B. LA MOBILISATION DE L'ENSEMBLE DE LA COMMUNAUTÉ ÉDUCATIVE SUR LA BASE DES ABCD DE L'ÉGALITÉ DOIT DONNER À L'ÉCOLE LES MOYENS DE REDEVENIR LE CREUSET D'UNE CULTURE DE L'ÉGALITÉ
« Être éducateur au XXI ème siècle, c'est permettre à chaque enfant de se développer en fonction de ses potentialités sans être assigné à son sexe ou à sa classe sociale, et donc ouvrir tous les possibles humains » 57 ( * ) .
La délégation adhère pleinement à cette affirmation qui l'a guidée tout au long de ses travaux et à l'aune de laquelle elle a formulé des recommandations.
Nos auditions nous ont permis de rencontrer des professionnels de l'Éducation nationale de grande qualité - professeurs, formateurs, inspecteurs d'académie - tous engagés dans des parcours professionnels remarquables et ils nous ont donné confiance. Confiance dans une école qui considérerait chaque élève comme une personne unique et qui porterait l'idéal de l'accompagner dans l'apprentissage du respect de l'autre.
Or, comme nous l'avons entendu tout au long des auditions, l'école de l'égalité repose sur une mobilisation de toute la communauté éducative - enseignants, certes, mais aussi inspecteurs, conseillers principaux d'éducation, personnels d'encadrement, personnels médicaux... -. Comme le rappelait l'adjointe à la cheffe du service des droits des femmes et de l'égalité entre les hommes et les femmes, en charge des ABCD de l'égalité au ministère des droits des femmes 58 ( * ) , la valeur égalité n'a de sens que si elle est partagée.
1. Mobiliser l'ensemble de la communauté éducative
La réussite de tous et toutes, élèves, apprentis ou étudiants, qui est au coeur de la mission du service public de l'Éducation nationale, suppose de créer les conditions pour que l'école porte à tous les niveaux le message de l'égalité entre les filles et les garçons et contribue à modifier la division sexuée des rôles dans la société.
« Pour mettre en place la loi d'orientation et de programmation pour la refondation de l'école, il est essentiel de mobiliser les corps intermédiaires » , insistait notre collègue Françoise Cartron lors de la première table ronde organisée le 20 février 2014 59 ( * ) .
Nous estimons en effet que la formation des cadres et des inspecteurs est un facteur-clef. Ce sont eux qui pourraient être investis d'un devoir de vigilance sur la pédagogie des professeurs, afin de déjouer les stéréotypes de genre dans les classes. Or, selon notre collègue Françoise Cartron : « l'École supérieure de l'Éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche (ESEN), dans sa forme actuelle, ne me paraît pas être un outil de formation adapté » .
Lors de l'entretien de votre rapporteur avec son directeur 60 ( * ) , nous avons appris qu'étaient proposés de nombreux modules de formation relatifs à la question de l'égalité et aux stéréotypes.
Toutefois, ces outils restent optionnels et ne s'adressent finalement qu'à ceux qui sont déjà convaincus, comme le regrettait Fanny Lignon devant notre délégation 61 ( * ) .
Finalement, la mobilisation des cadres de l'Éducation nationale dépend essentiellement du niveau académique, rectorat par rectorat.
C'est ce qu'a rappelé la cheffe de la formation des enseignants à la DGESCO pour la formation, notamment en rappelant qu'une des manières d'impulser des axes nationaux tenait à la fixation de grandes priorités, charge aux académies de les mettre en oeuvre : « Chaque année, à l'automne, nous publions dix priorités de formation en direction des académies pour le premier et le second degré. Certaines sont déclinées sur trois ans pour leur permettre de produire des résultats concrets et d'autres sont renouvelées pour tenir compte de l'évolution du contexte » 62 ( * ) .
Or, si l'une de ces priorités concerne bien la formation à la laïcité, la lutte contre les discriminations et l'égalité entre les filles et les garçons, elle est inégalement prise en compte par les recteurs d'académies, qu'il s'agisse des plans stratégiques ou des plans de formation.
Ainsi, le rectorat de Rouen a signé une convention, portant sur les années 2013 à 2018, pour l'égalité entre les filles et les garçons et les femmes et les hommes dans le système éducatif qui prend en compte plusieurs axes, dont l'orientation scolaire et professionnelle, l'éducation des jeunes à l'égalité et l'intégration de l'égalité dans les pratiques professionnelles. Le dispositif repose sur des actions de formation, l'accompagnement et le dialogue.
Dans l'académie de Grenoble, le plan de formation a pris en compte cette thématique en s'appuyant sur des candidatures collectives. Comme l'a souligné la cheffe de la formation des enseignants à la DGESCO, « les inscriptions ne concernent pas des individus isolés, mais des équipes, ce qui me semble très intéressant » .
Pour la délégation, il s'agit de créer une véritable dynamique, en travaillant sur la sensibilisation de tous et en montrant aux enseignants comment devenir acteur du changement.
C'est l'objectif de la convention interministérielle pour l'égalité entre les filles et les garçons qui désigne comme objectif prioritaire une approche globale de l'éducation à l'égalité des sexes et est porteuse d'une vision partagée .
Sa mise en oeuvre repose sur un comité de pilotage et sur des journées de travail qui rassemble les professionnels de l'éducation de toutes les académies, qui nous semblent être des instances propices à la mobilisation de l'ensemble des rectorats .
Nous formulerons donc une recommandation en ce sens.
* 57 Extrait de l'audition par la délégation de la sociologue Sylvie Cromer, le 30 janvier 2014.
* 58 Lors de son audition par la délégation le 20 février 2014, dans le cadre de la table ronde « Établir un diagnostic partagé et tracer les pistes de réflexion » précitée.
* 59 Table ronde « Établir un diagnostic partagé et tracer les pistes de réflexion ».
* 60 Le 6 mai 2014.
* 61 Le 15 mai 2014 lors de la table ronde « Former les enseignants à la problématique de l'égalité entre les femmes et les hommes », déjà citée.
* 62 Extrait de l'audition du 15 mai 2014 déjà citée.