. Toutefois, même dans ces départements, on ne peut pas parler de transvasement du public vers le privé car les flux dans le privé sont extrêmement faibles. Les évolutions de la scolarisation dans le public ne sont pas corrélées avec l'évolution dans le privé et ne sont pas dues à l'application de la loi Carle.

L'exemple de la Creuse illustre bien ce point : les effectifs dans les écoles privées croissent de 1,7 % alors qu'ils baissent de 4,7 % dans le public. En réalité, il n'y a eu qu'un gain de 2 élèves dans le privé pour une perte de 475 élèves dans le public. En valeur absolue, les effectifs totaux scolarisés dans des établissements privés de ce département sont tellement faibles qu'ils ne peuvent absorber les évolutions du public, si bien que les variations s'apparentent à une illusion d'optique vite dissipée.

Au vu de l'évolution constatée des flux d'élèves depuis 2009, vos rapporteurs estiment que la loi Carle n'a entraîné aucun bouleversement des équilibres entre le public et le privé.

EXAMEN EN COMMISSION

Lors de la réunion commune de la commission sénatoriale pour le contrôle de l'application des lois et de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication, le mardi 8 juillet 2014, sous la présidence de M. David Assouline, Président, il a été procédé à l'examen du rapport d'information sur le bilan de la mise en oeuvre de la « loi Carle » du 28 octobre 2009.

M. David Assouline , président de la commission sénatoriale du contrôle de l'application des lois . - Nous sommes réunis cet après-midi pour examiner le rapport d'information de MM. Jacques-Bernard Magner et Jacques Legendre sur le bilan d'application de la « loi Carle », qui tend à garantir la parité de financement entre les écoles publiques et privées accueillant des élèves scolarisés hors de leur commune de résidence.

Ce bilan d'information, réalisé avec le concours de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication, avait été inscrit à notre programme d'activité pour 2014 en octobre 2013 sur la proposition de Jacques-Bernard Magner, en accord avec la présidente de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication.

Toutefois, s'agissant d'un sujet sensible pour les communes, il avait été décidé que les rapporteurs ne présenteraient pas leurs conclusions avant le deuxième trimestre 2014, pour ne pas risquer d'interférer avec les élections municipales de mars 2014.

Du coup, ce rapport n'a pu être porté à notre ordre du jour pendant la session ordinaire.

Comme tous les élus locaux le savent, le principe de parité du financement entre l'enseignement public et l'enseignement privé est au coeur de la loi Carle, mais ce texte et le décret pris pour son application ont pu donner lieu à quelques divergences d'interprétation.

C'est pourquoi il nous paraissait important de faire un bilan d'application d'une loi qui a suscité beaucoup de réactions au moment de sa promulgation, mais dont la mise en oeuvre semble réunir un certain consensus.

M. Jacques Legendre , rapporteur - Nous avons mené, avec Jacques-Bernard Magner, le contrôle de l'application de la loi du 28 octobre 2009 tendant à garantir la parité de financement entre les écoles élémentaires publiques et privées, que j'appellerai par commodité la loi Carle, dans un esprit consensuel et attentif aux réactions des élus de terrain.

Nous nous sommes concentrés sur les effets concrets de la loi sans revenir sur les débats, parfois vifs, qui avaient précédé son adoption.

Je vais brièvement présenter, dans un souci de clarté, les dispositions assez techniques et complexes de la loi, avant de dresser un premier bilan de son application. Jacques-Bernard Magner reviendra ensuite sur les quelques ambiguïtés et difficultés d'interprétation qui nous ont été signalées.

La loi Carle comprend trois articles. Le coeur du dispositif est contenu dans l'article premier, tandis que l'article 2 prévoit une voie de règlement des litiges par le préfet et que l'article 3 abroge les dispositions préexistantes sur le même sujet, dont le fameux « amendement Charasse ».

L'article premier inscrit dans le code de l'éducation un régime juridique propre au financement de la scolarisation des élèves non-résidents dans des écoles privées, analogue à celui qui était valable pour l'enseignement public depuis les premières lois de décentralisation.

Il convient de délimiter précisément son champ d'application :

- ne sont concernées que les classes privées faisant l'objet d'un contrat d'association avec l'État, à l'exclusion des classes sous contrat simple, envers lesquelles les communes n'ont aucune obligation financière ;

- ne sont concernées que les classes élémentaires, à l'exclusion des classes maternelles, qui n'appartiennent pas à la scolarité obligatoire et n'ouvrent aucune obligation de financement pour les communes, comme l'a établi la jurisprudence du Conseil d'État.

Le principe central régissant le financement à la charge de la commune de résidence est que sa contribution ne constitue une dépense obligatoire que lorsqu'une contribution similaire aurait été due au titre de la scolarisation d'un élève dans une école publique de la commune d'accueil. Il s'agit donc d'un corollaire du principe de parité inscrit dans la loi Debré de 1959.

En conséquence, la contribution de la commune de résidence n'est obligatoire que dans quatre cas limitativement énumérés :

- l'absence de capacités d'accueil suffisantes dans une école publique de la commune de résidence ;

- les contraintes dues aux obligations professionnelles des parents, lorsque la commune de résidence n'assure pas directement ou indirectement la restauration et la garde des enfants ;

- l'inscription d'un frère ou d'une soeur dans un établissement scolaire de la commune d'accueil ;

- l'existence de raisons médicales.

Pour calculer le montant de la contribution obligatoire, il est tenu compte :

- des ressources de la commune de résidence ;

- du nombre d'élèves de la commune de résidence scolarisés dans la commune d'accueil ;

- du coût moyen par élève calculé sur la base des dépenses de fonctionnement de l'ensemble des écoles publiques de la commune d'accueil.

Est également fixé un plafond de contribution équivalent au coût moyen de l'élève d'une école publique de la commune de résidence.

En dehors des cas de contribution obligatoire, la loi Carle laisse aux communes de résidence la faculté de participer volontairement aux frais de fonctionnement de l'établissement privé d'une autre commune. Comme dans le cas de la contribution obligatoire, le montant de la contribution facultative de la commune de résidence ne peut pas excéder le coût de la scolarisation d'un élève dans une de ses propres écoles publiques.

Par ailleurs, l'article 2 de la loi Carle introduit une nouvelle procédure de règlement des litiges financiers entre les communes et les écoles privées. Cette procédure spécifique porte sur toutes les contributions obligatoires des communes, si bien qu'elle concerne aussi bien les élèves résidents que non-résidents. Elle prévoit qu'en cas de litige, le montant de la contribution obligatoire est fixé par le préfet qui statue dans les trois mois suivant sa saisine par la plus diligente des parties, qu'il s'agisse de la commune ou de l'établissement privé.

Cette procédure spécifique ne se retrouve pas à l'identique dans l'enseignement public. Tout d'abord, les différends dans le public ne font pas intervenir l'école qui ne possède pas la personnalité juridique, contrairement à l'établissement privé. Ensuite, en cas de désaccord entre les deux communes, le préfet statue sur la contribution de chacune d'entre elles, alors que dans l'enseignement privé, il ne fixe que la contribution obligatoire de la commune de résidence. Enfin, le préfet n'intervient qu'après avis du conseil départemental de l'éducation nationale (CDEN), lorsque l'école d'accueil est publique.

Une fois définie la contribution due par la commune de résidence à l'école privée, pour en assurer le paiement effectif, le préfet est invité par la circulaire d'application du 15 février 2012 à utiliser les procédures d'inscription d'office et de mandatement d'office, plutôt que le déféré préfectoral.

Le calcul exact de la participation financière est un sujet complexe, largement laissé ouvert par la loi Carle. Les préfectures interrogent fréquemment la direction générale des collectivités locales (DGCL) du ministère de l'intérieur à ce propos.

Tant que le Conseil d'État n'est pas saisi de contentieux liés aux forfaits dus au titre de la loi Carle, il faut extrapoler à partir de ses décisions sur le calcul du forfait de base pour les élèves du privé et sur la contribution due au titre d'élèves non-résidents scolarisés dans une école publique.

Avant le vote de la loi Carle, le Conseil d'État s'est en effet prononcé sur le dispositif analogue qui était valable pour les élèves non-résidents dans l'enseignement public. Il a considéré que pour la répartition des charges entre la commune de résidence et la commune d'accueil, il fallait partir des frais effectivement supportés par la commune d'accueil pour assurer le fonctionnement des écoles, mêmes si elles n'ont pas un caractère obligatoire, dès lors qu'elles ne résultent pas de décisions illégales.

Cette jurisprudence Commune de Port d'Envaux de 2004 a été précisée dans le cas du forfait de base dû aux écoles privées, de sorte que les dépenses de la commune exposées dans les classes élémentaires publiques qui se rapportent à des activités scolaires, même s'il ne s'agit pas de dépenses obligatoires, doivent être prises en compte pour le calcul de la participation de la commune aux dépenses de fonctionnement des classes privées sous contrat d'association. Cette décision Commune de Clermont-Ferrand c/ OGEC Fénelon de 2011 concerne par exemple les dépenses relatives au transport des élèves lors des activités scolaires, à la médecine scolaire, à la rémunération d'intervenants lors des séances d'activités physiques et sportives et aux classes de découverte.

Il convient de remarquer que la nomenclature comptable utilisée par les communes n'est pas opposable aux établissements privés. Seul importe que les dépenses en cause soient véritablement des charges ordinaires ou des investissements. La seule inscription en section de fonctionnement ou d'investissement d'une dépense engagée par la commune d'accueil au profit de ses écoles publiques ne saurait justifier son intégration ou son exclusion respectivement dans le calcul de la contribution de la commune de résidence, conformément à une décision Fédération UNSA de 2010.

Quelle que soit la position de fond que chacun peut défendre sur le principe même de la parité de financement entre l'école publique et l'école privée, il est indéniable que la sécurité juridique des communes et des écoles privées a été renforcée par la loi Carle.

Les associations de maires, comme les ministères de l'intérieur et de l'éducation nationale, les parents d'élèves de l'enseignement libre (UNAPEL), le secrétariat général de l'enseignement catholique (SGEC) et les inspections générales constatent que les relations sur le terrain sont apaisées et que les tensions antérieures se sont largement dissipées.

Le nombre de contentieux est extrêmement faible. L'action positive des préfets et des sous-préfets, qui ont réalisé un travail important de médiation en amont, doit être saluée à cet égard. La possibilité de recourir à la procédure de mandatement d'office a été très efficace.

Nous nous félicitons de cet épuisement du contentieux ; toutefois, il convient de l'interpréter prudemment.

D'une part, même si le financement des élèves non-résidents dans les écoles privées avait beaucoup inquiété les maires entre 2004 et 2009, le nombre de contentieux portés devant le juge administratif demeurait faible et les appels sur les jugements de première instance étaient encore plus rares.

D'autre part, il convient de relever le peu d'empressement manifesté par les établissements privés pour exiger le paiement du forfait « loi Carle ». Pour l'enseignement privé lui-même, le forfait de base pour les élèves résidents constitue un enjeu autrement plus important à la fois en termes de nombre et de montant des forfaits recouvrés. Les enjeux financiers de la loi Carle sont trop limités pour que les organismes de gestion de l'enseignement catholique (OGEC) engagent le processus d'identification des élèves concernés et déclenchent une opération de recouvrement ou a fortiori un contentieux. C'est ce qui explique que les réclamations soient peu nombreuses.

Néanmoins, même si les établissements privés n'entreprennent pas toujours de réclamer le forfait spécifique de la loi Carle, ils pratiquent parfois une politique d'optimisation de leur recrutement en privilégiant les élèves résidents, c'est-à-dire les élèves systématiquement pris en charge par la commune où ils sont établis. Ceci a été confirmé en audition par notre collègue députée Annie Genevard, en sa qualité de maire de Morteau, bourg centre qui accueille nombre d'élèves des communes avoisinantes.

À cette réserve près, force est de constater que la loi Carle a tout à fait apaisé la situation en stimulant le dialogue local et la conclusion d'accords. La loi a été pacificatrice et les congrès départementaux et nationaux des maires n'abordent plus la question.

Pour répondre à des inquiétudes exprimées notamment par le Comité national d'action laïque (CNAL), nous avons étudié l'évolution de la répartition de la population scolaire entre l'enseignement public et l'enseignement privé.

Aucun flux d'élèves vers le privé n'a été déclenché par la loi Carle. À l'échelon national, le premier degré élémentaire public a connu une croissance légère de 0,78 % de ses effectifs contre une baisse modeste de 0,34 % dans le privé sous contrat. En termes de nombre de classes, le ministère indique une quasi-stabilité dans l'élémentaire public contre une baisse nette dans l'élémentaire privé sous contrat. Il faut donc écarter toute idée d'une déstructuration du réseau national des écoles publiques sous l'effet de la loi Carle.

Les mêmes tendances sont confirmées en se limitant à l'étude de 45 départements ruraux.

Dans sept départements de cette liste seulement, l'évolution de la scolarisation dans le privé est plus favorable que dans le public. Il s'agit de l'Aude, de la Creuse, de la Dordogne, du Gers, de la Haute-Saône, de la Moselle et de l'Yonne. Toutefois, même dans ces départements, on ne peut pas parler de transvasement du public vers le privé car les flux dans le privé sont extrêmement faibles. Les évolutions de la scolarisation dans le public ne sont pas corrélées avec l'évolution dans le privé et ne sont pas dues à l'application de la loi Carle.

Au vu de l'évolution constatée des flux d'élèves depuis 2009, nous estimons que la loi Carle n'a entraîné aucun bouleversement des équilibres entre le public et le privé.

Je cède maintenant la parole à Jacques-Bernard Magner.

M. Jacques-Bernard Magner , rapporteur . - Je vais pour ma part me concentrer sur quelques difficultés d'application, issues essentiellement de l'ambiguïté ou du silence des textes réglementaires.

La définition exacte des capacités d'accueil des communes conditionne la portée de la loi Carle, notamment en zone rurale. Plus une définition large est retenue, plus le nombre de communes sortant du champ de l'obligation de financement est important. Deux problèmes se posent : celui du périmètre géographique retenu et celui de la définition du nombre d'élèves par classe au sein du périmètre défini.

Le seul texte d'application prévu par la loi Carle est un décret déterminant les modalités de prise en compte des regroupements pédagogiques intercommunaux (RPI). La solution retenue dans le décret en Conseil d'État du 9 novembre 2010 vise à gommer une asymétrie dans la prise en compte de l'intercommunalité entre l'enseignement public et l'enseignement privé. La loi Carle ne mentionne pas les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI), alors que la disposition du code de l'éducation qui lui servait de modèle et qui s'applique aux élèves non-résidents dans les écoles publiques prévoit que l'EPCI à compétence scolaire se substitue à la commune, mais elle ne mentionne pas les RPI. Pour égaliser les situations, le décret de 2010 prévoit de ne prendre en compte, dans l'appréciation des capacités d'accueil de la commune de résidence, que les RPI organisés dans le cadre d'un EPCI à compétence scolaire.

D'après le ministère de l'éducation nationale, à la date du décret, les RPI concernaient environ 15 000 communes et 11 % des élèves. Une moitié environ des RPI étaient adossés à un EPCI. L'autre moitié ne touchait qu'un peu plus de 3 % des élèves, ce qui paraissait un effectif trop faible pour rigidifier le statut juridique des RPI, aujourd'hui simplement régis par une circulaire de 2003.

Les avis sont très partagés sur la question de savoir si le décret de 2010 respecte la volonté du législateur. Les associations de maires le contestent. Elles sont favorables à une prise en compte de tous les RPI et pas seulement de ceux qui sont adossés à un EPCI.

Les juristes que nous avons auditionnés ne s'accordent pas. Certains considèrent que le pouvoir réglementaire a déformé le texte voté par le Sénat, en vidant de toute substance l'amendement sénatorial qui prévoyait un traitement spécifique des RPI pour tenir compte de la situation des communes rurales. D'autres juristes estiment à l'inverse que le principe de parité entre le public et le privé doit l'emporter, par cohérence avec l'objet même de la loi Carle. C'est aussi la position du Conseil d'État dans son avis du 6 juillet 2010.

Les débats parlementaires eux-mêmes ne permettent pas de trancher sur l'intention du législateur puisqu'en réalité, l'Assemblée nationale et le Sénat ont adopté le même texte dans les mêmes termes mais avec des intentions divergentes. Les débats au Sénat laissent penser que l'esprit de l'amendement sur les RPI était effectivement de les prendre en compte globalement au-delà des seuls EPCI. En revanche, le rapporteur de l'Assemblée nationale, notre collègue Frédéric Reiss, avait clairement indiqué que la disposition adoptée au Sénat devait être restreinte par le pouvoir réglementaire aux seuls RPI adossés à un EPCI à compétence scolaire, afin de respecter le principe de parité. Le texte ayant été adopté conforme à l'Assemblée nationale en première lecture, le débat n'a pu être tranché par une commission mixte paritaire et l'incertitude demeure.

Après avoir déterminé le périmètre géographique de la zone de résidence, il reste encore à apprécier la capacité d'accueil effective dans les classes inscrites dans ce périmètre. C'est source de nouvelles difficultés pratiques.

Faut-il se caler sur le seuil d'ouverture ou de fermeture des classes ? Certains inspecteurs d'académie - directeurs académiques des services de l'éducation nationale (IA-DASEN) n'ont même pas défini de seuils fixes d'ouverture et de fermeture. Lorsqu'ils l'ont fait, les seuils varient entre 20 et 25 élèves avec de grandes variations par zones, pour tenir compte de la viabilité du tissu scolaire ou des contraintes géographiques spécifiques, notamment en zone de montagne. De façon générale, au-delà de l'application de la loi Carle, les associations d'élus souhaitent plus de clarté et de lisibilité dans la définition des seuils d'ouverture et de fermeture des classes.

L'application de la loi Carle pose encore d'autres difficultés, qui ne trouvent pas de réponses dans la circulaire d'application de 2012. C'est le cas par exemple des effets d'un déménagement en cours d'année et des modalités de prise en compte des fratries.

Pour l'enseignement public, l'article L. 212-8 du code de l'éducation accorde à l'enfant le droit au maintien dans l'école de la commune d'accueil jusqu'à la fin du cycle d'études entamé. Cette disposition s'applique en cas de déménagement de la famille en cours d'année avec le maintien de l'inscription de l'enfant dans l'école d'origine. Il n'existe pas de disposition analogue dans le code de l'éducation pour l'enseignement privé.

Même si l'on transposait au privé la solution retenue pour le public, il resterait une difficulté de fond : la nouvelle commune de résidence après le déménagement est-elle tenue de contribuer financièrement à la prise en charge de l'enfant dans l'école de la commune d'origine où il demeure inscrit ? Autrement dit, le déménagement en cours d'année avec maintien dans l'école d'origine crée-t-il un cas supplémentaire d'obligation de financement pour la nouvelle commune de résidence ?

Les interprétations du ministère de l'intérieur et du ministère de l'éducation nationale divergent sur ce point.

Le ministère de l'intérieur considère qu'aucune obligation ne pèse sur la nouvelle commune de résidence, même si un accord entre les communes peut être recherché.

En revanche, le ministère de l'éducation nationale estime que le maintien de l'inscription initiale dans la commune d'origine, avant le déménagement, entraîne l'obligation pour la nouvelle commune de résidence, après le déménagement, de financer la continuité du parcours scolaire.

La jurisprudence administrative n'est pas stabilisée, mais dans les quelques cas où des tribunaux se sont prononcés, ils ont plutôt retenu l'interprétation du ministère de l'intérieur. Dans deux arrêts significatifs de janvier 2002, la Cour administrative d'appel de Douai a considéré que :

- l'obligation de financement à la charge de la commune de résidence ne porte que sur les seules années au titre desquelles les cas dérogatoires sont justifiés ;

- le droit au maintien dans l'école d'origine n'entraîne pas de lui-même une obligation de prise en charge financière par la nouvelle commune de résidence.

Pour autant, en réponse à une Question écrite de notre collègue Jean-Pierre Sueur en 2013, le ministère de l'éducation a maintenu son interprétation. L'imprécision des textes réglementaires autorise des lectures équivoques. En attendant une décision claire du Conseil d'État, cette ambiguïté demeure une source d'insécurité juridique pour l'enseignement public comme pour l'enseignement privé.

J'en viens à la question des fratries.

Pour l'enseignement public, l'article R. 212-21 du code de l'éducation dispose que la commune de résidence est tenue de participer financièrement à la scolarisation maternelle ou élémentaire dans une autre commune du frère ou de la soeur d'un enfant inscrit la même année scolaire dans une école publique de ladite commune d'accueil, dans le cas où la scolarisation de l'enfant de référence dans la commune d'accueil est elle-même justifiée par une des dérogations classiques (activité professionnelle des parents, état de santé de l'enfant, capacité d'accueil insuffisante dans la commune de résidence).

Il faut noter que l'inscription simultanée de deux frères ou soeurs n'emporte pas l'application de cette mesure, qui n'est valable qu'en cas d'inscription échelonnée. Elle vaut pour un regroupement de fratrie mais pas pour une inscription groupée de fratrie.

Il n'existe pas de dispositions analogues pour l'enseignement privé et c'est par extrapolation, en recourant au principe de parité, qu'il faudrait interpréter les termes de la loi Carle en matière de prise en compte des fratries. La seule condition restrictive propre au privé serait la limitation aux seules classes élémentaires, sans tenir compte des inscriptions en classes maternelles.

En tout état de cause, le critère de regroupement de la fratrie paraît matériellement très difficile à utiliser pour les établissements privés. Comme le notent les préfectures sondées par la DGCL, il faut que chaque établissement privé concerné fasse la preuve au cas par cas que les aînés en général auraient pu bénéficier d'une dérogation à l'époque de leur inscription. En particulier, pour apprécier les capacités d'accueil au moment de l'inscription de l'aîné, le chef d'établissement doit vérifier les statuts en vigueur à l'époque des éventuels EPCI, ce qui s'apparente à une enquête quasi impossible pour lui.

Nous devons confesser un regret dans l'exercice de la tâche qui nous a été confiée, celui de n'avoir pu disposer que de très peu de données statistiques. Cela a compliqué notre appréciation exacte de la portée du problème et de l'efficacité de la solution.

Parmi les élèves non-résidents accueillis dans des établissements privés, il est très ardu de déterminer le nombre d'élèves effectivement concernés par la loi Carle. Personne au niveau des communes ou des préfectures ne procède à ce recensement, et encore moins les instances nationales de l'enseignement privé et les directions centrales des ministères. S'y oppose clairement le défaut d'information sur les motifs d'inscription dans les écoles privées. Il faudrait procéder à une enquête auprès des familles pour savoir si elles entrent dans un des cas de figure. Les maires des petites communes rurales n'émettent pas d'avis et ne sont pas informés d'une décision d'inscription. Leurs moyens d'identifier les élèves concernés auprès des autres maires sont aussi limités.

Même s'il n'existe aucune statistique précise qui renseigne sur le nombre d'élèves entrant dans le champ du dispositif, nous nous sommes appuyés sur les estimations de la direction des affaires financières du ministère de l'éducation nationale. Peu d'élèves seraient concernés par la loi Carle et les flux financiers générés seraient d'autant plus difficiles à repérer qu'ils seraient d'ampleur marginale.

Un tiers des élèves scolarisés en primaire dans les établissements de l'enseignement catholique seraient des non-résidents, ce qui représente environ 300 000 élèves. Il faut soustraire les classes maternelles qui ne sont pas concernées par la loi Carle et ne tenir compte que des 200 000 élèves non-résidents scolarisés dans des classes élémentaires privées. Ensuite, il faut encore soustraire de ce total tous les élèves non-résidents qui ne rentrent pas dans un des cas de dépenses obligatoires prévus par la loi de 2009. Le ministère de l'éducation nationale estime au final que 30 000 élèves seulement entrent dans le champ de la loi Carle.

En outre, à partir de données rassemblées et retraitées par la Cour des comptes et d'informations transmises par l'enseignement catholique, le ministère de l'éducation nationale estime le forfait communal moyen à 550 euros par élève. On aboutit ainsi à une estimation financière maximale des flux qui pourraient être générés par l'application intégrale de la loi à 16,5 millions d'euros.

En tout état de cause, les sommes sont trop faibles et trop éparpillées sur des milliers de communes, pour que la direction générale des finances publiques entreprenne de mettre en place un système d'extraction spécifique des données financières relatives à l'application de la loi Carle. Rappelons que les coûts des systèmes d'information dans l'éducation nationale sont déjà colossaux. Il faut veiller à ce que le suivi de la loi Carle et un légitime besoin d'informations ne coûtent finalement pas davantage que la loi Carle elle-même.

M. David Assouline , président . - Vos propos, messieurs les rapporteurs, nous éclairent sur les raisons pour lesquelles votre travail d'analyse est empreint de tant d'harmonie et ne propose guère d'évolution à la loi étudiée. Vous avez toutefois soulevé le problème que constituent les différences d'appréciation juridique entre les ministères de l'intérieur et de l'éducation nationale. À mon sens, c'est le rôle de notre commission d'exiger que ces divergences, qui créent tant d'incompréhensions sur le terrain, soient corrigées. Pourriez-vous intervenir en ce sens auprès des ministères concernés, afin que ce rapport ne se limite pas à la seule information du Parlement ?

Vous avez cité le chiffre de 30 000 élèves concernés par le dispositif de la loi Carle : c'est effectivement fort disproportionné au regard des combats idéologiques qui ont agité notre hémicycle à l'occasion du vote de ce texte. Un tel écart avait déjà été observé lors de l'examen du rapport de nos collègues Corinne Bouchoux et Jean-Claude Lenoir relatif à l'indemnisation des victimes d'essais nucléaires : le dispositif ne pouvait s'appliquer à si peu de gens qu'au final, la loi restait sans effet pratique. Ces exemples nous rappellent combien les études d'impact réalisées en amont sont essentielles à la dédramatisation du débat politique.

Mme Marie-Annick Duchêne . - Deux éléments doivent être gardés à l'esprit s'agissant de l'application de la loi Carle : d'abord, l'enseignement privé n'est pas soumis à la sectorisation scolaire ; ensuite, les forfaits dus par les communes lorsque des enfants ne sont pas scolarisés sur leur territoire sont rarement versés aux communes d'accueil. En charge du suivi de ce dossier dans le département des Yvelines, j'ai souvenir, qu'à l'époque de l'adoption de la loi, les combats idéologiques faisaient rage. Pourtant, les forfaits communaux ont rarement été mis en oeuvre tant les élus comprenaient finalement les raisons avancées par les parents pour scolariser leur enfant dans l'enseignement privé hors du territoire de leur commune de résidence. En réalité, ces forfaits sont majoritairement versés lorsque les communes ne se sont pas mises d'accord entre elles en amont. J'avais, pour ma part, demandé au directeur diocésain du département de faire preuve d'indulgence et de compréhension à l'égard des communes rurales qui ne disposaient plus que de quelques classes dans l'enseignement public. Il s'agissait en effet d'éviter que de trop nombreuses inscriptions dans le privé ne conduisent à la fermeture de ces classes. Finalement, les communes riches, où les écoles privées sont nombreuses, assument l'essentiel des frais de scolarisation. Le diocèse des Yvelines n'a pas souhaité passionner le débat et, de ce fait, la guerre scolaire n'a pas eu lieu.

M. Jean-Claude Lenoir . - J'aurai trois observations et deux questions pour nos rapporteurs. Je souhaite tout d'abord les féliciter pour leur travail d'analyse qui nous permettra de mieux répondre à nos interlocuteurs de terrain, bien que les différences d'appréciation juridique soulevées posent toujours question. Ensuite, je constate, à l'instar de notre président David Assouline, que les études d'impact permettent efficacement d'éviter d'envenimer inutilement les débats. Enfin, je souhaite attirer votre attention sur les difficultés que constitue, pour l'avenir, le regroupement des intercommunalités qui conduira de nombreux parents à inscrire leurs enfants dans des établissements privés situés à la frange de leur territoire désormais élargi.

Ma première question concerne les charges prises en compte dans le calcul du forfait dû, par enfant, à la commune d'accueil. Si les investissements ne sont pas pris en compte, qu'en est-il des charges financières liées à ces investissements ?

Ma seconde question porte sur les inégalités trop souvent constatées dans un même département, d'une intercommunalité à l'autre, s'agissant du forfait versé par élève. Avez-vous, dans le cadre de vos travaux, pensé à un système de calcul permettant l'uniformisation ou, à tout le moins, le rapprochement de ces montants ?

M. Michel Le Scouarnec . - Parfois, pour des raisons géographiques, certaines communes scolarisent de nombreux enfants qui ne résident pas sur leur territoire. À titre d'exemple, sur les 1 600 élèves d'Auray, 500, dont 300 scolarisés dans l'enseignement privé, n'habitent pas la ville, ce qui représente une somme importante. Avant mon élection en 1995, la municipalité versait une somme identique pour chaque enfant scolarisé dans le privé, qu'il réside ou non à Auray, alors qu'elle ne participait pas à l'achat de fournitures scolaires dans les établissements publics. J'ai remédié à cette inégalité en prenant en compte, dans le versement des subventions, la commune d'origine des enfants scolarisés dans les différents établissements. Avec les autres maires du canton, nous avons également travaillé à uniformiser les forfaits. Deux communes ont ainsi participé aux frais de scolarité de leurs élèves dans les établissements privés d'Auray, tandis qu'un accord était trouvé pour le versement d'un forfait de 200 à 250 euros pour chaque élève extérieur scolarisé dans une école primaire publique. La situation s'est donc nettement améliorée.

M. Jacques Legendre , rapporteur - Sous réserve de vérification, les remboursements ne concernent que les frais de fonctionnement et en aucun cas les remboursements des intérêts d'emprunts contractés pour des investissements.

M. Jacques-Bernard Magner , rapporteur . - Pour répondre à la question relative aux intercommunalités, j'indique que la compétence scolaire relève souvent de la commune. Toutefois, certaines activités sont en voie de transfert au niveau communautaire, tels les temps d'activités périscolaires (TAP). Il n'existe que quelques rares EPCI ayant la compétence et des regroupements pédagogiques intercommunaux relevant parfois de deux ou trois EPCI différents.

Le montant du forfait est quant à lui soumis à un accord. Lorsque j'étais moi-même adjoint aux affaires scolaires à Clermont-Ferrand, j'avais passé un accord avec l'enseignement diocésain. Le chiffre sur lequel nous nous étions accordés a d'ailleurs fait l'objet d'un litige quelques années plus tard et a été revalorisé pour prendre en compte de nouveaux éléments. Il existe peu de débat au niveau des écoles élémentaires car les relations avec les communes sont généralement bonnes.

À l'issue de ce débat, la publication du rapport est autorisée à l'unanimité.

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

Mercredi 30 avril 2014

• Ministère de l'Éducation nationale, de l'Enseignement supérieur et de la Recherche : M. Bernard TOULEMONDE , inspecteur général honoraire ; Pr. Antony TAILLEFAIT , professeur des universités, UFR de Droit, Économie et Gestion, Droit - Enseignants et Chercheurs Droit public

• Sénat : M. Jean-Claude CARLE , vice-président du Sénat, sénateur de la Haute-Savoie

Jeudi 15 mai 2014

• Comité national d'action laïque ( CNAL ) : Mmes Céline RIGO , secrétaire générale du CNAL et secrétaire nationale du syndicat des enseignants - l'Union nationale des syndicats autonomes (SE-UNSA), Roseline GASCÒ , secrétaire générale de la fédération des délégués départementaux de l'éducation nationale (DDEN), M. Nicolas SADOUL , secrétaire national de la Ligue enseignement, Mmes Valérie MERCH-POPELIER , secrétaire générale de la Fédération des conseils de parents d'élèves (FCPE), et Céline FAURAND , secrétaire générale l'Union nationale des syndicats autonomes, UNSA éducation

Ministère de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche : M. Frédéric BONNOT , sous-directeur de l'enseignement privé à la direction des affaires financières - Secrétariat général de l'éducation nationale, enseignement supérieur, recherche

Association des parents d'élèves de l'enseignement libre ( APEL ) : M. Christophe ABRAHAM , délégué national

Association des maires ruraux de France ( AMRF ) : M. Louis PAUTREL , président des maires ruraux d'Ille-et-Vilaine et membre du bureau national de l'AMRF

• Direction générale des collectivités locales ( DGCL ) : M. Guillaume ROBILLARD , chef du bureau des services publics locaux, Mmes Arielle ROUMI , rédactrice en charge du secteur éducation au sein du bureau des services publics locaux, sous-direction des compétences et des institutions locales, Isabelle THOMAS , adjoint du chef du bureau, et M. Stéphane MONET , adjoint du chef du bureau

• Secrétariat général de l'enseignement catholique : M. Yann DIRAISON, délégué général des ressources humaines

• Inspection générale de l'éducation nationale ( IGEN ) : M. Didier JOUAULT , inspecteur général, et Inspection générale de l'administration de l'éducation nationale et de la recherche ( IGAENR ) : Mme Isabelle ROUSSEL , inspecteur général

Association des maires de France (AMF) : Mme Annie GENEVARD , députée-maire de Morteau et rapporteure de la commission éducation et culture de l'AMF, et M. Sébastien FERRIBY , conseiller technique éducation et culture à l'AMF.

ANNEXES

Enseignement privé sous contrat

Règles de prise en charge par les communes des dépenses de fonctionnement des écoles privées sous contrat

NOR : MENF1203453C
circulaire n° 2012-025 du 15-2-2012
MEN - DAF D2

Texte adressé aux préfètes et préfets ; aux rectrices et recteurs d'académie ; aux directrices et directeurs académiques des services de l'éducation nationale

La présente circulaire a pour objet principal de préciser les conditions de mise en oeuvre de la loi n° 2009-1312 du 28 octobre 2009 tendant à garantir la parité de financement entre les écoles élémentaires publiques et privées sous contrat d'association lorsqu'elles accueillent des élèves scolarisés hors de leur commune de résidence et du décret n° 2010-1348 du 9 novembre 2010 pris pour son application. Cette circulaire rappelle également les principales règles de la participation des communes aux dépenses de fonctionnement des établissements privés sous contrat avec l'État et les modalités de la procédure de l'inscription d'office à mettre en oeuvre en cas de défaillance de la collectivité. La présente circulaire vient abroger et remplacer la circulaire n° 2007-142 du 27 août 2007.


1 - Étendue de l'obligation de prise en charge, par les communes, des dépenses de fonctionnement des écoles privées sous contrat


1.1 Cas dans lesquels la participation de la commune est obligatoire


1.1.1 Pour l'élève scolarisé dans une école privée sous contrat d'association située dans sa commune de résidence, l'obligation de prise en charge par les communes des dépenses de fonctionnement des écoles privées sous contrat d'association répond au principe de parité entre l'enseignement privé et l'enseignement public qui impose, en application de l'article L. 442-5 du code de l'éducation, que les dépenses de fonctionnement des classes sous contrat d'association soient prises en charge dans les mêmes conditions que celles des classes correspondantes de l'enseignement public.


Pour les communes concernées, la participation aux dépenses de fonctionnement des établissements d'enseignement privés sous contrat du premier degré à hauteur des dépenses de fonctionnement consenties pour les écoles publiques est toujours obligatoire.

Toutefois, il y a lieu de préciser que :

- la commune n'est tenue d'assumer la prise en charge des dépenses de fonctionnement des classes élémentaires privées sous contrat d'association qu'en ce qui concerne les élèves domiciliés sur son territoire (cette précision a été apportée par le Conseil d'État dans une décision du 31 mai 1985 ministère de l'éducation c/association d'éducation populaire Notre-Dame-d'Arc-lès-Gray, qui rappelle « qu'une commune sur le territoire de laquelle se trouve un établissement d'enseignement privé sous contrat d'association comportant des classes élémentaires doit, par application des dispositions de l'article 4 de la loi du 31 décembre 1959, prendre en charge les dépenses de fonctionnement de ces classes mais seulement en ce qui concerne les élèves résidant dans la commune ») ;

- la commune ne doit supporter les dépenses de fonctionnement des classes maternelles et enfantines privées que lorsqu'elle a donné son accord à la mise sous contrat d'association de ces classes (article R. 442-44 du code de l'éducation).


La participation de la commune est calculée par élève et par an en fonction du coût de fonctionnement relatif à l'externat des écoles publiques de la commune ou, à défaut, du coût de fonctionnement moyen relatif à l'externat des écoles publiques du département.


Lorsque la commune de résidence est membre d'un établissement public de coopération intercommunale (EPCI) compétent pour le fonctionnement des écoles publiques, cet établissement, par application de l'article L. 442-13-1 du code de l'éducation, est substitué aux communes dans leurs droits et obligations à l'égard des établissements d'enseignement privés sous contrat d'association. Par conséquent, l'EPCI est tenu d'assumer la prise en charge des dépenses de fonctionnement des classes privées sous contrat d'association en ce qui concerne les élèves domiciliés sur le territoire de l'EPCI.


La liste des dépenses de fonctionnement à prendre en compte pour le calcul de la contribution communale, telle qu'elle résulte de l'article L. 442-5 du code de l'éducation et conformément à l'interprétation qu'en a donné le Conseil d'État, est annexée à la présente circulaire.

1.1.2 Pour l'élève scolarisé dans une école privée sous contrat d'association située hors de sa commune de résidence, le nouvel article L. 442-5-1 du code de l'éducation détermine le principe de la contribution de la commune de résidence et fixe les cas dans lesquels cette contribution est obligatoire, mettant ainsi fin à des difficultés d'interprétation qui avaient fait obstacle à la bonne application du principe de parité.


Ainsi, comme pour une scolarisation dans l'enseignement élémentaire public, si la commune de résidence ne dispose pas des capacités d'accueil nécessaires à la scolarisation de l'élève, la prise en charge de l'élève scolarisé dans une école élémentaire privée sous contrat d'association en dehors de la commune de résidence présente toujours un caractère obligatoire.

Lorsque la commune de résidence appartient à un regroupement pédagogique intercommunal (RPI), organisé dans le cadre d'un EPCI chargé de la compétence en matière de fonctionnement des écoles publiques (nouvel article D. 442-44-1 du code de l'éducation), la capacité d'accueil dans les écoles publiques doit s'apprécier par rapport au territoire de l'EPCI et non par rapport au territoire de la seule commune de résidence. Si, en revanche, la commune de résidence est membre d'un RPI qui n'est pas adossé à un EPCI, la capacité d'accueil est appréciée uniquement par rapport aux écoles situées sur son territoire communal.

Si la commune est en mesure d'accueillir l'élève, la prise en charge présentera, ici encore comme pour l'enseignement public, un caractère obligatoire lorsque la fréquentation par l'élève d'une école située sur le territoire d'une autre commune que celle où il est réputé résider trouve son origine dans des contraintes liées :

- aux obligations professionnelles des parents, lorsqu'ils résident dans une commune qui n'assure pas directement ou indirectement la restauration et la garde des enfants ;

- à l'inscription d'un frère ou d'une soeur dans un établissement scolaire de la même commune ;

- à des raisons médicales.


Il y a lieu de préciser que le Conseil d'État a rappelé, dans l'avis qu'il a rendu le 6 juillet 2010, que la loi du 28 octobre 2009 a pour objet de garantir la parité de financement entre les écoles élémentaires publiques et privées sous contrat d'association lorsqu'elles accueillent des élèves scolarisés hors de leur commune de résidence.


Il conviendra de rappeler, si nécessaire, aux communes que les accords qu'elles ont pu passer entre elles quant aux modalités de prise en charge des élèves scolarisés dans leurs écoles publiques sont sans influence sur le caractère obligatoire de leur participation aux frais de scolarité des élèves des classes sous contrat d'association des écoles privées. C'est notamment le cas lorsque ces accords prévoient que les communes de résidence sont dispensées de verser à la commune d'accueil une participation au titre de leurs élèves scolarisés dans le public.


Il y a lieu de rappeler également qu'aucun accord préalable du maire, qu'il s'agisse du maire de la commune de résidence ou, le cas échéant, du maire de la commune d'accueil, n'est exigé pour la scolarisation dans un établissement privé, conformément au principe de liberté de choix des parents garanti constitutionnellement.


1.2 Cas dans lesquels la participation de la commune n'est pas obligatoire

Dans toutes les autres situations, la commune peut toujours, sur la base du volontariat, faire le choix de participer aux frais de scolarité des élèves, qu'ils soient scolarisés dans ou hors de la commune. Ainsi, une commune peut financer, si elle le décide, la scolarisation des enfants inscrits dans une classe maternelle ou enfantine privée, soit qu'ils résident dans la commune siège de l'école privée alors qu'elle n'a pas donné son accord au contrat d'association pour ces classes, soit qu'ils résident dans une autre commune que celle où est située l'école privée.

La commune peut également sur la base du volontariat participer au financement des dépenses de fonctionnement des classes sous contrat simple dans les conditions prévues à l'article R. 442-53 du code de l'éducation.


1.3 Modalités de participation de la commune de résidence en cas de scolarisation d'un élève hors de la commune

La contribution de la commune de résidence est calculée selon les règles prévues au dernier alinéa de l'article L. 442-5-1 du code de l'éducation.

Le forfait communal est calculé par référence au coût moyen d'un élève externe scolarisé dans les écoles publiques de la commune d'accueil. Toutefois, le montant dû par la commune de résidence par élève ne peut être supérieur au coût qu'aurait représenté pour la commune de résidence l'élève s'il avait été scolarisé dans une de ses écoles publiques. Les ressources de la commune de résidence doivent également être prises en compte dans ce calcul. La liste des dépenses à prendre en compte, figurant en annexe, s'applique également à cette situation.


En matière de dépenses obligatoires , il convient de préciser que seules les dépenses de fonctionnement font l'objet d'une contribution obligatoire de la commune de résidence, l'intégration des dépenses d'investissement dans le calcul du forfait communal est prohibée.

Il y a lieu de souligner que la nomenclature comptable utilisée par les communes n'est pas opposable aux établissements et seul compte le point de savoir si les dépenses en cause doivent être véritablement regardées comme des investissements ou au contraire comme des charges ordinaires. Aussi, la seule inscription en section de fonctionnement ou, au contraire, en section d'investissement d'une dépense engagée par la commune ou l'EPCI au profit des écoles publiques situées sur son territoire ne saurait suffire à justifier sa prise en compte ou non dans le montant des dépenses consacrées aux classes de l'enseignement public du premier degré (Conseil d'État, n° 309948, 2 juin 2010, Fédération Unsa et autres).


En matière de dépenses facultatives , l'article L. 533-1 du code de l'éducation dispose que les collectivités territoriales, les établissements publics de coopération intercommunale et les caisses des écoles peuvent faire bénéficier des mesures à caractère social tout enfant sans considération de l'établissement d'enseignement qu'il fréquente. Toutefois, la circulaire interministérielle n° 89-273 du 25 août 1989 prévoit que, lorsque les communes prennent en charge des dépenses telles que les dépenses de cantine scolaire, les frais de garderie en dehors des horaires de classe, les dépenses afférentes aux classes de découverte ainsi que les autres dépenses facultatives, ces dépenses ne sont pas prises en compte pour le calcul du forfait. En application du principe de parité de financement, l'exclusion de ces types de dépenses s'applique aussi s'agissant de l'article L. 442-5-1 du code de l'éducation.

Le Conseil d'État, dans une décision rendue le 7 avril 2004, n° 250402, commune de Port d'Envaux, a cependant nuancé le dispositif de la circulaire en considérant que les dépenses prises en compte pour la répartition intercommunale des charges des écoles primaires publiques prévue par l'article L. 212-8 du code de l'éducation sont les frais effectivement supportés par la commune d'accueil pour assurer le fonctionnement des écoles, mêmes si elles n'ont pas un caractère obligatoire, dès lors qu'elles ne résultent pas de décisions illégales.

Le Conseil d'État a précisé que les dépenses de la commune exposées dans les classes élémentaires publiques qui se rapportent à des activités scolaires , alors même qu'il ne s'agirait pas de dépenses obligatoires, doivent être prises en compte pour le calcul de la participation de la commune aux dépenses de fonctionnement des classes sous contrat d'association (Conseil d'État, n° 325846, 12 octobre 2011, commune de Clermont-Ferrand c/ OGEC Fénelon pour des dépenses relatives au transport des élèves lors des activités scolaires, à la médecine scolaire, à la rémunération d'intervenants lors des séances d'activités physiques et sportives et aux classes de découverte).

En définitive, les communes disposent d'une marge d'appréciation importante en la matière. Dès lors, il importe de s'assurer du respect de deux règles :

- l'interdiction pour la commune de résidence de financer un coût moyen par élève supérieur au coût moyen de ses propres écoles publiques ;

- l'obligation pour la commune de résidence de traiter de la même façon le cas des élèves scolarisés dans un établissement privé et celui des élèves scolarisés dans une école publique de l'autre commune. Lorsque la commune d'accueil prend en charge les dépenses de fonctionnement des classes sous contrat d'association pour l'ensemble des élèves résidents et non-résidents, la commune de résidence verse à la commune d'accueil la contribution correspondant à la prise en charge des élèves domiciliés sur son territoire et scolarisés dans la commune d'accueil. Si, en revanche, la commune d'accueil ne prend en charge que les dépenses de fonctionnement des classes sous contrat d'association pour les élèves domiciliés sur son territoire, la commune de résidence des élèves scolarisés dans une école privée de la commune d'accueil peut verser directement à l'organisme gestionnaire de l'établissement privé sa contribution pour ces élèves.


2 - L'intervention du préfet pour déterminer le montant de la contribution de la commune de résidence


2.1 Le préfet est désormais chargé de fixer le montant de la contribution

En application de l'article 2 de la loi n° 2009-1312 précitée, lorsqu'il est porté à la connaissance du préfet que les dispositions susmentionnées ne sont pas appliquées, qu'il s'agisse du refus de participation d'une commune ou du montant insuffisant de la contribution versée par cette dernière, il lui appartient de prendre toutes les mesures nécessaires pour remédier à cette situation. L'absence d'action de sa part est susceptible d'être contestée par la voie contentieuse. En effet, l'article L. 442-5-2 du code de l'éducation prévoit que le préfet dispose d'un délai de trois mois à compter de la date à laquelle il a été saisi par la plus diligente des parties. Cet article ne prévoit pas l'avis préalable du conseil départemental de l'éducation nationale.

À cet égard, les services départementaux de l'éducation nationale assurent auprès du préfet un rôle de conseil et d'expertise, au titre de leur compétence de contrôle et de gestion des établissements d'enseignement privé (cf. par analogie l'article R. 212-23 du code de l'éducation).

S'il convient, dans un premier temps, de privilégier la voie de l'accord entre les parties concernées, la recherche de cet accord ne saurait compromettre, de manière durable, l'application de la loi.


En cas d'impossibilité de parvenir à un accord, le préfet statue, avant l'expiration du délai de 3 mois, sur le montant de la contribution. Pour assurer la mise en oeuvre du paiement de cette contribution, il y a lieu de privilégier les dispositions de l'article L. 1612-15 du code général des collectivités territoriales plutôt que celles du déféré préfectoral.

2.2 En cas de contentieux, le préfet intervient dans le cadre de la procédure d'inscription d'office et de mandatement d'office


Il appartient au préfet, à l'occasion de la saisine de la chambre régionale des comptes, de justifier du caractère obligatoire et du montant des sommes dues par la commune. Il peut, pour cela, s'appuyer sur les budgets qui lui sont transmis dans le cadre du contrôle budgétaire et sur l'expertise des comptables publics et des services de l'inspection académique. Dans le cas où la commune concernée ne dispose pas d'école publique sur son territoire, le préfet s'appuie sur le coût moyen départemental qu'il aura fait déterminer, au préalable, par les services compétents.


2.2.1 S'agissant de la procédure d'inscription d'office, l'article L. 442-5-1 du code de l'éducation qualifie de dépense obligatoire la contribution de la commune de résidence aux frais de scolarisation d'un élève dans une école privée sous contrat d'association dans la commune d'accueil, dès lors que cette contribution aurait également été due si cet élève avait été scolarisé dans une des écoles publiques de la commune d'accueil. Si la dépense en cause remplit ces conditions, elle revêt le caractère de dépense obligatoire, qui est susceptible de faire l'objet d'une procédure d'inscription d'office au budget de la commune de résidence. Dès lors, en application de l'article L. 1612-15 du code général des collectivités territoriales, le préfet peut saisir la chambre régionale des comptes afin que cette dernière mette en demeure la collectivité d'inscrire le montant de la dépense au budget communal. Si cette mise en demeure n'est pas suivie d'effet dans le mois suivant, la chambre régionale des comptes demande au préfet d'inscrire cette dépense au budget de la commune et propose, le cas échéant, la création de ressources ou la diminution des dépenses facultatives destinées à couvrir la dépense obligatoire. Dès lors, le préfet règle et rend exécutoire le budget rectifié, conformément à l'avis rendu par la chambre régionale des comptes. La décision par laquelle le préfet règle le budget et le rend exécutoire est adressée dans un délai de vingt jours à compter de la notification de l'avis de la chambre régionale des comptes d'une part à la commune, d'autre part à la chambre. Cette mission, qui s'inscrit dans la procédure du contrôle budgétaire, confère au représentant de l'État dans le département une compétence liée.


La procédure d'inscription d'office d'une dépense obligatoire complète la procédure de rétablissement de l'équilibre réel du budget prévue à l'article L. 1612-5 du code général des collectivités territoriales. Ainsi, tant que le délai d'un mois après la transmission du budget imparti au représentant de l'État par l'article L. 1612-5 n'est pas expiré, celui-ci doit mettre en oeuvre la procédure de ce même article L. 1612-5 puisque le budget en cause ainsi adopté n'est pas en équilibre réel, dans la mesure où il ne retrace pas l'intégralité des dépenses à acquitter. À l'expiration de ce délai d'un mois, en revanche, il y a lieu de recourir à la procédure d'inscription d'office prévue à l'article L. 1612-15 du code général des collectivités territoriales.


2.2.2 La procédure de mandatement d'office prévue par l'article L. 1612-16 du code général des collectivités territoriales peut aussi être mise en oeuvre afin d'ordonner au comptable public de payer la dépense liquidée qui aura fait l'objet d'une procédure d'inscription d'office, mais également d'une dépense dotée de crédit au budget.


En cas d'absence de mandatement d'une telle dépense, il appartient donc au préfet de s'assurer que celle-ci revêt le caractère de dépense obligatoire. Il ressort des dispositions combinées des articles L. 1612-15 et L. 1612-16 du code général des collectivités territoriales que deux catégories de dépenses présentent pour les collectivités territoriales un caractère obligatoire et peuvent faire l'objet d'un mandatement d'office : les dépenses nécessaires à l'acquittement des dettes exigibles et les dépenses obligatoires par détermination de la loi. Précisant cette définition, le Conseil d'État considère qu'une dépense ne peut être regardée comme obligatoire et faire l'objet d'un mandatement d'office que si elle correspond à une dette échue, certaine, liquide, non sérieusement contestée dans son principe et dans son montant et découlant de la loi, d'un contrat, d'un délit, d'un quasi-délit ou de toute autre source d'obligations (CE, 17 déc. 2003, n° 249089, Sté Natexis-Banques populaires).

Dès lors, et à condition qu'elle soit échue, certaine, liquide et non sérieusement contestée dans son principe et dans son montant, la dette découlant pour une commune d'un tel contrat présente le caractère d'une dette exigible et la dépense correspondante constitue une dépense obligatoire susceptible de faire l'objet d'une procédure de mandatement d'office. Il appartient donc au préfet, avant de procéder si besoin au mandatement d'office, de vérifier que les éventuelles conditions entraînant l'obligation à la charge de la collectivité sont remplies (domicile des élèves, etc.), que le montant de la dette a été exactement calculé et que la dette ne fait l'objet d'aucune contestation sérieuse, ni dans son principe, ni dans son montant. En outre, le préfet doit mettre en demeure l'ordonnateur de mandater les crédits en cause. Si, dans un délai d'un mois suivant cette mise en demeure (si la dépense est égale ou supérieure à 5 % de la section de fonctionnement du budget primitif, le délai dont dispose l'exécutif local après la mise en demeure du préfet est portée à deux mois), l'exécutif local refuse toujours de mandater les crédits en cause, il revient au préfet d'y procéder d'office par arrêté.

Les modalités précises des procédures d'inscription et de mandatement d'office sont décrites dans la circulaire du 30 décembre 1997, n° NORINTB9700228C

Pour le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration et par délégation,

Le directeur général des collectivités locales,

Éric Jalon

Pour le ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative et par délégation,

Le directeur des affaires financières,

Frédéric Guin

Annexe
Rappel des dépenses à prendre en compte pour la contribution communale ou intercommunale


Dépenses obligatoires

Les dépenses de fonctionnement d'une classe élémentaire sous contrat d'association constituent une dépense obligatoire à la charge de la commune ou de l'EPCI compétent. Le montant de la contribution communale s'évalue à partir des dépenses de fonctionnement relatives à l'externat des écoles publiques correspondantes inscrites dans les comptes de la commune ou de l'EPCI et qui correspondent notamment (cette liste n'est pas exhaustive) :

- à l'entretien des locaux liés aux activités d'enseignement, ce qui inclut outre la classe et des accessoires, les aires de récréation, les locaux sportifs, culturels ou administratifs, etc. ;

- à l'ensemble des dépenses de fonctionnement des locaux désignés ci-dessus telles que chauffage, eau, électricité, nettoyage, produits d'entretien ménager, fournitures de petit équipement, autres matières et fournitures, fournitures pour l'entretien des bâtiments, contrats de maintenance, assurances, etc. ;

- à l'entretien et, s'il y a lieu, le remplacement du mobilier scolaire et du matériel collectif d'enseignement ;

- à la location et la maintenance de matériels informatiques pédagogiques ainsi que les frais de connexion et d'utilisation de réseaux afférents ;

- aux fournitures scolaires, aux dépenses pédagogiques et administratives nécessaires au fonctionnement des écoles publiques ;

- à la rémunération des intervenants extérieurs, recrutés par la commune, chargés d'assister les enseignants pendant les heures d'enseignement prévues dans les programmes officiels de l'éducation nationale ;

- à la quote-part des services généraux de l'administration communale ou intercommunale nécessaire au fonctionnement des écoles publiques ;

- au coût des transports pour amener les élèves de leur école aux différents sites pour les activités scolaires (piscine, gymnase...) ainsi que le coût d'utilisation de ces équipements ;

- au coût des ATSEM, pour les classes pré-élémentaires pour lesquelles la commune a donné un avis favorable à la conclusion du contrat d'association ou s'est engagée ultérieurement à les financer.


En l'absence de précisions législatives ou réglementaires, les communes ou les EPCI compétents en matière scolaire peuvent soit verser une subvention forfaitaire, soit prendre en charge directement tout ou partie des dépenses sous forme de fourniture de prestations directes (livraisons de fuel ou matériels pédagogiques, intervention de personnels communaux ou intercommunaux, par exemple), soit payer sur factures, soit combiner les différentes formes précitées.


Aux termes de la jurisprudence, la nomenclature comptable utilisée par les communes n'est pas opposable aux établissements et seul compte le point de savoir si les dépenses en cause doivent être véritablement regardées comme des investissements ou au contraire comme des charges ordinaires. Aussi, la seule inscription en section de fonctionnement ou, au contraire, en section d'investissement d'une dépense engagée par la commune ou l'EPCI au profit des écoles publiques situées sur son territoire ne saurait suffire à justifier sa prise en compte ou non dans le montant des dépenses consacrées aux classes de l'enseignement public du premier degré.


À l'opposé, ne sont pas prises en compte, pour le calcul du coût moyen de l'élève du public servant de référence à la contribution communale, les dépenses d'investissement et les dépenses de location de locaux scolaires.


Dépenses facultatives

Les dépenses de fonctionnement des classes sous contrat simple peuvent être prises en charge par les communes, dans les conditions fixées par convention, passée entre la commune et l'école privée, qui contient des clauses fixant les modalités de sa reconduction et de sa résiliation. Ainsi, il peut toujours être mis fin à la convention en respectant la procédure prévue. Cette contribution, facultative, demeure toujours soumise à la règle selon laquelle elle ne peut en aucun cas être proportionnellement supérieure aux avantages consentis par la commune à son école publique ou ses écoles publiques. Aussi, une commune ou un EPCI qui souhaite financer des classes sous contrat simple malgré l'absence d'école publique sur son territoire, doit demander au préfet de lui indiquer le coût moyen d'un élève des écoles publiques du département, pour les classes de même nature.

La prise en charge des dépenses de fonctionnement des classes pré-élémentaires sous contrat d'association pour lesquelles la commune n'a pas donné son accord au contrat d'association concernant ces classes ou ne s'est pas engagée ultérieurement à les financer, constituent une dépense facultative pour la commune.

Enfin, et toujours de manière facultative, la commune ou l'EPCI peut décider de financer pour ses élèves scolarisés à l'extérieur les dépenses de fonctionnement des classes sous contrat simples situées dans la commune ou l'EPCI d'accueil.


* 1 Loi n° 83-663 du 22 juillet 1983 complétant la loi du 7 janvier 1983 relative à la répartition des compétences entre les communes, les départements, les régions et l'État.

* 2 Loi n° 85-97 du 25 janvier 1985 modifiant et complétant la loi n° 83-663 du 22 juillet 1983 et portant dispositions diverses relatives aux rapports entre l'État et les collectivités territoriales.

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