ANNEXES
1. Liste des personnes auditionnées
2. Vers une meilleure articulation des temps de vie pour tous
3. Note de Synthèse de la mission Bailly : Rapport sur la question des exceptions au repos dominical dans les commerces : vers une société qui s'adapte en gardant ses valeurs, décembre 2013
4. Guide méthodologique (extraits) de l'association Tempo territorial
5. Association AIDER : Le temps de la coordination commerces, services et territoire : Des marchés au bon endroit, au bon moment : l'exemple de Piégros-la-Clastre (26)
6. Synthèse des réflexions issues du travail des groupes focus - Région Nord-Pas-de-Calais
7. Convention entre la région Nord-Pas de calais et Lille Métropole : mise en place d'une démarche d'expérimentation avec un territoire dans le cadre de la démarche sur la prise en compte des temps dans l'aménagement du territoire à l'échelle régionale en Nord-Pas-de-Calais
8. Après l'espace, penser l'aménagement temporel du territoire et de ses services, Jean-Pierre Moure, Président de la communauté d'agglomération de Montpellier
9. Mindmap réalisée par Chrystelle Amblard - qui régule les temporalités locales ?
10. Principaux enseignements d'une enquête relative aux pratiques et aspirations au regard du dimanche dans la ville de Brive
11. Charte de qualité de vie nocturne - ville de Caen
12. Synthèse des actions en faveur d'une meilleure articulation des temps de vie de la ville de Caen
13. Mise en place des horaires continus pour les agents d'entretien de la communauté urbaine de Strasbourg
14. Communauté urbaine de Strasbourg - Charte de réunion
15. Tableau de suivi des actions de la mission temps - communauté urbaine de Strasbourg (mis à jour janvier 2014) et Lettre de mission de la chef de projet « mission des temps »
16. L'agence des temps de Poitiers
17. Quand une collectivité explore le temps pour incuber des services innovants : l'exemple du Grand Lyon
18. Propos sur le travail à distance : « Mon bureau, c'est la France »
19. Présentation des actions, enjeux et résultats de la mission « temps urbains » de la ville de Dijon
20. Un exemple d'amélioration des conditions de travail par l'aménagement du temps, Rennes
21. Action hyper pointes métro / temps des étudiants : Expérimentation d'une modification des horaires de début et de fin à l'Université de Haute Bretagne
22. Les politiques temporelles comme thème de campagne à Paris
23. « Et si on ouvrait davantage les bibliothèques? », Ouest-France le 10 février 2014
24. La campagne, hors du temps ? de Marie Danjean (extraits de l'ouvrage « urgences temporelles »)
25. La nuit, un temps particulier ?, conférence de Luc Gwiazdzinski du 29 septembre 2005
26. La construction d'un projet éducatif territorial (circulaire)
1. Liste des personnes auditionnées
Patrick Vasallo, Conseiller municipal délégué à l'égalité des droits, aux services publics, aux prestations administratives, aux temps de la ville, l'emploi et l'insertion et Pierre-Alexis Tchernoïvanoff, chargé de mission - ville de Saint-Denis
Déplacement à Rennes
Evelyne Reeves, Responsable du bureau des temps - ville de Rennes
Jocelyne Bougeard, Adjointe déléguée aux temps de la ville, aux droits des femmes, à l'égalité des droits et à la laïcité - ville de Rennes
Catherine Gabriel, Adjointe au maire chargée de la politique des temps et Marie-Claire Lacaze, Directrice de la politique des temps et de l'Égalité femmes-hommes - ville de Brive
Chrystelle Amblard, Responsable de la mission gestion des temps - communauté d'agglomération de Montpellier
Chantal Trouwborst, Conseillère municipale déléguée aux temps urbains - ville de Dijon
Déplacement à Poitiers
Jules Aimé, Conseiller municipal délégué à l'Agence des temps et Christine Sarrazin-Baudoux, adjointe déléguée à l'administration générale et à l'agence des temps - ville de Poitiers
Dominique Royoux, Directeur de l'agence des temps du Grand Poitiers et Mireille Terny, Animatrice de l'agence des temps
Marie Jacquin-Pavard, Cheffe de projet de la Mission des temps - communauté urbaine de Strasbourg
Corinne Féret, Première adjointe en charge du personnel municipal, de l'égalité entre les hommes et les femmes et du bureau des temps - ville de Caen
Lucie Verchere-Tortel, chargée de mission Temps et services innovants - communauté urbaine du Grand Lyon
Jean-Yves Boulin, chercheur associé à IRISSO-Université Paris-Dauphine
Cédric Szabo, directeur de l'association des maires ruraux de France
Patrice Vuidel, consultant associé chez Atémis, Maire Adjoint - ville de Pantin
Anne-Charlotte Riedel, Directrice générale adjointe des services - ville de Gradignan
Philippe Ducloux, adjoint en charge de la qualité des services municipaux, de l'accueil des usagers et du bureau des temps - ville de Paris
Mme Catherine Coutelle, ancienne adjointe au maire de la ville de Poitiers ayant créé l'agence des temps, présidente de la Délégation de l'Assemblée Nationale aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes
Myriam Cau, Vice-présidente déléguée au développement durable, à la démocratie participative et à l'évaluation et Benoit Guinamard, Chargé de mission au service "Observation et Prospective Régionale" - conseil régional du Nord-Pas-de-Calais
Robert Arnaud, Président de l'association Aider et Marie Danjean, chargée de mission
Jean-Paul Bailly, auteur d'un rapport pour le Premier ministre sur l'exception au repos dominical dans les commerces
Claude Boulle, Président exécutif de l'Union du Grand commerce de centre-ville
2. Vers une meilleure articulation des temps de vie pour tous
Dominique Méda, philosophe et sociologue, professeure de sociologie à l'université Paris-Dauphine, associée au Centre d'études de l'emploi (CEE), article publié dans la revue Alternatives Économiques Poche n° 063 - septembre 2013
Les parcours de vie des hommes et des femmes restent largement marqués par les stéréotypes traditionnels. Comment les dépasser et aller vers une meilleure articulation des temps de vie pour tous ?
Les enquêtes les plus récentes mettent en évidence que 15 % des couples avec enfants sont égalitaires, c'est-à-dire que les pères appartenant à ces couples sont non seulement capables de réaliser les mêmes tâches que les mères, mais les pratiquent autant qu'elles 82 ( * ) . Qui sont ces hommes qui déclarent s'occuper tout autant que leur compagne du biberon, du bain, des démarches administratives, des sorties, etc. ? Ils appartiennent à des couples où les deux conjoints travaillent et où les revenus du ménage sont plus élevés que la moyenne (supérieurs à 3 000 euros mensuels), le père y contribuant pour environ la moitié. Ils sont un peu plus âgés que la moyenne et occupent plutôt un poste de cadre ou de profession intermédiaire. Tout comme leur compagne, ils sont plus fréquemment sortis du système scolaire avec un niveau d'études supérieures.
La persistance d'une représentation traditionnelle des rôles
Des entretiens approfondis menés auprès de ces pères et mères hautement diplômés, ainsi que l'exploitation de grandes enquêtes 83 ( * ) mettent en évidence deux résultats marquants : d'abord, les pères les plus investis dans la vie familiale sont des pères "contraints" (ou "autorisés" ?) par l'investissement professionnel de leur partenaire. En effet, dans les couples où les hommes sont très impliqués dans la vie familiale, les femmes apportent au moins la moitié du revenu du ménage et leurs contraintes temporelles sont au moins équivalentes - et souvent supérieures - à celles des hommes.
Certes, les hommes aspirent à une paternité plus active, et celle-ci constitue plus que par le passé un élément essentiel de l'identité masculine. Mais une différence de taille subsiste dans l'exercice de la parentalité entre les hommes et les femmes : alors qu'une très grande partie des femmes, y compris celles qui sont très fortement engagées dans la vie professionnelle, reconnaissent avoir mis leur carrière en veilleuse, les hommes "égalitaires" savent aujourd'hui cumuler tous les rôles, mais ne mettent qu'exceptionnellement leur carrière en danger.
Deuxième résultat : si les aspirations à davantage d'égalité, à une paternité plus active ou à des parcours de vie moins exclusivement déterminés par le travail semblent assez fortes chez les pères des jeunes générations, elles se heurtent à des stéréotypes et à des représentations des rôles traditionnels encore très profondément ancrés dans les mentalités et en oeuvre au sein des institutions, notamment les organisations de travail. Si la majorité des pères déclarent certes vouloir davantage s'occuper de leurs enfants et mieux partager les tâches domestiques et familiales, une très grande partie d'entre eux et une partie non négligeable des femmes, en France, continuent d'affirmer que l'enfant d'âge préscolaire "souffre" du fait que sa mère travaille et que la vie de famille "en pâtit" également. Le fait que cette question ne soit posée que s'agissant des mères participe évidemment du caractère très "enkysté" de la représentation traditionnelle des rôles.
Les pères investis considérés comme déviants
Qu'advient-il des hommes qui adoptent des comportements jusqu'alors considérés plutôt comme féminins, c'est-à-dire principalement pratiqués par des femmes ? Ils apparaissent, au sens propre du terme, comme "déviants". C'est par exemple le cas d'un homme travaillant pour une très grande entreprise française, conjoint d'une femme très diplômée et très engagée dans son activité professionnelle, qui avait décidé de prendre une année de congé parental pour mieux faire connaissance avec sa fille : stupeur dans son entourage professionnel, chez ses supérieurs, dans sa famille. Et le supérieur de tonner : "Tu fous ta carrière en l'air !" "Et les femmes qui le font, alors ?" , rétorqua notre nouveau père. Elles foutent bien sûr leur carrière en l'air, mais cela est considéré comme normal. S'il est admis, y compris chez une femme très engagée dans sa vie professionnelle, qu'un break puisse être fait pour les enfants, qui sera sans doute pénalisant mais reste compréhensible, un tel comportement chez un homme continue d'apparaître comme fortement déviant et non conforme au rôle que la société attend de lui.
La force des stéréotypes consiste à attirer l'attention sur le décalage qui existe entre le comportement et les attentes, et à suggérer qu'en adoptant la conduite habituellement dévolue à l'autre sexe, le déviant court le risque de confusion des rôles, et finalement de confusion des genres. La peur de celle-ci s'enracine dans des assimilations hâtives (entre adoption de comportements traditionnellement féminins et perte de la virilité) et des préjugés tenaces, qui trouvent souvent leur origine dans les représentations biologiques et naturalisantes.
Vouloir consacrer plus de temps à ses enfants et/ou adopter un autre rapport au travail, moins fondé sur le présentéisme et la totale disponibilité, continuent d'apparaître, dans les entreprises françaises, comme une marque de déviance ou de paresse. Dans tous les cas, cette volonté reste très peu compréhensible par des supérieurs hiérarchiques issus d'une génération où les femmes travaillaient peu et où la différence des rôles était fortement marquée.
Revoir les conditions de travail
Il suffit de se promener dans les rues de Stockholm pour constater que certains pays sont plus engagés que d'autres dans la voie de la déspécialisation des rôles. Davantage d'hommes y promènent des poussettes, y tiennent leur enfant dans des porte-bébés ventraux, prennent des congés parentaux et, surtout, osent le revendiquer. Pourtant, il est également bien connu que les Suédois ne prennent pas la totalité de leurs congés parentaux (loin de là !) et qu'une autre norme est en vigueur : ils participent plus que les Français aux soins de leurs enfants, mais les femmes s'arrêtent généralement de travailler durant les dix-huit premiers mois de l'enfant. Comment, alors, aller plus loin vers une société qui permette à chacun, homme ou femme, d'accéder également aux activités productives, parentales, familiales, amoureuses, politiques et de développement personnel ?
Comment y parvenir alors que les stéréotypes en vigueur sont encore très forts et diffusés par l'ensemble des institutions : famille, école, médias, organisations de travail ? Si les pères les plus investis sont aussi les plus contraints par les caractéristiques professionnelles de leur conjointe, ne faut-il pas prioritairement agir sur les conditions de l'emploi féminin (revalorisation des salaires, lutte contre la segmentation professionnelle, mise en oeuvre de quotas de postes pour les femmes à tous les niveaux) ? Mais à ne faire que cela, on risquerait une déspécialisation des rôles vers le bas et d'évoluer, comme l'indiquait Nancy Fraser 84 ( * ) , vers un monde dans lequel hommes et femmes seraient exclusivement voués au travail, au détriment des activités du care ou du soin à autrui.
Ce qui signifie qu'il faut aussi développer des actions spécifiques à l'endroit des pères : congé de paternité allongé et obligatoire, congé parental raccourci, mieux rémunéré et entièrement partagé entre les deux parents (voir l'article "La réforme du congé parental, un premier pas"), congés pour enfant malade réservés aux pères... Mais il faut également des mesures générales, susceptibles d'autoriser les pères à adopter un rapport différent au travail, plus proche de celui qu'ont encore aujourd'hui les femmes. D'une part, le développement de modes d'accueil de qualité en grand nombre ; d'autre part, l'amélioration des conditions de travail des postes, secteurs et fonctions dans lesquels ne travaillent aujourd'hui que des femmes ; et, enfin, une mesure générale de réduction du temps de travail, au-delà des 35 heures, seule susceptible d'autoriser toutes les catégories de travailleurs, quel que soit leur sexe, à assumer pleinement leurs responsabilités familiales et professionnelles.
3. Note de Synthèse de la mission Bailly : Rapport sur la question des exceptions au repos dominical dans les commerces : vers une société qui s'adapte en gardant ses valeurs, décembre 2013
« Vers une société qui s'adapte en gardant ses valeurs ». Ce titre résume bien le sens des propositions de ce rapport. Après avoir auditionné tous ceux qui le souhaitaient [les organisations syndicales de salariés et d'employeurs, des coordinations de salariés, des chambres de commerces et de `l'industrie, des chambres de métiers, des élus locaux, des préfets, des directeurs d'administration, et des parlementaires ayant travaillé et réfléchi sur ces questions], une conclusion s'impose : si c'est un sujet qui divise l'opinion française, un consensus émerge néanmoins sur trois points :
1) la spécificité du dimanche doit être respectée. La société se retrouve sur l'idée d'une journée différente de ressourcement, d'échange et de découverte : il s'agit de faire société ensemble, ce qui nécessite une synchronisation du temps de repos. De ce fait, l'activité le dimanche doit continuer à faire l'objet de régulations et de dérogations.
2) la situation actuelle se caractérise, par l'incohérence, l'illisibilité et l'instabilité des normes et pratiques. Elle se traduit par une conflictualité déstabilisante tant pour les commerces que les salariés, tout particulièrement en Ile-de-France.
3) la société française évolue rapidement : ainsi ont été pris en compte les attentes nouvelles des consommateurs, les demandes des salariés qui peuvent être volontaires pour travailler le dimanche mais qui ne veulent surtout pas être contraints à le faire, l'importance des enjeux du tourisme tant national qu'international, le rôle croissant du commerce électronique, l'évolution des villes et des territoires, la question du travail des étudiants, etc.
Les propositions d'évolution cherchent à apporter bons sens, cohérence, simplification, lisibilité et stabilité. En intégrant les évolutions récentes de la société, elles permettent de préparer l'avenir. Elles sont fondées sur le dialogue social, permettant de compenser le travail du dimanche de façon cohérente et appropriée, de respecter le volontariat des salariés, et de prendre en considération l'équilibre vie privée-vie professionnelle. Elles permettent également une adaptation à la diversité des territoires puisqu'elles s'appuient sur un dialogue territorial prenant en compte les spécificités et l'équilibre tant entre les centres villes et les périphéries qu'entre les commerces traditionnels et les grandes enseignes.
À l'écoute attentive des besoins des consommateurs et des revendications sectorielles, la solution qui semble s'imposer est celle de l'ajout du bricolage à la liste des dérogations de droit par la voie réglementaire.
Néanmoins, compte tenu de la porosité des secteurs, il est impossible, sans générer de nouvelles distorsions de concurrence, de ne pas inclure également le secteur de l'électroménager pour créer une dérogation autour des commerces d'équipement de la maison. Se poserait alors immédiatement la question du secteur des enseignes culturelles, dès lors que celles-ci vendent, pour partie, des biens similaires. Si le secteur des biens culturels devenait dérogatoire de droit, comment ne pas entendre les revendications du secteur des loisirs sportifs et, tout de suite après, celui de l'habillement ? Cet « effet domino » est inexorable et il faudrait beaucoup de détermination pour le contenir. Cette voie est une impasse sauf à accepter à terme une généralisation du travail du dimanche dans les commerces.
Cette option est d'autant moins souhaitable qu'elle ne prend aucunement en compte les contraintes qui pèsent sur les salariés amenés à travailler le dimanche, puisqu'aucune obligation de contreparties sociales n'est imposée aux secteurs bénéficiant d'une dérogation de droit.
Enfin, contrairement au schéma cible proposé, elle cherche à répondre par une réglementation nationale à des problématiques qui sont avant tout territoriales. |
Le schéma cible (1) rétablit la cohérence de la liste des dérogations de droit, (2) recommande une seule mesure transversale, nationale, étendant de 5 à 12 le nombre de dimanches « du maire », (3) et propose, dans le cadre d'une loi, une réforme profonde du dialogue territorial et social débouchant sur des Périmètres d'Animation Concertés Commerciaux (PACC) ou Touristiques (PACT) au sein desquels l'ouverture le dimanche est structurelle et où les conditions sociales sont harmonisées. L'ensemble des propositions ne concerne pas les commerces d'alimentation pour lesquels, malgré les dysfonctionnements mineurs, l'équilibre actuel est jugé satisfaisant sous réserve de la réactualisation des arrêtés de fermeture obsolètes.
1) La liste des dérogatoires de droit doit correspondre aux activités et commerces reconnus par la société française comme étant essentiels au fonctionnement de la société le dimanche (santé, sécurité, transports, ...) et aux activités dominicales (loisirs, détente, culture, sport, ...). Elle doit garder et retrouver toute sa légitimité, son sens et donc sa robustesse, pour éviter tout effet domino. L'introduction de l'ameublement en 2008 dans cette liste, en amorçant la perte de cohérence, a été l'un des faits déclencheurs des conflits actuels.
D'où la première recommandation devant être mise en oeuvre par décret en Conseil d'État :
L'adoption d'un décret en Conseil d'État sortant le secteur de l'ameublement de l'article R. 3132-5 du code du travail, une fois le nouveau dispositif territorial ayant pu produire ses effets. Un délai de six à douze mois après l'entrée en vigueur de la nouvelle loi (proposée au point 3) semble de ce fait réaliste et conduirait à proposer comme date limite le 1er juillet 2015. |
Dès l'année 2015, la liste des dérogatoires retrouvera sa légitimité et son sens, sans pour autant porter préjudice au secteur de l'ameublement qui pourra bénéficier de nouvelles modalités d'ouverture telles que proposées dans ces recommandations et adaptées à sa pratique actuelle. La liste des dérogatoires de droit n'a pas vocation à être ré-ouverte pour les commerces.
2) Pour autant, la société française a évolué et la demande d'activité le dimanche est plus forte. La position des commerces traditionnels eux-mêmes s'est infléchie en faveur d'une plus large ouverture. De manière très majoritaire, le dispositif des « cinq dimanches du maire » est considéré comme insuffisant dans la mesure où ces « cinq dimanches » sont souvent totalement consommés par les fêtes de fin d'année et les soldes du début d'année.
Un consensus s'établit autour de douze dimanches par an, permettant ainsi de mieux répondre aux événements rythmant la vie économique : soldes saisonnières, rentrée des classes, départ en vacances, fête des mères, fête des pères, Saint-Valentin, animations spécifiques de certaines villes, quartiers ou professions, etc. Sur ces douze dimanches, sept seraient à la main du maire (lui donnant ainsi l'initiative sur l'animation collective de sa ville) et cinq constitueraient un droit de tirage déclaratif pour les différents commerces, ce qui leur permettrait de répondre aux spécificités saisonnières ou évènementielles de leurs activités et d'être assurés de bénéficier d'au moins cinq dimanches par an. Avec un tel dispositif, la France rejoindrait la moyenne européenne.
D'où la deuxième recommandation :
Une modification rapide de l'article L. 3132-26 du code du travail permettant l'ouverture de douze dimanches par an selon les modalités suivantes : - un passage de cinq à sept du nombre maximal de dérogations accordées par le maire ; - la possibilité, pour les commerçants, de déroger cinq fois par an à la règle du repos dominical, sous réserve d'une obligation de déclaration préalable auprès du maire ; - le même niveau de contreparties que celui actuellement en vigueur, et prévu par l'article L. 3132-27 du code du travail. |
Cette disposition, tout en conservant le caractère exceptionnel de l'activité dominicale, permet de satisfaire la quasi-totalité des attentes en dehors de la Région Île-de- France, y compris dans les grandes agglomérations.
3) Les autres recommandations sont liées à un projet de loi réorganisant le dialogue territorial et le dialogue social permettant de redéfinir les contours et modalités de fonctionnement des zones commerciales et touristiques. Il est en effet nécessaire d'apporter une réponse aux spécificités commerciales des très grandes agglomérations et des zones touristiques, tout en étant très attentif à la cohérence des dispositifs sociaux et à l'équilibre entre centre-ville et périphérie, commerces traditionnels et grandes enseignes.
3-1 Il est indéniable que dans certaines zones existent des besoins d'ouverture dominicale spécifiques : c'est le cas des lieux touristiques, ainsi que de certaines zones commerciales, en particulier en Ile-de-France. Pour répondre à ces besoins de manière équilibrée et responsable, seule une approche territoriale concertée est légitime et pertinente. D'ailleurs, dans de très nombreux pays, la question de l'ouverture dominicale des commerces est une compétence des collectivités locales.
Il est donc proposé de remettre totalement à plat ces dispositifs en créant deux types de périmètres, les PACT (Périmètres d'animation concertés touristiques) et les PACC (Périmètres d'animation concertés commerciaux) au sein desquels les commerces pourront être autorisés de manière structurelle à déroger au repos dominical. Les zones touristiques, tout-à-fait légitimes dans leur principe, souffrent d'un problème de définition du périmètre puisque le dispositif permet à la fois de classer par exemple l'ensemble d'un territoire communal (Bordeaux) ou quelques numéros dans une rue (Montmartre). Les PUCE quant eux sont avant tout un dispositif ayant permis de régulariser des pratiques d'ouvertures souvent illégales puisque fondés sur le critère d'antériorité de la consommation ce qui, d'une part, désavantage les établissements ayant toujours respecté la loi et, d'autre part, empêche toute vision prospective d'aménagement du territoire.
D'où la troisième recommandation :
Une loi organisant les modalités de fixation des périmètres et d'octroi de contreparties aux salariés. Les nouveaux périmètres doivent reposer sur des critères objectifs et factuels spécifiques et différents selon les PACC et les PACT. La délimitation des périmètres doit être fondée sur l'organisation d'un large dialogue territorial, à l'initiative du président de la structure intercommunale. L'instruction des demandes de création de périmètre se fait sous l'égide du préfet pour les PACC, ou du président de la structure intercommunale pour les PACT. Elle se formalise par un dossier d'opportunité et une étude d'impact. La validation définitive du périmètre est traitée au niveau du préfet de région pour les PACC, ou du préfet pour les PACT avec une latitude donnée à l'autorité pour adapter le périmètre proposé sur le fondement des éléments de l'instruction. La procédure doit être encadrée par des délais afin de permettre la création d'un périmètre en six à dix mois 85 ( * ) . LES PUCE, les communes et zones touristiques existantes ont vocation à évoluer vers des PACC et des PACT. Ces dispositifs permettent de prendre en compte la situation des gares et des centres commerciaux, et de manière générale toutes les évolutions à venir. |
3.2. S'agissant du régime social des salariés amenés à travailler le dimanche dans les commerces du secteur non alimentaires ne bénéficiant pas d'une dérogation sectorielle, il est indispensable de rétablir l'équité de traitement. Dans la loi actuelle, il existe en effet une distorsion importante entre les PUCE (accord social et à défaut mise en oeuvre d'un dispositif supplétif portant sur le volontariat et la compensation salariale) et les communes et zones touristiques (aucune obligation sociale).
D'où la quatrième recommandation :
La loi doit encadrer le dialogue social dont le volontariat doit être la clé de voûte. Ce volontariat reposera sur une déclaration positive et temporaire du salarié, une possibilité de retrait ave un préavis raisonnable, l'absence de clause dans le contrat de travail, la lutte contre d'éventuelles discriminations, et une organisation ne faisant pas appel à la totalité des salariés habituels. L'accord collectif doit également prévoir les conditions de rémunération, l'octroi d'un repos compensateur et les mesures visant à favoriser la conciliation entre vie privée et vie professionnelle. A défaut d'accord collectif, un dispositif supplétif sera prévu par la loi (doublement de la rémunération, repos compensateur, garanties de volontariat, mesures visant à assurer la conciliation entre vie privée et vie professionnelle). Afin d'assurer la protection des petits commerçants, il est proposé d'exclure de cette obligation, dans les PACT, les commerces de moins de onze salariés. L'examen de l'ensemble de ces dispositions gagnerait sans doute à être précédé d'une concertation nationale interprofessionnelle organisée dans des délais rapides. |
Cela signifie concrètement que toute salarié travaillant dans un commerce ouvert structurellement le dimanche en dehors des commerces alimentaires devra bénéficier d'un régime social de compensation, qu'il s'agisse des PACC ou des PACT. A e titre, l'accord de site garantissant des contreparties identiques sur une même zone semble devoir être privilégié.
Un régime déclaratif se substituera dès lors au régime d'autorisation aujourd'hui en vigueur dans les PUCE. Concrètement, une fois le PACT ou PACC délimité, un commerce pourra ouvrir le dimanche après transmission à l'autorité administrative compétence de l'accord collectif fixant les contreparties, ou, à défaut d'accord, de la décision unilatérale approuvée par référendum. |
Afin de gérer la situation transitoire dans l'attente de la mise en oeuvre effective du schéma cible, deux dispositions sont proposées.
La première a pour objet de mettre instantanément fin aux conflits en cours dans le secteur du bricolage. Elle suppose évidemment que les enseignes de bricolage se soient désistées de toutes les instances contentieuses en cours relatives au repos dominical.
La première mesure consiste à inscrire provisoirement, jusqu'au 1er juillet 2015, le secteur du bricolage dans la liste des dérogatoires de droit. Cette date estimée correspond à un délai de six à douze mois après l'entrée en vigueur de la loi instaurant les nouveaux dispositifs, délai permettant la traduction sur le terrain de ces derniers. En tout état de cause, l'échéance de ce décret provisoire devrait être simultanée à la sortie de l'ameublement du champ des dérogations sectorielles. |
Cette disposition dont l'objet est de pacifier la situation en Île-de France devrait être conditionnée à la signature d'une charte comportant l'engagement des magasins du secteur à accorder des contreparties sociales à leurs salariés et à circonscrire l'ouverture aux seuls magasins franciliens. Cette charte s'inscrit dans la logique des futurs PACC, d'une part, en ce qu'elle fixe des compensations pour les salariés, et, d'autre part, en ce qu'elle est fondée sur une approche territoriale.
La seconde mesure consiste à permettre aux préfets d'accorder des dérogations individuelles sur le fondement de l'article L. 3132-20 du code du travail, dans un cadre sécurisé, pour remédier aux situations de distorsion de concurrence qui ne pourront disparaître qu'à terme, une fois le dispositif territorial devenu effectif. À ce titre, il est proposé de mettre fin à l'effet suspensif des recours exercés contre ces décisions de dérogation par le premier véhicule législatif disponible qui supprimerait l'article L. 3132-24 du code du travail, afin de sécuriser ces décisions préfectorales. |
En résumé, l'ensemble de ces propositions constitue une colonne vertébrale robuste articulée autour (1) de la fin de l'extension des mesures sectorielles, (2) d'une seule mesure transversale et nationale, (3) d'une méthode d'évolution fondée sur le dialogue territorial et social.
En ce sens, elles permettent effectivement d'aller vers « une société qui s'adapte en gardant ses valeurs ».
4. Fiche d'identité de l'association Tempo territorial et Guide méthodologique (extraits)86 ( * )
Fiche d'identité |
Coordonnées :
Hôtel de Rennes Métropole
Service Prospective, évaluation et développement durable
4 avenue Henri Fréville,
CS20723,35207 Rennes Cedex 2
Tél.: 02 23 62 20 95
Contacts :
Evelyne Reeves, secrétaire : e.reeves@agglo-rennesmetropole.fr
Mireille Terny, communication/abonnement newsletter :
mireille.terny@agglo-poitiers.fr
Sophie Koenig trésorière : skoenig@ville-dijon.fr
Tempo Territorial a pour objet de favoriser, entre acteurs des démarches temporelles territoriales : l'échange, le partage, l'apprentissage, la mutualisation, la coopération, dans un but non lucratif, de manière à :
1. Accompagner les acteurs dans des démarches temporelles, notamment liées aux transformations et aux évolutions des rythmes de temps de la vie moderne.
2. Intégrer la dimension temporelle dans les politiques publiques, à des échelles pertinentes, dans les domaines de l'aménagement et de l'environnement, du développement économique, des transports, de l'action sociale, culturelle, sportive et de loisirs, des services... et sensibiliser les acteurs de ces politiques territoriales publiques et privées.
3. Construire un lieu de capitalisation et un centre de ressources sur les enjeux temporels et favoriser l'échange des bonnes pratiques, en termes d'organisation de la concertation, de sensibilisation et de communication, d'analyse méthodologique, de mise en oeuvre d'actions concrètes, de représentations cartographiques, etc.
4. Permettre à l'échelle européenne le débat public sur les pratiques temporelles entre pouvoirs publics, entreprises, habitants, salariés, usagers et leurs représentants.
Conseil d'administration au 1er octobre 2013: Jules Aimé, Chrystelle Amblard, Robert Arnaud, Jocelyne Bougeard (vice-présidente), Jean-Yves Boulin (vice-présidente), Oriane Bourdenet, Jocelyne Chatelier-Savat, Catherine Coutelle (vice-présidente), Philippe Ducloux (vice-présidente), Corinne Feret, Catherine Gabriel, Nicole Guilhaudin, Benoît Guinamard, Thierry Halay, Marie Jacquin-Pavard, Sophie Koenig (trésorière), Marie-Claire Lacaze, Evelyne Reeves (secrétaire),Anne-Charlotte Riedel, Dominique Royoux (président), Christine Sarrazin-Baudoux, Cédric Szabo, Chantal Trouwborst, (trésorière adjointe), Patrick Vassallo (vice-président), Lucie Verchère-Tortel, Patrice Vuidel (vice-président).
Guide Méthodologique rédigé par l'association Tempo territorial : « Rythmes de vie et organisation du territoire : quelles tensions ? Quelles médiations ? Quelles politiques publiques mettre en oeuvre ? |
1) Notre vie aujourd'hui : la conciliation de rythmes contradictoires (ou de nouveaux rapports au temps)
Des constats au niveau national (source INSEE)
• En un siècle, les rythmes de vie n'ont cessé d'évoluer : le temps de travail a été divisé par 2 et le temps libre multiplié par 5. Durant ce siècle, on a gagné 40 % de durée de vie, soit autant qu'entre l'an 1000 et 1900.
• 80 % des femmes âgées de 24 à 54 ans travaillent.
• 2,7 millions de salariés français travaillent régulièrement ou ponctuellement la nuit, y compris les femmes depuis 2000, année de la fin de l'interdiction du travail de nuit pour les femmes.
• En 1950, chaque habitant parcourait en moyenne 5 km par jour contre 45 km par jour aujourd'hui.
• 37 % des salariés seulement ont des horaires de travail en journée prévus à l'avance avec un repos le week-end (source DARES 2009).
Les évolutions des rythmes de vie et des temps de travail plus fractionnés créent des tensions au niveau local que les collectivités territoriales doivent intégrer et apprendre à gérer. Ces tensions entre temps collectifs et temps individualisés fragmentés, sont plus ou moins renforcées et varient suivant :
• les lieux (centre-ville, quartiers périphériques, espaces ruraux...),
• les temporalités (conflits d'usages de la nuit, utilisation diversifiée d'un espace public suivant les âges...),
• les conditions de vie (familles monoparentales, emplois précaires, horaires de travail atypiques, doubles résidences...).
Les acteurs publics doivent s'emparer de ces questions pour tenter de diminuer ces inégalités entre individus et/ou groupes sociaux.
2) Les enjeux des politiques des temps
Les collectivités territoriales, face aux changements fondamentaux des rythmes de vie, doivent remettre l'usager au coeur des projets de développement ou de son organisation en intégrant les évolutions des modes de vie. Il faut trouver de nouveaux arbitrages sans promouvoir pour autant la ville ouverte 24h/24.
Plusieurs enjeux se dégagent
1. Mieux prendre en compte les rythmes des usagers, des habitant-e-s et des salarié-e-s pour améliorer l'organisation des services et du territoire.
2. Réduire les inégalités face aux temps entre les femmes et les hommes, réduire les inégalités d'accès aux ressources du territoire.
3. Travailler à de meilleures adéquations entre rythmes de vie, aménagements et espaces publics.
Il faut donc être imaginatif, trouver des solutions innovantes, bousculer les idées reçues. Exemple : limiter les interventions fractionnées et en horaires décalés des agents de la propreté - tôt le matin ou tard le soir - au profit d'horaires continus en journée. Cela suppose d'accompagner un changement d'organisation et de perception réciproque entre agents et occupants des bureaux.
3) Le temps traverse tous les domaines de l'action publique durable
Âges de la vie : favoriser l'accès aux services et aux loisirs en fonction des âges de la vie, valoriser et développer l'intergénérationnel pour mieux vivre ensemble.
À Poitiers, l'Agence des Temps et le Conseil de Développement Responsable aident à la connaissance et la reconnaissance des actions intergénérationnelles, à la mise en lien entre bénévoles et associations.
Services publics : en faciliter l'accès par les démarches à distance (e-administration), la mise en place de guichets uniques thématiques, les maisons de services publics.
Les guichets uniques de rentrée scolaire à Poitiers réunissent à la fin du mois d'août les différents acteurs de la rentrée dans un même lieu (chacune des 7 maisons de quartier) et sur des horaires plus accessibles (de 16h30 à 19h30, le mercredi après-midi et le samedi matin).
À Paris, et dans d'autres villes, les Points d'Information et de Médiation Multi Services (PIMMS) permettent d'offrir un accueil de proximité, de faciliter les démarches des usagers en évitant les déplacements et les temps d'attente.
Gestion des ressources humaines : réfléchir au temps de travail en horaires décalés.
Les Villes de Rennes et de Paris ont repositionné les horaires de travail des agents de propreté en journée. Cette réorganisation, outre le bénéficie en matière de qualité de vie, a permis de créer des temps de travail à temps complet.
Éducation, Culture, Sports : en élargir l'accès sur des temps différents.
En partenariat avec la Direction de la Culture et l'Orchestre des professeurs du Conservatoire, Brive crée les « Concerts sur le pouce ». Des rendez-vous gratuits entre 12h30 et 13h15 d'avril à juin, dans des lieux accessibles au public, notamment salarié, où le spectateur peut déambuler et déjeuner à sa guise. Cette action permet de toucher aussi des personnes vivant en dehors de Brive et qui ne pourraient revenir le soir.
Équipements collectifs : mutualiser, adapter les horaires d'ouverture (piscines, gymnases, écoles, salles de réunion...).
Aménagement des horaires des piscines de Montpellier agglomération : tôt le matin, entre midi et deux, le soir et le week-end et coordination des horaires des différentes piscines.
Transports : organiser l'intermodalité adaptée à la configuration de chaque territoire, favoriser la mobilité des seniors.
Le Grand Lyon a initié la mise en place des Plans de Déplacements Interentreprises et d'un PDIE de filière Services à la personne. Cette filière emploie le plus souvent une main d'oeuvre féminine, précaire, sans moyen individuel de locomotion, d'où l'intérêt de leur rendre la ville et l'emploi plus accessibles.
Urbanisme : intégrer la dimension temporelle dès l'élaboration des documents de planification jusqu'à leur application réglementaire.
Plan Local d'Urbanisme de Dijon adopté en juin 2010.
Aménagement : faciliter l'accessibilité d'un lieu aux différents temps de la journée, prendre en compte la diversité des usages exercés à un même moment dans un même endroit.
À Saint-Denis, l'aménagement d'une place en fonction d'usages et de temporalités différenciés permet des rassemblements culturels et cultuels comme des pratiques de glisses urbaines.
Emploi : faciliter le parcours vers l'emploi, le maintien dans l'emploi par la prise en compte de la mobilité, de la garde des enfants, ...
De nombreux Bureaux des Temps ont facilité la création de services de gardes d'enfants sur horaires atypiques. La prestation est effectuée au domicile des parents par des professionnel-le-s de la petite enfance.
4) Les préalables à l'installation d'une politique temporelle au sein des collectivités territoriales
En amont, si les démarches peuvent être similaires, il faut insister sur les spécificités du territoire et ses rythmes : le processus identifié sera nourri des particularismes locaux car chaque territoire est marqué par sa propre « couleur temporelle ».
Préalables
1. Des élu-e-s identifié-e-s en charge d'une délégation aux politiques temporelles, légitimant une mission ou un Bureau des Temps.
2. Une organisation administrative et technique : 1 responsable et/ou des chefs de projet, maîtres d'oeuvre avec un positionnement transversal qui donne la capacité à travailler en réseau et une participation active au coeur des instances de décision :
- le développement d'une démarche de conduite de projet en mobilisant les expertises et les compétences au sein des directions thématiques comme des partenaires extérieurs.
- des moyens humains et financiers dédiés (pour mener à bien des travaux d'enquêtes, études, plans de communication, co-financement d'actions, ...).
3. Des espaces de concertation et de co-production à mobiliser ou à créer, en s'appuyant sur un réseau : conseils de quartiers, conseils de développement, Comités de pilotage ad hoc, comités consultatifs, représentants du personnel.
4. Une communication : des actions fortes en interne et en externe sont à mettre en place dès l'installation du Bureau des Temps.
5) Éléments de méthodologie
Phase de positionnement et de diagnostic
1. une relecture du programme politique de la Collectivité sous l'angle temporel.
2. une phase exploratoire pour une identification des ressources du territoire, de ses particularités à l'aide d'indicateurs (part des femmes sur le marché du travail, nombres de familles monoparentales, temps de déplacements domicile-travail, place de l'économie de services...), la définition des objectifs généraux, des moyens spécifiques, la proposition de référents thématiques et territoriaux.
3. une phase complémentaire de diagnostic sur les dysfonctionnements du territoire et les publics contraints.
Phase opérationnelle
4. l'élaboration et la validation d'un premier plan d'actions.
5. la définition et la mise en oeuvre de chantiers prioritaires.
6. l'évaluation, le réajustement, la généralisation des actions.
6) Tempo territorial :
Historique et objectifs
Les premiers territoires qui se sont investis dans les politiques temporelles, Poitiers, Saint-Denis, Conseil Général de la Gironde, Rennes, Paris, Dunkerque, Grand Lyon, etc., après avoir longuement travaillé ensemble au sein du groupe DATAR « Coordination des temps de vie sur les territoires », ont souhaité poursuivre cette dynamique avec leurs nouveaux partenaires. C'est ainsi qu'en 2004 l'Association TEMPO Territorial a été créée à l'initiative de représentant-e-s de collectivités, - élu-e-s et technicien-ne-s -, d'associations, d'universitaires, de femmes et d'hommes intéressés par l'échange, la mutualisation, la construction de démarches temporelles, dans un but non lucratif.
TEMPO Territorial cherche à accompagner des acteurs désireux de s'engager dans des démarches temporelles et donc de débattre des transformations de sociétés liées aux évolutions des rythmes du temps de la vie moderne. Il s'agit aussi de comprendre en quoi l'aménagement, le développement économique, les transports, l'action sociale, culturelle, sportive et de loisirs peuvent devenir le support de nouvelles politiques temporelles.
TEMPO Territorial constitue un centre de ressources sur les enjeux temporels, permet le débat public à l'échelle européenne sur ces questions, et favorise l'échange de bonnes pratiques en terme de concertation, de communication, d'analyse méthodologique.
Organisation
Le Conseil d'Administration de Tempo territorial est constitué de 22 membres représentant la diversité des structures intéressées (élu-e-s et technicien-ne-s de villes, communautés urbaines et d'agglomérations, conseils généraux et régionaux, chercheurs, parlementaires).
Des ateliers thématiques permettent de développer des réflexions et des propositions sur différents axes : entreprises, services, aménagement urbain.
En 2010, trois groupes se sont constitués autour des questions relatives à :
- la méthodologie et la formation aux politiques temporelles,
- l'ouverture des bibliothèques le dimanche,
- le réseau européen créé en 2009 à Barcelone.
Des conférences , « les mardis de Tempo », sont régulièrement organisées à Paris afin de débattre des sujets d'actualité. En 2009 : « le dimanche : un jour comme les autres ? », « Pourquoi et comment réorganiser le temps de travail des agents d'entretien ? », « Des villes la nuit », « L'urbanisme temporel ».
En 2010 : « Le temps de la concertation », « La ville l'été : entre rupture et continuité ».
Enfin « Les Temporelles », rencontres annuelles organisées par l'association, mobilisent un public nombreux autour de thématiques diverses. En 2009 à Poitiers : « Horaires décalés, délitement social : enjeux de régulation des politiques temporelles » ; en 2010 à Dijon : « Aménagements urbains temporels ».
Territoires ou structures (personnes morales) adhérents à Tempo territorial
(septembre 2010)
7) le réseau européen
Dans les années 1990, les politiques temporelles sont apparues en Europe, notamment en Italie, sous la pression des femmes en difficulté dans l'articulation de leurs différents temps de vie.
Parallèlement, l'Espagne, les Pays-Bas, la France, l'Allemagne... s'engageaient également dans cette voie. Les contacts entre ces pays ont été formalisés en novembre 2009 à Barcelone par la création d'un réseau européen des acteurs des politiques temporelles (www.jornadausosdeltemps.net).
Dans sa phase actuelle le réseau concerne l'Espagne, l'Italie et la France. Les représentants français dans le groupe de pilotage de ce réseau international sont quatre membres du CA de Tempo et un élu de la Ville de Paris.
L'année 2010 est celle des premières capitalisations d'expériences au sein du nouveau réseau européen.
La diversité des actions à travers le sommaire de la brochure « Les politiques temporelles au coeur de votre territoire », octobre 2013, Tempo territorial
5. Association AIDER : le temps de la coordination commerces, services et territoire : des marchés au bon endroit, au bon moment : l'exemple de Piégros-la-Clastre (26)
Le problème, le point de départ de l'action
Ø Les commerçant-e-s et artisan-e-s de la Vallée de la Drôme travaillent en moyenne 63h par semaine.
Ø En milieu rural, on vit majoritairement en maison individuelle, parfois loin du centre-village.
Ø D'autres marché, mais aussi les supermarchés, font une terrible concurrence à ce petit marché du jeudi matin qui peu à peu, perd des vendeurs.
Ø Conséquences : Le marché ne compte plus que 2 stands, n'est plus une « locomotive du commerce sédentaire », et ne permet plus une vie de village.
Ø Objectif : favoriser une plus grande attractivité du marché, à la fois pour les vendeurs, et pour les habitant-e-s
La démarche
Ø Un diagnostic du marché > 40 % des enquêtés demande un changement des jours et horaires
Ø La réalisation d'une enquête de consommation et des attentes auprès des habitant-e-s de la commune.
Ø L'organisation d'une réunion publique, afin d'en donner les résultats et d'identifier les perspectives d'actions.
Ø L'organisation d'un groupe de travail, pour la mise en place d'une démarche participative (élus, gérant du bar-restaurant, habitant-e-s, vendeurs)
Ø La mise en oeuvre des actions, identifiées par le groupe de travail, pour redynamiser le marché.
Les effets
Ø Des constats : l'horaire du marché ne correspond plus aujourd'hui à l'activité des client-e-s potentiel-le-s, le jour et les horaires ne prennent pas en compte le contexte local (lieu de résidence, école, autres marchés, difficultés d'accès des personnes âgées...).
Ø le changement du jour et horaires au vendredi de 15h à 19h
Ø Un accroissement et une diversification des stands (jusqu'à 9)
Ø La création d'une nouvelle offre de restauration par le bar-restaurant le vendredi soir
6. Synthèse des réflexions issues du travail des groupes focus - Région Nord-Pas-de-Calais
Réalisés par :
ATEMIS
Région Nord Pas-de-Calais
Groupe Temps-territoires-Développement Durable
Jean-Yves Boulin
Christian du Tertre
Introduction
Un séminaire de prospective a été organisé, en 2008/2009, à la demande de la Direction du Développement Durable, de la Prospective et de l'Évaluation, du Conseil Régional du Nord-Pas-de-Calais sur le thème de la prise en compte du temps dans l'aménagement et le développement du Territoire. Ce séminaire s'adressait aux directions de services de la Région, à celles des deux départements, à des agents des collectivités locales - communes, communautés urbaines, communautés d'agglomérations etc - aux agences d'urbanisme ainsi qu'au monde socio-économique (organisations patronales et syndicales). Il avait pour objet de sensibiliser les personnes issues de ces organismes aux politiques temporelles qui ont commencé à se développer en France depuis 2000/2001. Ces politiques qui sont aujourd'hui, à des degrés divers, mises en oeuvre dans une trentaine de collectivités locales, se donnent pour objectifs l'amélioration de la qualité de vie - la qualité de la vie quotidienne, celle qui renvoie à la façon dont on peut travailler tout en menant une vie de famille épanouissante, jouir de relations sociales denses, participer à toutes les activités offertes par la vie urbaine et rurale, qu'il s'agisse de loisir, d'engagement associatif ou politique - l'égalité - de genre mais aussi entre les âges, les catégories sociales, les ethnies différentes qui cohabitent sur un même territoire - la cohésion sociale, c'est-à-dire, le « vivre ensemble ». Tout cela dans une perspective d'un développement économique durable dans la mesure où dans une économie servicielle, les enjeux de synchronisation temporelle ont une incidence directe sur les conditions de mise en oeuvre de services, leur accessibilité, leur pertinence, leur portée.
Il s'agit donc bien de développement soutenable dans le présent et pour les générations futures, autant dire d'une utopie.
De fait, ces objectifs sont un horizon, une perspective souhaitée par les élues et les agents des collectivités territoriales qui s'attachent à mettre en oeuvre des politiques temporelles. Ce qui compte, ce qui est constructeur de ces politiques, c'est le chemin pris, c'est le processus par lequel s'implique une large diversité d'acteurs dont ceux, si souvent oubliés, que l'on a coutume de désigner sous le terme générique d'usagers malgré leur diversité : les habitants, les travailleurs, les salariés, les indépendants, les inactifs, les retraités, les enfants, les étudiants etc - s'implique dans la construction de ces politiques. Cet acteur - l'usager - est souvent appréhendé par les décideurs comme une forme abstraite, comme la cible de politiques considérées comme bonnes pour eux, parce que destinées à eux. C'est la politique de l'offre urbaine, pensée par des élus, des techniciens, des experts, des urbanistes, des architectes, des aménageurs qui conçoivent, élaborent, construisent sans analyse préalable des pratiques, des usages, des besoins, des attentes. Cela débouche, bien souvent, sur des paysages et fonctionnements urbains qui se reproduisent d'une ville à l'autre, d'un pays à l'autre, sans tenir compte de la spécificité propre à chacun de ces territoires. C'est aussi la façon dont les acteurs économiques - publics, privés ou parapublics - pensent les fonctionnements horaires des activités industrielles et servicielles, souvent de façon unilatérale - légitimée par l'organisation sociale du temps dominante - parfois de façon négociée, mais dans les deux cas en omettant le plus souvent de prendre en compte les spécificités du territoire ainsi que les externalités produites par les acteurs économiques sur le territoire et les utilisateurs du territoire.
C'est sur le fondement de cette spécificité que les politiques temporelles se sont construites. Elles sont nées du constat de la diversité des situations auxquelles sont confrontées les habitants et usagers, qui riment, bien souvent, sous nos latitudes, avec inégalités. Elles se sont élaborées « à l'ombre du citoyen », ou plutôt de la « citoyenne » à partir du constat que le fonctionnement temporel des villes était bien souvent adverse au déploiement de la citoyenneté des femmes. Citoyenneté entendue ici comme possibilité de participer à cet ensemble d'activités - dès lors qu'elles sont souhaitées - qui sont au fondement de la qualité de vie, d'une « bonne vie ».
Nées en Italie ( Politichedellacittà) , ces politiques se sont diffusées en Allemagne (Zeiten der Stadt ), puis en France ( Politiques des Temps de la Ville ou Politiques temporelles locales ) et en Espagne ( Politiques del Temps ). Elles sont entrées en résonance avec les politiques d'aménagement des temps quotidiens ( Dagindeling ) menées aux Pays-Bas. Dans leur développement plus élaboré, que l'on trouve surtout en Italie, les politiques temporelles se caractérisent par le fait que le temps, appréhendé sous ses différentes dimensions, est devenu un élément consubstantiel de l'aménagement urbain et, bien plus, de l'aménagement du territoire qu'il soit urbain, rurbain ou plus largement régional.
La Région Nord-Pas-de-Calais est la première collectivité de cette nature - l'échelle régionale - à s'intéresser aux politiques temporelles en France. Un rapport a tiré les enseignements du séminaire qui s'est déroulé en 2008/2009, en montrant tout d'abord quels étaient les enjeux temporels du développement régional et en développant les incidences en termes de gouvernance. Il se penchait ensuite sur les conditions nécessaires à la mise en place d'une politique temporelle à l'échelon régional telles qu'elles avaient été déclinées par les participants au séminaire. Le rapport se concluait par des questions de méthodes pour avancer, pour poursuivre la démarche de sensibilisation et de prise de conscience du rôle joué par le temps et son organisation au regard de la vie quotidienne. Des « chantiers » étaient proposés, généralement à partir de projets, actions, orientations stratégiques en cours dans la Région.
Une des conclusions, et des décisions, entérinée par le Vice-Président de la Région en charge du Développement Durable, était qu'il convenait de mettre sur pied un groupe de référence en charge de la sensibilisation, de la veille et du soutien à des projets en cours. Ce groupe « Temps-Territoires-Développement Durable Nord Pas-de-Calais » était constitué, pour majeure partie, des participants au séminaire auxquels sont venues s'ajouter d'autres personnes intéressées par la démarche. Celle-ci s'est poursuivie en 2010 par la constitution de « groupes focus » afin de préciser, de façon plus acérée, pourquoi et comment sur des projets et orientations existants, la dimension temporelle constituait un angle d'approche heuristique, un levier de l'action à même de les inscrire dans une perspective de développement économique et social durable : avec quels acteurs, à travers quelles institutions, selon quels processus, à quelles conditions, le temps, ou plutôt les temps et leur organisation, enrichissaient ces projets ?
Trois groupes focus
Le groupe de référence a décidé de poursuivre la réflexion en prenant pour points d'application trois thématiques correspondant à des orientations/initiatives actuelles de la Région :
• un groupe centré sur les Eco quartiers qui font l'objet de plusieurs initiatives dans le Nord-Pas-de-Calais, expériences concrètes et démarches réflexives à travers la rédaction de chartes ou de guides de référence ;
• un groupe consacré aux Maison de Santé qui font l'objet d'un processus d'expérimentation initié par la Région depuis 2007 ;
• le dernier focus était centré sur le Dialogue Social Territorial qui fait l'objet d'une étude action, également initiée par la Région, dans le cadre du SRDE.
La démarche pour chacun de ces groupes focus a consisté à analyser en quoi le temps est un élément déterminant au regard de la réalisation des objectifs attaché à chacun des champs observés. La méthode a été d'une double nature : tout d'abord, des échanges très libres/ouverts afin d'identifier, d'une part, quelles étaient les convergences/divergences relatives à l'importance de la dimension temporelle, d'autre part, quels étaient ses points d'application. Des échanges avec des acteurs de terrains venus expliciter des cas en cours de réalisation ont permis d'étayer ces analyses.
D'emblée, il convient de préciser que ces trois groupes focus n'avaient pas le même statut. Maisons de santé et Eco quartier ont une vocation opérationnelle tandis que la question du Dialogue Social Territorial, outre son ambivalence théorique et pratique (cf. infra), renvoie à un processus, à une façon de procéder. Cela n'ôte rien aux interactions fortes entre les problématiques de ces trois focus qui ont pu être mises en évidence au cours des travaux. Simplement, et avant d'entrer plus avant dans l'analyse des principaux enseignements, il apparaît important de souligner, d'une part, que le concept de Dialogue Social Territorial demande à être précisé plus dans ses objets et dans son rapport aux acteurs du territoire (périmètre des acteurs), que dans ses finalités, d'autre part, que s'il est revisité, il apparaît alors transversal vis-à-vis aux deux autres focus, apparaissant comme une des conditions e la réalisation des Eco quartiers et des maisons de santé.
Des interactions fortes avec les objectifs et méthodes des politiques temporelles
Eco quartiers et Maisons de santé attestent au regard de leurs objectifs d'interactions profondes avec ceux des politiques temporelles. Chacune de ces deux thématiques renvoie, en effet, aux notions de qualité de vie (la santé est un élément central de la qualité de vie), notamment au travers de questions liées à l'accessibilité, à la mobilité, à l'égalité et à la cohésion sociale. Eco quartier et Maisons de santé font référence à des notions de mixité et de diversité (humaine et d'activités), de lien social, de mutualisation, de qualité de l'emploi, ce qui se retrouve dans les principes qui sont au fondement des politiques temporelles. À l'observation, il apparaît que ces dimensions temporelles ne sont pour l'instant pas prises en compte en tant que telles dans la façon de rendre opérationnels les principes structurants des Eco quartiers et des Maisons de santé. A tout le moins, elles ne sont pas explicitées.
Problématique des Eco quartiers dans une perspective de politique temporelle
A Limeil-Brévannes (Val de Marne) un projet d'éco quartier à énergie positive s'appelle « Temps durables ». C'est bien là la question soulevée par une approche temporelle des éco quartiers : promouvoir des temps durables, des temps soutenables qu'il s'agisse du temps du travail, de celui du transport, du temps familial, du temps des soins aux autres, du temps physiologique, du temps de loisir, du temps de la vie sociale et de participation citoyenne, du temps pour soi, etc.
Le concept « éco » que l'on trouve dans l'expression éco quartier réfère le plus souvent à des dimensions techniques en lien avec l'environnement (réduire l'empreinte écologique à travers la baisse de la consommation d'énergie - voire à travers celle de quartier à énergie positive - utiliser des matériaux recyclables et des méthodes de recyclage des énergies et des sources naturelles, par exemple les eaux de plus, le solaire etc) mais il réfère aussi à des dimensions sociales voire sociétales (le vivre ensemble), tout au moins dans l'objectif à atteindre (cf. les chartes).
En effet, un éco quartier est un quartier urbain ( mais le groupe focus nous a permis d'étudier le cas d'un éco quartier rural ) qui s'inscrit dans une perspective de développement durable et inclus les trois dimensions, environnementale, sociale et économique : il doit réduire au maximum l'impact sur l'environnement, favoriser le développement économique, la qualité de vie, la mixité et l'intégration sociale. Il promeut la participation des citoyens en amont (la conception du quartier) et leur participation à la vie du quartier (démocratie participative). Cela exige du temps.
Un autre aspect de l'éco quartier est sa multi fonctionnalité ou plutôt l'effort mis sur la conception multi fonctionnelle des différentes infrastructures envisagées : entre logements, activités, équipements et espaces publics. Cela en lien avec les objectifs visés de favoriser l'accessibilité et la mobilité (tout en réduisant les déplacements automobiles).
Dans cette approche, un éco quartier devrait être attentif à tout ce qui a été mis en évidence/ recherché par les politiques temporelles : la qualité de vie ; la cohésion sociale ; l'égalité ; l'accessibilité aux services et aux différentes activités qui font la vie quotidienne (travail, transport, services de toute nature, marchands et non marchands) dans un objectif d'accorder aux utilisateurs (résidents, navetteurs, utilisateurs temporaires ...) une plus grande autonomie dans la gestion de leurs temps sociaux ce qui implique de travailler les notion de proximité et déspécialisation des espaces ; le vivre ensemble, à travers une vraie vie de quartier, des temps et espaces communs (cf. la Journée du citoyen en Italie ).
En pratique, les éco quartiers sont fondés sur des normes techniques qui donnent la primauté à la dimension environnementale par rapport aux dimensions économiques et sociales. Ainsi, les critères retenus pour primer des projets d'éco quartiers sont la gestion e l'eau et celle des déchets, la mobilité, la sobriété énergétique, la densité et l'éco construction. L'architecture des bâtiments - qu'ils soient d'habitat ou dédiés à des activités marchandes ou administrative, de loisirs, culturelles, de sport, etc. - va donc être pensée d'abord au regard de ces critères environnementaux et non en fonction de la façon dont ces lieux vont être utilisés, habités.
L'appréhension des dimensions temporelles de l'éco quartier
Lorsqu'on lit les articles ou dossiers consacrés aux éco quartiers, la question du temps se retrouve exclusivement abordée (de façon littérale, directe) sous l'angle de la durabilité (ville durable comme on parle d'un environnement durable) : c'est-à-dire, soit de façon clivée soit de façon conjointe, le maintien dans le temps à travers une articulation avec l'idée de ressources planétaires limitées, ou bien une ville qui articule passé, présent et à venir (mémoire et projections dans le temps, extirpation de la culture du présent et de l'urgence).
En filigrane toutefois, la notion de ville durable qui parle de qualité de vie, de mixité sociale et fonctionnelle, de cohésion sociale, de mobilité douce, de démocratie participative suggère que le temps va y jouer un rôle important. Qualité de vie implique, non seulement une grande fluidité dans les usages du temps, dans l'articulation entre les différents temps de la vie quotidienne, mais aussi une appréhension des mutations de ces usages au cours de la vie (la mixité temporelle liée à l'intergénérationnel). Mixité sociale suggère la cohabitation de plusieurs structures de temps, celle des cadres, celle des artistes, celle des employés et ouvriers. Poussée plus loin, à la mixité ethnique, elle suggère la cohabitation de cultures différentes du temps (« vous avez l'heure, nous avons le temps »). Mixité sociale et ethnique, habitat intergénérationnel suggèrent la cohabitation de temps différents, de rythmes différents, et conjointement la nécessité de temps communs. Mixité fonctionnelle suggère des questions d'accessibilité temporelle, d'articulation entre temps de production, temps de consommation, temps de rencontres, temps pour soi, entre rythmes différenciés d'activités fonctionnant sur un temps mondialisé et d'autres ancrées dans le local (voir par exemple le concept émergent de tiers lieux qui seraient dédiées au télétravail mais qui seraient également des centres de services de la vie quotidienne).
Transports doux, mobilités douces supposent non seulement un espace urbain (qui ne soit pas limité à l'éco quartier) fonctionnant selon le principe structurant de la proximité (c'est-à-dire une mixité fonctionnelle associant logement, emplois, services administratifs et de la vie quotidienne - accueil des enfants, des personnes dépendantes - activités de loisirs et de temps libre - équipements sportifs, culturels etc. - afin que puissent être utilisés des modes doux de déplacement - vélo, marche, véhicules électriques, TC - etc.).
Démocratie participative - on parlera aussi d'éco-citoyenneté - suppose que les habitants et utilisateurs aient le temps de participer : pour cela leur ressource temps ne doit pas être épuisée par le travail, le transport, les soins aux enfants, les temps de consommation 87 ( * ) etc.
Les maisons de santé comme processus d'articulation entre santé et territoire à travers la prise en compte des dimensions temporelles.
Promouvoir une réponse territoriale aux questions de santé à travers la mise en oeuvre de maisons de santé, suppose, comme dans le cas des Eco quartiers, de prendre en compte les dimensions temporelles de la santé, des acteurs de la santé, des habitants et du territoire. On retrouve au fondement de la réflexion sur cette thématique les notions d'accessibilité, de la synchronisation entre le temps des patients et celui professionnels de la santé (et partant de la réciprocité au regard du fonctionnement horaire des différentes institutions de santé), de multifonctionnalité et de mutualisation ... Réfléchir à la localisation d'une Maison de santé en territoire rural suppose une bonne connaissance de la répartition géographique de la population, notamment au regard de sa catégorisation par âge, et sa mise en relation avec le système de transport (question de l'accessibilité qui peut être instruite au moyen des cartes chronotopiques). De la même manière qu'un éco quartier ne peut être envisagé sous sa seule dimension technique et technologique, une maison de santé ne peut pas être évaluée au seul regard des indicateurs de santé usuels : il convient en effet de tenir compte des réalités socio-économiques susceptibles d'influencer la santé des personnes (cf. les travaux relatifs au rôle que joue la dimension temps au regard du bien-être - Rapport Fitoussi, Sen, Stiglitz, 2009 ou ceux de l'OCDE sur les indicateur du bien-être, 201). Il faut également que soient prises en compte la question de l'accessibilité (temps et moyen utilisables dans des conditions économiques et environnementales durables) tout comme celle de la sensibilisation à la prévention, qui elle aussi demande du temps (marcher ou utiliser le vélo au lieu de prendre sa voiture ; prendre le temps de participer à des activités sportives etc.). La santé c'est, aussi, un environnement matériel et relationnel.
Aborder le concept de Maisons de santé à partir de la question temporelle permet de tenir compte des spécificités locales (où sont les habitants ? quelles sont leurs conditions sociales et sanitaires ? quelles sont leurs possibilités d'accès aux infrastructures sportives, de loisirs et culturelles ? etc.) et de les resituer au regard des enjeux interterritoriaux (cf les travaux de l'IAU IdF sur la façon de mesurer les niveaux d'accessibilité aux équipements de proximité, 2011).
Dialogue social territorial ou dialogue sociétal ? quelques précisions
La façon dont ont été appréhendés les Eco quartiers et les Maisons de santé, et l'objectif de leur donner une forme concrète supposent des formes nouvelles de diagnostic partagé à l'échelle d'un territoire et de co-construction de solutions. Il s'agit de mettre en oeuvre une forme de « gouvernance » qui permette une coopération entre entreprises et autres organisations publiques ou parapubliques (salariés et direction), institutions territoriales (collectivités locales) et société civile. Dès lors, on peut se poser la question de savoir si l'on est en présence d'un dialogue social qui prend le territoire comme lieu d'action parce que la nature des problèmes traités est profondément territorialisée ? Ou s'agit-il d'un dialogue social élargi qui, en complément du dialogue social sectoriel, prend comme scène permanente le territoire mais en limitant le nombre d'acteurs ? Ou, enfin, est-on en présence d'un dialogue sociétal local qui serait le signe d'une démarche nouvelle et qui se déploierait en complémentarité avec le dialogue social ? Les démarches entreprises par la Région dans le cadre du SRDE se situent, nous semble-t-il, sur l'un des deux premiers registres selon les cas retenus (quatre expérimentations vont être conduites dans le cadre de cette étude-action).
En préconisant une approche temporelle tant des Eco quartiers que des Maisons de santé, le groupe « Temps -territoires - Développement Durable Nord-Pas-de-Calais » s'inscrit dans une démarche de dialogue sociétal local.
Le temps comme catalyseur du dialogue sociétal local
Une des conclusions du rapport de synthèse élaboré à l'issue du séminaire 2008/2009 était que l'émergence de nouveaux conflits temporels et de nouvelles contraintes d'accessibilité spatiales et temporelles concernait tant les entreprises, les institutions que les individus et la société civile. Les politiques temporelles locales, en prenant le temps pour point d'application dans un objectif d'amélioration de la qualité de vie, d'égalité, de renforcement de la cohésion sociale et de développement soutenable, ont mis en évidence ces tensions et se sont attachées à inscrire leur atténuation dans leurs politiques d'aménagement. Face à l'éclatement des espaces, des temporalités, des mobilités, la prise en compte du temps dans l'aménagement urbain est incontournable. Dans un espace polychrone, les conflits d'usage portent sur l'espace mais aussi sur le temps c'est-à-dire l'occupation du temps et la gestion des rythmes urbains (et le plus souvent sur la combinaison des deux : pas de lieu sans temps, pas de temps sans lieu). C'est aussi une condition de la cohésion sociale dans la mesure où, sans débat public, sans prise en compte des inégalités de temps, les ajustements se feront au détriment des plus faibles. La résolution de ces tensions suppose donc une coopération active et la plus large possible des différents acteurs à même d'exposer les enjeux et de déterminer les actions à mener sur la base de la place spécifique que chaque acteur occupe sur le territoire.
Adopter l'approche par les temps dans un objectif de développement territorial durable signifie basculer d'une logique de gain de temps à une logique de qualité de temps et donc de qualité de vie/qualité de la ville (en lien avec les problèmes liés aux évolutions climatiques et à l'épuisement des ressources énergétiques). C'est par exemple, le dilemme entre être transporté plus rapidement ou mieux (i.e. dans des meilleures conditions).
Trois ressources fondamentales sont à prendre en compte dès lors que l'on pense aménagement urbain ou du territoire : l'énergie, le temps et l'espace. D'une façon générale, les marges de manoeuvre sur l'énergie et l'espace sont faibles tandis que celles relatives au temps sont plus amples, d'autant que le temps peut d'une part se composer, s'articuler aux deux autres, d'autre part se décliner selon des rythmes diurnes, nocturnes, hebdomadaires, saisonniers.
Le temps est l'un des rares enjeux de politiques publiques dont la responsabilité de la prise en compte soit transversale. Compétence de tout le monde et de personne, le temps est l'un des seuls thèmes qui permette d'engager le débat avec l'ensemble des acteurs publics et privés. La question du temps oblige au partenariat depuis la phase d'observation jusqu'à celle de l'expérimentation et de l'évaluation.
Comment rendre effective la participation réelle des citoyens
Impliquer les citoyens, les habitants, les usagers du territoire dans le contexte des politiques temporelles signifie coconstruire avec les acteurs qui disposent d'une expertise d'usage plutôt que de simplement faire participer ou informer/consulter. Il s'agit de privilégier une approche sensible aux usages, à la vie quotidienne (intégrer la dimension qualité des espaces, mais aussi celle du « vivre ensemble »).
Idéalement, le dialogue sociétal local implique une large palette d'acteurs : élus et techniciens des collectivités locales, entreprises, organisations syndicales, associations, mais aussi habitants et usagers temporaires du territoire. Dès lors, il est nécessaire d'imaginer des formes nouvelles de légitimité démocratique ainsi que de nouvelles formes de participation (via des enquêtes directes auprès des personnes concernées, la mobilisation via les NTIC, etc.) et de nouvelles façons d'envisager le périmètre des acteurs (par exemple, on peut imaginer une citoyenneté temporaire, éphémère qui implique ceux qui ne vivent pas dans l'espace concerné mais l'utilisent, le parcourent, y vivent une partie de la journée ou de la semaine.
La problématique du dialogue sociétal local apparaît ainsi transversale aux autres focus (maisons de santé et éco quartier) : c'est à propos de ces deux objets d'analyse que l'on peut mettre en oeuvre le dialogue sociétal local.
Conclusions provisoires en termes de perspectives d'action pour la Région
Les travaux des trois groupes focus ont permis de confirmer la valeur ajoutée que constitue la prise en compte du temps, dans ses différentes dimensions, au regard des thématiques analysées. De ce point de vue, les travaux du groupe sont venus confirmer le constat tiré à l'issue du séminaire 2008/2009 : « Dans une économie et une société de service, réguler les enjeux temporels permet de soutenir le développement économique, d'améliorer la qualité de vie, de diminuer les inégalités sociales et territoriales au regard de l'accessibilité des services, de prendre en compte les enjeux écologiques ... en d'autres termes de favoriser le développement durable ». Tous les exemples qui ont pu être évoqués au cours des séances de travail relatives aux Eco quartiers ou aux Maisons de Santé ont montré l'intérêt qu'il pouvait y avoir à mener des diagnostics temporels et à utiliser ceux-ci comme levier des actions futures. Ces travaux montrent qu'à rebours du constat pessimiste d'Harmut Rosa qui pense que les politiques publiques ne peuvent pas limiter le mouvement d'accélération du temps (Rosa, 2010), il est possible d'initier des politiques publiques génératrices d'une amélioration de la qualité de la vie.
Ainsi, une des premières pistes d'action pour la Région pourrait être de procéder à une évaluation temporelle du fonctionnement des Eco quartiers (et non pas seulement à leur impact énergétique) et des Maisons de santé : si les mobilités et accessibilités sont fluides à l'intérieur du quartier, comment est-il relié au reste de la ville ou de l'espace dans lequel il est inscrit ? Quels types d'emploi a-t-il généré ? Dans quelles activités ? Quels sont les temps de liaisons entre ce quartier et les autres parties de l'espace urbain ? Comment contaminer les autres parties de la ville avec les principes qui sont au fondement de l'éco quartier ? Qui participe au gouvernement du quartier, quelles catégories (de genre, d'âge, de qualification, d'activité, ethnique) sont inscrites concrètement dans la gouvernance du quartier (le temps disponible est ici crucial).
Plus généralement, le chrono-urbanisme qui consiste à intégrer la question des temps, à travers un dialogue sociétal local, en amont de la production urbaine (ce qui est apparu nécessaire lors des débats qui se sont noués au regard des Eco quartiers et des Maisons de santé), génère une multiplicité de points d'application potentiels du dialogue sociétal local qui ont déjà fait l'objet d'initiatives par les collectivités locales ailleurs en France et en Europe :
- les pactes pour la mobilité (décaler les horaires, désynchroniser ou plutôt resynchroniser différemment à l'aune d'une recherche de plus grande diversité des horaires, mutualiser les moyens de transports, organiser l'information sur les transports, intégrer des services dans les transports etc.) ;
- l'ouverture des bibliothèques/médiathèques et autres équipements le dimanche ou en soirée ;
- les services temporellement adaptés (crèches aux horaires décalés pour permettre aux inactifs de passer en emploi) ;
- les banques du temps ;
- la mixité des usagers dans des lieux polychroniques (des locaux scolaires, gymnases etc) que l'on peut utiliser le soir, le week-end etc. (voir par exemple les écoles fenêtres au Pays Bas).
Une des conclusions des groupes de travail qui se sont réunis en plénière à trois reprises a été de préconiser un accompagnement de projets concrets, afin de montrer que « c'est possible ». Il rejoint de ce point de vue les conclusions du rapport de synthèse du séminaire 2008/2009 qui avait identifié des « chantiers » parmi lesquels outre les maisons de santé, le Louvre Lens pour lequel les enjeux temporels sont centraux (accessibilité, horaires de fonctionnement, insertion dans l'espace-temps local encore fortement marqué par l'histoire minière, etc), la question des temps d'accès à la métropole lilloise depuis les différents points du territoire et les relations entre ces différents points, ou encore des actions dans le domaine de l'éducation, tant à partir des concepts de l'école culturelle que de l'école virtuelle auxquels il nous semble nécessaire d'ajouter celui d'école élargie à l'image de ce qui est développé aux Pays-Bas.
Si les travaux menés en 2010/2011 ont confirmé cette nécessité d'accompagner/initier des projets concrets expérimentaux (une expérience d'école élargie pourrait être initiée par la Région) ou non, ils ont également confirmé d'autres éléments d'action du Conseil Régional qui avaient été suggérés lors de la première phase en 2008/2010 :
- sensibiliser les différents acteurs institutionnels et socio-économiques de la région. Cela demande un engagement et des initiatives spécifiques ; en d'autres termes que des forces et des ressources y soient consacrées ;
- assurer une mission de veille informationnelle et d'animation de débats qui soit en mesure d'identifier les enjeux temporels au sein des principaux projets engagés dans la région. Il s'agit aussi de repérer les acteurs régionaux déjà sensibilisés par ces enjeux et de capitaliser leur expérience ;
- constituer une « instance ressources » permettant d'accompagner les projets « phares » ou « pilotes » et de former les acteurs chargés de les mener. Cette « instance ressources » s'appuiera d'une part sur les réseaux d'acteurs nationaux et européens (l'association Tempo territorial, le club économie de la fonctionnalité et développement durable ...), d'autre part sur les chercheurs de la région (IFRESI, INRT ...), les agences d'urbanisme, les institutions de formation des urbanistes et des architectes, les membres des antennes locales du CNFPT ;
- contribuer à ce que les dispositifs d'évaluation des politiques régionales intègrent les dimensions temporelles. A cette fin « l'instant ressources » pourra concevoir des méthodes d'évaluation en cohérence avec les problématiques identifiées et arrêtées par le Conseil Régional.
Enfin, il nous paraît utile de rappeler les trois postures que la Région pouvait adopter pour soutenir son action :
- lancer des projets directement dans ses champs directs de compétences, comme par exemple le transport ;
- accompagner des projets déjà existants initiés par d'autres acteurs publics et privés ;
- inciter, à travers des appels à projets (voir l'exemple italien), les autres acteurs régionaux, notamment les autres collectivités territoriales, à s'engager dans des démarches de régulation des temps sociaux ou dans des expérimentations (par exemple dans le domaine de l'éducation et de l'accueil des enfants).
Éléments de synthèse
1. Dans une société dont la dynamique est fondée sur les services, les questions temporelles sont au coeur des tensions sociales et économiques . Les conditions d'accessibilité temporelle s'ajoutent aux enjeux de solvabilité, et sont à l'origine de nouvelles inégalités sociales. Les formes de synchronisation/désynchronisation des temps de travail vis-à-vis des temps de disponibilité des bénéficiaires de service représentent des obstacles ou des leviers au développement des activités productives contemporaines. La prise en compte des enjeux temporels ne représente pas un « supplément d'âme », mais est au centre d'une capacité d'agir de manière opérationnelle dans une perspective de développement durable.
2. Mettre en place des dispositifs d'identification des tensions temporelles, des dysfonctionnements temporels ou des conflits d'usages sociaux, est le moyen de repérer les obstacles au développement pour les surmonter, les dépasser. Cela ne relève pas d'une politique comme les autres dans la mesure où ces enjeux sont transversaux aux champs classiques des politiques publiques territoriales.
3. Prendre en charge les enjeux temporels dans les politiques publiques, c'est le moyen d'approfondir la démocratie en acte car cela exige de s'appuyer sur l'expérience des acteurs économiques, sociaux, institutionnels. C'est un levier de donner la parole à tous de manière concrète et opérationnelle, de s'appuyer sur l'expérience de tous et ainsi de sortir de la domination symbolique des experts techniques ou politiques.
4. Prendre en charge les tensions temporelles conduit à concevoir de nouvelles réponses aux attentes des ménages, des entreprises, des institutions. Cela exige à procéder à des formes de « sauts systématiques » dans la façon d'aborder le périmètre des enjeux à traiter. Par exemples, cela conduit à ne plus poser simplement les problèmes en termes :
a. de soin, mais de santé afin d'intégrer la prévention, comme les activités connexes aux soins ;
b. de transport mais de mobilité afin d'engager des politiques qui abordent les enjeux de l'inter-modalité des systèmes de transport, de l'information et de la « billettique », des services à bord comme des services dans les lieux d'échange de modalité de moyens transport ... ;
c. de cadre bâti, mais de modalités d'habiter des quartiers afin de s'engager dans un urbanisme durable à même de penser les articulations entre les différentes fonctionnalités de la ville, du quartier ...
5. La conception et la mise en oeuvre de ces réponses intégrant les enjeux temporels représentent un levier de mise en oeuvre concrète des exigences du développement durable dans la mesure où le temps est un moyen d'envisager de manière articulée les questions sociales, environnementales et économiques.
6. Les dynamiques temporelles conduisent les acteurs à se déplacer vis-à-vis de leur compétence et champ d'action « classiques ». Cela les conduit à renouveler leur rapport aux territoires locaux tout en prenant conscience de la nécessité d'articuler différentes échelles d'action. Dans cette perspective, les enjeux temporels remettent sur le devant de la scène les questions du « vivre ensemble », du politique. Les territoires infranationaux apparaissent comme des lieux où se construisent des compromis sociaux (le dialogue sociétal territorial) fondés sur des cohérences temporelles locales.
7. En définitive, les politiques temporelles ont ceci de spécifique qu'elles sont transversales à l'action publique territoriale. Dans cette perspective, elles représentent un levier pour que les directions des services puissent opérer en synergie les unes avec les autres. La mise en oeuvre de ces coopérations transverses représente une nouvelle manière de travailler, plus efficace et pertinente, tant pour les élus que pour les services techniques. Cela fait évoluer les métiers des uns et des autres. C'est donc un projet en direction de la société civile comme un levier d'évolution de l'institution territoriale dans son mode de fonctionnement en prise avec les enjeux de développement durable.
7. Convention entre la région Nord-Pas-de-Calais et Lille Métropole : mise en place d'une démarche d'expérimentation avec un territoire dans le cadre de la démarche sur la prise en compte des temps dans l'aménagement du territoire à l'échelle régionale en Nord-Pas-de-Calais
Région Nord-Pas-de-Calais
Commission permanente du conseil régional
Délibération n° 20140569
Réunion du 7 avril 2014
Exercice Budgétaire : 2014 Programme : 0202 Autres moyens généraux
Thème : Développement Durable
Objet : Démarche d'expérimentation avec un territoire dans le cadre de la démarche sur la prise en compte des temps dans l'aménagement du territoire à l'échelle régionale en Nord-Pas-de-Calais
La Commission Permanente du conseil régional Nord-Pas-de-Calais réunie le 7 avril 2014, sous la présidence de Monsieur Daniel PERCHERON,
Vu le Code Général des Collectivités Territoriales,
Vu le Code des Marchés Publics,
Vu l'ensemble des décisions budgétaires de l'exercice 2014, adoptées jusqu'à ce jour,
Vu la délibération n°20102707 des 15, 16 et 17 décembre 2010 adoptant le règlement budgétaire et financier,
Vu la délibération n°20131950 du 26 septembre 2013 adoptant le projet d'actualisation du Schéma Régional d'Aménagement et de Développement Durable du Territoire (SRADDT) et de ses volets
Vu la délibération n° 2010 0613 des 21 et 22 avril 2010 donnant délégation à Monsieur le Président du
Conseil Régional Nord Pas-de-Calais pour la préparation, la passation, l'exécution et le règlement des marchés et des accords-cadres, ainsi que toute décision concernant leurs avenants lorsque les crédits sont inscrits au budget,
Vu la délibération n° 20100614 des 21 et 22 avril 2010 portant délégation à la Commission Permanente,
Vu la présentation en Commission Développement durable, démocratie participative, évaluation lors de sa réunion du 18 mars 2014,
PREAMBULE :
La Région a engagé à partir de 2008 et dans le cadre du Schéma Régional d'Aménagement et de Développement du Territoire (SRADT) une démarche prospective sur la prise en compte des temps dans l'aménagement du territoire à l'échelle régionale en Nord-Pas-de-Calais. Les enjeux de cohésion sociale et territoriale liés au temps individuels et collectifs ont en effet amené l'inscription dès 2006 d'un objectif intitulé « accompagner les territoires dans la mise en place de politiques des temps ».
La nécessité d'une étape d'expérimentation avec un territoire volontaire a été identifiée: il est nécessaire en effet de mieux cerner les conditions d'appropriation de la problématique des temps par les acteurs locaux.
Lille-Métropole Communauté Urbaine a répondu favorablement à l'interpellation de la Région lui proposant une telle expérimentation, compte tenu de l'émergence de la question des temps dans des démarches comme, le Plan Climat de Lille-Métropole ainsi qu'à travers une saisine de son Conseil de Développement.
Le projet est décrit en annexe 1.
Une convention d'objectifs est proposée entre les deux collectivités, précisant leurs objectifs communs, le thème principal du partenariat ainsi que son mode de gouvernance (Annexe 2)
DECIDE
De mener, en partenariat avec Lille-Métropole Communauté Urbaine et les outils à son service, une expérimentation dans le cadre de la démarche sur la prise en compte des temps dans l'aménagement du territoire à l'échelle régionale en Nord-Pas-de-Calais. Cette expérimentation portera sur la question de la gestion des heures de pointe. Elle consistera en un diagnostic temporel du territoire, une identification de pistes d'actions, une co-construction de réponses opérationnelles avec les acteurs concernés et une diffusion des connaissances et des conclusions de cette démarche. Sa durée sera de deux ans.
De recourir à une assistance à maîtrise d'ouvrage pour accompagner cette démarche.
De lancer à cet effet une consultation dans le respect du code des marchés publics pour un coût prévisionnel de 30.000 € TTC. Cette somme est imputée sur la ligne budgétaire 930 0202/617.
AUTORISE
Monsieur le Président du Conseil Régional à signer les actes juridiques, administratifs et financiers correspondants.
DECISION DE LA COMMISSION PERMANENTE :
ADOPTE DANS SON INTEGRALITE
Daniel PERCHERON
Président du Conseil Régional
Contrôle de légalité en Préfecture de Région le : 18 avril 2014
ANNEXE DE LA DELIBERATION N°20140569
NOM DE L'OPERATION : Démarche d'expérimentation avec un territoire dans le cadre de la démarche sur la prise en compte des temps dans l'aménagement du territoire à l'échelle régionale en Nord-Pas-de-Calais
PRESENTATION DU PROJET :
• Rappel du contexte et historique
La Région a engagé à partir de 2008 et dans le cadre du SRADDT une démarche prospective sur la prise en compte des temps dans l'aménagement du territoire à l'échelle régionale en Nord-Pas-de-Calais. Les enjeux de cohésion sociale et territoriale liés au temps individuels et collectifs ont en effet amené l'inscription dès 2006 d'un objectif intitulé « accompagner les territoires dans la mise en place de politiques des temps ».
Cette démarche, appuyée sur une dynamique de groupe prospectif, a jusqu'à présent donné lieu à deux phases :
-2008-2009 : phase exploratoire destinée à vérifier la pertinence de l'échelle régionale et à identifier les problématiques et politiques régionales concernées.
Restitution en Atelier de prospective et lancement d'un groupe « Temps-Territoires-Développement Durable Nord-
Pas-de-Calais »
-2010-2011 : phase « focus » destinée à approfondir comment l'intégration de la dimension des temps constitue une valeur ajoutée pour qu'un projet atteigne mieux ses objectifs. Trois thèmes retenus : maisons de santé; éco-quartiers ; dialogue social territorial. Restitution en atelier de prospective.
Elles ont été appuyées par une assistance à maîtrise d'ouvrage et ont donné lieu à une production de rapports (dont un publié dans « Etudes Prospectives Régionales »).
Les principaux enseignements en sont les suivants :
-la dimension des temps, transversale par essence, articule les piliers du développement durable tout en valorisant l'» expertise d'usage » et les processus collectifs
-elle permet une autre compréhension du territoire qui renforce la dimension humaine
-elle permet de faire un saut qualitatif dans les raisonnements comme dans le caractère innovant de certaines réponses
-le temps est un sujet en soi (ex. : conciliation vie professionnelle-vie privée...) mais aussi un révélateur de différentes problématiques : égalité femme-homme ; mobilités/ transports ; conception de la ville ; organisation et fonctionnement métropolitain de la région ; disparités sociales et territoriales, place des services publics...qui interpellent les représentations collectives et la manière d'envisager les politiques.
• Objectifs de la démarche et thème retenu
La nécessité d'une étape d'expérimentation avec un territoire volontaire a été identifiée dès le départ compte tenu de la formulation du texte du SRADDT. Elle a par ailleurs été confortée dans l'approche collective : il est nécessaire en effet de mieux cerner les conditions d'appropriation de la problématique des temps par les acteurs locaux. Dans l'esprit d'un
SRADDT dont la mise en oeuvre suppose une co-construction avec les différents partenaires, une telle expérimentation vise donc les objectifs suivants:
- Passer à l'action en apportant des réponses concrètes, innovantes, appropriables et parlantes . Il s'agit aussi de comprendre comment la question des temps explicitée à l'échelle d'un territoire permet de mieux révéler les interactions d'échelles territoriales (en particulier territoire-région) et d'acteurs.
- Préciser « l'outillage » nécessaire pour une meilleure appropriation par les acteurs : argumentaire, bonnes questions à se poser, diagnostic temporel, connaissance à mobiliser, processus participatifs et besoins en animation...
- Identifier les possibilités de transfert dans différents contextes territoriaux
- Nourrir la mise en oeuvre du SRADDT évolutif et des chantiers qui lui sont liés (Indicateurs 21, résilience territoriale, DRA « Mobilités » et « Égalité des territoires », Égalité Femme-Homme, RASODD...
Lille-Métropole Communauté Urbaine a répondu favorablement à l'interpellation de la Région lui proposant une telle expérimentation, compte tenu de l'émergence de la question des temps dans des démarches comme le Plan Climat de Lille-Métropole ainsi qu'à travers une saisine de son Conseil de Développement. Un terrain de complémentarité évident entre les deux collectivités sur cette question peut s'illustrer par la place de la métropole lilloise dans le fonctionnement territorial régional et les nombreuses interactions auxquelles elle donne lieu, qui commencent à être également appréhendées à l'échelle de l'Aire Métropolitaine Lilloise. Il en est de même concernant les stratégies et politiques respectives en matière de mobilité.
Le sujet principal identifié conjointement expérimentation est celui de la question des heures de pointe.
Les situations récurrentes d'engorgement des infrastructures de la métropole lilloise impactent une bonne partie du territoire régional et affectent également une partie importante de la population. Elles interpellent à la fois l'organisation spatiale, les rythmes et l'organisation horaire, et mettent en scène des disparités sociales et territoriales qui se complexifient tant à l'échelle locale qu'à l'échelle régionale. Elles s'invitent de façon récurrente dans les débats des différentes collectivités du Nord-Pas-de-Calais.
L'analyse et la compréhension de ce phénomène, de ses déterminants, de ses impacts, impose des regards croisés permettant d'aborder le diagnostic de façon pertinente et décloisonnée et d'envisager des réponses s'appuyant sur les différents acteurs concernés.
• Méthodologie et pilotage
Compte tenu de la co-construction en cours, les éléments qui suivent seront précisés de façon conjointe entre la Région et Lille-Métropole.
La démarche sera organisée en trois phases afin de pouvoir adapter la gouvernance et les moyens aux différentes étapes. Ces trois phases seront :
- un diagnostic temporel du territoire métropolitain
- une élaboration de perspectives d'action
- l'action commune
PHASE 1 : Diagnostic temporel du territoire métropolitain
Cette phase visera à développer une connaissance et une compréhension partagées des phénomènes d'engorgement, dans l'optique de définir des perspectives d'actions adaptées : (caractérisation des différents aspects de la congestion, des lieux et des moments les plus critiques de la congestion, identification les grands générateurs de flux, acteurs et personnes régulièrement affectées...). Ce diagnostic sera relié aux travaux de l'AML qui recoupent en de nombreux points ces préoccupations.
Ce diagnostic pourra être conclu par une communication des résultats, notamment auprès du grand public. Les réactions et débats suscités faciliteront le repérage les acteurs à associer ensuite dans un processus participatif de recherche de solutions.
Cette première phase nécessite un pilotage resserré afin d'assurer une conduite optimale du diagnostic. Il est donc décidé de limiter le comité de pilotage à un binôme Région/Lille Métropole.
PHASE 2 : Élaboration des perspectives d'action
Cette seconde phase sera un moment charnière pour la démarche commune envisagée. Sur la base de la photographie réalisée en amont, elle visera à identifier les perspectives d'action pour remédier aux difficultés identifiées. A cette occasion, des problématiques dépassant la stricte question des heures de pointe seront certainement repérées et alimenteront la définition d'une politique communautaire des temps de la ville ainsi que les complémentarités avec celles pouvant être envisagées à l'échelon régional.
Un important travail de partenariat sera nécessaire afin d'associer les acteurs du territoire à la définition des solutions (grands générateurs de trafic, opérateurs de transport, ...). Cela nécessitera la formation d'un comité de pilotage élargi.
PHASE 3 : Action commune
Cette troisième phase sera beaucoup plus opérationnelle : elle visera à s'emparer d'une des actions identifiées plus haut et d'agir de concert pour apporter une solution aux problèmes soulevés par le diagnostic. Ce partenariat d'action associera la Région, Lille Métropole et les acteurs du territoire concernés. Sans préjuger des conclusions de l'étude, cela pourra être par exemple le dialogue avec les grands générateurs de trafic pour faire évoluer leurs heures d'embauche ou de fonctionnement.
• Identification des différents moyens nécessaires :
Moyens existants :
- la Région avec les moyens techniques et humains de la D2DPE mais également des différentes Directions impliquées dans cette démarche, avec les productions issues du partenariat avec l'INSEE, avec le CERDD, avec l'Enquête Régionale Mobilité-Déplacements, à travers le partenariat avec les Agences d'Urbanisme...
- LMCU, avec ses moyens techniques et humains, ainsi que par les travaux lancés dans le cadre de l'élaboration du Plan Climat Métropolitain, avec la saisine du Conseil de Développement.
Besoins spécifiques identifiés pour l'expérimentation
Ils concerneront :
- la connaissance (besoins documentaires, études, analyses, expertise, témoignages...) ainsi que sa valorisation et sa diffusion.
Il s'agit tout autant, sous un co-pilotage Région-LMCU, de rassembler et de valoriser ce qui existe de façon parfois éparse que d'envisager une production de connaissance nouvelle.
Ces besoins seront mutualisés entre la Région et Lille-Métropole en s'appuyant sur leurs équipes techniques, outils à leurs service, et productions dans le cadre de leurs divers partenariats. Ils pourront être identifiés en lien avec l'animation collective et donner lieu, le cas échéant, à une expertise spécifique.
- l'animation collective (à l'échelle du territoire d'expérimentation ; à l'échelle régionale).
Le groupe « Temps-Territoires-Développement Durable Nord-Pas-de-Calais», qui avait été le lieu support de la phase « focus » de la démarche régionale, sera relancé. Associant les pilotes techniques du territoire d'expérimentation, il jouera un rôle important dans les phases clés de la démarche et de son pilotage :
o suivi de cette phase et cohérence dans le cadre de la démarche régionale
o vérification de la réalisation des objectifs
o identification des conditions de transférabilité sur d'autres territoires
o synthèse des éléments à mettre à disposition du co-pilotage
Dans l'animation de ce groupe, il s'agira :
- de comprendre les articulations d'échelles, les transversalités, les complémentarités entre acteurs,
- d'identifier et de formaliser les besoins de connaissance à produire, à valoriser, en appui à l'expertise locale,
- de recueillir les bonnes pratiques issues d'autres initiatives
- de préparation les restitutions à l'échelle régionale et locale
Une assistance à maîtrise d'ouvrage sera nécessaire pour la partie « animation ».
• Estimation du financement :
Trois postes sont donc mobilisés : équipes techniques des deux collectivités ; expertises complémentaires ; animation collective.
Sous réserve de précisions apportées conjointement par les deux collectivités dans le déroulement de cette démarche, les besoins en assistance à maîtrise d'ouvrage peuvent être estimés à 30 000 euros TTC.
• Établissement d'une convention d'objectifs
Pour une bonne coordination entre Lille-Métropole et la Région Nord-Pas-de-Calais, il est décidé d'encadrer cette démarche expérimentale d'une convention d'objectifs (Annexe 2).
Cette convention présente tout d'abord les objectifs communs des deux institutions :
- travailler en collaboration sur un projet qui concrétise les réflexions menées jusqu'à présent sur les temps de la ville
- développer un savoir-faire propre aux temps de la ville et valorisable, dans le cadre de l'expérimentation régionale, dans d'autres territoires du Nord-Pas-de-Calais et sur d'autres sujets repérés conjointement.
Elle précise ensuite le thème principal du partenariat : la question de l'engorgement de la métropole aux heures de pointe.
Elle régit enfin le mode de gouvernance de ce partenariat. Il y est inscrit que la Région Nord-Pas-de-Calais et Lille Métropole pilotent conjointement et à responsabilité égale cette expérimentation grâce à un comité de pilotage composé de deux Vice-Présidents représentant respectivement chacune des institutions.
CONVENTION PASSEE ENTRE LILLE METROPOLE ET LA REGION NORD-PAS-DE-CALAIS
Entre :
La Communauté Urbaine de Lille, Établissement Public de Coopération Intercommunale, sise 1 rue du Ballon, BP
749, 59034 Lille Cedex, représentée par sa Présidente, Madame Martine Aubry, désignée sous les termes
« LM », d'une part,
Et :
La Région Nord - Pas-de-Calais, Siège de Région, 151 Avenue du Président Hoover à Lille, ci-après dénommée
« la Région », représentée par son Président Monsieur Daniel Percheron, désignée sous les termes « Région
Nord-Pas-de-Calais », d'autre part,
Il est établi la présente convention
Préambule :
La dimension des temps imprègne nos fonctionnements collectifs et individuels à travers les horaires, les rythmes, les saisons ainsi que les différentes conciliations ou conflits qui en résultent (temps travaillé-temps privé, mobilités...). Très transversale, elle articule étroitement les piliers économique, social et environnemental du développement durable. Sa prise en compte débouche souvent sur de nouvelles approches, en particulier par les usages des équipements, des infrastructures ou encore des services qui sont de plus en plus légitimées par le contexte budgétaire contraint des collectivités.
Si elle parle à chacun dans sa vie quotidienne, la question du temps reste cependant complexe à analyser, compte tenu d'interactions entre ses traductions locales et ses déterminants plus globaux.
Depuis 2008, la Région Nord-Pas-de-Calais a mené une démarche sur la prise en compte des temps dans l'aménagement du territoire à l'échelle régionale. Riche de ces enseignements, elle souhaite désormais mettre en évidence les conditions de mise en oeuvre d'une politique des temps sur un territoire afin de pouvoir généraliser une telle démarche par la suite.
De son coté, Lille Métropole souhaite poursuivre la démarche engagée à l'occasion des travaux du Plan Climat Energies Territorial, en dessinant une politique communautaire des temps de la ville. Un partenariat avec le Conseil régional sur ce thème permettrait de mettre en évidence comment l'entrée « temps » renouvelle les approches et les réponses aux sujets complexes qui caractérisent son territoire.
Un terrain de complémentarité évident entre les deux collectivités sur cette question peut s'illustrer par la place de la métropole lilloise dans le fonctionnement territorial régional et les nombreuses interactions auxquelles elle donne lieu, qui commencent à être également appréhendées à l'échelle de l'Aire Métropolitaine Lilloise. Telle est donc la raison d'être du partenariat envisagé entre les deux collectivités sur le thème des temps de la ville.
ARTICLE 1 - OBJET ET DUREE DE LA CONVENTION
La présente convention vise à définir le contenu et les modalités du partenariat entre le Conseil régional Nord-Pas-de-Calais et la Communauté urbaine de Lille sur le thème particulier des temps de la ville.
Cette convention est conclue pour une durée de trois ans renouvelables à compter du 2 mai 2014.
ARTICLE 2 - OBJET DU PARTENARIAT
Lille Métropole et la Région Nord-Pas-de-Calais conviennent que les principaux objectifs de ce partenariat sont de :
- Travailler en collaboration sur un projet qui concrétise les réflexions menées jusqu'à présent sur les temps de la ville.
- Développer un savoir-faire propre aux temps de la ville et duplicable sur d'autres territoires
ARTICLE 3 - THEME DU PARTENARIAT
Le partenariat envisagé abordera prioritairement la question de l'engorgement de la métropole lilloise aux heures de pointes et prendra la forme d'une expérimentation.
Ce choix repose sur trois éléments principaux :
- L'engorgement de la métropole aux heures de pointe (qu'il s'agisse de flux internes ou externes) impacte et concerne les différentes échelles territoriales et ne peut être abordé de façon cloisonnée
- Cette question s'est invitée dans nos instances politiques respectives et attend des réponses.
- Nos compétences croisées en matière de mobilité et leur intégration dans les stratégies respectives nous permettraient d'agir de concert pour réguler et limiter ce phénomène.
ARTICLE 4 - MODALITES DU PARTENARIAT
Le mode de faire retenu par les deux collectivités est de procéder à une expérimentation qui sera composée:
- D'un diagnostic aboutissant à une connaissance et une compréhension partagées de la situation d'engorgement de la métropole en heure de pointe, (déterminer finement les périodes d'heure de pointe, identifier les grands générateurs de flux, connaître le profil des citoyens régulièrement confrontés aux heures de pointe)
- D'une phase opérationnelle consistant à mobiliser quelques générateurs de flux identifiés parmi les principaux afin d'envisager, en complémentarité avec les différents acteurs concernés, des évolutions dans leur organisation horaire au regard de leur impact sur le territoire.
Ce focus n'exclut en aucune façon d'autres sujets qui pourraient se révéler à l'issue de cette expérimentation.
ARTICLE 5 - GOUVERNANCE
Lille Métropole et la Région Nord-Pas-de-Calais conviennent d'organiser une gouvernance commune qui permette de piloter conjointement et à responsabilité égale cette expérimentation à travers le dispositif suivant :
1 - Comité de pilotage politique : Composé de deux Vice - Présidents représentant chacune des institutions.
2 - Un comité technique composé à minima des services de la Région (D2PE) et de Lille Métropole (DSDD) qui assurera l'organisation et la mise en oeuvre de cette expérimentation. Ce comité technique pourra être élargi aux directions thématiques concernées par cette expérimentation (mobilité, économie,...).
ARTICLE 6 - MOYENS
1- Etude diagnostic
La mobilisation de l'ADULM est envisagée pour compléter les données dont disposent les deux institutions. Dans cette perspective, l'étude serait pilotée par les mêmes comités de pilotage et comité technique définis plus haut enrichis de représentants de l'ADULM.
1- Animation
L'animation de cette démarche sera assurée par les équipes techniques de la Région et de Lille Métropole (D2DPE et DSDD). Des moyens humains sont donc mis à disposition de ce projet par les deux institutions pour le repérage des acteurs à associer en phase de diagnostic, l'organisation d'échanges et de rencontres, la capitalisation de ces échanges et l'aide à la décision dans la définition de la stratégie et du programme d'action.
La Région prendra en charge une assistance à maîtrise d'ouvrage destinée à appuyer cette animation et Lille Métropole participera pour sa part à l'élaboration du diagnostic.
ARTICLE 7 - AVENANT
Toute modification des conditions ou modalités d'exécution de la présente convention, définie d'un commun accord entre les parties, fera l'objet d'un avenant.
ARTICLE 8 - RESILIATION DE LA CONVENTION
En cas de non-respect par l'une ou l'autre partie des engagements respectifs inscrits dans la présente convention celle-ci pourra être résiliée de plein droit par l'une ou l'autre partie à l'expiration d'un délai de trois mois suivant la mise en demeure par lettre recommandée avec accusé de réception.
ARTICLE 9 - LITIGES
Les litiges susceptibles de naître à l'occasion de la présente convention feront l'objet d'une procédure de négociation amiable et, autant que de besoin, il sera systématiquement, avant toute procédure contentieuse, fait appel à une mission de conciliation du Tribunal administratif de Lille dans le cadre des dispositions de l'article L 211-4 du code de justice administrative.
Pour la Présidente de Lille Métropole, Pour le Président du Conseil régional,
Le Vice-Président délégué et par délégation
La Vice-Présidente
Eric Quiquet
Myriam Cau
8. Après l'espace, penser l'aménagement temporel du territoire et de ses services, Jean-Pierre Moure, Président de la communauté d'agglomération de Montpellier88 ( * )
Depuis 2006, Montpellier Agglomération s'est emparée de la question temporelle sur le plan local. Après avoir mené beaucoup d'actions temporelles sur son territoire et réaménagé de nombreux services en interne au vu des évolutions des rythmes de vie, elle souhaite aujourd'hui penser plus globalement l'aménagement temporel de son territoire et des services à la population.
Depuis la fin de l'année 2012, au même titre que le Schéma de cohérence territorial (Scot) dans lequel l'aménagement spatial du territoire est pensé et optimisé, Montpellier Agglomération a lancé l'élaboration d'un Schéma directeur temps et territoire (SDiTT) pour penser l'aménagement temporel de son territoire et de ses services, ce qui constituera une première en France et en Europe.
Pourquoi cet intérêt pour l'aménagement temporel du territoire et des services ? Il nous semble que les grandes mutations qui sont intervenues en l'espace de quelques décennies en matière de temps sociaux et économiques interrogent le modèle temporel que nous souhaitons pour notre territoire. Par ailleurs, nous avons pris conscience que les temps d'accès, les horaires des services à la population, les rythmes scolaires, les rythmes de travail, structurent la vie sur notre territoire et nécessitent d'être mieux pensés, organisés et coordonnés. En nous emparant de ces questions, nous souhaitons proposer collectivement un fonctionnement temporel de notre territoire qui soit efficient et qui offre à chacun une bonne articulation de ses temps de vie. De cette volonté est né le SDiTT. Son élaboration est en cours. La première phase a été consacrée à la réforme des rythmes scolaires, qui va modifier les rythmes de vie de 25 % de notre population. Notre objectif est de le finaliser dans le courant de l'année 2015.
Cette Note traite des grandes questions et des différents champs d'application qu'abordera le SDiTT.
Des territoires et des institutions qui peinent encore à s'adapter aux mutations contemporaines
Jamais dans l'histoire d'aussi grandes mutations temporelles sont intervenues en si peu de temps. Celles-ci questionnent nos politiques publiques, l'organisation de nos temps sociaux au niveau national, mais aussi au niveau local.
Nous avons gagné au XX e siècle trente et un ans d'espérance de vie (+ 65 %), notre existence n'est donc plus la même. Au cours d'une vie en effet de nombreuses ruptures, de nombreux changements interviennent (séparations, réorientation professionnelle, périodes de chômage, innovations technologiques, mutations sociales...), des évolutions que notre organisation peine encore à accompagner. Quels services, quelles protections sociales développer pour accompagner la population dans ces mutations ? L'allongement de l'espérance de vie pose également la question des fondements de la retraite et son financement, car lors de sa création, seulement 5 % de la population atteignait l'âge de 60 ans, alors qu'aujourd'hui nous avons une espérance de vie de 81 ans. Doit-on concentrer le temps libre en fin de vie ? Ne faudrait-il pas plutôt repenser l'aménagement des différents temps tout au long de la vie ? Comment faciliter l'accès à l'emploi le plus longtemps possible (par exemple avec la garde des enfants, la prise en charge des personnes dépendantes) pour que le système par répartition puisse perdurer ?
La durée des études a augmenté de six ans au XX e siècle, elle s'élève aujourd'hui à 30 000 heures au cours d'une vie. L'âge moyen de sortie des études est désormais de 21 ans. Mais la formation demeure trop concentrée en début de vie, alors qu'il faudrait la repenser tout au long de l'existence pour maintenir dans l'emploi la population le plus longtemps possible au vu des évolutions technologiques et sociétales.
Le temps de travail rémunéré a été divisé par deux au XX e siècle et il ne représente plus que 10 % de la vie, soit environ 70 000 heures. Mais, du fait de la concentration de l'activité professionnelle entre 25 et 54 ans, à un moment où l'on est souvent parent, de l'entrée massive des femmes sur le marché du travail (84 % des 25-49 ans travaillent en 2010 contre 41 % en 1962) et de la répartition encore trop inégale des tâches domestiques et parentales entre les hommes et les femmes, la charge de travail (rémunéré et non rémunéré) est très inégalement répartie tout au long de la vie et s'est même alourdie à certaines étapes. Nous avons en effet d'un côté les parents actifs avec enfants qui cumulent une double journée de travail et rencontrent des difficultés pour articuler leurs différents temps de vie (pour s'occuper de leurs enfants, avoir une vie de couple, une vie sociale et citoyenne, prendre soin d'eux-mêmes) ce qui se répercute sur leur santé et le rythme de vie de leurs enfants. Et de l'autre côté, les jeunes et les quinquagénaires qui peinent à trouver un emploi, ainsi que les seniors, qui disposent de vingt années d'espérance de vie au cours desquelles ils doivent « occuper leur temps ». Faut-il maintenir cette organisation concentrée du temps de travail ? Ne faudrait-il pas plutôt la penser à l'échelle de l'existence, en permettant à chacun d'avoir une bonne articulation de ses temps de vie ? Comment inciter les entreprises à aller dans ce sens ?
L'entrée massive des femmes sur le marché du travail a aussi modifié en profondeur les temps sociaux et a généré des demandes en matière de garde d'enfants (crèches, dispositifs péri et extrascolaires...) sur les territoires.
Le temps libre a été multiplié par quatre en l'espace de trois générations (les vacances, les loisirs, la retraite...) et représente de nos jours 400 000 heures au cours d'une vie. Cela signifie que, sur le territoire, il y a en permanence du monde qui pratique des activités de loisirs. Par ailleurs, l'usage du temps libre est extrêmement diversifié, en fonction de l'organisation des temps de vie, des pratiques, des moyens. Mais certains rencontrent aujourd'hui des difficultés pour trouver une offre adaptée à leur temps libre (par exemple le fait pour un intérimaire de s'engager à l'année dans une activité), ce qui ne leur permet pas d'en profiter. Quelle politique de temps libre, quelle offre de loisirs, promouvoir sur le territoire ? Quelle politique touristique ?
Sur le plan technologique, en un siècle, la vitesse des transports a augmenté de 102 % ; celle des communications, de 107 % ; celle du traitement de l'information, de 1 010 % 89 ( * ) .On se déplace donc plus, plus vite, plus loin - physiquement mais aussi virtuellement -, et les choses sont faites plus rapidement. La morphologie des territoires tels qu'ils sont vécus en est donc transformée. Par ailleurs, la localisation physique perd de son importance, car on peut faire de plus en plus de choses, de n'importe quel endroit et à n'importe quelle heure, grâce aux nouvelles technologies. Quelle nouvelle offre de mobilité, de services, d'aménagement du territoire proposer au regard de ces évolutions ? Nous sommes passés dans les années 1970-1980 à une économie mondialisée, une société de services, de consommation, qui utilise les technologies de l'information et de la communication, le flux tendu et qui implique des taux de rentabilité élevés. Cela a induit un fonctionnement du travail 24 heures sur 24 7 jours sur 7, en temps réel, qui a conduit au développement de rythmes atypiques (travail de nuit, le dimanche, fragmenté, les trois-huit), de la flexibilité et de la précarité (CDD, intérim, chômage...). Ces changements ont généré des demandes de nouveaux services sur les territoires (par exemple des crèches, des transports, pour les travailleurs nocturnes, pour les intérimaires). Ils ont aussi engendré une opposition entre la ville qui dort et les activités nocturnes. Faut-il répondre à ces nouveaux besoins (les gardes d'enfants ou les transports le soir ou le dimanche) ? Quel compromis trouver entre les impératifs économiques et les rythmes humains ? Quel aménagement du territoire au regard de cette tendance au 24 heures sur 24, en sachant que les collectivités ne pourront pas financer partout des services ouverts en continu ?
L'ensemble de ces évolutions nous a fait passer très rapidement d'une « société industrielle taylorienne », caractérisée par des rythmes massifs et standardisés ainsi que par une division du travail entre genres (l'homme actif et la femme au foyer), à une « société à mille temps », dans laquelle les femmes et les hommes travaillent, les rythmes de travail sont diversifiés, intensifiés, le temps libre a augmenté et où l'économie mondialisée fonctionne en permanence. Ces mutations temporelles, interrogent nos politiques publiques nationales, mais aussi locales en ce qui concerne les services à la population, l'aménagement du territoire, l'aménagement du temps de travail et les activités économiques.
Le temps, un facteur important de la qualité de vie et de l'aménagement du territoire, trop souvent négligé
Les temps d'accès, l'amplitude horaire des services à la population, les rythmes scolaires, les rythmes de travail, structurent la vie sur nos territoires. Mais la dimension temporelle est souvent négligée, alors qu'elle est aussi essentielle que l'espace.
Les temps d'accès aux services et activités du territoire structurent la vie quotidienne
Le temps que l'on met pour emmener ses enfants à l'école, se rendre au travail, pratiquer une activité de loisirs, faire ses courses... conditionne notre pratique du territoire, facilite ou non l'organisation de nos temps quotidiens. Finalement ce n'est pas la distance, mais bien le temps nécessaire pour se déplacer qui est important. C'est au regard des temps d'accès et non de la distance que la personne fera ses choix d'habitation, fréquentera plutôt tel ou tel service à la population, optera pour un mode de transport plutôt qu'un autre. L'aménagement des bassins de vie du territoire, la localisation des équipements d'intérêt communautaire doit donc se faire aussi au regard des temps d'accès.
Par ailleurs, on constate que l'augmentation de la vitesse des déplacements n'a pas conduit à la réduction du temps de transport quotidien, qui est resté constant au fil des décennies, mais qu'elle a au contraire favorisé l'allongement des distances parcourues et donc l'étalement urbain que nous connaissons. La maîtrise de l'étalement urbain passe donc par une meilleure maîtrise des temps d'accès, au-delà de la maîtrise foncière et de la qualité urbaine.
Il est donc essentiel que l'aménagement du territoire soit aussi pensé au regard des temps d'accès. Comment structurer les vitesses (voiries, transports en commun) pour favoriser une organisation du territoire autour de pôles urbains équilibrés et maîtrisés ? 90 ( * )
Quelle localisation pertinente au regard des temps d'accès et des différents bassins de vie pour les services, les commerces, les écoles, l'emploi, l'habitat ? Comment optimiser les temps de parcours en transports en commun et en modes actifs ?
Aller vers une ville compacte, multifonctions, moins chronophage, qui concilie et gère des usages temporels différenciés
Pour faciliter une bonne gestion des temps quotidiens, il faut passer du modèle chronophage de la ville éclatée en différentes fonctions (logement, commerce, travail, loisirs) à un modèle de ville compacte avec une grande mixité des fonctions urbaines (par exemple, le fait de pouvoir manger, faire des courses, pratiquer une activité de loisirs... à proximité de son travail entre 12 heures et 14 heures).
Aller vers ce modèle de ville améliorera la gestion des temps quotidiens, mais risquera aussi de générer des conflits entre des régimes temporels divergents (par exemple entre ceux qui dorment et ceux qui font la fête). Il faut donc structurer la mixité des fonctions urbaines pour que leurs différents régimes temporels puissent cohabiter, mais aussi développer des outils de médiation pour gérer les conflits temporels existants.
Exemple : La mairie de Paris organise des concertations qui aboutissent à des « chartes locales des usages », qui contractualisent des engagements réciproques, des aménagements. Cela permet d'apaiser les conflits liés aux pratiques divergentes des habitants. |
Par ailleurs, de nombreux équipements sont sous-utilisés à certaines périodes (les salles de gymnastique dans les écoles par exemple) alors qu'ils pourraient répondre à d'autres besoins.
Plutôt que de construire des équipements pour chaque usage, il vaudrait mieux optimiser l'usage temporel des équipements. Cela nécessite de réfléchir à leur polyvalence, à des modalités d'accès différenciés ainsi qu'à des modalités de gestion multipartenariale.
La morphologie du territoire, les usages des services évoluent en fonction des périodes, leur organisation doit donc en tenir compte
Selon le moment, la semaine ou le week-end, l'hiver ou l'été, la période scolaire ou les vacances, l'usage du territoire change. Ainsi, alors que pendant la semaine, les actifs des zones rurales et périurbaines viennent travailler à Montpellier, le dimanche et lors des vacances, ce sont les urbains qui investissent la campagne et les plages. De même, l'usage d'un parc n'est pas le même en hiver et en été.
Les usages, les lieux de centralité changent au cours du temps, et l'aménagement du territoire et des services doit en tenir compte.
Prendre en compte l'accessibilité horaire aux services en fonction des différentes populations présentes (habitants, étudiants, salariés, touristes) permet de répondre finement à la diversité des rythmes de vie et d'optimiser le fonctionnement des services
Les rythmes de vie se sont énormément diversifiés et incitent à une réflexion sur l'offre de services. En voici quelques illustrations.
Alors qu'auparavant les transports étaient synchronisés sur les entrées et sorties d'usines à heures fixes, aujourd'hui on attend des transports une large amplitude horaire et une fréquence élevée, car ils doivent répondre à des mobilités plus diffuses, nombreuses et éclatées (horaires de travail variables des actifs, besoins de déplacements pour des motifs de loisirs et d'achats). Comment répondre à ces nouvelles attentes ? Jusqu'où doit-on s'adapter ? Quelles innovations apporter ?
Exemple : Les tramways de l'agglomération de Montpellier fonctionnent de 5 heures à 1 heure du matin tous les jours avec une fréquence en heure de pointe de 5 minutes en zone urbaine et de 15 minutes en zone périurbaine. |
Le temps libre a été multiplié par quatre, mais il s'est aussi énormément diversifié. Or l'offre de loisirs reste très classique et ne répond pas à la diversité des besoins. Comment prendre un abonnement annuel quand on ne sait pas si on travaillera le lendemain ?
Comment occuper son temps libre quand on travaille avec des horaires décalés et qu'il n'y a aucune offre au moment où l'on serait disponible ? Que faire quand on est à la retraite ? Comment gérer le temps libre des enfants quand on n'est pas là pour s'en occuper ? Quelle offre pour les touristes, les étudiants et autres usagers ponctuels de notre territoire ?
Montpellier Agglomération a réaménagé les horaires de ses médiathèques centrales (ouvertes le dimanche d'octobre à avril), de ses piscines, de son planétarium, de ses musées, pour mieux répondre à l'évolution des rythmes de vie. |
Quelle accessibilité horaire des services et des commerces définir dans les zones d'activité économique, les campus, les zones commerciales, les zones périurbaines dortoirs... ? Quels nouveaux services développer ?
Exemple : À la suite d'une concertation locale et d'une enquête sur le parc d'activités du Millénaire, de nouveaux services ont été développés (crèche, restaurant et conciergerie interentreprises) et un plan de déplacement interentreprises a été signé. |
Il est donc important d'analyser les besoins liés à la diversification des rythmes de vie pour bâtir une offre de services pertinente à destination des usagers présents sur le territoire (habitants, salariés, touristes...).
Par ailleurs, travailler la question de l'accessibilité horaire des équipements permet d'optimiser leur fonctionnement. Au vu de la diversité des demandes, quels sont les horaires d'ouverture les plus efficients ? Comment répartir les créneaux horaires entre les différents publics, les différentes activités, pour répondre à toutes les attentes ?
Comment optimiser l'accessibilité horaire à un service pour un réseau d'équipements et par bassin de vie ? Comment améliorer l'aménagement du temps de travail des agents ?
Exemple : Montpellier Agglomération a réaménagé les horaires de ses douze piscines. Les horaires d'ouverture au grand public ont été élargis et coordonnés de manière à permettre à la population d'avoir au moins tous les soirs et les week-ends une piscine ouverte à proximité. Par ailleurs les créneaux horaires attribués aux clubs sportifs et à la natation scolaire ont été renégociés et rendus plus pertinents et les rythmes de travail des agents des piscines ont été réaménagés et améliorés. |
Aider la population à organiser son temps, à l'utiliser au mieux, faire évoluer les mentalités...
De plus en plus de personnes courent après le temps, la gestion des temps quotidiens et l'optimisation du temps deviennent donc des enjeux forts. Les pouvoirs publics peuvent jouer un rôle dans ce domaine, en informant la population de l'offre existante, en développant des guichets multiservices de médiation et de conseil, en développant les e-services ou les services 24 heures sur 24 et en simplifiant les démarches.
Dans les médiathèques de l'agglomération de Montpellier, il est désormais possible de prolonger ses emprunts ou de réserver des livres par Internet et de les rendre dans des boîtes aux livres accessibles 24 heures sur 24. |
L'amélioration de l'articulation des temps passe aussi par une évolution des mentalités.
Comment favoriser une meilleure répartition des tâches parentales et domestiques entre les hommes et les femmes ? Comment faire évoluer le modèle du présentéisme français (pour, par exemple, admettre que mieux vaut partir à 17 heures en ayant rempli ses objectifs, que traîner au travail jusqu'à 19 heures pour se faire bien voir) ?
Inciter les entreprises à mieux prendre en compte l'articulation entre la vie professionnelle et la vie familiale pour mieux se développer
Dans l'agglomération de Montpellier, 46 % des actifs occupés ont au moins un enfant âgé de moins de 25 ans et sont donc aussi des parents. La question de l'articulation entre la vie professionnelle et la vie familiale est donc importante, surtout à l'aune de la réforme des rythmes scolaires du primaire, qui aura une incidence sur l'organisation de 22 % des actifs occupés. Cela passe bien sûr par des aménagements du temps de travail (aménagement horaire, temps partiel de 80 %, télétravail), mais aussi par le développement de services.
Montpellier Agglomération s'implique dans l'amélioration de l'articulation entre la vie professionnelle et la vie familiale de ses agents : élargissement des plages variables, formation à la maîtrise des temps, développement de services (plan de déplacements entreprise, paniers de légumes...). Par ailleurs, dans le cadre de la réforme des rythmes scolaires, Montpellier Agglomération dirige actuellement un groupe de travail avec des organisations patronales, syndicales, des entreprises, des institutions sur la question : « Quels aménagements du temps de travail au vu de la réforme des rythmes scolaires ? » |
Cet enjeu d'articulation ne répond pas qu'à un impératif de « bien-être familial » : le développement des activités de service, activités dominantes sur nos territoires, passe non seulement par leur solvabilisation financière, mais également par la disponibilité temporelle à la fois des salariés qui vont rendre le service et de ses bénéficiaires. L'articulation des temps, la disponibilité temporelle conditionnent donc également le développement économique des activités de service.
Quel modèle temporel souhaitons-nous pour notre territoire et comment y parvenir ?
Quel modèle temporel souhaitons-nous pour notre territoire ?
Les grandes mutations temporelles ainsi que les évolutions récentes (par exemple la réforme des rythmes scolaires) remettent en question le modèle d'organisation temporelle que nous souhaitons promouvoir localement. Souhaitons-nous aller vers un territoire qui fonctionne 24 heures sur 24, vers le slow ? 91 ( * ) Quelles formes ce modèle doit-il prendre sur notre territoire (pôles accessibles 24 heures sur 24, pôles ouverts le dimanche) ? Quels modèles horaires pour le périurbain, pour le périscolaire, pour l'offre de mobilité, de loisirs ?
Dans le cadre de la réforme des rythmes scolaires, nous débattons localement du nouveau modèle horaire à mettre en place. Faut-il maintenir les horaires actuels du périscolaire ? Comment inciter les parents à adopter le même aménagement horaire que leurs enfants (travailler plus de jours mais moins longtemps chaque jour) ? Faut-il choisir le mercredi ou le samedi matin ? Comment respecter la chronobiologie de l'enfant ? Faut-il mettre en place une garderie après l'école jusqu'à 12h30-13h pour permettre aux parents de venir récupérer leurs enfants à la sortie du travail ? Quel nouveau modèle horaire pour les acteurs culturels et sportifs qui interviennent sur le temps péri et extrascolaire ?... |
Les modèles horaires locaux, une fois débattus, doivent être testés et évalués. Si finalement la fréquentation n'est pas au rendez-vous, il faut savoir revenir en arrière.
Exemple : Nous avions mis en place une nocturne au musée Fabre qui n'a pas eu le succès escompté. Lors de nouveaux aménagements horaires, elle a donc été supprimée. |
Quels leviers pour y parvenir ?
Comme nous l'avons vu précédemment, la quête d'un nouveau modèle temporel nécessitera d'agir sur différents leviers :
• Structurer les temps d'accès,
• Aller vers une ville compacte, multifonctions et une optimisation temporelle de l'usage des équipements,
• Avoir une organisation des services, du territoire différenciée selon les périodes,
• Définir l'offre de services au regard des différentes dimensions temporelles : répondre à la diversité des rythmes de vie, mais aussi optimiser son fonctionnement temporel,
• Développer des outils pour organiser son temps, l'utiliser au mieux,
• Faire évoluer les mentalités,
• Inciter les entreprises à mieux prendre en compte l'articulation entre la vie professionnelle et la vie familiale pour mieux se développer.
Quelle méthode ?
L'édification d'un nouveau modèle d'organisation temporelle du territoire, efficient, adapté à tous, impliquera une écoute des besoins, une approche systémique, une meilleure coordination, des outils de régulations, une contractualisation entre les différents partenaires locaux et nationaux, de l'évaluation.
De nouveaux usages des temps se développent, il faut les observer pour bâtir les services et l'organisation temporelle de demain. Cela passe par des enquêtes qualitatives, quantitatives, l'analyse de l'usage actuel, du design de services, de l'innovation.
Il arrive souvent que les acteurs locaux pensent leur positionnement horaire seuls, alors qu'une approche systémique permet un bien meilleur fonctionnement et un meilleur service aux usagers.
Exemple : À Montpellier, 60 000 étudiants commençaient tous les cours à 8 heures et saturaient la ligne 1 du tramway. Sans approche systémique temporelle, cela impliquait l'investissement dans une rame de tramway supplémentaire. En incitant les trois universités à décaler sur l'ensemble de la journée leurs cours d'un quart d'heure, nous avons divisé par deux les flux et résolu les problèmes de congestion. |
Certaines décisions nationales ont des répercussions sur l'organisation temporelle locale.
Les nouveaux modèles horaires locaux qui en découlent doivent être discutés avec l'ensemble des acteurs touchés et mis en place de manière concertée et coordonnée.
Montpellier Agglomération s'est saisie de la réforme des rythmes scolaires, dès son origine, dans le cadre de son Schéma directeur temps, car celle-ci va modifier les rythmes de vie de 25 % de la population, de 22 % des actifs occupés et l'organisation de l'ensemble des acteurs éducatifs, culturels et sportifs concernés par le primaire. Dans ce cadre, elle leur offre un lieu d'échange, de partage et de coordination (parents, communes, acteurs éducatifs, culturels et sportifs, autorité organisatrice des transports, entreprises, syndicats). Par ailleurs, dans le cadre de ses propres compétences, Montpellier Agglomération a adapté son offre culturelle, sportive ainsi que son offre de transport, de manière coordonnée avec les communes. |
Aller vers un modèle temporel local, c'est aussi se donner des outils pour réguler de manière concertée les activités. Cela peut passer par les maires, le préfet, la Direccte (Direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi), l'Inspection du travail, le recteur et le directeur académique des services de l'éducation nationale (DASEN), le président du conseil général, qui disposent d'outils légaux relatifs à la régulation temporelle (par exemple les horaires des commerces, des bars, des écoles, les limites de vitesse sur les voiries, PUCE, la dérogation à la durée légale du travail...). Cela peut aussi passer par des instances de concertation et des engagements réciproques sous la forme d'une charte (comme pour l'ouverture des bars la nuit). Enfin, cela peut se faire par la définition d'un modèle horaire pour un service à la population (par exemple les horaires du périscolaire rythment l'activité professionnelle des parents).
Les modifications temporelles apportées doivent être évaluées et modifiées si elles ne sont pas pertinentes.
Bâtir un nouveau modèle d'organisation temporelle du territoire nécessite donc une approche systémique impliquant l'ensemble de ses acteurs. Cela nécessite de favoriser des dispositifs de compréhension mutuelle, d'innovation, de coordination, de régulation et une contractualisation entre acteurs publics, privés et citoyens.
Conclusion
Le Schéma directeur temps et territoire se veut un terrain de réflexion, d'innovation, de coordination, de régulation autour des questions de temps pour améliorer l'aménagement de notre territoire, de ses services et sa qualité de vie. Nous espérons que notre expérience contribuera à ce que d'autres territoires, l'État, la recherche se saisissent des questions temporelles. Le temps est un champ d'innovation, investissons-le.
Pour aller plus loin :
L'Observatoire de l'innovation locale de la Fondation Jean-Jaurès :
Avertissement : La mission de la Fondation Jean-Jaurès est de faire vivre le débat public et de concourir ainsi à la rénovation de la pensée socialiste. Elle publie donc les analyses et les propositions dont l'intérêt du thème, l'originalité de la problématique ou la qualité de l'argumentation contribuent à atteindre cet objectif, sans pour autant nécessairement reprendre à son compte chacune d'entre elles.
9. Mindmap- qui régule les temporalités locales ?92 ( * )
Parties 1 et 2
10. Principaux enseignements d'une enquête relative aux pratiques et aspirations au regard du dimanche dans la ville de Brive
Jean-Yves Boulin
IRISSO-Université Paris Dauphine
ATEMIS
Profil des répondants
L'enquête dont nous livrons ici les principaux enseignements est une enquête en ligne, qui a été administrée, en septembre/octobre 2012 par la Direction de la Démocratie Participative, de la politique des temps et de l'égalité femmes-hommes via le magazine municipal de la ville de Brive : Brive Mag. Le questionnaire, élaboré conjointement par la Direction de la Démocratie Participative, de la politique des temps et de l'égalité femmes-hommes et Jean-Yves Boulin, sociologue, chercheur associé au Laboratoire IRISSO de l'Université Paris Dauphine ainsi qu'au laboratoire ATEMIS et par ailleurs Vice-Président de l'Association Tempo Territorial, comportait 11 questions visant à connaitre à la fois les pratiques (que font les habitants de Brive le dimanche ?) et les aspirations (que souhaiteraient faire les Brivistes et notamment que souhaiteraient-ils voir ouvrir le dimanche ?) ainsi que des questions permettant de renseigner le profil des personnes ayant répondu.
259 questionnaires ont été retournés. Ce qui apparaît en première analyse c'est que l'ensemble de ces répondants ne constitue pas un échantillon représentatif de la population de la ville de Brive. Ont surtout répondu les retraités (ils représentent 42% des répondants) ainsi que les cadres et professions intellectuelles (qui sont près de 42% également, mais il y a un redoublement avec les retraités car l'on posait la question de la CSP actuelle et antérieure lorsqu'il s'agissait de personnes retraitées). Sinon les femmes (elles sont 64,5% à avoir répondu) ont plus répondu que les hommes, de même que les personnes qui sont en couple avec des enfants. De façon congruente au biais constitué par la surreprésentation des retraités, les plus de 65 ans représentent 32% de notre échantillon, tandis que les moins de 34 ans ne sont que 12%.
Comme toute enquête de ce type, c'est-à-dire constituée d'un questionnaire largement distribué mais sans obligation ni incitation à répondre, ce sont ceux qui sont intéressés par le sujet, et ceux qui ont le temps qui répondent. C'est la loi du genre et on ne peut pas y faire grand-chose, l'effectif des répondants étant par ailleurs trop petit pour que l'on essaie de procéder à des redressements.
Il convient donc d'appréhender les résultats en ayant bien à l'esprit les caractéristiques majeures de l'effectif répondant qui est très dominé par les retraités, les cadres et professions intellectuelles.
Reste que des enseignements très intéressants se dégagent de cette enquête pour les élus en charge de la politique temporelle à Brive.
1. Quelles sont les activités pratiquées et en quels lieux ?
Six questions visaient à mieux connaître les pratiques des Brivistes le dimanche. Elles permettent de mieux cerner ce que sont les dimanches des Brivistes.
Ceux-ci les consacrent tout d'abord à la famille et aux amis : les activités privilégiées, comme le fait de se promener, se déroulent avant tout en famille, avec les enfants, mais également, avec les amis (cf. tableau 1). De ce point de vue, les Brivistes ne se distinguent pas des Français en général, puisque les enquêtes menées sur un échantillon national indiquent, de façon récurrente, que pour plus des deux tiers des Français, le dimanche est un jour vécu en famille (par exemple, enquêtes menées par Le Pèlerin en 1990 et 2006, cf. Boulin 2013).
Tableau 1 : Activités pratiquées le dimanche par les habitants de Brive
Activité |
% |
Recevoir famille, amis |
64 |
Se promener |
58 |
Travail |
7 |
Regarder TV |
30 |
S'occuper des enfants |
23 |
Faire des courses |
4 |
Faire du sport |
19 |
Activités sur ordinateur |
10 |
Activités ménagères |
23 |
Bricolage, jardinage |
27 |
Cinéma, théâtre, concert ... |
23 |
Restaurant |
17 |
Repos |
34 |
Note : plusieurs réponses sont possibles
On notera également l'importance des activités connotées par le repos tout comme par le fait de s'occuper de ses enfants. Tout cela est congruent avec le fait que le dimanche est avant tout familial et caractérisé par le temps libre (la part de ceux qui travaillent est faible, comme l'on pouvait s'y attendre, tout comme, ici en référence aux débats récurrents sur l'ouverture des commerces le dimanche, la part de ceux qui font des courses) : se promener, regarder la télévision 93 ( * ) , faire du sport, bricoler, jardiner, aller au cinéma, au restaurant, au théâtre, au concert et ... se reposer sont les pratiques essentielles des Brivistes le dimanche.
Si l'on fait une distinction entre les activités déployées hors du domicile, que l'on pourrait qualifier de loisirs « actifs », de celles qui se déroulent au domicile ou autour du domicile (on n'emploiera pas ici le terme de loisir « passif », tant s'occuper des enfants ou bricoler et jardiner ne peuvent être qualifiés d'activités passives), on observe que les activités déployées à l'extérieur du domicile sont nettement dominantes (cf tableau 2).
Tableau 2 : activités dans/autour du domicile vs activités menées à l'extérieur
Activité |
% |
Activités physiques/extérieur |
62 |
Activités dans/autour du domicile |
39 |
Si nombre de Brivistes déploient des activités à l'extérieur de leur domicile, notamment pour se promener, il est assez logique que la fréquentation des parcs et jardins arrive en tête (la moitié des répondants) des lieux fréquentés le dimanche au cours des six derniers mois, tandis que près de 40% ont visité des lieux culturels, un tiers des infrastructures sportives et près d'un quart des lieux de rencontre conviviaux (restaurants, cafés, salon de thé, club de jeux,...) (cf. tableau 3).
Tableau 3 : lieux fréquentés le dimanche au cours des 6 derniers mois (tous les dimanches ou environ un dimanche par mois)
Parcs et jardins |
50 % |
Lieux culturels |
38 % |
Infrastructures sportives |
32 % |
Lieux de rencontres conviviaux |
23 % |
Au cours des six mois précédant l'enquête, les répondants ont passé leur dimanche... à Brive (57% tous les dimanches ou presque, 16% environ une fois par mois) 94 ( * ) . Mais 23% vont à la campagne tous les dimanches ou presque et autant environ une fois par mois. Ils ne sont que 4% à sortir de la région tous les dimanches ou presque et 1/5 environ une fois par mois.
A la question de savoir s'ils ont un hobby, près de la moitié (46,5%) des répondants répond par l'affirmative tandis que pratiquement tous ceux-là (86% de ceux qui ont répondu avoir un hobby) estiment pouvoir pratiquer cette activité à Brive ou ses alentours. Ce sont surtout les 35-64 ans qui ont un hobby (55% d'entre eux pour une moyenne de 47%) et ceux qui sont en recherche d'emploi (87,5%).
Enfin, pour terminer ce tour d'horizon des activités dominicales des Brivistes, on observera que 20% des répondants déclarent travailler le dimanche 95 ( * ) . Le taux de 20%, en deçà de celui observable au plan national (près de 30% disent travailler habituellement ou occasionnellement le dimanche) provient de ce que nous avons introduit un indicateur de durée (plus de deux heures) ce qui éliminent ceux qui relèvent leur courriels le dimanche soir ou effectuent quelques tâches préparatoire au travail du lundi. Ce cinquième des répondants qui disent qu'il leur arrive de travailler le dimanche sont surtout des commerçants (24% - enseignants, personnel de santé ou de sécurité, tels que policiers par exemple). Ces travailleurs dominicaux se retrouvent plus souvent au sein des familles monoparentales (30% d'entre elles) et au sein des couples avec enfants (27%). Les travailleurs à temps partiel sont plus souvent concernés par le travail dominical (44% d'entre eux contre 31% des temps complets).
2. Les ressentis du dimanche
Ceux qui travaillent le dimanche sont proportionnellement plus nombreux (16% contre 13% pour l'ensemble des répondants) à dire qu'il est « tout à fait vrai » qu'ils sont débordés ce jour-là, et surtout (57% contre 40% pour l'ensemble) que c'est « parfois vrai ». Comme on pouvait s'y attendre, parmi l'ensemble des répondants, ce sont surtout les couples avec enfants (69%) et surtout les ménages monoparentaux (71%) qui disent être débordés le dimanche.
Reste que ce qui ressort de cette enquête est que les Brivistes vivent les dimanches de façon plutôt détendue, en vivant à leur rythme (cf tableau 4).
Tableau 4 : « je me sens détendu, je vis à mon rythme »
Tout à fait vrai |
67,5% |
Parfois vrai |
25,5% |
Pas du tout |
7% |
Toujours dans cette optique positive, 69% des répondants ont indiqué ne jamais s'ennuyer le dimanche (cf tableau 5)
Tableau 5 : « je m'ennuie le dimanche »
Tout à fait vrai |
11% |
Parfois vrai |
20% |
Pas du tout vrai |
69% |
L'âge semble jouer un rôle déterminant dans le fait de s'ennuyer ou non le dimanche puisque ce sont les plus de 65 ans qui sont les plus nombreux à répondre que c'est « tout à fait vrai » (18,5%) mais aussi les jeunes qui estiment à 35% que c'est « parfois vrai ». Mais la situation familiale joue aussi un rôle puisque les personnes seules avec enfants répondent plus souvent qu'elles s'ennuient le dimanche (29% - effet de la garde des enfants un dimanche sur deux, qui crée un vide lorsque l'enfant est chez l'autre conjoint ? - ), de même que les personnes seules (24%). On observe également que parmi ceux qui répondent proportionnellement plus souvent qu'ils s'ennuient le dimanche se trouvent les « sans emploi » (25% répondent « tout à fait » à la question de savoir s'ils s'ennuient le dimanche), suivis de ceux « en recherche d'emploi » (20%). Le chômage du fait de la situation économique qu'il induit rend le dimanche plus difficile à « passer », le constituant en quelque sorte en « temps vide ».
Si les deux tiers des répondants ne se sentent jamais seul le dimanche (cf Tableau 6), l'enquête montre, de façon congruente avec ce qui précède, que les chômeurs se sentent plus souvent seuls le dimanche (ils sont 57% à répondre que c'est « parfois vrai » ou « tout à fait vrai » ces deux modalités étant citées à parts égales, respectivement 28,5%) tandis que de façon non surprenante, ce sont aussi les plus de 65 ans (52%) et - de façon redondante puisque ces deux catégories se chevauchent - les retraités (50%) qui se sentent seuls le dimanche.
Tableau 6 : sentiment de solitude
Sentiment de solitude le dimanche |
% |
Tout à fait vrai |
12 |
Parfois vrai |
21 |
Pas du tout |
67 |
Au final, débordés ou non, plongés dans l'ennui ou pas, accablés ou non par un sentiment de solitude, les Brivistes plébiscitent le dimanche : à la question « aimez-vous le dimanche ? », ils sont 86% à émettre une opinion positive (la somme des « beaucoup » et assez »). Ce sont les personnes seules avec enfant(s) (60% d'opinion positive) ainsi que celles qui vivent seules (73%) qui sont le moins enthousiastes. Les plus de 64 ans et les retraités (75% d'opinions positives), tout comme les ouvriers (75% également à sont également un peu en retrait : c'est parmi ces catégories et chez les chômeurs que l'on trouve les plus hauts scores de « pas du tout » (10 à 12% contre 6% en moyenne). En revanche, signe que le dimanche reste un jour symbole de la vie familiale, les personnes qui sont en couple avec des enfants sont les plus enthousiastes (80,5% aiment « beaucoup le dimanche » et 18% aiment « assez » le dimanche).
Tableau 7 : Aimez-vous le dimanche ?
Beaucoup |
58% |
Assez |
28% |
Peu |
6% |
Pas du tout |
6% |
Sans opinion |
2% |
Enfin et de façon contre intuitive, ceux qui travaillent le dimanche apprécient plus ce jour-là comparativement à ceux qui ne travaillent pas le dimanche (cf graphique 1) : faut-il y voir de la part de ceux qui doivent travailler ce jour-là une survalorisation d'un jour qui devrait être un jour de repos auquel ils aspireraient ? ou à l'inverse un signe de valorisation d'une situation distinctive compensée par ce qui pourrait être considéré comme un « avantage » par ceux qui travaillent le dimanche : salaire plus élevé, durée du travail plus faible, temps libre décalé,... ?
Graphique 1 : Appréciation portée sur le dimanche par ceux qui travaillent ce jour-là (« oui ») et ceux qui ne travaillent pas (« non »).
3. Que souhaiteraient faire les habitants de Brive le dimanche et quels sont les lieux qu'ils souhaiteraient voir ouverts ?
Une dernière série de questions était de nature plus prospective, cherchant à savoir, d'une part ce que souhaitent faire les habitants de Brive le dimanche, quelles activités ils privilégient, d'autre part, quels lieux/espaces ils souhaiteraient voir ouvrir, en plus de ceux qui le sont déjà.
Lorsque l'on pose la question de ce qu'ils aimeraient pouvoir faire le dimanche, c'est-à-dire, en réalité, à partir de leur propre expérience de ce qu'il est déjà possible de faire, mais sans induire de réponse a priori 96 ( * ) , comme cela est si souvent le cas dans les enquêtes sur l'ouverture des commerces le dimanche, les répondants privilégient, par ordre décroissant, d'abord des activités conviviales pouvant donner lieu à des rencontres, puis à l'égalité des activités culturelles et des activités sportives (cf Tableau 8 et Graphique 2).
Tableau 8 : Que souhaitent faire les habitants de Brive le dimanche ?
Activités conviviales, rencontres |
28 % |
Activités culturelles |
23 % |
Activités sportives |
23 % |
Achat, shopping |
4 % |
Activité religieuse |
1 % |
Rien |
20 % |
Les hommes privilégient les activités sportives : 31% vs 19% pour les femmes qui elles privilégient les activités conviviales (30% vs 26% pour les hommes). Les jeunes privilégient également les activités conviviales (45% pour les moins de 34 ans), tandis que pour les 35-64 ans, ce sont les activités culturelles (25%) et sportives (22%) mais aussi « rien » (26%) qui dominent. Les 65 ans et plus privilégient les activités sportives (33%) 97 ( * ) et les activités conviviales (30 %).
Graphique 2 : Activités souhaitées par les habitants de Brive
On ne sera pas surpris de voir que les personnes seules privilégient les activités conviviales et celles qui permettent les rencontres (46%), tandis que les familles monoparentales mettent en avant les activités culturelles (50%). Ce sont surtout les couples avec enfants et les familles monoparentales qui indiquent « rien » (respectivement 31% et 50%).
Les étudiants (concept partiellement redondant avec la catégorie jeunes) privilégient les activités conviviales/rencontres et les activités culturelles (50% pour chaque modalité). Le « rien » domine chez les sans emploi (67%) et les chômeurs (33%). Tandis que pour les retraités, les souhaits se portent plutôt sur les activités de rencontre (33%) et les activités sportives (31%) (cf. les plus de 65 ans).
Les cadres (32,5%) et les professions intermédiaires (36%) privilégient les activités conviviales/rencontres. Les secondes mettent l'accent sur les activités sportives (36%) tout comme les employés (32%) et surtout les ouvriers (57%). Pour les employés, ce sont avant tout les activités conviviales/rencontre (42%) qui sont souhaitées.
De façon cohérente avec les souhaits d'activités, les répondants insistent sur la nécessité d'ouvrir plus de lieux qui occasionnent des rencontres, qui permettent la convivialité ainsi que plus de lieux culturels (cf. tableau 9 et Graphique 3).
Tableau 9 : quels sont les lieux que le Brivistes souhaiteraient voir ouvrir le dimanche ?
Lieux conviviaux, de rencontre |
34 % |
Lieux culturels |
22 % |
Infrastructures sportives |
7 % |
Commerces |
12 % |
Services administratifs, transport |
4 % |
Lieux de culte |
3 % |
Rien |
19 % |
L'ouverture de lieux conviviaux/de rencontre est souhaitée de façon plus intense par les familles monoparentales (50%), par les couples sans enfant (45%), et par les personnes vivant seules (40%). Les plus de 65 ans (38%) et les retraités (44%) ainsi que les actifs à temps plein (30%) souhaitent aussi l'ouverture de ces lieux. Les couples avec (26%) et sans (26%) enfant vont également dans ce sens.
L'ouverture des commerces est souhaitée par les familles monoparentales (25%), par les jeunes (27% des moins de 34 ans), par les étudiants (33%) et par les ouvriers (37,5%). À noter que les commerçants ne souhaitent pas l'ouverture... des commerces !!
À noter que ce sont les commerçants (11%) et les ouvriers (12,5%) qui souhaitent que plus de services administratifs et de transports fonctionnent le dimanche.
Enfin, on observera que ce sont massivement les chômeurs qui estiment que rien de plus ne devrait être ouvert le dimanche (67%) suivis de loin par les couples avec enfant (28%) et les familles monoparentales (25%).
Graphique 3 : quels sont les lieux que le Brivistes souhaiteraient voir ouvrir le dimanche ?
Ces résultats sont intéressants à noter lorsqu'on sait que 58% des répondants disent savoir ce qui est ouvert à Brive (cf Tableau 10)
Tableau 10 : Avez-vous connaissance de ce qui est ouvert le dimanche dans votre ville ?
Connaissance de ce qui est ouvert |
% |
Oui |
58 |
Non |
42 |
Ainsi, 40% de ceux qui disent savoir ce qui est ouvert à Brive souhaitent l'ouverture de lieux conviviaux et de rencontre, tandis que 23% souhaitent l'ouverture de lieux culturels. Ils sont plus nombreux dans le premier cas et pratiquement aussi nombreux pour les lieux culturels que ceux qui disent ne pas avoir connaissance de ce qui est ouvert à Brive.
Ceux qui connaissent et ceux qui ne connaissent pas ce qui est ouvert se trouve dans la même proportion à ne rien souhaiter de plus (20%).
Graphique 4 : connaissance de ce qui est ouvert à Brive et souhait d'ouverture
4. Conclusion
Cette enquête qui, certes, ne peut prétendre à la représentativité, mais reflète tout de même l'avis d'un échantillon assez diversifié d'habitants de la ville de Brive, livre des enseignements qui peuvent s'avérer utile pour la municipalité de Brive.
Un premier enseignement qui conforte les résultats de cette enquête limitée réside dans le fait que les pratiques des habitants de Brive ne diffèrent pas sensiblement de celles observées à l'échelle nationale : le dimanche est pour les Brivistes, un jour de repos que l'on passe en famille et avec des amis, et c'est cette dimension qui semble être appréciée. Car à Brive on aime les dimanches, qui sont autant d'occasions de sortir, de s'aérer de partager des moments avec son entourage, et on les vit de façon plutôt détendue. Mais, premier enseignement important pour les édiles, certaines catégories sont un peu en retrait au regard du plébiscite du dimanche : les personnes âgées, les familles monoparentales, les personnes seules et les chômeurs éprouvent plus que d'autres une sensation d'ennui et de solitude. C'est la question du lien social qui est ici posée, qui induit sans doute des actions pour réintégrer ces catégories d'habitants dans la dynamique sociale et économique de Brive. Second enseignement qui renforce l'idée d'actions à mener à l'échelon local les Brivistes passent leurs dimanches essentiellement à Brive et aux alentours.
Troisième enseignement, les habitants de Brive qui ont répondu à cette enquête, souhaitent - lorsqu'on leur demande d'exprimer des souhaits en termes d'activités dominicales et de lieux ouverts ce jour-là - que l'accent soit mis sur des activités et des lieux qui favorisent la rencontre, le lien social, ainsi que leurs développement et pratiques culturelles. L'originalité de cette enquête est d'avoir laissé ouverts les choix des répondants au regard des activités souhaitées et des lieux qu'ils souhaitent voir ouvrir, et l'on voit que les choix exprimés ici sont éloignés de ceux qui ressortent lorsque la réponse est induite par la question comme dans le cas des enquêtes sur l'ouverture des commerces le dimanche.
Cette demande assez sensible de plus forte convivialité, d'activités et de lieux qui favorisent le lien social, le vivre ensemble, est une ouverture pour l'action de la municipalité. Il semble donc qu'il y a sûrement un effort d'information à faire sur ce qui est ouvert (42% des répondants disent ne pas savoir ce qui est ouvert à Brive). Au-delà, on peut imaginer d'engager une concertation avec les responsables, les salariés, acteurs des lieux et des activités signalés par l'enquête afin de réfléchir aux possibilités d'ouverture (extension ?) le dimanche (mais il conviendrait, si l'on allait dans ce sens, d'approfondir l'enquête pour affiner ce que les répondants entendent par lieux de rencontres favorisant la convivialité, ou par lieux culturels). Enfin, pour les responsables politiques il n'est certes pas anodin de savoir qu'un cinquième des répondants semblent satisfaits de la situation actuelle : on pourrait s'en satisfaire, mais lorsque l'on remarque que ceux qui expriment le plus cette position, atone sont les chômeurs, on doit au contraire d'interroger sur ce qui motive ce type de réponse. Ne sont-ils pas, ceux qui répondent ainsi, dans un syndrome de décrochage au regard de la société et plus directement ici de la municipalité : tout simplement ils ne croient sans doute pas que quoique ce soit puisse changer leur situation.
11. Charte de qualité de vie nocturne - Ville de Caen
PRÉAMBULE
Caen, capitale régionale, représente le principal pôle d'attractivité d'une agglomération urbaine qui compte plus de 230 000 habitants. Son dynamisme économique, touristique, la richesse de son patrimoine architectural, historique et sa vie culturelle font de Caen une ville attractive sur le plan des sorties et des loisirs. Dans ce cadre, le centre-ville est un lieu de forte animation. Il attire des habitants de toute la ville et de l'ensemble de l'aire urbaine Caennaise, et ce à toutes les heures de la journée. C'est ce qui en fait un espace exceptionnel et d'une grande qualité.
Les cafés, restaurants, bars et discothèques font partie intégrante de l'animation commerçante du centre de Caen et constituent une composante importante de son animation nocturne. Néanmoins, cette concentration d'activité n'est pas non plus sans susciter certaines nuisances, notamment pour ceux qui y résident. Or, chacun doit pouvoir profiter de la ville, et de son centre, dans de bonnes conditions. Le centre doit rester un lieu de vie et de mixité des usages (loisirs, études, commerces, habitation, travail, etc...).
Dans une démarche pragmatique et de concertation, il est donc essentiel d'optimiser les conditions d'activité et de coexistence de ceux qui vivent la ville au quotidien. Cette démarche va notamment dans le sens de la politique temporelle globale engagée à l'échelle de la ville, destinée à améliorer la qualité de vie de chacun en harmonisant les rythmes et usages de la ville par les habitants selon leurs activités quotidiennes.
En outre, la problématique de la consommation d'alcool excessive, notamment par les jeunes, constitue un véritable enjeu de santé publique. De plus en plus de jeunes consomment de l'alcool dans la rue et non plus à l'intérieur des bars. Cela pose donc un véritable problème de régulation de cette consommation d'alcool sur l'espace public en soirée.
La Ville de Caen et les gérants d'établissements des débits de boisson ont lancé le 3 juin 2009 une campagne de sensibilisation, notamment à l'attention de la clientèle jeune, sur le thème : « pour que la fête continue, ne bois pas dans la rue ».
Les gérants du centre-ville se sont également engagés à ne servir des consommations en terrasse que dans des contenants en verre afin de pouvoir clairement distinguer leur clientèle.
Monsieur le Préfet a par ailleurs pris un arrêté règlementant la consommation de boissons alcoolisées le jeudi à partir de 20h jusqu'au vendredi matin 5h et du vendredi 20h au samedi 5h sur les voies publiques. Le périmètre a été défini en association avec la ville.
Les actions engagées ne doivent pas être compromises par des excès ou des comportements qui iraient à l'encontre de l'intérêt des professionnels, riverains et pouvoirs publics. Il a donc paru nécessaire de définir des conditions propices d'une vie nocturne de qualité permettant d'assurer la sécurité de tous, le respect des règles de vivre ensemble, la conciliation des intérêts des différents acteurs de la nuit, des riverains et d'acter l'engagement des différents acteurs concernés visant à articuler les actions de prévention et els actions de répression lorsque cela s'avère nécessaire.
Dans le cadre d'une démarche constructive et concertée, la présente charte a donc pour objectif de fixer un cadre d'engagements pour l'ensemble des acteurs publics et privés qui souhaitent développer différentes actions préventives contribuant au maintien d'une qualité de vie nocturne et instaurer un échange régulier entre les différents acteurs concernés.
ENGAGEMENTS DES EXPLOITANTS DE DÉBITS DE BOISSONS
Le professionnalisme et la responsabilité des exploitants de bars, cafés, discothèques, jouent un rôle essentiel dans le comportement de la clientèle dans le cadre de la vie nocturne. Les exploitants des débits de boisson et restaurants se conformeront donc aux lois et règlements en vigueur qui existent indépendamment de la présente charte et qui régissent leur activité.
Les responsables des établissements s'engagent à travers la présente charte :
1) Au respect des horaires d'ouverture et d'accueil des clients
Les exploitants titulaires :
- d'une licence de 1ère, 2e, 3e et 4e catégories ;
- d'une petite licence restaurant ;
- d'une licence restaurant ;
- d'une petite licence à emporter ;
- d'une licence à emporter.
S'engagent à respecter les horaires de fermeture des débits de boisson fixés par arrêtés préfectoraux.
Des dérogations individuelles précaires et révocables à tout moment pourront être accordées par le Préfet du Calvados après avis du Maire et du Commissariat de Police.
Des dérogations individuelles et exceptionnelles pourront être accordées par le Préfet à l'occasion de soirées privées sur invitations.
2) A la prévention des troubles à l'ordre public
Les exploitants s'engagent à prendre toutes les dispositions de nature à garantir le bon ordre dans leurs établissements et prévenir d'éventuelles infractions. A cette fin, ils pourraient employer des agents de sécurité et d'accueil du jeudi au samedi et n'hésiteront pas à faire appel à la Police en cas de difficultés.
Les exploitants s'engagent à interdire l'accès à leur établissement à toute personne en état d'ivresse manifeste ou présentant des signes de drogues, ou tout groupe de personnes dont l'attitude laisse raisonnablement prévoir un risque de troubles à l'intérieur de l'établissement.
Les exploitants s'engagent à apposer le règlement intérieur de l'établissement de manière visible aux entrées.
3) Au respect de l'environnement urbain
Les exploitants s'engagent à respecter le règlement de collecte des déchets, notamment les horaires de dépôts, le conditionnement et à remiser les containers prévus pour la collecte des ordures.
Les exploitants inciteront leur clientèle à stationner leur véhicule de manière règlementaire. Cette sensibilisation pourra prendre la forme d'une communication par voie d'affiches ou tout autre support, dans l'établissement, ou éventuellement du remboursement du ticket de stationnement dans le parking le plus proche.
Les exploitants s'engagent à installer sur leurs terrasses des cendriers mobiles qu'ils rentreront tous les soirs après fermeture de l'établissement. Ils veilleront à laisser le trottoir dans un état de propreté correcte, sans mégots de cigarette.
Ils s'engagent à ne plus servir de boissons dans des gobelets en plastique et à n'utiliser que de la verrerie, sauf lors d'évènements particuliers qui génèreront un flux important (la fête de la musique, évènements sportifs, ....).
4) A lutter contre l'alcoolisme, la toxicomanie et le tabagisme
Les exploitants s'engagent à mettre en oeuvre des actions de sensibilisation de leur clientèle aux risques liés à la consommation d'alcool et de drogue. Ils s'engagent notamment à :
- respecter la réglementation interdisant la vente d'alcool aux mineurs de moins de 18 ans ;
- refuser de recevoir et de servir de l'alcool à une personne en état d'ivresse manifeste ;
- servir des boissons sans alcool à un tarif accessible, inférieur pour la plupart de celles-ci au tarif des boissons alcoolisées ;
- associer une action de prévention à chaque soirée étudiante organisée dans l'établissement ;
- encourager les conducteurs à tester leur alcoolémie et en cas de test positif, à céder leurs clefs de voiture à un proche dont le teste est négatif ;
- respecter les dispositions légales et réglementaires relatives à la lutte contre le tabagisme.
5) A lutter contre les discriminations
Les exploitants s'engagent à faire respecter les textes législatifs et règlementaires afin qu'aucune discrimination reposant sur l'appartenance réelle ou supposée à un groupe ethnique ou religieux ne soit faite à l'entrée de l'établissement. Le refus d'entrer doit être motivé par la nécessité de ne pas dépasser la norme de fréquentation arrêtée pour l'établissement, d'éviter des troubles à l'ordre public, d'appliquer une politique commerciale affichée.
Les exploitants porteront une attention particulière à l'accueil des clients présentant un handicap, notamment en les assistant dans leur installation si nécessaire. Ils s'engagent à faire respecter ces dispositions par leur personnel.
Rappel des motifs reconnus pour faire interdire l'accès à un établissement de débit de boissons :
- personne en état d'ébriété manifeste ;
- personne ayant déjà commis des troubles dans l'établissement ;
- personne n'ayant pas la tenue correcte par rapport aux critères de l'établissement ;
- personne dont le comportement pourrait nuire à la quiétude de la clientèle.
6) A appliquer les règlementations relatives aux nuisances sonores et celles relatives à la musique amplifiée
Les exploitants s'engagent à respecter la tranquillité publique en ne générant pas de bruits de voisinage dépassant les normes réglementaires admises.
Les exploitants s'engagent à respecter les dispositions prévues aux articles R571-25 et suivants du code de l'environnement relatifs aux établissements diffusant de la musique amplifiée.
L'exploitant devra présenter une étude d'impact acoustique établie par un organisme agréé et produire les justificatifs attestant de la conformité de son établissement. En cas de travaux susceptibles d'avoir une incidence sur l'acoustique, l'exploitant devra fournir une nouvelle étude d'impact.
Les exploitants s'engagent à fermer les portes et fenêtres de l'établissement dès lors que la source sonore devient une nuisance. Les exploitants s'engagent tout particulièrement à sensibiliser leurs clients sur les nuisances sonores qu'ils peuvent générer tant à l'intérieur qu'à l'extérieur de l'établissement au moment de l'entrée ou de la sortie de l'établissement. Ils mettront en oeuvre les moyens nécessaires en personnel pour assurer une présence à la sortie de l'établissement.
Les exploitants bénéficiant d'une autorisation d'exploiter une terrasse mobile et mobile protégée devront respecter le règlement d'occupation du domaine public fixé par arrêté municipal.
7) A assurer une qualité de service
Les exploitants s'engagent notamment à :
- accueillir la clientèle de façon personnalisée avec un mot de bienvenue ;
- assurer la présence d'un membre du personnel parlant au minimum l'anglais ;
- permettre l'identification du personnel (tenue vestimentaire reconnaissable) ;
- limiter l'attente au service ;
- maintenir l'établissement parfaitement entretenu et propre ;
- former le personnel pour la mise en oeuvre de leur obligation en matière d'ordre public, respect des règlementations qui s'appliquent aux établissements de boissons, de lutte contre la discrimination, l'alcoolisme et la toxicomanie ;
- fournir aux clients les renseignements pratiques dont ils ont besoin (localisation des commerces, de l'office de tourisme, des stations de bus et de tram...) et les informer des animations, activités proposées à Caen ;
- ne pas pratiquer l'augmentation des prix lors des grands évènements ;
- établir une addition détaillée faisant clairement ressortir la TVA et le service inclus dans le prix.
ENGAGEMENTS DE LA VILLE DE CAEN
La ville de Caen s'engage à travers la présente charte :
À promouvoir cette charte et valoriser la qualité de vie nocturne en créant un label
Un label de qualité de vie nocturne sera décerné aux signataires de la charte et traduira les engagements des exploitants sur l'ensemble des points précités.
Un support de communication destiné à l'affichage sera remis à l'établissement labellisé. Le maintien de ce label, au même titre que l'adhésion à la Charte, sera conditionné par le respect des engagements par les exploitants.
La Ville de Caen s'engage :
- à agir en faveur de la prévention contre l'alcoolisme des jeunes notamment au travers de campagnes de communication et à initier des actions de sensibilisation dans les collèges, lycées et universités ;
- à fournir aux exploitants les informations leur permettant de se conformer à leurs obligations, par l'intermédiaire des différents services municipaux compétents. La Ville de Caen s'engage à communiquer aux futurs exploitants lors des demandes de transferts de licence IV un résumé de la réglementation des débits de boisson en vigueur, notamment concernant les horaires d'ouverture, les obligations d'affichage, la présente Charte etc. ;
- à être à l'écoute des demandes techniques des exploitants en matière de voirie et d'environnement urbain dans le but de veiller aux bonnes conditions d'activité des exploitants et d'accueil de la clientèle ;
- à faire le lien avec la Communauté d'Agglomération dans le but d'optimiser les conditions de collecte des déchets et d'organisation du tri sélectif ;
- à entamer une réflexion sur les horaires de la vente d'alcool à emporter la nuit (entre 20h et 8h) sur son territoire dans le cadre de la loi n°2009-879 du 21 juillet 2009 portant réforme de l'Hôpital et relative aux Patients, à la Santé et aux Territoires (HPST) ;
- à prendre en compte le respect des engagements de la charte par l'exploitant demandeur lorsqu'elle sera sollicitée par le Préfet sur une demande d'autorisation de dérogation d'ouverture tardive ;
- à veiller au respect des règlements relevant de ses pouvoirs de police.
ENGAGEMENTS DE L'ÉTAT
L'État s'engage à travers la présente charte :
- À poursuivre ses missions de présence et d'intervention nocturne sur le centre-ville.
L'État s'engage notamment à faire appliquer les arrêtés interdisant la consommation de boissons alcoolisées sur l'espace public.
SUIVI DE L'APPLICATION DE LA CHARTE
Un comité de pilotage rassemblant l'ensemble des signataires de la charte ou leurs représentants, se réunira 2 fois par an pour faire le point sur la mise en oeuvre et le respect de la charte et du label de qualité de vie nocturne.
Un comité de suivi de la charte regroupant les représentants administratifs des signataires se réunira régulièrement pour assurer une bonne coordination des interventions de chacun et suivre la mise en oeuvre et le respect des engagements de chacun.
Des points seront effectués lors de rencontres entre la Ville et l'État ainsi qu'entre la Ville, les exploitants et les associations de commerçants du centre-ville.
En cas de non-respect des dispositions de la présente charte, les membres du comité de pilotage pourront décider du retrait de la charte et du label de qualité de vie nocturne après envoi d'un courrier d'avertissement non suivi d'effet.
ADÉSION A LA CHARTE
Chaque établissement peut adhérer librement à la présente charte. La demande d'adhésion se fera par écrit auprès de la Ville de Caen.
12. Synthèse des actions en faveur d'une meilleure articulation des temps de vie de la ville de Caen
L'intérêt pour les politiques temporelles faisait partie du programme de mandat de l'équipe municipale dès 2008. Cette volonté s'est concrétisée par la création d'une délégation spécifique confiée à Corinne Féret, première maire adjointe en charge du personnel communal, de l'égalité Hommes-Femmes et du Bureau des Temps puis par la création en 2009 d'une mission «Bureau des Temps» pour contribuer à l'animer.
Le Bureau des temps de la Ville de Caen est un outil pour proposer et impulser des mesures visant à simplifier la vie quotidienne des citoyens et améliorer leur qualité de vie. Il s'adresse aussi bien aux habitants qu'aux agents de la collectivité. Dans un cadre transversal et contributif, c'est un outil d'impulsion et de veille par le biais des diagnostics et recherches qu'il effectue. Il apporte une expertise dans des domaines variés.
À la fin de l'année 2011, une réunion d'information à destination du grand public sur les politiques temporelles et le bureau des Temps caennais a été proposée. Les résultats d'une enquête menée auprès des habitants sur leurs modes de vie et besoins ainsi que sur les conditions d'articulation des activités et services au sein de la Ville ont été présentés. A l'issue de ces échanges, des axes de travail et de réflexion ont été dégagés pour la construction d'actions.
Au-delà de cet angle d'intervention spécifique, un grand nombre d'actions et de projets de la Ville mis en oeuvre depuis 2008 s'inscrivent pleinement dans une volonté de meilleure articulation des temps de vie des habitants. Ces actions s'inscrivent dans plusieurs champs thématiques :
- l'adaptation de l'offre de modes de garde ;
- l'action interne au service de meilleures conditions d'égalité des agents de la collectivité ;
- l'action en direction des agents d'entretien de la Ville de Caen ;
- l'organisation de temps forts de réflexion collective pour favoriser l'égalité entre les femmes et les hommes ;
- le développement de services de proximité ;
- l'action sur la vie nocturne caennaise.
Ø L'action d'adaptation de l'offre de mode de garde de la direction de la petite enfance
La Direction de la Petite enfance de la Ville a développé un grand nombre d'actions pour faire évoluer l'offre de modes de garde.
On peut notamment citer :
- la création d'une nouvelle crèche ;
- l'élargissement des horaires d'accueil d'une halte-garderie depuis mars 2012 ;
- le développement de l'offre d'accueil au domicile des assistantes maternelles dans le cadre des accueils en crèche familiale.
- Un diagnostic co-piloté avec la Caisse d'Allocations Familiales a été mené en 2013 pour recenser les besoins de modes de garde émergents et non couverts (notamment sur des horaires atypiques) d'un quartier de la ville afin de construire des propositions adaptées.
- Enfin, trois nouvelles garderies périscolaires ont été créées au sein de la Ville depuis 2008.
L'une des priorités du Bureau des Temps de la Ville de Caen est de favoriser de meilleures conditions d'égalité entre les femmes et les hommes. Cela se traduit par la volonté de favoriser la conciliation des vies professionnelle et familiale des habitants mais également des agents de la Ville.
Ø Un plan d'action interne au service de meilleures conditions d'égalité des agents de la ville
Un groupe de travail Agenda Social "Égalité Femmes-Hommes" a été mis en place au sein de la Ville constitué de représentants d'organisations syndicales depuis juillet 2009.
La réalisation d'un diagnostic d'ampleur des conditions d'égalité entre les hommes et les femmes au sein de la collectivité a été lancée. L'objectif de ce diagnostic était la construction d'un plan d'actions concerté au bénéfice de tous les agents de la ville.
Ce diagnostic s'est fondé sur les données de la collectivité concernant la situation administrative des agents, la mixité dans les services, l'organisation et la durée du travail, les conditions de rémunération, d'avancement, l'accès à la formation etc.
Ce travail a donné lieu à la réalisation d'un rapport de situation comparée semblable au bilan social appliqué à la collectivité. Pour approfondir ce diagnostic chiffré, une enquête qualitative a été menée auprès d'un panel représentatif d'agents. Ce travail d'ampleur a débouché sur la construction d'un plan d'actions en cours de finalisation.
Ø L'action en direction des agents d'entretien de la Ville de Caen
Un travail de fond a également été mené auprès du service entretien de la Ville de Caen. En effet, l'organisation de ce service, quasi exclusivement féminin, a été complètement modifiée afin d'améliorer la qualité de vie des agents en optimisant leur emploi du temps.
Après un travail de concertation et d'échange de deux ans avec les agents, une nouvelle organisation du travail a été mise en place en octobre 2011. Elle a permis d'apporter un ensemble d'améliorations significatives, sur le plan humain, matériel, de la formation et de la professionnalisation :
- actuellement, 85 % de l'effectif total des agents d'entretien du service d'intervention de conseil en entretien et propreté sont passés à 100 % de quotité de temps de travail.
- mise en place d'une dynamique d'équipe, associée à une revalorisation du métier d'agent d'entretien,
- mise en place de cycles de travail correspondant mieux aux besoins de la collectivité et permettant une meilleure articulation entre vie professionnelle et vie privée (plannings, suppression des journées de travail discontinues, deux jours de repos consécutifs),
- amélioration du cadre de travail,
- modernisation des moyens d'interventions (acquisition d'équipement pour diminuer la pénibilité des tâches et améliorer l'efficacité et la qualité des interventions),
- mise en place d'un plan de formation pluriannuel pour l'ensemble des agents et d'un plan spécifique pour les agents en attente de reclassement.
Cette nouvelle organisation traduit la volonté d'améliorer les conditions de travail des agents de la Ville et de réduire les emplois à temps non complet occupés à 80% par des femmes.
En novembre 2012, à l'invitation de Philippe Duron et de Corinne Féret, Najat Vallaud-Belkacem, Ministre des Droits des Femmes, porte-parole du Gouvernement a rencontré les agents du service entretien pour découvrir et mettre en valeur cette action innovante et représentative.
Ø Des temps forts de réflexion collective et de ré-impulsion
La Ville organise chaque année à l'occasion de la Journée Internationale des Droits des Femmes, un temps fort de rencontres et de sensibilisation. Il permet d'échanger sur la situation des femmes en France et à travers le monde, de mettre en lumière les nouveaux enjeux autour de ces questions et de relancer les actions à mener.
Afin de marquer l'engagement de la Ville en la matière, un programme événementiel est proposé : échanges, débats pendant la pause méridienne, rencontres conviviales, actions culturelles spécifiques en direction des femmes de différents quartiers etc.
C'est dans ce cadre que la Ville a signé la Charte européenne pour l'égalité des femmes et des hommes dans la vie locale en 2013. Elle affirme la volonté de prendre publiquement position sur le principe de l'égalité des femmes et des hommes. Corinne Féret, Première adjointe au maire chargée du personnel communal, de l'égalité hommes-femmes et du bureau des temps et Jocelyne Bougeard, Adjointe au Maire de Rennes, déléguée aux temps de la ville, aux droits des femmes, à l'égalité des droits et à la laïcité et Présidente de la Commission pour l'Égalité des Femmes et des Hommes dans la vie locale à l'Association Françaises des Conseils de Communes et Régions d'Europe ont signé ensemble cette charte en mars 2013.
Parallèlement aux actions menées en faveur de l'égalité entre les hommes et les femmes, la volonté est d'améliorer la vie quotidienne des habitants grâce au développement de services en proximité.
Ø le développement de services de proximité
On peut notamment citer la création de quatre pôles de vie des quartiers qui permettent aux habitants d'avoir accès en proximité à un panel d'interlocuteurs municipaux pour répondre à leurs demandes. Dix agents présents dans chaque pôle peuvent apporter des réponses à toutes les questions des habitants relatives au cadre de vie, à la citoyenneté, à la sécurité ou à la solidarité.
Les pôles de vie de quartiers permettent :
• de faciliter les démarches du quotidien des habitants,
• un traitement plus rapide de leurs demandes,
• de donner une meilleure information,
• d'établir un contact plus direct avec les élus et les agents de la Ville,
Enfin, et sur un autre champ thématique, le Bureau des Temps participe à la réflexion de fond sur la vie nocturne caennaise.
Ø L'action sur la vie nocturne caennaise
Le Bureau des Temps a contribué à créer et à animer la Charte caennaise de Qualité de vie nocturne . Issue d'un travail partenarial, elle offre un cadre commun de principes et d'engagements partagés par l'ensemble des acteurs publics et privés qui souhaitent contribuer au vivre ensemble, au partage intelligent et respectueux de l'espace public et au maintien d'une qualité de vie nocturne.
On peut également citer le développement de soirées sportives, culturelles et de loisirs à destination des jeunes caennais de 18 à 30 ans en nocturne (de 21h à 2h), le jeudi soir et dans une régularité. L'objectif est de proposer une offre conviviale, originale, attractive et favorisant la découverte, dans un équipement caennais.
Enfin, le Bureau des Temps est partie prenante de la Commission Transports et Rythmes Urbains de Viacités, (le syndicat mixte des transports en commun de l'agglomération caennaise). Cette commission a notamment élargi l'amplitude horaire de l'offre de transports pour mieux l'adapter aux rythmes des usagers. On peut par exemple citer la création récente de bus de nuit. L'objectif poursuivi est également de mieux réguler les flux de transports par la modulation des horaires d'ouverture des grands établissements scolaires de la Ville (exemples des grands lycées prescripteurs de temps).
13. Mise en place des horaires continus pour les agents d'entretien de la communauté urbaine de Strasbourg
Enquête auprès des agents d'entretien et des occupants réalisée en février 2011 dans le cadre du contrôle de gestion et évaluation des politiques publiques Mission des temps / Moyens généraux
Les objectifs de l'enquête : évaluer l'impact de la réorganisation des horaires de travail
• Auprès des agents d'entretien
1. Une forte participation des agents à l'enquête
2. Les principaux résultats : satisfaction sur les nouvelles conditions de travail et de vie personnelle
• Auprès des occupants
1. Un intérêt des occupants à cette nouvelle organisation avec un taux de 37 % de répondants
2. Les principaux résultats : satisfaction sur la nouvelle organisation et l'évolution de conditions de travail des agents d'entretien
3. Des suggestions d'amélioration pour aller plus loin
Afin d'améliorer la qualité de vie des agents d'entretien, le service des Moyens généraux a réorganisé depuis le 1 er février 2010 les horaires des agents d'entretien : ceux-ci interviennent désormais en horaires continus entre 6 et 13h.
Après 1 an de mise en oeuvre, conformément aux engagements pris, les agents ont été invités par questionnaire à s'exprimer sur cette nouvelle organisation.
• enquête réalisée du 10 au 21 janvier, 89 % de répondants
Parallèlement, les occupants des bureaux ont également été sollicités pour donner leur avis dans le cadre d'une seconde enquête.
• enquête réalisée du 12 au 28 janvier, 37 % de répondants
La démarche est menée conjointement par le service des Moyens généraux, la Mission des temps et le service du Contrôle de gestion et d'évaluation des politiques publiques.
I) Enquête auprès des agents d'entretien
1. Une forte participation à l'enquête
• 89% des agents d'entretien actuellement présents ont répondu au questionnaire
• 37 agents travaillent désormais en horaires continus ( 3 agents ont conservé leurs horaires continus d'après-midi, 4 sont restés sur leurs horaires en coupé )
Dans le cadre de la réorganisation, avez-vous personnellement changé d'horaires de travail :
Base : 34 répondants
Localisation - vous travaillez :
Base : 33 répondants
2. Les principaux résultats
Une réorganisation vécue par les agents comme une nette amélioration des conditions de vie et d'emploi
Une réorganisation vécue par les agents comme une nette amélioration des conditions de vie et d'emploi
Estimez-vous que les horaires continuent par rapport à la précédente organisation :
Les nouveaux horaires de travail ont favorisé une diminution du stress et de la fatigue pour les agents
Des contacts fréquents et appréciés entre agents d'entretien et occupants
Avez-vous des échanges avec les occupants ?
La cohabitation entre agents d'entretien et occupants se déroule bien, dans la plupart des cas :
> 4% des agents estiment que leur intervention peut déranger certains occupants...
> ...mais 28% des agents rencontrent des difficultés pour réaliser certains tâches :
ï en particulier, passer l'aspirateur (bruit)
ï plus spécifiquement : certains services où les agents ne peuvent quitter leur poste
Les agents ont le sentiment que leurs conditions de vie en dehors du travail se sont fortement améliorées
Le passage en horaires continus :
> pour 52%, permet de pratiquer de nouvelles activités de loisirs : sports, jardinage, bricolage, sorties...
> pour 21%, permet d'accompagner plus facilement les enfants à la crèche/à l'école
> pour 33%, permet d'améliorer l'alimentation le midi (pas de changement pour 52%, dégradation pour 15%)...
> ... mais cette amélioration ne passe pas par la fréquentation du restaurant du CA : 91% n'y vont jamais
Trajet domicile-travail : l'économie d'un aller-retour chaque jour (un seul trajet en horaires continus, au lieu de deux en horaires coupés)
> 24 mn, en moyenne pour le trajet domicile-travail (aller simple)
> mais pas d'impact sur les modes de transport : seuls 2 agents indiquent avoir changé
L'organisation des remplacements en cas d'absence d'agent(s) d'entretien constitue un point d'insatisfaction
Le non remplacement de certaines absences génère une surcharge de travail pour les collègues présents et un travail bâclé
38% des agents ont suggéré des améliorations des conditions de travail :
- une meilleure entente entre agents et plus d'écoute par leurs responsables
- plus de respect de leur travail par les occupants
Large satisfaction sur le matériel mis à disposition, mais une satisfaction plus mitigée sur les produits d'entretien
ð Une insatisfaction liée au remplacement des produits chlorés par des produits écologiques jugés moins performants par les utilisateurs
II) Enquête auprès des occupants
1. Un intérêt porté par les occupants
87% des occupants satisfaits de la nouvelle organisation
2/3 étaient informés de l'évolution des horaires
> 2184 boites mail identifiées sur les sites entretenus par les agents d'entretien des Moyens généraux
> 813 questionnaires ont retournés et saisis, soit un taux de participation de 37%
2. Principaux résultats
Concernant la propreté : 82% se déclarent satisfaits (dont près d'1/3 très satisfaits) contre 3% « pas du tout satisfaits » (Base : 796 répondants)
Concernant la fréquence : 82 % sont satisfaits, contre 4 % estimant cette fréquence « très insuffisante » (Base : 787 répondants)
Près de 7 agents sur 10 déclarent que le changement n'a pas dégradé la qualité de l'entretien...
... et 2 fois plus d'agents considèrent que cela s'est même amélioré par rapport à ceux qui ont le sentiment qu'elle s'est dégradée (base 773 répondants)
Quelques commentaires négatifs :
• un nettoyage jugé superficiel, trop rapide
• des endroits qui ne seraient jamais nettoyés (sols, armoires)
• des problèmes d'allergies
• la reconnaissance que l'agent peut difficilement intervenir si l'agent ne range pas lui-même son bureau
• des locaux vétustes, difficiles à nettoyer (moquettes)
• des difficultés pendant les périodes de congés ou d'absence de l'agent
• sentiment de non prise en compte du type de fréquentation (notamment accueil du public)
Une cohabitation appréciée par les occupants, alors que la crainte d'un rejet de cette nouvelle organisation était réelle au départ
• 84% des occupants rencontrent les agents plusieurs fois par semaine
• 90% apprécient d'avoir un échange et ne se déclarent pas dérangés (seuls 8 % se disent « parfois dérangés », et 1% « souvent »)(base 791 répondants)
Commentaires des occupants sur les contacts avec les agents d'entretien
En positif :
ï agent sympa, souriant, discret
ï permet un moment de convivialité, de créer des liens, les agents d'entretien sont «visibles »
ï permet des demandes d'intervention spécifique
En négatif :
ï nuisances liées au bruit (discussions ou utilisation de l'aspirateur) notamment dans les lieux qui accueillent du public
ï un passage à des moments parfois inappropriés (réunion ou conversation téléphonique)
ï des problèmes liés aux locaux (exigus ou moquettes difficiles à nettoyer)
ï contraintes liées à l'accueil du public : pour certains l'intervention des agents semble être un problème (bruit, confidentialité...)
Des pistes :
ï Des rappels dans le fonctionnement et l'intervention des agents d'entretien notamment en termes de confidentialité, lors de l'accueil des publics
2/3 des répondants considèrent que la nouvelle organisation contribue à une certaine reconnaissance du travail des agents (Base : 765 répondants)
25 % ont fait des efforts, et font plus attention au tri et au rangement.
Parmi les 75 %, certains ont des bureaux toujours rangés ; ils n'ont pas besoin de faire un effort particulier. Pour les autres cela conforte un axe de réflexion en cours (projet de Charte de l'entretien impliquant les agents d'entretien et les occupants)
Les occupants ont pris le temps de s'exprimer, de faire part de leur avis : près de 990 phrases de commentaires ont été saisies.
Suggestions :
• organiser des réunions occupants et agents d'entretien pour mieux cerner les besoins (préfiguration de la charte) et préciser ce que les occupants peuvent faire pour faciliter le travail des agents
• réfléchir à l'opportunité d'un passage des agents d'entretien moins fréquent mais plus approfondi, voire un nettoyage annuel
• proposition de mise en place de carnet de liaison
• opérer des remplacements de sols (type de matériau et vétusté)
14. Communauté urbaine de Strasbourg - Charte de réunion
La collectivité attend de chaque collaborateur qu'il effectue son temps de travail et qu'il s'engage avec résolution dans l'accomplissement des missions de service public qui lui sont confiées. Elle souhaite également veiller à une meilleure articulation des temps professionnel et privé. Elle entend donc mieux organiser les périodes collectives du travail.
Initiée et pilotée par la Mission des temps, la Charte de la réunion résulte d'un travail transversal conduit en interne. Il s'agit d'un guide de bonnes pratiques pour nos séances de travail interne, qui s'applique à toutes et tous et répond aux objectifs suivants :
• Respecter le temps de chacun par une régulation des horaires de réunion,
• Gagner du temps par des réunions courtes et menées dans un souci d'efficacité,
• Réduire le temps de déplacement par de nouvelles pratiques de réunion à distance et l'utilisation des outils disponibles.
Les propositions formulées relèvent pour l'essentiel du bon sens et participent du savoir vivre et travailler ensemble. Chacun d'entre vous est invité à s'efforcer de les mettre en pratique en prenant en compte les nécessités de service et l'objectif de qualité du service public.
C'est un outil de modernisation de notre administration, qui comprend trois volets :
• Les horaires ;
• Les règles pour professionnaliser la conduite de réunion, que l'on soit animateur ou participant ;
• La logistique et les outils à notre disposition pour mener les réunions dans les meilleures conditions de travail, y compris à distance.
15. Tableau de suivi des actions de la mission temps et lettre de mission - Communauté urbaine de Strasbourg (mis à jour janvier 2014)
16. L'agence des temps de Poitiers
Le contexte : pourquoi une politique des temps ?
L'Agence des Temps de Grand Poitiers, créée en mars 2001, constitue un levier de politique sociale , notamment en faveur des personnes les plus démunies, mais elle est également un moyen d'identifier des besoins nouveaux nés de la désynchronisation des temps multiples de la vie moderne.
En effet, sur un territoire, la capacité des habitants à maîtriser, - ou pas -, leur temps constitue indéniablement un facteur d'inégalités :
- les emplois les moins qualifiés sont ceux sur lesquels pèsent les plus fortes contraintes (horaires décalés, temps de travail fragmenté ...),
- l'étalement urbain provoque des difficultés en matière d'accessibilité aux services,
- les femmes salariées continuent à assumer la « double journée ». Toutes les études statistiques nationales le montrent.
Ces éléments rejaillissent sur l'organisation quotidienne personnelle et familiale, souvent faite d'arrangements précaires. Ils pèsent également sur la demande de services en direction des collectivités (modes de garde adaptés) ainsi que sur les conditions d'accès aux offres (horaires des transports en commun, des offres sportives, culturelles, des commerces, des services publics).
Pour une collectivité prendre en compte la dimension Temps permet de :
- lutter contre ces inégalités en favorisant l'accessibilité, entre les femmes et les hommes, entre les territoires, les âges ou les revenus,
- aider les habitants à mieux articuler vie professionnelle, vie familiale, personnelle
- considérer le citoyen dans sa globalité (usager, consommateur, salarié, piéton, automobiliste ...),
- agir pour synchroniser et/ou harmoniser les horaires des services publics et privés,
- optimiser les équipements publics et l'usage des espaces publics en développant leur polyvalence, aux différents moments de la journée, semaine ou année
En matière de management, intégrer la dimension Temps, permet de :
- développer un nouvel outil de gestion entre institutions publiques et privées favorisant la transversalité entre les services et incitant de nouveaux partenaires à s'impliquer (Éducation Nationale, entreprises etc.),
- susciter de nouveaux modes de concertation sollicitant des acteurs non systématiquement impliqués dans ces processus.
De 2002 à 2008
Forte de son bilan, l'Agence des Temps de Grand Poitiers a été reconduite lors de l'élection municipale de 2008. Comme dans le mandat précédent deux élus sont délégués à l'animation de la structure, la 1 ère adjointe et un conseiller. Toutefois, en adossant cette délégation « temporelle » à celle de l'accueil au public, les marges de manoeuvre, ont sûrement été plus restreintes que lors du mandat précédent où l'adjointe avait également pour délégations l'Université et le Développement Économique.
En 2008, aucune restriction n'est donc imposée au travail de l'Agence mais, de fait, les dossiers transversaux auront plus de mal à s'imposer.
Outre les deux élus de la Ville de Poitiers délégués à l'Agence des Temps, Christine Sarrazin-Baudoux et Jules Aimé, l'Agence des Temps s'appuie sur un groupe de travail, nommé « Grand Poitiers/Temps » composé de deux élus de chacune des communes de Grand Poitiers. Ces élus, qui ne sont pas obligatoirement des élus communautaires, ont été désignés par les communes pour réfléchir avec l'Agence aux problématiques temporelles.
Avant de présenter les actions engagées depuis 2008, il convient de rappeler que l'Agence des Temps a maintenu un service créé en 2001 qu'elle ne gère plus directement, un dispositif facilitant une meilleure accessibilité aux services, à la culture et à la vie citoyenne :
- les guichets uniques de rentrée scolaire , gérés maintenant par le service de l'Administration Générale, qui permettent aux habitants d'effectuer pendant une semaine, -fin août -, un grand nombre de démarches liées à la rentrée, en un seul endroit, les Maisons de Quartiers et la Mairie centrale, à des horaires atypiques, fin de soirée et samedi matin.
Par ailleurs, nous rappellerons quelques actions marquantes de l'Agence qui, en leur temps, ont apporté un souffle de nouveauté et de dialogue :
- l'ouverture de la mairie centrale entre midi et 2 et des mairies de quartiers en fonction des besoins des usagers et de l'environnement (présence d'un marché, présence et horaires des administrations voisines etc.),
- le décalage des entrées de cours le matin sur le campus de 8h à 8h45. La réforme LMD a quelque peu perturbé ce dispositif qui reste toutefois mis en place par quelques UFR,
- le dialogue avec les commerçants du centre-ville pour une ouverture entre midi et 2,
- l'aide à la mobilité des personnes en insertion par la création d'une plate-forme d'information gérée par Vitalis, (de 2006 à 2007 puis fermée ensuite ... pour retrouver vie sûrement en 2014, portée par une Maison de quartier ayant répondu à un appel à projet du FARE).
- l'aide à la création du Groupement d'Employeurs Temps-DEM pour répondre aux besoins de gardes d'enfants sur horaires atypiques.
Des actions concrètes
Depuis 2008, l'Agence poursuit et complète son action en matière d'accessibilité à la culture. En effet, on constate de plus en plus une demande d'offres sur des horaires différents, - entre midi et 2, en fin d'après-midi -, émanant de salariés qui habitent aux alentours de Poitiers, - 15, 20 km ou plus -, et ne reviennent plus en centre-ville de Poitiers à 20h30 pour « consommer » de la culture. C'est pourquoi l'Agence a toujours favorisé l'émergence d'offres différentes et souvent gratuites : les midis et 2 des Expressifs, des Tudiantes, des Clefs de Notre-Dame. Aujourd'hui ces manifestations ne sont plus subventionnées par l'Agence des Temps mais la dynamique est acquise.
Par contre, l'Agence a concrétisé un partenariat avec le TAP qui a permis la création des « concerts-sandwiches » . Le premier, le 17 décembre 2010, a obtenu un énorme succès. De nombreuses personnes, dont certaines sûrement néophytes en matière de musique classique, sont venues apprécier un concert de qualité au moment de leur pause déjeuner. L'Agence des Temps active, à cette occasion, son réseau constitué de l'ensemble des administrations du centre-ville. Depuis, ces concerts-sandwiches ont été totalement intégrés dans la programmation du TAP et font l'objet d'un visuel spécifique. Lorsqu'ils nécessitent une prise en charge financière, elle est assumée par l'Agence.
Public : environ 300 à 350 personnes par concert.
En matière de mobilité des seniors , dans le cadre de la semaine de la mobilité en septembre 2009, l'Agence a été à l'initiative d'une journée de découverte du réseau de bus Vitalis par ce public spécifique. C'est dans ce contexte que des personnes des différents logements-foyers de Poitiers avaient été accueillies par le maire pour une présentation du projet Coeur d'Agglo.
Dans le cadre de la réflexion menée avec le groupe «Âges de la vie » du Conseil de Développement Responsable, l'Agence des Temps et le Conseil ont permis, par la mobilisation de nombreux partenaires, la création d'un service de cohabitation intergénérationnelle sur notre territoire, porté par la Maison de quartier Le Local.
La garde des enfants pour les adhérents de la Bourse Spectacles et des Maisons de quartiers de Poitiers, et, depuis 2011, de Buxerolles et Migné-Auxances
Ce dispositif qui permet aux familles de bénéficier de gardes d'enfants gratuites à domicile afin de se rendre plus facilement aux spectacles et activités citoyennes des Maisons de Quartier a été peu utilisé. Compte tenu des impératifs budgétaires pesant sur l'Agence (prise en charge des concerts-sandwiches), le dispositif n'avait pas été reconduit en 2013.
Toutefois, en 2014, une enveloppe financière a été affectée pour la mise en place de gardes d'enfants lors de rencontres citoyennes, dans les maisons de quartier.
Une source de débats et de propositions
Outre l'élaboration de nouveaux services, l'Agence par son caractère transversal, multiplie les opportunités pour ouvrir des thèmes de réflexion qui intéressent nombre de services de la collectivité et de structures extérieures. Elle est sollicitée sur certains dossiers (ex : enquête de satisfaction et de besoins des clients du marché couvert Notre-Dame ) ou moteur pour lancer le débat sur de nouveaux enjeux qui lui semblent majeurs (ex : le temps des étudiants, l'intergénérationnel). Elle est un des maillons du service Prospective dans sa capacité de diagnostic, d'écoute et de propositions dont elle se fait le relais auprès des élus.
Dans ce travail de diagnostic et d'évaluation des besoins, le partenariat engagé avec l'Université de Poitiers (Master Sociologie, Master Médiation, IAE etc.) est particulièrement déterminant. Il a ainsi permis la coordination de plusieurs études ; cinq depuis 2008 :
- les besoins en matière de services des salariés travaillant en horaires décalés sur le site du Futuroscope (essentiellement les centres d'appels - 2012)
- la transmission des savoirs entre générations (2011)
- les modes de vie des étudiants de Poitiers (2009)
- la fréquentation du marché couvert Notre-Dame et les attentes des habitants (2009)
- les publics de la médiathèque François-Mitterrand (2008).
Un important travail a été effectué sur le temps des étudiants . Il convient de rappeler que l'Agence des Temps s'inscrit ici dans le cadre de la convention quadripartite, Ville/Grand Poitiers/CROUS/Université, dont un des chapitres concerne l'approche temporelle des problématiques de la vie étudiante. Les associations et syndicats étudiants ont été mobilisés sur diverses thématiques. Leurs attentes et propositions concrètes ont été transmises à l'ensemble des élus, services de la collectivité et structures concernés.
Les étapes en sont les suivantes :
- le 26 juin 2008, une journée de la Prospective concernant le temps étudiant de manière globale. Trois préoccupations essentielles ont été alors mises en exergue : la mobilité, l'accessibilité à la culture et aux loisirs, les conditions de vie.
- le 12 mars 2009, une restitution des réflexions des étudiants sur le thème de la mobilité : les besoins des étudiants handicapés, la communication, le vélo et le bus la nuit.
Lors de cette réunion l'Agence et ses partenaires ont été interpellés sur le temps de loisirs pendant la période estivale.
- le 1er juin 2010 ; une réunion a eu lieu sur la thématique, - temps de loisirs et de la culture -, autour des trois questions suivantes :
- l'accessibilité temporelle à la culture et aux loisirs : banalisation des cours le jeudi après-midi ; compression de l'année universitaire et ses conséquences sur le temps culturel ; loisirs et culture pendant les vacances universitaires (connaissance des événements ? besoins ? rapprochement des étudiants entre eux, des étudiants et de la population etc.),
- l'accessibilité financière : besoins de lieux informels ? carte Culture ; les événements gratuits sont-ils connus ?
- l'accessibilité à la création artistique. Outre les associations et syndicats étudiants, étaient présents les représentants de la Ville et de Grand Poitiers, de l'Université, du CROUS, de la Maison des Etudiants et de Vitalis. Le représentant de Vitalis n'a pas manqué de souligner l'apport précieux de ces réunions thématiques qui permettent de répondre au plus près aux besoins des étudiants, tout en ne négligeant pas, bien entendu, les impératifs économiques de la régie.
En lien avec le groupe « Ages de la vie » du Conseil de Développement Responsable, l'Agence des Temps anime la démarche sur l'intergénérationnel. Dans notre société où quatre, voire cinq générations se côtoient, où l'éloignement géographique met à rude épreuve les liens entre générations au sein des familles, l'intergénérationnel est un véritable enjeu de société.
Des forums des acteurs locaux organisés les ont permis d'échanger, de mobiliser autour de ces questions. Ils ont remporté un grand succès en mobilisant à chaque fois une centaine de personnes, parmi lesquelles élus, représentants d'institutions, d'associations, habitants, entreprises etc.
Parallèlement différentes pistes de travail ont été explorées par l'Agence et ses partenaires :
- la valorisation des actions intergénérationnelles au sein des associations. Un recueil d'actions-phares a été édité. Il est également en ligne sur le site de Grand Poitiers. Son objectif est de faire levier, de créer une dynamique autour de cette question. Un module de formation des bénévoles associatifs autour de l'intergénérationnel a également été créé à la demande du groupe par l'AFIPAR. Une douzaine de personnes l'ont suivi avec intérêt.
- la création un dispositif de cohabitation intergénérationnelle , Equip'Âges. En lien avec des étudiants de l'IAE, les membres du groupe « âges de la vie » du CDR et de Grand Poitiers/Temps, l'Agence a coordonné une étude sur l'adhésion des habitants de Grand Poitiers à un dispositif de cohabitation intergénérationnelle. Les résultats présentés le 28 mars 2011 montrent que 40% des personnes interrogées (1091 questionnaires traités) ont une réelle envie d'adhérer à ce projet. Ensuite, sous l'égide de l'Agence et du Conseil, ce sont de multiples acteurs du territoire qui ont été mobilisés pour le faire émerger : bailleurs sociaux, MLI, ADIL, Université, CROUS, Confédération Syndicale des Familles, Foyer des jeunes travailleurs etc. En juin 2012, Le Local a proposé d'adjoindre ce service à son secteur Habitat jeunes. Le vendredi 8 mars, une conférence de presse, en présence de Régine Faget-Laprie et Nathalie Rimbault-Raittière, lançait le dispositif.
- le lien à développer entre bénévoles et associations comme facteur de bien vivre ensemble :
Les forums des acteurs ont mis en lumière le rôle du bénévolat associatif dans le développement du « bien vivre ensemble ». Or, aujourd'hui, le bénévolat serait en crise. Qu'en est-il vraiment ? Si cette assertion est exacte, pourquoi ? Qu'attendent les citoyens ? Comment les associations peuvent-elles réagir ? Ce sont ces questions qui intéressent aujourd'hui le groupe « âges de la vie » du CDR et l'Agence des Temps, aidés dans leur démarche par une nouvelle promotion d'étudiantes de l'IAE de Poitiers.
Celles-ci ont mené deux enquêtes : une auprès des habitants (enquête mise en ligne notamment sur le site de Poitiers), l'autre auprès des associations. La réunion technique du 14 mars 2013, précédée d'une réunion du groupe âges de la vie le 6 mars, avait pour objectif de présenter les résultats de ces deux enquêtes et de susciter le débat avec les représentants des associations « têtes de réseaux ». Ceci dans le but d'éclairer les élus sur la mise en oeuvre d'actions favorisant le lien indispensable aujourd'hui entre bénévoles et associations et notamment la création d'une Bourse du Bénévolat.
Aujourd'hui, en lien avec des étudiants de l'IAE, un projet est en cours sur la mise en place d'une stratégie de communication concernant le bénévolat des jeunes.
Participation de l'Agence des Temps au projet IHHS (Innovation habitat habitant seniors) de SIPEA (bailleur social)
SIPEA habitat, le CSC des Trois Cités, accompagnés d'un consultant, travaillent depuis plusieurs mois sur un projet stratégique dont l'objectif est de répondre aux problématiques liées au logement des seniors (adaptation du logement mais également lien social, mixité intergénérationnelle etc.).
Un référentiel I2HS (Innovation, Habitat, Habitant Senior) a été créé qui permet d'identifier les différents axes d'intervention (logement, vie sociale, services, espaces publics) ainsi que les acteurs concernés par la maîtrise de chacun d'entre eux. La démarche I2HS doit permettre de renforcer la coopération entre les partenaires.
Son travail sur l'intergénérationnel a amené l'Agence des Temps à intégrer le Copil d'I2HS.
Aujourd'hui des groupes de travail se sont mis en place autour des 4 axes. L'Agence participe au groupe « Services ».
Les rencontres de l'Agence des Temps
Depuis 2008 l'Agence a rencontré des partenaires de la Collectivité ou des structures extérieures afin d'ouvrir de nouvelles pistes de réflexions dans l'intérêt des habitants ... avec plus ou moins de succès.
Une rencontre avec l'Adjoint aux sports et le directeur du service sur la mutualisation des équipements sportifs (réflexion reportée au prochain mandat).
En 2012, une rencontre avec la Déléguée Régionale aux Droits des Femmes, ainsi qu'une mobilisation des Bureaux des Temps de la Région Poitou-Charentes par l'intermédiaire d'AIRE 198, a permis d'aboutir sur un travail commun de mise en place des horaires de journée pour les agents de propreté . La DRH de la Ville a ainsi pu bénéficier du travail effectué par Tempo territorial en ce domaine.
Plusieurs rencontres avec des membres du CJD (Centre des Jeunes Dirigeants) pour présenter les politiques temporelles et les sensibiliser à la conciliation des temps au sein des entreprises. Malgré un intérêt marqué de leur part, la suite de la réflexion s'est heurtée au changement de président de l'association.
Ces rencontres pour ouvrir de nouvelles pistes de travail nécessiteraient un portage politique et de l'administration générale plus intense d'autant plus qu'elles de heurtent également, comme on l'a vu, au changement de personnes au sein des structures.
Les perspectives immédiates de l'Agence des Temps
Les marches nocturnes
Il s'agit sur ce temps de la nuit de réaliser une observation sociale et sensible des lieux : identifier les usages, les besoins, les représentations et l'ambiance en recueillant des informations spatio-temporelles au détour d'observations et d'interviews. Les personnes croisées seront interrogées ainsi que les acteurs incontournables de la nuit : responsables des lieux de vie (bars, boîtes, restaurants) mais également agents de propreté etc.
Cette approche nouvelle, déjà mise en oeuvre dans certaines villes (Strasbourg, Dijon etc.) permet de faire émerger des constats mais également des idées et des projets.
Quatre trajets ont été identifiés : trois au centre-ville, un dans le quartier de Saint-Eloi. Ils permettent d'avoir une approche des différents points sensibles de la ville.
La méthode retenue est celle de l'impromptu : pas d'annonce dans la presse locale en amont, ce qui n'interdit pas de demander à être accompagnés dans ces déambulations par un ou des journalistes.
Toutefois les responsables des bars, parkings etc. seront, quant à eux, sollicités en amont.
Dans le contexte de la période préélectorale, ces marches n'ont pu avoir lieu en mai 2013.
Le projet est bien sûr conservé et même élargi à une réflexion globale sur la nuit, un Projet
Global de la nuit à Poitiers , porté par l'Agence.
La poursuite du travail avec le groupe « âges de la vie » du CDR
Le groupe «Âges de la vie » du CDR finalise actuellement son bilan mais s'est également donné pour objectif de tracer la voie aux prochains membres. Pour ce faire, les nombreuses pistes évoquées autour de l'intergénérationnel, et non encore exploitées, vont être revues et débattues.
Le réseau Tempo Territorial
Enfin, il convient d'évoquer l'implication de l'Agence des Temps de Grand Poitiers dans le réseau national Tempo territorial , association dont Dominique Royoux est Président depuis 2008 et Christine Sarrazin-Baudoux et Jules Aimé, actuellement membres du Conseil d'Administration. Ce réseau réunit une trentaine de territoires diversifiés, villes, communautés urbaines ou d'agglomérations, conseils généraux ou régionaux (villes de Paris, Lyon, Brive, Rennes, Caen, Dijon ... Conseil Général de Gironde, Communauté Urbaine de Strasbourg ..., Conseil Régional Nord-Pas-de-Calais ...), des laboratoires de recherche également.
C'est à ce titre que l'Agence a organisé à Poitiers, les 12 et 13 novembre 2009, Les Temporelles, sur le thème « Horaires décalés, délitement social : enjeux de régulation des politiques temporelles ».
Par ailleurs l'Agence a participé à la création d'un module de formation à l'attention des élus et des techniciens sur les politiques temporelles ainsi qu'à celle d'un guide méthodologique.
Elle gère également la Lettre d'information de l'association.
Par l'intermédiaire de l'association, elle initie et participe aux grands débats de société : rythmes scolaires, travail du dimanche, télétravail, ouverture des médiathèques le dimanche etc. En octobre 2009, Dominique Royoux et sa collaboratrice Mireille Terny, ont été auditionné à l'Assemblée Nationale par le rapporteur du budget « Egalité des chances », Christophe Sirugue, Député-Maire de Chalon-sur-Saône et par Catherine Coutelle, Députée de la Vienne, sur l'articulation vie familiale-vie professionnelle.
La réforme des rythmes scolaires dans le cadre de la loi d'orientation sur l'éducation, a été l'occasion pour Tempo territorial de participer activement à la concertation des différents acteurs. Elle a mené et présenté un travail approfondi nourris d'expérimentations et d'organisations fonctionnant à 4,5 jours par semaine.
La question des rythmes scolaires intéresse les politiques temporelles à plusieurs niveaux :
- Au coeur de la réflexion, l'aménagement du temps des enfants doit permettre un nouvel équilibre entre temps scolaire, périscolaire et familial.
- Au-delà, ce débat réinterroge l'ensemble des rythmes de vie des familles avec enfants et notamment le temps de travail des actifs, dans une perspective sociétale
- Enfin, l'école joue un rôle de "générateur de temps" dans les territoires, c'est-à-dire qu'elle impacte fortement le rythme des territoires et l'organisation des services locaux et de transports. Cette dimension territoriale doit être prise en compte dans la concertation en cours.
Tempo a également intégré le réseau européen des acteurs des politiques temporelles constitué en novembre 2009. Dans ce cadre Tempo et l'Agence des Temps de Grand
Poitiers ont participé activement au groupe « services publics » du réseau. Il s'agit d'analyser les pratiques des différents pays membres.
Les élus membres du Conseil d'Administration de Tempo ont créé un groupe de travail pour analyser leurs cinq années de travail et donner des perspectives nouvelles à leurs engagements. Car il apparaît que les politiques temporelles connaissent un regain d'intérêt et d'activités. Les nombreux essais autour de l'accélération des temps, les dynamiques déployées par certaines entreprises sur la conciliation des temps, ont peut-être constitué des éléments déclencheurs. |
Pistes d'évolution
Elles passent avant tout par l'appropriation du plus grand nombre de ces nouvelles politiques publiques. Pour y parvenir, quelques suggestions - plutôt - souhaits :
- Portage politique favorisé par une double délégation plus stratégique que celle de l'accueil du public,
- Portage de la Direction Générale plus affirmé,
- Création d'un groupe interne à l'administration, groupe dédié aux problématiques temporelles en parallèle au groupe d'élus Grand Poitiers temps
Cette « assise » permettrait peut-être d'explorer des champs qui ne l'ont jamais été ou de manière très ponctuelle jusqu'à présent ....
- Politique des ressources humaines au sein de notre propre collectivité : quid de la conciliation des temps pour nos propres salariés ?
- Aménagement urbain. Quels aménagements en fonction des rythmes des activités économiques et des habitants ? Quelles mutualisations d'équipement ?
Acte 2 de la décentralisation - Schéma de services publics dans le champ de compétence des collectivités.
Positionnement de l'Agence sur cette problématique mais qui, pour qu'il soit crédible et efficace, nécessitera un budget conséquent.... et même d'inscrire les politiques temporelles dans le projet politique global de l'agglo et de la ville.
17. Quand une collectivité explore le temps pour incuber des services innovants : l'exemple du Grand Lyon
Article écrit par Lucie Verchère, chargée de mission « temps & services innovants » - Grand Lyon Direction de la Prospective et du Dialogue Public 98 ( * )
Résumé :
Les temps et les rythmes des individus, mais aussi du travail, des institutions ont évolué ces 20 dernières années. Ils se sont complexifiés, désynchronisés et ont conduit de la part des citoyens à de nouvelles attentes de services, plus 24/24, plus immédiats, plus « à la carte». Ces évolutions sociétales interrogent de fait l'action publique.
Certaines collectivités locales françaises, telles le Grand Lyon, en mettant en place un « bureau des temps » (terme générique) ont fait le choix de prendre en compte ces évolutions temporelles, afin de les observer, de les diagnostiquer et ainsi d'incuber des nouveaux services au citoyen pour lui permettre de mieux gérer l'articulation de ses temps de vies, tout en produisant une ville plus durable et plus intelligente.
Pour cela, le Grand Lyon a mis en place une mission « temps & services innovants » intégrée à la Direction de la Prospective (www.espacedestemps.grandlyon.com)
Les temps qui rythment notre vie ont beaucoup évolué au cours du XX e siècle et cela interroge le rôle de l'action publique.
Notre société change, est devenue plus complexe, difficilement prévisible. Une organisation du travail en pleine transformation, des rythmes de travail et de vie de plus en plus déstructurés, désynchronisés, un rapport au temps plus individualisé, autant de faits qui conduisent à une évolution des modes de vie et des pratiques de la ville et de ses services. Les grandes temporalités de notre société ont été bouleversées en peu de temps et cela concerne plusieurs phénomènes. Les plus importants sont la féminisation du travail. En France 80% des femmes en âge d'avoir des enfants travaillent, mais aussi l'accroissement de la durée de la vie (+ 31 ans au cours du XX e siècle qui a bénéficié à toutes les catégories sociales). Il faut aussi considérer le droit à la retraite qui, bien que mouvant, permet de passer le dernier tiers de notre vie en temps hors travail, tout en étant encore actif. À cela s'ajoute la mise en place, depuis les années 2000 de l'ARTT (aménagement et réduction du temps de travail). Ainsi, nous n'avons jamais eu autant de temps libre, et pourtant chacun se plaint d'en manquer ! Si l'on se réfère à Jean Viard, au cours du XX e siècle, il y a eu une augmentation importante du temps libre :
Ainsi en 1914, sur une vie entière (de 60 ans soit 525 600 heures environ), on travaillait 200.000 heures, on dormait 200 000 heures, il nous restait 125 000 heures pour faire autre chose. Aujourd'hui sur une vie entière de 80 ans (soit 700 800 heures environ) environ, on travaille 70 000 heures, on étudie 30 000 heures, on dort 200 000 heures (donc on dort moins) et il nous reste 400 000 heures pour faire autre chose. Le temps non contraint a donc été multiplié par 4 en 3 générations.
Cela signifie par exemple que pour aménager une ville, puisque 12 % de notre temps est consacré au travail, 88% l'est pour autre chose et la ville et ses aménageurs vont devoir se mettre au diapason de ces nouveaux rythmes ! Cela explique pourquoi on a l'impression qu'il y a tout le temps du monde dans la rue par exemple ! Ce sont aussi les heures de pointe qu'il faut reconsidérer car elles se sont lissées, en particulier celles du soir qui s'étalent maintenant de 16h à 19h30 !
Il faut aussi mettre en cause le développement des nouvelles technologies à l'information et à la communication, qui accélèrent tous les processus de communication, personnels ou dans le travail, ou l'accélération des rythmes dans le travail : on voit se développer partout une flexibilité accrue, une course à l'urgence, à l'immédiateté dans le travail, qui se répercute dans la vie privée par un accroissement de stress et l'impression de n'avoir « plus de temps pour soi ». Le territoire est ainsi devenu un lieu où l'on assiste à une multiplicité des rythmes tant dans notre vie familiale, que sociale ou professionnelle.
Pour exemple, une enquête réalisée par Keolis (opérateur de transports) en 2007 99 ( * ) a démontré plusieurs évolutions. Cette enquête a consisté à interroger 3 300 actifs par téléphone dans 11 agglomérations du territoire français (50 % issus de la ville centre, 50% d'autres communes périphériques), soit 18 700 journées de travail décrites présentant les pratiques de mobilité et les modes de vies des interviewés ! Et les résultats sont éloquents en termes de rythmes de mobilité puisque 37 % de la population interrogée déclare commencer ou finir son travail en dehors des heures de pointe, 20 % assurant finir après 19h ! Ce sont aussi les jours de la semaine où les rythmes sont différents puisque 60 % des salariés n'ont pas les mêmes horaires selon les jours de la semaine. Enfin les durées du travail sont variées durant la semaine : 50% des personnes interviewées travaillent du lundi au vendredi, mais 10% travaillent en outre le samedi et 4 % le week-end.
Récemment une enquête réalisée par le bureau d'études Nova7 pour le Grand Lyon 100 ( * ) concernant les déplacements des habitants du Grand Lyon, mettait en évidence que 12 % d'entre eux ont une activité de travail ou d'études le samedi !
Cela sans compter sur le « mythe de l'année scolaire » : 48 % des personnes interrogées dans l'enquête Keolis vivent sans enfants à charge et sont donc peu concernés par le rythme des vacances scolaires. Et on observe que la fréquentation TC entre 13 et 19 h de certains jours de vacances scolaires peut être égale, voire supérieure, à celle d'une semaine hors vacances scolaires, en lien avec des activités de temps libre.
Dès lors, on assiste à un phénomène où chacun revendique SON propre temps et SON propre rythme avec l'émergence de logiques paradoxales difficiles à gérer par la puissance publique. Le risque est de voir se développer une société de l'immédiateté , qui veut « tout, tout de suite, et tout le temps », qui vit de plus en plus dans l'instant présent, qui anticipe moins et qui est de plus en plus dans l'action immédiate et dans l'urgence. Ceci n'est pas sans conséquence pour l'offre de services, publics ou non, qui doit en permanence s'adapter. On voit se développer une société qui veut « tout et son contraire », qui veut des services plus « à la carte », individualisés, « sur-mesure »... Avec des attitudes contradictoires et schizophrènes où chacun « demande à autrui ce qu'il ne veut pas pour soi ». Ainsi, si nous travaillons moins, nous voulons pourtant des services publics aux horaires élargis (crèches, activités péri et extra scolaires, ou transports par exemple).
À ceci s'ajoute la dimension fortement inégalitaire du temps, selon des critères bien spécifiques selon le statut, le genre, le lieu d'habitation, de chacun.
La demande d'une ville ouverte en continu se renforce. Une crèche 24h/24 existe à Lyon, de même que 4 lignes de bus nocturnes. On va au concert à la pause de midi, des séances de cinéma ont lieu à minuit ou à 11 heures du matin; le débat pour ouvrir les magasins ou les bibliothèques le dimanche est souvent relancé.
On dort une heure de moins par nuit que nos grands-parents ; internet nous relie au monde en continu... La pression sur la nuit, comme sur le dimanche, comme sur tous les temps de la vie quotidienne, et comme sur le temps de travail, augmente. L'étalement temporel sans limite peut devenir aussi nuisible que l'étalement urbain.
Et l'action publique dans ce débat ?
Les services urbains s'adaptent peu à peu, mais la ville fonctionne aussi avec des décalages entre les temps individualisés des habitants et les rythmes collectifs des services urbains. Dans une société ou le court-terme prédomine, comment interroger le temps du politique, comment gérer au mieux l'accélération des usages, des modes de vie, et le temps des décisions politiques ? Comme on l'a vu précédemment, le temps est forcément inégalitaire, alors comment l'action publique peut-elle intervenir ? Encourager ? Freiner ? S'adapter ?
Comment répondre aux attentes de la société civile en mouvement ? Quelle offre de services proposer : par exemple sur les lieux d'interconnexions pour transformer du temps d'attente subi en temps choisi pour faire une escale et moins perdre de temps lors des déplacements ? Mais aussi pour permettre aux parents de concilier leurs vies multiples ? Pour la garde des enfants en proposant des crèches à horaires décalés, en ouvrant le débat sur la semaine de 4 jours et demi tout en respectant le temps de l'enfant ? Quel modèle de valeurs doit-on impulser? pour une ville 24h/24 ? ou une ville apaisée ?
Face à ce questionnement sur les temps accélérés, il est nécessaire de repenser l'approche temporelle de l'aménagement des territoires. Cela peut être au travers des documents de planifications nouvelle version, les SCOTT, ainsi que les définit jean Yves Boulin, sociologue et spécialiste des politiques temporelles, devenant des Schémas de Cohésion et d'Organisation Territoriaux et Temporels ou par une approche plus servicielle de l'aménagement urbain avec la mise en place de services adaptés qui mettraient au même tempo, rythmes des individus et rythmes des territoires. Cela peut être également par une approche temporelle de l'urbanisme en particulier via le partage de l'espace publique à tous, en tenant compte des rythmes spécifiques de chacun de jour comme de nuit.
La mise en place de politiques temporelles dans les collectivités publiques en France
Pour prendre en compte ces multiples questionnements temporels, une vingtaine de collectivités françaises, dont le Grand Lyon, ont mis en place des « bureaux des temps », dont l'objectif principal croise plusieurs enjeux majeurs : l'innovation, l'amélioration de la qualité de vie mais aussi l'égalité et la cohésion sociale, afin de construire collectivement un fonctionnement temporel qui convienne aux besoins et aux rythmes du plus grand nombre.
Pour cela, les territoires impliqués ont mis en oeuvre des actions selon plusieurs axes de travail. On peut citer la mutualisation des espaces publics et des équipements , afin de les rendre adaptables en fonction des besoins et des usages différents des utilisateurs au cours de la journée, comme à St Denis ou à Dijon. De nombreuses collectivités ont pu agir sur les horaires d'ouverture des services, médiathèques, piscines ou musées, tels Paris, Rennes, ou Poitiers. En proposant des maisons de services publics, des guichets uniques, et en développant des horaires élargis, les collectivités permettent à l'habitant de mieux gérer son temps de vies tout en se déplaçant moins et mieux. D'autres collectivités ont incité à mettre en place des activités culturelles sur le temps de midi par exemple afin de toucher le plus grand nombre. Réorganiser le temps de travail des salariés précaires est une autre piste pour s'attaquer directement aux inégalités temporelles, en particulier des femmes. Par exemple, Rennes puis Paris et Nantes ont réaménagé le temps de travail des salariés d'entretien des lieux publics en les faisant travailler « aux heures de bureaux » afin de leur faciliter les déplacement et l'organisation de leurs temps de vies. Mais il s'agit aussi de repenser une organisation de travail plus « nomade » et mobile à partir de nouveaux lieux, tels les tiers- lieux, ainsi que le fait le Grand Lyon. Le thème « temps et mobilité » est aussi un axe majeur pour certains bureaux des temps, parce que le temps dans le déplacement est un critère majeur et que les problématiques de déplacements se posent pour de nombreuses collectivités ; c'est un axe fort pour le Grand Lyon, mais aussi Montpellier, Rennes, Poitiers, ...
Le temps de la nuit a été également plébiscité par certaines collectivités avec études et actions mises en place : à Paris, à Lyon, Rennes ou Dijon. Enfin, le thème des « modes de garde » a bien évidemment été majeur pour beaucoup de territoires puisque l'on touche par ce biais, un des enjeux forts de l'égalité hommes-femmes.
Dans tous les cas, ces axes ont privilégié une concertation entre toutes les parties prenantes, à l'instar des tables quadrangulaires de concertation italiennes, afin de concevoir des services qui s'appuient sur les attentes et les besoins des individus ou des collectifs, et non plus sur du « top-down » traditionnel.
Par définition ces « bureaux des temps », qu'ils soient nommés bureau, agence, mission, etc.. ont vocation à être transversaux et à travailler avec tous les services d'une même collectivité afin de croiser avec les autres politiques publiques.
Ces structures temporelles sont regroupées au sein du réseau Tempo Territorial, réseau national des acteurs des politiques temporelles. Il regroupe élus, techniciens, experts et universitaires spécialistes du sujet 101 ( * ) .
Un axe majeur de travail pour le Grand Lyon : le management de la mobilité
Initiée en 2002, la mission « temps & services innovants » du Grand Lyon a rapidement focalisé son action sur de l'expérimentation concrète de services visant à favoriser à la fois une meilleure articulation des temps de vie des habitants tout en produisant une ville plus durable et plus intelligente, tout en jouant la proximité vis-à-vis de l'usager.
En effet, lors de son installation, les élus et acteurs locaux ont souhaité privilégier cette approche aux dépens d'une approche temporelle plus conceptuelle et dogmatique. Pour autant de nombreux diagnostics et études sur des thématiques diverses ont été abordés : la question de la nuit, l'accélération des temps, les services à la petite enfance, les services aux salariés, par exemple. De nombreux forums grand public sur des « questions de temps » ont également été organisés entre 2003 et 2008 afin de sensibiliser sur le thème sur le temps de l'enfant, celui des personnes âgées, le temps des entreprises, celui du projet urbain, etc...
Mais l'axe majeur de la mission reste cette approche expérimentale avec ce rôle d'incubateur de services innovants, en lien avec la démarche marketing public développé par la Direction de la Prospective du Grand Lyon. Dès le départ, le domaine de la mobilité et des déplacements a été le thème plébiscité par l'ensemble des acteurs interrogés. La mission « temps » a ainsi très rapidement engagé un travail de concertation avec les partenaires économiques sur ce thème. A l'instar des tables quadrangulaires de concertations italiennes, il s'agissait de réunir autour de la même table tous les acteurs d'un territoire concernés par le sujet « temps & mobilité » et de concevoir des réponses communes permettant de réduire les problèmes de déplacements d'une zone tout en améliorant les temps et qualité de déplacements des salariés. Ainsi la mission « temps » assure le rôle de « conseil en mobilité » de l'agglomération et met en oeuvre le management de la mobilité avec les entreprises du territoire avec en particulier, la mise en oeuvre de 14 Plans de Déplacements interentreprises
(PDIE). Elle assure également un rôle d'incubateur de Nouveaux Services en Mobilité en s'appuyant sur les nouveaux métiers déclinés sur les zones économiques, les « animateurs mobilité » que l'on peut rapprocher des « time-manager » de Prato en Italie.
L'évolution du rythme "métro-boulot-dodo" est plus que flagrante dans le domaine des déplacements ! Les évolutions sociétales ont conduit à complexifier les rythmes de chacun, mais également les rythmes du territoire et donc des attentes différentes sur des besoins de services, en particulier de mobilité ; nous l'avons démontré en introduction en montrant les effets de l'enquête Kéolis. Ces évolutions impliquent un changement de paradigme puisque on doit maintenant prendre en compte la dimension multimodale de la mobilité : puisqu'on ne fait pas les mêmes choses selon les jours de la semaine, on ne va pas se déplacer de la même manière, en utilisant le même mode. Ainsi, le lundi, nos contraintes personnelles nous conduisent à devoir utiliser notre voiture personnelle, le mardi pas de contrainte, il fait beau, on prend son vélo pour aller travailler, le jeudi on covoiture avec son voisin car nos rythmes s'accordent, etc... C'est en se basant sur ces nouveaux usages que la mission "temps " du Grand Lyon a bâti son approche de management de la mobilité.
Avec une spécificité complémentaire aux services techniques traditionnels : une approche par l'usage, les pratiques et les modes de vies.
Une méthodologie de « management de la mobilité » éprouvée
En concertant largement et en s'appuyant sur les Associations d'Entreprises du territoire, 14 Plans de Déplacements inter-Entreprises ont été établis, avec plus de 400 entreprises, et 45 000 salariés potentiellement concernés, ainsi que le précise le schéma ci-dessous.
Pour chacun d'entre eux, un plan d'action offre des solutions de mobilité plus souples, plus durables pour les salariés concernés : meilleure connaissance et utilisation des TC, possibilité de covoiturer, meilleur usage des « modes doux », incitation au travail à distance pour moins se déplacer et mieux gérer ces temps de vies.
Pour que ces actions soient déclinées concrètement sur les territoires d'emplois, des postes d'animateurs - mobilité territoriaux ont vus le jour, cofinancés par le Grand Lyon et les Associations d'entreprises. Ces postes assurent un lien d'importance et de confiance entre les collectivités, les entreprises, les AOT et permettent ainsi de s'adresser à l'utilisateur final, via ce marketing de proximité.
La mission « temps & services innovants » intégrée au pôle Marketing joue également un rôle d'incubateur de services au sein de la Direction de la Prospective du Grand Lyon en ayant le souhait de toucher au plus près de ses attentes, l'utilisateur final. Puisque la relation de proximité existe avec chaque entreprise engagée dans un PDIE, des expérimentations de services innovants de mobilité peuvent être engagées plus facilement.
Ainsi dès 2008, un dispositif de covoiturage très complet a été mis en place sur le territoire.
Le portail www.covoiturage-grandlyon.com et la communication qui l'accompagne est piloté par la mission « temps » et doit être bientôt pérennisé au sein du Grand Lyon en étant porté par la Direction de la Voirie. Il permet à tout salarié habitant ou travaillant sur le Grand Lyon de trouver un covoitureur potentiel pour les trajets domicile-travail. Ce service initié comme une expérimentation à la demande des entreprises partenaires a rapidement démontré son utilité. Il a été complété en 2010, par une entrée « covoiturage-pour sortir» permettant à tout spectateur d'une des salles culturelles du Grand Lyon de pouvoir covoiturer vers un événement culturel. Le 10 000e inscrit au portail a été atteint en mai 2013. L'évaluation réalisée la même année a démontré en outre que 24 % des inscrits covoiturent effectivement ce qui permet d'économiser 1 500 000 kms de trajets mensuels, soit une économie financière conséquente pour tout covoitureur de 20 pleins d'essence par an et 1 627 € environ économisés à l'année. Le marketing de proximité mis en place par la mission « temps » est sans conteste un des volets qui a permis la réussite du dispositif.
D'autres incubations de services de mobilité, de vélos en location longue durée à partir des gares périurbaines, ou de voiture en partage entre particuliers et entreprises ont été impulsées. Chacune vise à étudier la faisabilité de tels concepts et d'en comprendre les déclics vis-à-vis des usages et des pratiques de déplacements des salariés. La mission pilote également des expérimentations de services innovants à mettre en place sur les lieux d'interconnexions afin de faire gagner du temps aux utilisateurs de TC/TER tout en promouvant une mobilité plus durable.
Parler de « démobilité » et revisiter le rapport temps et espace
Forte de ses actions dans le domaine de la mobilité, la mission « temps » du Grand Lyon s'est engagée dans une réflexion sur la « démobilité ». En effet, si l'on veut à la fois mieux concilier les temps de vies des habitants tout en construisant une ville plus durable, il faut se questionner sur la nécessité de se déplacer, en particulier pour aller travailler, puisque les déplacements domicile-travail représentent 33% des nuisances environnementales 102 ( * ) .
En quelques décennies, avec la montée en puissance des TIC (développement de la capacité des réseaux, outils numériques plus performants type smartphones), le travail s'est de plus en plus déporté hors de l'entreprise, induisant des changements qui définissent de nouvelles manières de travailler, mais aussi d'articuler ses temps de vies. La question du travail à distance mais aussi du travail collaboratif est donc plus que jamais d'actualité. Elle est d'ailleurs ressortie largement en lien avec quelques catastrophes : pandémie grippale, météo de crise, neige abondante, pollution majeure, grève générale ou très récemment lors des JO de Londres où 80% des entreprises londoniennes ont proposé des solutions de télétravail à leurs employés afin de soulager les transports publics.
Cela sous-entend de mener une réflexion sur de nouveaux espaces permettant ces nouveaux usages de travail plus collaboratifs ; ces espaces sont communément appelés « les tiers-lieux ». Travailler, un ou deux jours par semaine, non plus en entreprise mais depuis ces lieux équipés, collaboratifs et multifonctionnels, tel est le concept des tiers-lieux. Fruit de l'évolution de la technologie et de nouveaux modes d'organisation, ces nouveaux lieux, dédiés aux e-activités, sont au confluent de la demande sociale pour moins de mobilité, pour une gestion du temps personnel privilégiée, tout en assurant une compétitivité de l'entreprise et des territoires accrue, mais aussi pour attirer des « talents particuliers » sur le territoire.
Le concept de « télécentres » n'est pas récent. Les études de benchmark réalisées en 2010 ont permis de mettre en évidence les types de lieux existants en France et en Europe, ainsi que les facteurs de réussite et d'échec de la mise en place de tels lieux. Depuis quelques années, on note cependant une vraie évolution sur le sujet avec le développement de nouveaux types de lieux collaboratifs, lieux de sociabilité, de créativité et d'événementiel autres que de simples télécentres visant à partager des bureaux.
Le cadre juridique sur le travail à distance, mis en place en 2005 a participé à ce renouveau, tout comme la crise économique et énergétique. Il s'agit à présent de développer des télécentres ou centres de coworking de 2e génération , véritables tiers-lieux permettant l'innovation sociale et participant à l'attractivité des territoires. Le tiers-lieu, « outil de production et de développement » permet d'associer des acteurs variés publics, privés et associatifs à l'échelle d'un territoire. Il répond à des enjeux de développement durable favorisant « le mieux vivre et travailler ensemble ».
La mission « Temps et services innovants » du Grand Lyon a travaillé sur cette problématique du travail à distance, puisqu'elle croise de très près la question d'une meilleure articulation des temps de vies. Depuis 2010, elle soutient la commune de Charly, commune périurbaine au sud-ouest du Grand Lyon, dans la mise en place d'un centre de télétravail d`environ 30 postes. L'ouverture est prévue en 2014. Ce centre se doublera d'un centre de ressource sur le travail à distance. Pour se faire, dès 2010, une enquête web a été conduite auprès de 800 entreprises du territoire afin de les interpeller sur ce concept. Une étude de faisabilité a été conduite en 2011 en collaboration avec la commune de Charly. Cela a débouché par l'intérêt de quelques grosses entreprises pour utiliser le futur centre (Groupama, La Poste, Orange ...) et d'un certain nombre d'entrepreneurs. Une Association regroupant des partenaires potentiels publics et privés a vu le jour en 2012 pour accompagner la création du dispositif.
Plus largement, un réseau des centres de coworking est en train de voir le jour, action pilotée par la mission « temps », ce qui lui permet d'être un interlocuteur reconnu la démarche Ville intelligente et Durable du Grand Lyon.
Sur le même sujet, des territoires d'emplois situés en périphérie commence à se saisir de la question et à sensibiliser les entreprises. En quelques années, les avancements sont notoires. Il va falloir conduire la réflexion encore plus en avant sur ce sujet, et pourquoi pas engager une sensibilisation auprès d'entreprises volontaires pour étaler leurs horaires de travail. Comme nous sommes tous connectés, on pourrait rêver d'une organisation de travail où aux heures de pointes le salarié travaille chez lui pour rejoindre son entreprise aux heures plus creuses. A explorer ...
Quel bilan ?
Le temps est un sujet transversal par excellence, et il a donc fallu travailler avec de nombreux partenaires externes et internes, élus ou techniques. Il a fallu au début se faire entendre et reconnaître et le fait de travailler sur du concret, en visant la proximité a été un vrai atout. Des projets n'ont pas abouti, telle la mise en place de crèches en gare, du fait d'une gouvernance multipartenariale trop complexe mais après dix ans d'existence, la mission « temps & services innovants » du Grand Lyon a démontré auprès de ses partenaires, sa capacité à aborder des actions avec une approche psychosociale, complémentaire aux approches techniques qui s'appuie sur les usages, les pratiques et les modes de vies.
Sa vraie plus-value a été de pouvoir mettre autour de la table des acteurs qui ne se rencontraient jamais et donc ne pouvait comprendre les logiques de l'autre, ni ses attentes. Par cette mise en concertation, la mission « temps » permet la mise en place d'un processus « gagnant-gagnant » pour une mobilité plus durable qui réponde aux attentes des modes de vies des uns et des autres. Son intégration à la Direction de la
Prospective et du Dialogue Public est un élément favorisant pour agir avec souplesse et agilité dans ses modes de faire. Enfin, dans un contexte de crise des finances publiques, les incubations déployées le sont à moindre cout et peuvent, à défaut de construire des infrastructures lourdes et couteuses, avoir des effets conséquents en terme environnementaux, tout comme en qualité de vie.
18. Propos sur le travail à distance : « Mon bureau, c'est la France »
Lucie Verchère 103 ( * ) , Grand Lyon, Direction de la Prospective et du Dialogue public Chargée de mission « temps et services innovants »
« Mon bureau, c'est la France ! »
1. Un contexte qui a évolué ces 10 dernières années
Un travail se développe dans un espace et sur une durée ; le développement des TIC, et ses conséquences sur le travail à distance revisite ces deux notions, puisque l'espace devient de plus en plus mobile et la durée de travail, évolue, devient flexible. De ce fait, la frontière entre le travail et le hors-travail devient de plus en plus « poreuse ».
On voit ainsi se développer de plus en plus, du télétravail « gris » : dans le train, le soir, le week-end, à 23h03, .. à 3 h du matin.. etc ..
Dans ce contexte, il faut aussi citer les effets de la RTT, avec un recul de 10 ans maintenant, et ses impacts sur la FLEXIBILITÉ du temps de travail, et bien sur le corollaire : la question de l'articulation des temps de vies, et la qualité de vie des salariés.
La question du travail à distance est donc plus que jamais d'actualité. Elle est d'ailleurs ressortie largement en 2010 en lien avec quelques catastrophes : pandémie grippale, météo de crise : neige abondante, pollution majeur, grève générale.. Et paradoxalement, aucune incitation des pouvoirs publics, même si dans les PDU on encourage « ... au covoiturage, à l'autopartage, .. et ... le télétravail ».
Le travail à distance recouvre de nombreux enjeux dont on va parler plus loin, mais aussi des atouts, ou des contraintes dont on va aussi débattre : on n'est pas ici pour donner un propos et une pensée unique !
2. de quoi parle-t-on quand on parle de travail à distance ?
Un peu de terminologie pour différencier des termes souvent utilisés : télétravail, télécentres, smarts-centers, coworking, cotravail, travail à distance, ... :
- le télétravail à domicile, le plus fréquent, que l'on soit salarié dans une entreprise, ou en freelance, le lieu de travail est « déporté » à domicile pour une durée variable, le tout encadré juridiquement ;
- le travail à distance depuis des lieux équipés, les télécentres où des salariés d'entreprises, des auto-entrepreneurs, ou des free-lance, viennent travailler sur ces lieux collectifs et équipés ; la plupart de ces télécentres sont situés en zone rurale ou périurbaine ; certains fonctionnent, d'autres moins ;
- enfin, une forme particulière, plus urbaine, située près de hubs de communication, et destinés à une cible plus mobile, ou des salariés « nomades » viennent se poser. Ce sont des centres de co-working, tels les smart-centers aux Pays Bas, ou la Cantine à Paris ou à Rennes. Dans ces « tiers lieux urbains », on vient se connecter quand on est de passage, avec son portable dans son sac à dos, pour travailler, pour échanger, pour se réunir, ... mais aussi pour faire de l'événementiel, de la promotion et de la communication.
3. Quelques chiffres
Beaucoup de chiffres existent, mais les données sont floues d'autant plus qu'avec le développement des TIC, le télétravail « gris » se développe ;
- pour l'ANDT, Association National pour le Développement du Téletravail (www.anadt.fr) qui a interviewé une centaine télétravailleurs d'origines très variées, ils seraient plus de 2 millions d'actifs en France, soit 8% des actifs, à travailler à distance.
- pour d'autres publications, tel le rapport du Centre d'Analyse Stratégique paru en 2009, 6% des actifs en France pratiquent le télétravail ( contre 25 % aux Pays Bas) ;
- l'étude Gartner cite 7% de télétravailleurs
è Il y a donc nécessité de collecter des données fiables , des enquêtes, des bilans officiels.
è pour l'ANDT, le profil type est féminin, (93 % des répondeuses a l'enquête) mais ne sont que 75 % parmi les salariés, compris entre 30 et 50 ans (60 %).
Leur niveau d'études est élevé : 75% télétravailleurs salariés ; et ils résident plutôt en province 84%.
À mon sens, il faut prendre ces constats avec vigilance, et s'interroger si les femmes ne répondent pas tout simplement plus facilement aux enquêtes ....
è des travailleurs de tous genres : les « nomades » seraient 5 Millions en France, les auto-entrepreneurs, les indépendants, les travailleurs salariés.
è un encadrement juridique (accord national interprofessionnel ANI, de 2005, loi sur le télétravail en juin 2009, mais toujours pas votée par le Sénat).... Il n'y a pas de vide juridique pour le télétravail pour des salariés comme les autres, encadrés par des dispositions claires et réglementées. Mais seulement une vingtaine d'accords ont été signés à ce jour ; mais le débat sur le télétravail est de plus en plus en marche ! L'enquête ANDT précise que 37.5% des salariés ne disposent d'aucun document officiel (59% dans l'enquête Obergo) ; l'enquête ANDT fait apparaître que 62% seulement des personnes interviewées ont un contrat, le reste faisant du télétravail gris.
è du potentiel : mais là aussi les chiffres sont flous et évoquent un potentiel de 30% des actifs en France , cités dans le rapport du CAS, à 50 % de potentiel (OCDE) !
Quelques pratiques réussies dans les grandes entreprises : on peut citer l'Oréal, et le télétravail pour les femmes enceintes, Danone et le télétravail le mercredi matin, Accenture envers la population non-cadres, IBM, HP, ... Et la collectivité publique dans tout ça ?
4. Les enjeux du travail à distance sont nombreux
Les nouvelles formes de travail à distance s'inscrivent dans un cadre social, juridique, organisationnel, culturel ; Les enjeux sont toujours à situer dans un rapport gagnant-gagnant ! !!
• environnemental , via la question de la réduction des déplacements domicile-travail.
Nous avons atteint nos limites et si nous ne faisons rien nos villes seront bientôt asphyxiées ;
o cf. étude ANDT, les temps de transports des télétravailleurs salariés équivalaient 60 à 120 mn ;
o cf. étude ANDT, à quoi profite le temps gagné sur les déplacements ? au travail pour 68 % des télétravailleurs, pour 62 % à la famille ;
o cf. étude Cisco : 60 % du temps gagné sur les déplacements, est consacré au travail, 40 % à la vie privée améliorée.
• issus du Grenelle, aout 2009, les plans climats se développent partout visant à réduire de - 20% les émissions de GES en 2020 ; or des recherches ont montré que si on baisse le trafic sur la route de 3 ou 4 % seulement cela redevient vivable !
• dans beaucoup de territoires se développent des PDIE Plans de déplacements Inter Entreprises, qui devraient intégrer cette dimension plus qu'ils ne le font, d'autant plus qu'un PDIE touche déjà les entreprises dans leur proximité. Exemple, chez
Dexia où la mise en place du télétravail est liée au PDE.
• Enfin coté sécurité routière : 57 % des accidents du travail sont des accidents de la route dans les trajets domicile-travail et professionnels !
• Mais attention : aujourd'hui on manque de données exactes pour vérifier si le travail à distance fait décroitre ou non la distance des déplacements. En effet, certaines études 104 ( * ) font apparaître que ceux qui télétravaillent risquent de partir habiter très loin de leur lieu de travail et de ce fait la distance domicile-travail des jours travaillés est importante et le bilan CO 2 important !! de plus certains télétravailleurs multiplient les déplacements de proximité ! ex chez British Telecom -450 kms pour se rendre au travail, + 96 kms dans la proximité, donc le solde est positif ! Mais il faut être vigilant car en la matière rien n'est ni tout noir, ni tout blanc ! Cela démontre la nécessité d'avoir des mesures ; pourquoi pas via les EMD (Enquêtes Ménages Déplacements) qui pourraient intégrer cette question ?
• social : moins de stress, une meilleure articulation des temps de vies pour les télétravailleurs ; Ainsi dans l'article Futuribles 105 ( * ) « les entreprises au défi de l'ubiquité », les salariés CISCO qui disent « être plus productif, plus heureux à 66% » et 80 % avoir accru leur qualité de vie !
On peut également citer Jerome Ballarin (président de l'observatoire de la parentalité) : « les salariés bien dans leur peau, détendus, sont un levier de performance pour l'entreprise ; les employés les plus créatifs et les plus innovants sont ceux qui ont une vie épanouie. Il faut repenser l'organisation du travail, favoriser le télétravail, arrêter ces réunions aux horaires impossibles. Avec l'arrivée des générations Y, les salariés sont de plus en plus demandeurs d'équilibre de leurs vies. »
On retrouve ce propos aussi dans l'article de Futuribles « les entreprises au défi de l'ubiquité » : Cisco 106 ( * ) a interrogé dans 13 pays, dont la France, 1 300 salariés du secteur informatique : les 2/3 optent pour un salaire moindre, mais avec des conditions de travail plus flexibles.
Pour les entreprises, cela peut aussi s'intégrer dans une démarche égalité Hommes-Femmes, même si tous les experts sont d'accord : on ne télétravaille pas en gardant bébé, que l'on soit homme ou femme !
MAIS, attention à l'isolement, la perte de lien social : on ne télétravaille pas 5 J/5 !
• productivité : pour tous, le travail à distance c'est plus d'efficacité et donc une meilleure compétitivité de l'entreprise : (ex étude Sunmicro system = 60% du temps de déplacement économisé est consacré au travail).
MAIS, attention à la laisse informatique ! Surtout pour les cadres qui ne s'arrêtent plus de travailler ! D'après Monique Boutrand, de la CFDT, les télétravailleurs travaillent plus qu'on ne leur demande, mais sont satisfaits ! Même si l'enquête ANDT, pose la question : « parvenez-vous bien à séparer vos 2 vies : OUI à 94 % » est plutôt favorable, de nombreuses études 107 ( * ) montrent que la pression liée aux smartphones et mails à outrance s'est accrue considérablement et entraine un télétravail « gris » de plus en plus : « 80% qui ont un smartphone privé, l'emploient professionnellement chez eux, ou dans les transports » ;
Selon l'étude Editions Tissot 108 ( * ) , les exceptions "ordinaires" au temps de travail légal se multiplient puisque les salariés continuent à travailler chez eux après une journée de travail.
Ainsi, 50% travaillent pendant leur week-end, 38% pendant leur RTT, 24% durant leurs trajets et 26% pendant leur arrêt maladie. Déjà le téléphone mobile a fait éclater des frontières et internet amplifie le mouvement.
L'organisation du travail n'en sortira pas indemne, ni la perception que les travailleurs s'en font.
Un des freins souvent évoqué est celui du déroulement de carrière, qui pourrait être entravé quand on fait du télétravail ! « Des sondages ont suggéré que beaucoup d'employés craignent qu'en sortant du bureau, ils sortent aussi de l'esprit de leurs supérieurs et restent à l'écart d'une promotion 109 ( * ) , avec le risque que si le travail est fait à la maison, alors il peut aussi être fait depuis l'étranger ».
L'étude Cisco montre pourtant que malgré cette crainte, 50 % des cadres en recherche d'emploi, sont quand même enclins à prendre une offre d'emploi en commuting ! Et rappelons-le, il faut télétravailler raisonnablement ! Une moyenne de 3J /2J parait être la bonne norme.
• économique : en favorisant l'accès à l'emploi (personnes handicapées, auto-entrepreneurs, etc.., mais aussi l'allégement des couts (foncier), ex. chez Accenture, où la mise en télétravail de 50% du personnel a permis d'économiser 100 postes de travail ou comme HP Grenoble qui a loué la ½ de ses locaux. Le travail à distance peut aussi permettre de recruter des profils très spécifiques mais qui ne souhaitent pas forcément déménager.
L'étude Cisco donne comme précisions une économie de carburant de 10.3 M$ et un gain pour Cisco de 277 M$ dû au télétravail, soit 5% des bénéfices annuels !
Mais attention plus que toutes, cette dimension ne doit pas être la seule motivation.
• managérial : avec de nouvelles formes de management en entreprise qui s'appuient sur du management par objectifs, par projets et qui développent l'autonomie, la responsabilisation de l'individu. Cela sous-entend aussi de réinventer le métier de manager ! Et ces nouvelles formes de management sont loin d'être acquises ; cette question semble être le vrai frein au développement de cette nouvelle forme de travail.
Avec la mise en place des télécentres, de nouveaux enjeux apparaissent :
• créativité et lien social : communautés de savoir, de savoir-faire (cf. Silicon Valley)
• revitalisation des centres periurbains ou ruraux, puisqu'on ne réussit toujours pas à réduire l'étalement urbain !
Dans ces enjeux, on voit donc émerger des paradoxes ! Le travail à distance s'inscrit complètement dans la démarche développement durable selon ses 3 aspects, en promouvant du gagnant pour chacun : entreprises, individus, territoires et collectivités.
Mais attention il y a des points de vigilance à avoir ! Pour ne pas tomber dans les dérives, et l'explosion complète de la porosité entre les univers privés et professionnels.
L'accroissement de la flexibilité du travail, de la charge mentale, et du développement des TIC provoquent un no man's land ou les « télétravailleurs » sont livrés à eux-mêmes sans aucun encadrement social.
Alors, pourquoi en France, le travail à distance ne prend-il pas ? Tous sont d'accord, l es freins sont culturels, plus que techniques ou financiers ! C'est aussi ce que confirme le rapport du Centre d'Analyse Stratégique en novembre 2009, qui conclut par « un encadrement en retard, à la fois sur les outils techniques et les styles de management ».
Jack Nilles 110 ( * ) , à l'origine du concept de « commuting », affirme lui, que ça ne marche pas, parce que le télétravail engendre ou déclenche une révolution sociale dans l'organisation des entreprises et ceci est toujours effrayant pour les dirigeants.
Le débat n'est plus entre travail dans les murs ou hors-murs mais acceptation ou négation d'une réalité qui est en train de s'imposer parce qu'on est tous connectés quelque part , où que nous soyons, et que nous avons pris l'habitude d'être constamment interconnectés avec autrui, et que cela favorise le développement de l'ubiquité 111 ( * ) !
5. la problématique sur le Grand Lyon
La réflexion sur l'articulation des temps, le développement d'expérimentations de services innovants, et les expérimentations sur la mobilité durable ont conduit naturellement une réflexion sur les tiers lieux .
Implanter un télécentre, cela ne se décrète pas ! on peut se rappeler ici les échecs des expérimentations DATAR parachutées sur certains territoires !
La réussite se construit à partir d'un travail AVEC les entreprises, en partant de leurs besoins et de leurs attentes précises ! C'est la spécificité du travail engagé par le Grand Lyon avec la municipalité de Charly.
- En partant d'une commande de la municipalité, qui dans le cadre d'une réhabilitation d'une maison bourgeoise en centre-ville souhaite mettre en place un centre de télétravail. Un tel équipement permettrait aux salariés des communes environnantes de faire du travail à distance, un ou plusieurs jours par semaine et ainsi réduire leur mobilité.
- Le travail a consisté à réaliser un benchmark pour connaître le concept, l'existant ;
- Une étude de faisabilité avec une enquête-test auprès de 800 entreprises du territoire : 109 réponses et 40 potentiellement intéressées.
Plus d'infos sur :
http://www.espacedestemps.grandlyon.com/_Services_aux_salaries/salaries.htm
19. Présentation des actions, enjeux et résultats de la mission « temps urbains » de la ville de Dijon
Conseil municipal de la ville de Dijon
Séance du 24 juin 2013
Rapport présenté au nom de la commission de la citoyenneté et de la démocratie locale
Objet du rapport : Actions, enjeux et résultats de la mission "temps urbains"
Mesdames, Messieurs,
Depuis 2008, la ville de Dijon a choisi de prendre en considération les préoccupations liées aux politiques temporelles et d'en faire un axe structurant des actions portées par la Municipalité.
Les politiques temporelles consistent à analyser, tout à la fois, l'organisation spatiale (urbanistique) et temporelle de la ville, en fonction de l'usage individuel et collectif de l'espace et du temps.
Il s'agit de construire collectivement un fonctionnement temporel qui convienne aux besoins de tous ; répondre aux besoins individuels tout en conservant le sens du collectif, du bien vivre ensemble au service d'un développement plus soutenable.
La prise en compte des temporalités passe par des initiatives visant à favoriser la conciliation entre vie au travail et vie personnelle, l'accessibilité des lieux, des espaces et des services, qui constituent les cadres de la vie quotidienne.
I. OBJET DE LA MISSION « TEMPS URBAINS »
La mission « temps urbains » fait émerger les besoins et problématiques liés aux politiques temporelles en identifiant des pistes d'actions. Elle est ensuite chargée de mettre en oeuvre et d'accompagner les démarches temporelles visant à faciliter la gestion quotidienne des différents temps de vie de chacun tout en recentrant l'usager au coeur des pratiques.
Les axes de travail de la mission « temps urbains » sont les suivants :
• articulation entre vie familiale, vie personnelle et vie professionnelle,
• articulation des temps de loisirs et des temps de repos,
• adaptation des ouvertures et offres proposées par les services accueillant du public,
• prise en compte des temporalités dans l'aménagement urbain.
De nombreux dossiers ont été élaborés, accompagnés et mis en oeuvre ces cinq dernières années par une organisation active de la mission « temps urbains ».
II. PROJETS DE LA MISSION "TEMPS URBAINS"
Afin d'illustrer les actions de la mission « temps urbains », citons quelques-uns de ces projets, par axe de travail :
1. Articulation entre vie familiale, vie personnelle et vie professionnelle
a. L'accueil des enfants en pause méridienne
Un des dispositifs emblématiques de cette thématique est certainement « l'accueil du midi », système souple et adapté aux familles actives.
Il s'agit de deux temps d'accueil périscolaire supplémentaires sur la pause méridienne (de 12h à 12h30 et de 13h15 à 13h50) donnant la possibilité aux parents de chercher leur(s) enfant(s) à l'école jusqu'à 12h30 ou le déposera partir de 13h15.
Les parents aimeraient parfois se donner le temps de déjeuner avec leurs enfants. Malheureusement ils quittent leur lieu de travail bien après la sortie de classe. La mission « temps urbains » et le pôle réussite éducative ont mis au point une solution : les enfants sont gardés jusqu'à ce qu'on puisse venir les chercher (ou les ramener avant la reprise des cours) sans obligation de déjeuner à l'école. Un tel service offre un gain de souplesse, une amélioration de l'articulation entre la vie professionnelle et la vie familiale.
b. L'extension de l'horaire de fermeture du marché des Halles
Cette action est le fruit d'une enquête réalisée auprès des consommateurs, des commerçants des Halles et des boutiques alentours ainsi que des personnes qui fréquentent le centre-ville.
A l'appui des résultats et en concertation avec les commerçants du marché des Halles, les horaires du marché sont étendus jusqu'à 13h00 du printemps à l'automne, et ce depuis 2012.
Ce projet a été mené en collaboration avec le service commerce.
2. Articulation des temps de loisirs et du temps de repos
La mission « temps urbains » a été à l'initiative de réflexions et d'actions sur le temps de la nuit.
Une charte pour la qualité de la vie nocturne, Harmonuits, qui vise à renforcer les actions en matière de lutte contre les nuisances nocturnes, pour des nuits plus douces à vivre, a été signée en 2009 par la Ville de Dijon, avec le soutien de l'État, en étroite collaboration avec la CCI Côte-d'Or et l'UMIH Côte-d'Or.
Ce dispositif multipartenarial est porté par la mission « temps urbains », en lien avec les services municipaux Dijon Ville Santé et Tranquillité Publique. Harmonuits est une marque déposée.
Deux comités ont été créés pour le suivi de l'application de la charte. D'une part, le comité de labellisation décerne le label pour une durée d'un an renouvelable et assure le suivi. D'autre part, le comité de médiation a pour objectif le règlement des conflits avant l'intervention de mesures policières ou administratives. Les élus de quartier peuvent y participer et se faire le relai des demandes des habitants.
32 établissements de nuit, 14 associations étudiantes et 1 école, l'école supérieure de commerce Dijon-Bourgogne, sont aujourd'hui labellisés, signataires de la charte Harmonuits. Le volet prévention est particulièrement développé dans le cadre du partenariat avec les responsables étudiants. Ceux-ci mettent en place des actions de sensibilisation pendant leurs événements ; stands de prévention, dispositifs conducteurs sobres, promotion des boissons sans alcool...
Pour les accompagner dans cette démarche, actions de sensibilisation grand public, temps d'échange et journées de formation sont organisés par la Ville de Dijon, conjointement avec la CCI Côte-d'Or.
3. Adaptation des ouvertures et offres proposées par les services accueillant du public
Afin de faciliter l'accès des bibliothèques, au même titre que la gratuité (effective depuis le 1er avril 2013), de développer leur fréquentation et d'élargir les publics, des actions sur les horaires d'ouverture ont été entreprises par la mission « temps urbains » et la direction de la culture.
Après un travail engagé depuis 2010, la Nef, place du théâtre, est aujourd'hui ouverte en continu de 11h à 18h, du mardi au samedi (10h-17h le samedi). Cette action propose ainsi une alternative à l'offre commerciale du centre-ville en permettant aux actifs de profiter de cet établissement pendant leur pause méridienne.
Son évaluation, à partir d'éléments statistiques et des remarques de lecteurs, a été enrichie par une enquête dont les résultats ont révélé une véritable attente vis à vis de l'ouverture proposée pendant les vacances scolaires.
Dès lors, un dossier d'étude a été élaboré à ce sujet par la mission "temps urbains" à partir de l'observation des usages du public dijonnais, de l'analyse des pratiques d'autres collectivités et des éléments relevés lors de la concertation mise en place avec le personnel des bibliothèques par l'intermédiaire des responsables de site.
Les bibliothèques fonctionnant à ce jour sur un principe d'alternance, il était nécessaire de raisonner sur une notion de réseau, en prenant en compte l'ensemble des bibliothèques municipales dijonnaises.
A partir de cet été, les bibliothèques seront ouvertes au public du mardi au vendredi, avec un horaire identique. Les trois bibliothèques du centre-ville, la Nef, le centre-ville jeunesse et la bibliothèque patrimoniale et d'étude seront également ouvertes le samedi toute la journée.
Ces réflexions ont aussi été l'occasion de se pencher sur les stations du bibliobus. Depuis 2012, tout l'été, le bibliobus est installé au lac Kir, à Dijon Plage, avec une offre de lecture adaptée.
4. Prise en compte des temporalités dans l'aménagement urbain
a) Inclure le temps au sein du PADD
En 2009, à l'occasion de l'élaboration de l'EcoPLU, la mission "temps urbains" s'est rapprochée des services de planification du Grand Dijon pour inscrire le temps dans cet outil. En effet, le Plan Local d'Urbanisme (PLU) agit sur l'organisation de la ville et ses fonctions urbaines (habiter, travailler, se détendre, etc).
Aujourd'hui, l'EcoPLU, à travers son Projet d'Aménagement et de Développement Durable (PADD) s'attache à prendre en compte les temporalités dans l'objectif d'optimiser la qualité de vie des habitants, de rendre la ville plus accessible et plus agréable à vivre.
3 orientations du PADD comportent ainsi une entrée temporelle : la ville évolutive, la ville mobile et la ville mosaïque.
Les politiques temporelles s'articulent autour de 4 axes : les usages multiples ou le partage des usages, la mixité des fonctions urbaines ou la multipolarité, la valorisation des lieux d'interconnexion et l'intermodalité.
Dijon a été la première ville à intégrer des orientations temporelles dans un document de planification.
b. La concertation, un outil indispensable à la prise en compte des temporalités
Au-delà de l'urbanisme temporel, il convient de concevoir des équipements publics qui puissent convenir à plusieurs usages mais qui puissent aussi évoluer en fonction des besoins. Ce principe reprend la notion de durabilité.
Pour qu'un projet urbain puisse être durable, celui-ci doit en effet tenir compte de dimensions sociologiques, anthropologiques. Sa qualité réside dans sa capacité à associer les diverses connaissances, y compris celles des habitants, des usagers de la ville.
Dans cette optique, la mission "temps urbains" et le service démocratie locale se sont réunis pour la réalisation d'une étude sur l'implantation de structures de repos au centre-ville de Dijon.
L'idée, née d'une demande de la commission de quartier centre-ville, est d'associer habitants, élus et techniciens dans le cadre d'une analyse partagée qui permet d'implanter des aménagements plus adaptés aux besoins, tout en prévenant d'éventuelles gênes auprès des riverains. S'intéresser au partage des usages c'est aussi permettre de limiter les conflits d'usage.
L'étude a aussi intégré les propositions formulées par les habitants durant les ateliers participatifs de la démarche « Dijon Ville Amie des Aînés » et par les membres du Conseil municipal d'enfants.
L'une des actions retenues, l'implantation d'un banc circulaire au chevet de l'église Notre-Dame, sera modulable en fonction des besoins. Composé de 3 éléments, ceux-ci pourront être retirés ou disposés de façon différente lors des manifestations organisées dans cet espace. Cette structure s'intègre aux cheminements piétons en proposant une halte sur le chemin du marché et un point de vue sur les bâtiments historiques, dans le cadre du « parcours touristique de la Chouette ».
III. ENJEUX ET RÉSULTATS DE LA MISSION "TEMPS URBAINS"
La mission "temps urbains" a permis de faire émerger les besoins et problématiques liés aux politiques temporelles en identifiant des pistes d'actions.
Elle a suscité et fédéré des partenariats, en générant un dialogue, une transversalité entre les différents acteurs. Des éléments d'expertise ont été apportés afin d'accompagner les démarches temporelles mises en oeuvre en interne et à l'échelle du territoire.
Si l'ensemble des axes de travail a été balayé, il semble que certains restent à approfondir. C'est notamment le cas de l'adaptation des services accueillant du public ou encore de l'articulation entre vie familiale, vie personnelle et vie professionnelle.
En ce qui concerne l'aménagement urbain, les commissions de quartier se montrent particulièrement intéressées par le développement de projets participatifs. Un lien est par ailleurs à développer entre ces projets et l'observatoire de l'âge afin de favoriser la mobilité des séniors.
Si vous suivez l'avis favorable de votre commission de la citoyenneté et de la démocratie locale, je vous demanderai, Mesdames, Messieurs, de bien vouloir prendre acte de l'intégration de ces réflexions au sein des projets municipaux.
20. Un exemple d'amélioration des conditions de travail par l'aménagement du temps, Rennes
Conférence de Presse du 30 avril 2004
• Agents d'entretien
• Équipe projet : Monsieur Haigron
Monsieur Porée
Monsieur Leloutre
• Comité de pilotage : Monsieur Suignard
Madame David
Madame Touchard
A) Cas concret : les agents d'entretien de certains locaux municipaux, soit 50 agents
- bien souvent à temps non complet (2/3 de temps),
- dans une situation peu motivante (il s'agit d'agents qui ont dû quitter d'autres services et être reclassés, présentant des difficultés relationnelles ou agents nouvellement recrutés qui commencent par l'entretien des bureaux avant d'avoir une promotion professionnelle).
- ils travaillent sur 47 sites,
- les horaires 7h00 - 9h00 ; 16h00 - 19h30 (= 2/3 temps),
- parfois ces agents vont en renfort le midi dans les restaurants d'enfants.
Donc grande parcellisation du temps :
Travail de 7h00 à 9h00, libre de 9h00 à 11h00, travail de 11 h00 à 13h00, libre de 13h00 à 16h00, travail de 16h00 à 19h30.
B) Analyse de la situation
1 - visite de tous les sites pour comprendre : ex : connaître la nature des sols ;
2 - réception de chaque agent (un par un) : pour connaître ses difficultés, ses attentes, sa situation personnelle (enfant, transport...) ;
3 - rencontre des chefs de services : pour les informer, les questionner (ex : les agents peuvent-ils intervenir durant votre travail) ;
4 - expérimentation de nouveaux horaires sur KLEBER : 2 500 m2, refaits à neuf, on a expliqué qu'il était possible d'intervenir pendant le temps de travail des secrétaires, que certaines d'entre-elles étaient à temps partiel, que les salles de réunion n'étaient pas utilisées constamment, qu'il y avait double sanitaire...
Un planning d'occupation sur l'année, la semaine, peut être fait pour dégager des heures au cours desquelles les agents d'entretien peuvent intervenir sans problème.
Une communication directe agents de bureaux - agents de services informe ceux-ci des disponibilités, rapproche les uns des autres. Les agents de bureaux prêtent attention à leur comportement pour faciliter le travail de ménage.
Il s'ensuit un respect des agents d'entretien que l'on connaît mieux.
Une auto-organisation se met en place.
C) A partir de l'expérimentation on va voir les autres chefs de service.
Résultats :
1 - on met en place deux horaires cibles :
10h45-18h45 on évite le morcellement 07h30 - 15h30 |
2 - les personnes travaillent deux par deux :
• ceci facilite les remplacements : si une personne est absente, la seconde la remplace pour un service minimum défini,
• sentiment de sécurité,
• plus grande motivation à deux,
• entraînement réciproque.
3 - s'il y a un déplacement pour aller d'un site à l'autre, le temps de trajet est inclus dans le temps de travail.
L'agent peut percevoir une indemnité forfaitaire de frais de déplacement (alignement sur les aides ménagères).
4 - nous avons proposé à tous les agents un régime à temps complet ce qui a entraîné une modification substantielle. Avec le régime à temps complet, les agents ne relèvent plus du régime général de la Sécurité Sociale (ce qu'est le régime de temps non complet) mais de la Caisse Nationale de Retraite des Agents des Collectivités Territoriales.
Le régime CNRACL est plus intéressant :
• meilleure protection sociale,
• déroulement de carrière plus intéressant.
Preuve :
Si vous êtes au régime général et que vous êtes malade vous conservez un plein traitement trois mois puis vous passez à la moitié après.
Si vous êtes à la CNRACL, vous conservez un plein traitement pendant trois ans.
Précision : à temps complet, vous pouvez travailler à temps partiel en conservant le régime à temps complet.
5 - Résultats :
Avant nous avions 50 personnes dont un encadrement. Maintenant nous avons 41 personnes dont trois encadrements. Les neuf autres personnes sont soit parties à la retraite, soit dans d'autres services.
L'absentéisme a baissé de 45 % sur les quatre premiers mois.
La productivité est passé de 150 m2 par personne à 175m² (privé : 200m²)
21. Action hyper pointes métro / temps des étudiants112 ( * ) : expérimentation d'une modification des horaires de début et de fin à l'Université de Haute Bretagne
I) Le contexte
Le succès du métro rennais a conduit à une situation de saturation de celui-ci aux heures de pointe en semaine, du fait notamment de l'affluence des voyageurs lycéens et étudiants utilisant la ligne A du métro, aux stations "Pontchaillou" et "Villejean-Université" le matin.
Le principal créneau critique se situait entre 7h40 et 8h le matin principalement les mardis, mercredis et jeudis, de mi-septembre à mi-mai approximativement.
En 2010, cette pointe atteint un seuil critique, supérieur à 180 usagers / rame. Elle affecte le niveau, de confort acceptable dans le métro qui, selon les données constructeur, est fixé à 160 usagers / rame. Cette forte affluence génère un allongement des temps de déplacement dû à une augmentation du délai d'attente ainsi que des problèmes d'évacuation du quai. Elle entraîne également un coût (prix surtaxés de l'électricité) et diminue la performance du service.
II / Des réponses techniques
Le premier niveau de réponse à ce problème a été technique : le Conseil décide, en 2010, l'achat de six nouvelles rames livrées en 2012, devant permettre d'augmenter la fréquence en heure de pointe à T30 environ. La reconfiguration des places assises dans les rames pour gagner de la place est également réalisée, portant, le nombre maximum d'usagers de 162 à 175. Ces deux opérations regroupées représentent pour la collectivité un coût global de 35 M € et une augmentation de la capacité de transport estimée à 30 %.
Une autre mesure, plus lourde, est programmée pour 2020 : la création d'un terminus « arrière-gare » à J.F.Kennedy, qui permettra encore d'augmenter le rythme des rames en circulation, sous réserve de l'acquisition d'autres nouvelles rames.
L'ensemble de ces mesures trouve cependant ses limites dans le constat d'une augmentation constante de la fréquentation du métro, passée d'environ 75 000 voyageurs par jour en 2003 à près de 120 000 voyageurs en 2012 (soit +6 % annuel en moyenne). Cette fréquentation devrait connaître un nouveau rebond au moment de l'ouverture de la seconde ligne de métro, prévue pour 2018.
III) Ailler plus loin : le projet
Le projet émerge alors d'aborder la question d'une façon complémentaire. Il ne s'agit plus seulement d'agir sur le réseau de transport lui-même mais sur ses utilisateurs . L'hypothèse est avancée que certains organismes contribuent involontairement, par la définition de leurs horaires de début et de fin, à la saturation des transports en commun et notamment du métro. L'objectif est alors de dépasser les solutions techniques en faisant appel à la conscience citoyenne des responsables des organismes générant des flux dans le métro à l'heure de pointe, afin qu'une désynchronisation des activités puisse être mise en place.
IV) Propositions de décalage des horaires
En 2010, une démarche de concertation, pilotée par le Bureau des temps est lancée. Elle réunit les principaux établissements ayant un impact sur l'affluence dans le métro : les Universités Rennes 1 et Rennes 2, le C.H.U de Rennes, deux lycées du secteur (Coëtlogon et Pontchaillou), le CROUS et les mutuelles étudiantes (LMDE et SMEBA).
Les éléments fournis par ces participants, d'une part, une étude de fréquentation réalisée dans et à la sortie du métro Villejean-Université d'autre part, montrent que les entrées et sorties de l'Université Rennes 2, qui comptait 18 000 étudiants en 2010 (plus de 20 450 en 2012), est bien le « générateur de flux» principal à l'origine de l'heure de pointe du matin. Le lissage de celui-ci passe donc inévitablement par un aménagement des horaires de ['Université.
Plusieurs propositions de décalage des horaires de l'Université sont alors successivement étudiées :
1 / décalage global des cours de tous les étudiants de 815, à 8h30 ou 8h00 ;
2/ scinder l'effectif étudiant en deux groupes, selon un découpage par filières.
Ces deux propositions sont abandonnées: la première revient à ajouter le flux engendré par l'Université Rennes 2 à celui généré par un lycée voisin, sans amélioration de la situation globale, la seconde bouscule l'organisation des modules inter-filières (informatique, méthodologie, langues...).
Face à ces deux abandons, le report de la démarche, jusque-là envisagée pour la rentrée de septembre 2011 est alors décidé.
V) Le projet validé : Y expérimentation lancée en septembre 2012
Face à ces constats, un pas est franchi par l'Université Rennes 2 qui accepte le principe de scinder l'effectif étudiants en deux groupes, avec deux horaires de cours différents, à titre expérimental , pour une période d'un an (septembre 2012 - septembre 2013) :
• un premier groupe à 8h15 ;
• un second groupe à 8h30.
Ce scénario, présenté en groupe de travail au Conseil Étudiant de la Vie Universitaire (CEVU) le 10 juin 2011, réexaminé le 7 octobre 2011, a été voté le 10 janvier 2012 et définitivement validé en Conseil d'administration de l'Université dans les jours qui suivent.
En 2012, l'Université Rennes 2 compte au total 20 450 étudiants répartis sur 4 niveaux, Un découplage par niveaux d'enseignement est retenu pour 2012/2013.
Deux groupes sont formés :
- 1er groupe - début 8h15 - Licence 3 et Master 1, 6317 étudiants en 2012 : 8h15 - 10h15 ; 10h45 - 12h45 (pause méridienne) 13h45 - 15h45 ; 16h00 - 18h00 ; 18h15 -20h15
- 2 nd groupe - début 8h30 - Licence 1 et 2,10340 étudiants en 2012 : 8h30 - 10h30 ; 10h45 - 12h45 (pause méridienne) 13h45 - 15h45 ; 16h00- 18h00 ; 18h15-20h15.
Ø Effets attendus :
- étalement de la pointe du matin ;
- allongement de la durée de la pause du matin pour L3 et M1 ;
- dès 10h45, retour à un horaire commun pour l'ensemble des étudiants ;
- une fin des cours de fin de journée plus tardive, mais ne concernant qu'un faible nombre d'étudiants (20h15 au lieu de20h actuellement).
Une charte destinée à formaliser l'engagement de l'ensemble des participants au groupe de travail de ne pas modifier leurs propres horaires de fonctionnement pour une période d'un an renouvelable, est validée et signée le 21 septembre 2012 (Université Rennes 1 et 2, CHU, les deux lycées Coëtlogon et Victor et Hélène Basch, le CROUS, les mutuelles étudiantes LMDE et SMEBA, Rennes Métropole).
VI) Résultats
Impact du décalage de Rennes 2 ; Lissage de la pointe
L'évaluation de l'expérimentation, établie par le prestataire de transport Kéolis à partir des données billettiques (validations en entrée dans le métro) et de comptages et observations sur le terrain (semaine 46), confirment :
- Un écrêtement de l'heure de pointe du matin (7h40 - 8h00) de 5 % en moyenne, le flux se reportant sur la tranche horaire 8h 15 principalement ;
- Une amélioration du confort et de la sécurité ;
- Une baisse de la charge moyenne des rames : -17 % à la station Pontchaillou ;
- Une suppression de la saturation de l'escalier de sortie à la station Villejean Université aux alentours de 8h.
Les principaux points noirs du métro ont donc été résolus.
Ces résultats ont été obtenus dans un contexte d'augmentation significative de la fréquentation du métro :
+ 6 % de 7h40 et 8h00, contre 2,7 % de fréquentation globale du métro. Cette augmentation s'avère particulièrement marquée en ce qui concerne la population étudiante (+ 3,3%) ;
L'université se dit également satisfaite de cette modification et note l'amélioration du niveau de confort dans les rames.
Lors du Conseil Étudiant de la Vie Universitaire (CEVU) du 1/02/2013 la reconduction de la modification des horaires a été validée sans limite de temps.
Sélectionnée parmi les dix finalistes des trophées SNCF, cette expérimentation a été remarquée par la Direction de la SNCF-Transilien, qui en préconise l'extension pour décongestionner les rames des trains et RER bondés. .
Elle ouvre également le débat sur la question de la mise en place d'incitations financières accordées aux entreprises qui accepteraient de reconsidérer leurs horaires pour agir sur les flux des transports en commun, notamment par l'effet d'une ristourne sur le versement transport.
Elle a par ailleurs bénéficié - et continue de bénéficier - d'une couverture médiatique locale nationale exceptionnelle (exemple : Les échos, Libération, le Point, Le télégramme, France 3, BFM, Radio France Armorique, La Gazette des communes, 20 Minutes, Ouest France, le Mensuel de Rennes...
Sur le territoire de Rennes Métropole, il-est envisagé de développer d'autres actions pour favoriser l'étalement des hyperpointes de déplacement, en particulier à l'abord des zones d'activité, et ce, en lien avec les plans de déplacement d'entreprise accompagnés par le Conseil en mobilité de Rennes Métropole.
22. Les politiques temporelles comme thème de campagne à Paris
« Lancer la révolution des horaires » : programme électoral de Mme Nathalie Kosciusko-Morizet.
« Je donnerai à chaque Parisien la liberté de vivre à son rythme »
9h-17h, ce n'est plus le rythme de vie des Parisiens. Le temps passé dans les transports, les contraintes professionnelles, ou, tout simplement, les aléas de la vie moderne ont considérablement allongé les journées de la plupart d'entre nous. Un salarié parisien sur trois a des horaires de travail décalés en soirée ou le week-end.
La ville doit s'adapter à ces nouveaux rythmes. Il n'est pas normal que la plupart des infrastructures municipales ferment leurs portes entre 18 et 19h ou que chaque arrondissement, parfois chaque service municipal, décide de ses propres horaires. Courir pour récupérer un enfant à la crèche avant 18 heures, trouver porte close à la piscine de son quartier ou ne pas pouvoir emprunter un livre à la bibliothèque municipale pendant tout l'été est non seulement aberrant, c'est une source de stress supplémentaire et un affront aux contribuables qui financent ces services publics. Nous proposons que la ville s'adapte aux nouveaux modes de vie des Parisiens en lançant la révolution des horaires.
1. Étendre les horaires d'ouverture des crèches
Aujourd'hui, les parents doivent récupérer leurs enfants avant 18h. En théorie, les crèches municipales ferment à 18h30, mais dans les faits les parents sont obligés de venir chercher leurs enfants à 18h au plus tard. Ceux qui le peuvent ont recours à une nounou, les autres doivent quitter leur travail plus tôt.
Ø Fixer l'heure de fermeture effective des crèches à 19h30
Ø Harmoniser les horaires d'ouverture des écoles le matin avec ceux des crèches
Ø Développer une offre associative de crèches ouvertes de 7 à 22h, offrant une solution aux parents qui partent très tôt le matin au travail ou rentrent tard le soir.
Ø Encourager le développement des crèches d'entreprises à proximité du lieu de travail des parents
Ø Créer un service de « crèche de secours »
2. Unifier les horaires des équipements culturels et sportifs
Sur 79 bibliothèques, médiathèques et centres de documentation, 16 sont complètement fermés pendant l'été... Et 2 seulement restent accessibles après 19h. Quant aux 38 piscines municipales, bien malin celui qui s'y retrouve dans leurs horaires : chacune a les siens ! Par exemple, seule une vingtaine ouvrent après 20h, et encore, parfois un jour par semaine. Enfin, les trop nombreuses fermetures exaspèrent les nageurs.
Le saviez-vous ? Baignade interdite pendant les vacances : Pendant les vacances de printemps 2013, 40 % des piscines municipales étaient fermées pour travaux. L'été dernier, 7 bassins étaient encore fermés. |
Ø Dans chaque arrondissement, une bibliothèque ouverte au moins deux soirs par semaine jusqu'à 21h
Ø Au moins 1 piscine ouverte dans chaque arrondissement jusqu'à 22h chaque soir de la semaine
3. Une vraie nocturne par semaine dans les mairies d'arrondissement
Les mairies d'arrondissement ouvrent aujourd'hui de 8h30 à 17h en semaine, sauf le jeudi où elles font nocturne jusqu'à... 19h30 ! Le samedi, seul le service d'état-civil ouvre de 9h à 12h30.
Ø Ouvrir les mairies d'arrondissement une fois par semaine jusqu'à 21h
Nous ouvrirons également tous les services à la population le samedi matin, en contrepartie d'une fermeture le lundi matin.
Ø Permettre de faire ses démarches dans tous les arrondissements.
Les Parisiens doivent aussi pouvoir accomplir dans n'importe quelle mairie d'arrondissement toutes les démarches simples de la vie courante, telles que les inscriptions à l'école ou à la crèche. Cela permettra d'effectuer ces formalités dans une mairie proche de son lieu de travail.
4. Faire rouler le métro en semaine jusqu'à 2h du matin et toute la nuit le week-end
Les transports publics s'arrêtent trop tôt. Le métro parisien ferme en moyenne à 1h du matin en semaine et à 2h le week-end. Un tiers des travailleurs de nuit se retrouvent dans une situation difficile du fait de la précarité de leur emploi souvent faiblement rémunéré, d'horaires décalés et variables, et de l'éloignement de leur lieu de travail. Quant aux bus, la fréquence diminue fortement après 21h et les usagers doivent faire face à de nombreuses irrégularités pendant le service.
Ø Faire fonctionner le métro jusqu'à 2 heures du matin en semaine
Ø Faire circuler le métro toute la nuit le vendredi et le samedi,
Nous commencerons par les lignes automatiques.
Ø Renforcer le réseau nocturne de bus Noctilien et améliorer sa régularité
Le saviez-vous ? 1 actif parisien sur 2 travaille régulièrement entre 20h et minuit. |
5. Ouvrir les magasins le soir et le dimanche
Les magasins ne sont pas autorisés à ouvrir le dimanche, sauf trop rares exceptions. Aujourd'hui, les Parisiens qui travaillent ne peuvent faire leurs courses que le samedi, tandis que les touristes n'hésitent plus à prendre l'Eurostar pour aller faire leur shopping à Londres : le manque à gagner pour l'emploi à Paris est considérable.
Ø Étendre le périmètre des zones touristiques
Cette extension permettra aux commerces de travailler le dimanche, en particulier la zone Opéra/Grands Magasins et le quartier Elysée (Montaigne, Faubourg Saint-Honoré)/Vendôme.
Ø Développer au cas par cas l'ouverture le dimanche dans les zones plus ciblées
Ces zones seront par exemple Montmartre, Bercy Village ou le quartier asiatique dans le 13e arrondissement.
Ø Ouvrir le dimanche dans tous les quartiers où les commerçants en feront la demande.
6. Développer l'offre de marchés
Les marchés sont encore aujourd'hui inaccessibles à de nombreux Parisiens. Non pas qu'il n'y en ait pas assez à Paris (la ville en compte 93, dont les marchés aux puces), mais parce que leurs horaires les rendent inaccessibles à beaucoup en semaine.
Ø Consulter les Parisiens, quartier par quartier pour développer, en fonction de leurs besoins, les marchés le soir en semaine.
23. « Et si on ouvrait davantage les bibliothèques? », Ouest-France le 10 février 2014
Article d'Alice Adéjès. -
En France, la plupart des bibliothèques n'ouvrent que 40 heures par semaine. Trop peu pour en faire de hauts lieux de culture et de rencontres, estiment les signataires d'une pétition lancée par l'association Bibliothèques sans frontières. Regard sur quelques expériences d'ouverture élargie, menées à Nantes, Rennes et Laval.
Mathilde et Yasmine s'aèrent les poumons, devant leur bibliothèque universitaire, à Nantes. Leur fac est entourée d'arbres, éloignée du centre.
Il est encore tôt dans l'après-midi, mais elles savent déjà qu'elles ne resteront pas longtemps travailler leurs cours de droit ici. Cette 'bibli' ferme à 19 h. Après ça, elles tenteront de bosser chez elles. Et pourquoi pas dans une bibliothèque municipale? « Mais il y a des gamins qui courent partout, non? ». « C'est bruyant, et je ne pense pas trouver mes bouquins de cours là-bas. » De toute façon, la « municipale » ne ferme pas beaucoup plus tard.
Les horaires d'ouverture, en France, se limitent à 40 heures hebdomadaires en moyenne. Il y a de quoi passer pour des ringards, quand nos voisins européens atteignent pour la plupart 80 à 100 heures par semaine. Quant aux Américains, leurs bibliothèques universitaires sont ouvertes 20 heures sur 24. Là, c'est sûr, on ne fait pas le poids...
En quelques semaines, une pétition de l'association Bibliothèques sans frontières a rassemblé 11000 signatures pour élargir les horaires le soir et le week-end.
« Les livres n'ont pas besoin de dormir, laissez donc lire ceux qui n'ont pas sommeil », commente un signataire. Une évidence, selon le président de l'association, l'historien Patrick Weil. « Les gens sont frustrés ! Un enfant qui prépare un exposé pour le lundi ne peut pas le travailler le dimanche en bibliothèque ! C'est un lieu de travail, de rencontres, de découvertes, un service public essentiel. ».
Trop cher, trop compliqué, répondent les élus. Car les mairies gèrent seules le budget des bibliothèques, aidées parfois d'une métropole ou d'un conseil général. L'État ne les subventionne pas, à moins d'un projet d'agrandissement ou de rénovation du bâtiment.
La pétition encourage les maires à élargir les horaires, et à augmenter ainsi le temps de travail des bibliothécaires. Et donc, leur salaire. Forcément, les élus, ça les fait grincer des dents. Mais les lecteurs grognent aussi, déplore une salariée de bibliothèque municipale : « En semaine, à 18 h 30, tout le monde sort du boulot... Alors, quand il ne reste que dix minutes avant la fermeture pour trouver le bon bouquin, c'est la foire d'empoigne au guichet d'emprunt ! »
« Les livres n'ont pas besoin de dormir »
Quelques initiatives ont toutefois réussi à émerger. À Nantes, la bibliothèque universitaire du pôle Santé a obtenu, en 2011, le label NoctamBU. Elle peut ainsi ouvrir jusqu'à 23h30 en semaine et le dimanche. La directrice des bibliothèques universitaires nantaises, Hélène Grognet, avait estimé alors le budget annuel à 160 000. L'État avait soutenu le label et financé le projet. Mais lorsqu'elle a voulu faire renouveler sa subvention pour 2014, on lui a répondu que c'était fini.
« Impossible de revenir en arrière, c'était une trop grande réussite. On s'est tournés vers la fac, elle a aménagé son budget et c'est elle qui nous finance maintenant. »
Tellement ouverte, la BU Santé, qu'elle déborde. Remplie d'étudiants en médecine, ou d'autres campus, dont les biblis ferment autour de 19h. « Entre le frigo, la télé, l'ordinateur, mon téléphone, je n'arrive pas à me concentrer pour travailler chez moi », confie Marie, 19 ans. Alors, comme ses camarades, elle investit les lieux, quitte à réserver sa place dès 7 h du matin, même le dimanche.
« Pour nous, c'est aussi un lieu de rendez-vous, explique François, 20 ans. Quand on butte sur un cours, les autres sont là pour nous aider. On sort s'aérer avec des amis, on se redonne de l'énergie. Mais ça, c'est quand on a une place... ». Avec 390 sièges, la bibliothèque sature très vite. Mais initiative positive, elle emploie 10 étudiants tuteurs qui, pour 500 par mois, comblent les heures d'ouverture supplémentaires. « Tout le monde y gagne », sourit la directrice.
Autre réussite, à Laval, en Mayenne, où la petite bibliothèque Legendre se métamorphose le dimanche. Record de fréquentation, avec 200 visiteurs en moyenne. Concerts, expositions, lectures de contes, l'endroit est devenu un lieu de sortie culturelle au même titre que les musées de la ville. « Le samedi, c'est toujours speed, les visiteurs n'ont pas le temps de rester. Les gens qui viennent le dimanche sourient plus, se réjouit son directeur, Olivier Michaud. Pas besoin de séparer la famille, avec l'un qui emmène les enfants à la bibliothèque une demi-heure, pendant que l'autre fait les courses. »
Selon Patrick Weil, le complexe des Champs Libres, à Rennes, est aussi un succès : « les Rennais ont été moins nombreux que les Nantais à signer notre pétition, j'en conclus qu'ils sont plus satisfaits. »
Si cette immense bibliothèque ouvre effectivement les soirs et dimanches, depuis déjà huit ans, elle suscite tout de même quelques critiques. Ses plages d'ouvertures, notamment, commencent assez tard dans la journée.
Une fois la pétition achevée, Patrick Weil ira plaider auprès des élus. « La bibliothèque est un lieu d'avenir. C'est là qu'on apprend à travailler en collectivité et ça, c'est très formateur. »
24. La campagne, hors du temps ?
Auteur : Marie Danjean 113 ( * ) - article paru dans l'ouvrage « urgences temporelles », sous la direction de Dominique Royoux et Patrick Vassallo, Sylepse, 2013.
Les territoires ruraux sont dans l'inconscient collectif des espaces où le temps s'égrène lentement. On y vivrait au rythme des saisons, en y goûtant des produits de bonne qualité, en connaissant ses voisins, et entretenant avec eux des échanges réguliers. C'est une image aisément véhiculée par la communication des industries touristique et agroalimentaire et qui flatte notre goût naturel pour l'authenticité. Mais c'est aussi une image que revendiquent les habitants, et parmi eux une certaine proportion d'élu-es et de décideur-euses.
Mais peut-on encore dire que la campagne est préservée du phénomène d'accélération? Les familles qui résident en milieu rural seraient-elles protégées de la désynchronisation des rythmes qui bouscule le quotidien des habitant-es des zones urbaines? Les espaces ruraux ont-ils intégré la gestion des temps individuels ou mené des actions impactant les temps collectifs ?
Nouveaux défis dans les territoires ruraux
Auparavant, à la campagne, «rural» et «agricole» étaient presque synonymes. L'activité se trouvait près de chez soi, les enfants vivaient le plus souvent de l'affaire familiale (exploitation agricole, commerce, artisanat) ou se voyaient confiés à une proche relation (ami ou parent) pour leur entrée dans le monde professionnel. On avait tendance à partager, avec la précédente génération, tant ses temps de travail que ses temps de loisirs.
Parce qu'on travaillait à proximité, et pour des raisons patrimoniales et pratiques, ce mode d'organisation se traduisait dans l'habitat : on habitait en famille ou on faisait construire aux alentours. Ainsi sont nés des hameaux que les locaux pouvaient associer à un nom de famille.
Aujourd'hui, rares sont celles et ceux dont le parcours d'entrée dans la vie active (études, formation, emploi) ne les conduit pas à s'éloigner, même à durée déterminée, du lieu d'origine et du noyau familial. Que ce soit pour y trouver du savoir, du travail, un cadre de vie ou un environnement social, la mobilité s'est généralisée et les habitant-es des territoires ruraux se sont ouverts, comme les résident-es d'autres territoires, à des paysages, des rythmes et de modes de vie nouveaux.
En Drôme, nos travaux d'observation des temps social dépeignent un portrait des rythmes des populations installées et territoires ruraux relativement proche de ceux observés dans les centres urbains. À titre d'exemple, en Val-de-Drôme, une étude sur le temps des familles ayant pour objet d'harmoniser les horaires d'accueil des jeunes enfants, a permis de constater que 70% des parents interrogés travaillaient en horaires atypiques. Sur ce même territoire, un diagnostic sur le temps des jeunes (les 11-24 ans) fait émerger des attentes fortes d'équipements et de services : piscine, magasins et commerces, stades, skate-parcs et champs de bosses. Pendant qu'en ville, on reconquiert les toits des immeubles pour en faire des potagers, la campagne rêve de cultures urbaines.
Deux éléments viennent accélérer la convergence des rythmes urbains et ruraux: la voiture et l'accès à internet.
D'une part, la pratique généralisée de l'auto-solisme conditionne fortement l'organisation spatiale et temporelle des territoires ruraux. Les territoires sont prévus pour la voiture et modelés pour elle. La dispersion de l'habitat, la faiblesse des réseaux de transport la concentration des lieux d'emploi et de services, les distances et désynchronisation des rythmes de travail motivent un usage massif de la voiture individuelle pour rejoindre des bourgs-centres rare ment conçus pour les piéton-nes. Comme en ville, on y constate des difficultés de stationnement, un enjeu fort de régulation de la vitesse, un bétonnage massif des abords extérieurs au profit de l'implantation de zones commerciales, zones d'activité ou zones artisanales.
D'autre part, une alternative à cette mobilité s'est offerte avec le développement des connexions internet et de l'accès aux nouvelles technologies. C'est aujourd'hui devenu un critère de choix d'implantation pour les nouveaux arrivants. En Drôme, tandis que la fibre optique commence à s'installer, certains espaces restent des « zones blanches», des hameaux, des quartiers dans lesquels aucun réseaux de téléphonie mobile n'est disponible ou qui ne sont pas le desservis par le haut-débit.
Les politiques et les choix en matière d'aménagement territorial ont donc un indéniable impact pour sur les temporalités des territoires ruraux, et leur impriment un rythme, rapide ou lent, qui conditionne l'installation ou le départ des populations, et par conséquent, le dynamisme des espaces.
Quelle gestion du temps dans les espaces ruraux ?
Les politiques temporelles sont de manière générale peu connues, mais sur les territoires urbains, elles s'imposent peu à peu comme moteurs de solutions efficaces et pertinentes à des problèmes visibles (congestions routières aux heures de pointe, saturation des sports, etc.).
En milieu rural, leur connaissance, même si elle progresse, reste rare. Leur visibilité et par conséquent, leur application est presque inexistante. Avant d'expérimenter leur mise en oeuvre en Drôme, Aider s'est attaché à repérer des initiatives similaires, sans pour autant découvrir d'expérience complète de prise en compte des rythmes de vie et de coordination des temps individuels et collectifs.
Si les acteurs du développement territorial en milieu rural ont encore peu intégré les modes d'action des politiques temporelles à leurs pratiques, la gestion des temps individuels et collectifs n'est pourtant pas absente des projets et actions qu'ils mettent en oeuvre. Il existe en effet une approche naturelle et intuitive des questions de temps, guidée par le bon sens.
C'est ainsi que certaines communes ont procédé à des études sociologiques pour mieux connaître les horaires où l'éclairage public était le plus pertinent. Dans un souci d'économies d'énergie et de budget, elles ont choisi de dresser des socio-types de leurs habitant-es pour calquer l'intensité de l'éclairage nocturne sur leurs horaires d'usage des espaces publics, sans pour autant définir sciemment leur démarche comme une action temporelle.
Quand les questions de temps rythmeront l'action des territoires ruraux
Les espaces à dominante rurale ont vécu de profondes mutations économiques, sociétales et technologiques qui ont modifié le profil des habitant-es et bouleversé les rythmes locaux. Après une période de confusion, aujourd'hui des modèles durables de développement territorial émergent.
A l'heure actuelle, les politiques temporelles complètent avec justesse les diagnostics territoriaux mis en oeuvre dans les zones rurales, parce qu'en s'attachant à repérer les pratiques réelles des habitant-es, elles fournissent une image renouvelée de l'organisation des bassins de vie. Elles ouvrent d'importantes perspectives, tant en termes de constats que d'actions possibles, pour contrer la dévitalisation des territoires ruraux et ralentir l'accroissement de la mobilité grâce à des actions durables qui permettent à court terme une relocalisation et une redynamisation de l'économie et des services, et à moyen terme, une reconstruction du lien social.
En complément de l'intuition des acteurs, et des outils existants pour aménager les territoires, les politiques temporelles apportent des méthodologies complémentaires, un regard nouveau, simplement parce qu'en observant les modes de vie de celles et ceux qui font vivre les territoires aujourd'hui, elles permettent d'orienter l'organisation territoriale de demain, et d'anticiper les évolutions de besoins en matière d'urbanisme et de services à la population.
25. La nuit, un temps particulier ?, Conférence de Luc Gwiazdzinski114 ( * ) du 29 septembre 2005
Pourquoi la nuit ? Pourquoi s'intéresser à la nuit urbaine ? Je vais tout d'abord vous parler un peu de moi-même. Je viens du Territoire de Belfort, frontalier de la Suisse, mais je suis né dans le «pays haut », du côté de Longwy, de Villerupt. C'était un pays de sidérurgie, un pays où il ne faisait jamais nuit. Quand j'étais gamin, on ne voyait pas les étoiles parce que le ciel était rouge, parce que de l'acier coulait en continu dans les laminoirs.
Je suis aussi issu d'une famille où l'on se levait très tôt. Une partie de la famille travaillait à la mine, une autre dans la sidérurgie et une autre encore dans la boulangerie. On était un peu dans ces nouveaux horaires, dits atypiques, où la nuit a une large part. Tout cela a contribué à me façonner un imaginaire de la nuit.
À l'âge de 18-19 ans, j'ai eu la chance de découvrir New York. J'ai été fasciné par cette ville qui ne s'arrête jamais. Je vous renvoie aux textes de Fernand Léger sur New York, qui en parle beaucoup mieux que moi.
Et puis, par la suite, j'ai travaillé, en tant que chercheur, sur la question des barrières et des frontières. J'ai commencé par les frontières qui me concernaient : celles du grand-duché de Luxembourg, celles de l'Allemagne et de la Suisse. A partir de cet espace-là, je me suis demandé si, quand les frontières administratives tombent, avec la construction de l'Europe, des frontières perdurent malgré tout entre ces différents pays. Ensuite j'ai glissé sur une autre problématique : comment se promène-t-on dans la ville ? J'ai constaté que l'on ne se déplace pas d'un point A à un point B en ligne droite. Quand on suit quelqu'un par GPS, expérience que l'on mène actuellement à Belfort avec des personnes volontaires, on obtient ce que les Italiens appellent des mobilités zigzagantes. Dans notre mouvement dans la ville, on rencontre des obstacles physiques, mais aussi des obstacles que j'ai appelés cognitifs, ou perçus. Il existe une ville réelle, contre laquelle on bute : un mur, une rue, une barrière, des travaux, mais il y a aussi des barrières mentales, dues à notre représentation de la ville. Il y a des endroits que l'on associe à un mauvais souvenir (une agression ou une mauvaise odeur, par exemple) ou, au contraire, à un moment heureux. Ce marquage conditionne notre circulation dans la ville. Ce marquage diffère en fonction de la lumière (jour ou nuit). Un exemple très simple : celui des parcs urbains. En journée, ce sont des endroits agréables, qu'on a envie de traverser. Le même parc, qui attire en journée, peut faire peur la nuit, et ce ne sont pas les mêmes populations qui le pratiquent le jour ou la nuit. Quand on étudie la ville, cela me semble une évidence, il faut donc travailler sur cette notion de temps.
Enfin, dernier élément, qui renvoie à la réflexion sur les villes la nuit en Europe. Quand vous consultez les fichiers des bibliothèques ou des organismes de statistiques pour obtenir des informations sur la nuit, vous constatez qu'il existe très peu de données. J'ai appelé cela la « nuit des données ». Essayez par exemple de savoir combien de policiers travaillent la nuit en France. C'est un chiffre noir. On dispose de très peu d'informations. Il y a vraiment un travail d'exploration à mener. Je suis géographe, né avec deux siècles de retard puisque, quand on est géographe, on a notamment envie de découvrir les taches blanches qui figurent sur les planisphères. La nuit m'est apparue comme une tache blanche, mais plutôt un espace-temps qu'un morceau d'espace. Ce goût pour la nuit part aussi d'un goût pour l'inconnu.
Pour explorer la ville la nuit, il faut essayer de se donner un cadre méthodologique. Mais il faut surtout avoir des convictions.
Première conviction, il existe bien, dans nos villes - et pas simplement à New York. -, une vie après le jour : pour ceux qui s'amusent, pour ceux qui travaillent aussi (on les oublie trop souvent), pour ceux qui s'approvisionnent.
Deuxièmement, j'ai la certitude que la nuit a beaucoup à dire au jour. Parce que la ville de nuit c'est une caricature de ville le jour. Explorer la ville la nuit, ses potentiels, ses contradictions, ses inégalités, permet donc de mieux comprendre la ville de nuit mais aussi celle de jour, voire éventuellement de découvrir des ferments - ou ce que l'on appelle, en termes de prospective, des signaux faibles -, c'est-à-dire d'éventuels éléments de l'avenir de la ville.
Mon intervention s'articulera autour de trois propositions. Première proposition : changer de regard sur la ville, vous donner à voir la ville autrement. Deuxième proposition : explorer la ville par ses nuits. Une dernière proposition enfin, en forme de prospective, dans laquelle j'ai essayé de glisser un petit peu d'humour c'est d'imaginer Rennes en 2047 : comme une ville qui réfléchit un petit peu autrement à ses nuits.
Première proposition : changer notre regard sur la ville. Il s'agit d'abord de considérer que la ville n'est pas utilisée par ses seuls résidents, que l'on appelle par ailleurs ; les citoyens, c'est-à-dire ceux qui y votent, mais bien évidemment aussi par des usagers diurnes ou nocturnes, des travailleurs, des visiteurs et des touristes, qui n'y ont pas le droit de vote. Peut-être qu'un jour l'idée d'une citoyenneté éphémère, pour reprendre l'expression d'Annah Arendt, finira par s'imposer qui sera permise par les nouvelles technologies. J'entre dans Rennes et, d'un simple clic, j'en deviens citoyen pour dix heures ; s'il y a un débat, j'ai droit d'y participer. Pourquoi pas ?
Je vous propose donc de réfléchir la ville comme une pulsation. Une ville, en journée, attire une certaine population, jusqu'à une heure du matin environ, vers le centre ou la proche périphérie ; puis, la nuit, la ville délocalise son sommeil. Ce qui pose un vrai problème. Je vote là où je dors, et non pas là où je vis. C'est la démocratie du sommeil. Les Français font en moyenne 20 kilomètres à vol d'oiseau pour rejoindre leur lieu de travail et votent à un endroit dont ils sont absents pendant la journée, pendant la semaine, voire le week-end (on n'a alors qu'une envie, c'est de partir plus loin, de découvrir d'autres endroits). Il y a donc un décalage.
Il faut aussi réfléchir la ville non pas « à plat », mais en essayant de la cartographier en trois dimensions. Une profession sait à la fois réfléchir la ville en trois dimensions et gérer des chantiers, donc le temps : ce sont les architectes. Aujourd'hui, en termes de visualisation, pour tenir compte de la complexité de la société, cette vision en 3 D est importante. Ma 3 D consiste par exemple à imaginer Rennes. Vous êtes un deus ex machina dans la ville de Rennes, vous disposez d'un énorme pinceau à l'aide duquel vous effacez les habitants, vous conservez simplement les bâtiments, la cité urbaine, la coquille de la ville. Vous obtenez une ville, de la profondeur, de la hauteur. Puis vous ajoutez la dimension temps. Vous obtenez un labyrinthe dont il manque les clés symboliques, plus simplement l'information. Car ce labyrinthe évolue au fil des heures, des semaines, des saisons, au moment de la solde ou de la paie de ses habitants. Il s'agit donc de penser la ville en termes de comme un système d'horaires.
Appuyons-nous sur quelques exemples. Celui des commerces dans la ville, qui font partie de ce que j'appelle l'offre urbaine. Si vous avez faim entre 3 et 4 heures du matin à Strasbourg, je vous souhaite bon courage. Il y a bien sûr les stations-service, où vous pouvez acheter des sandwichs à un prix prohibitif. L'offre urbaine pose problème en termes d'accessibilité aux services. Si l'on considère la nuit comme un arrêt des activités, on peut effectivement parler de nuit du commerce alimentaire.
Deuxième exemple, celui de l'usine PSA-Peugeot-Citroën (15 000 salariés, près de 300 hectares) implantée près de Belfort. J'y ai mené une étude, un plan de déplacements d'entreprise. Chez Peugeot, on travaille désormais - depuis trois ans - de nuit, le dimanche et même au mois d'août. Le site de Belfort est situé entre celui de Mulhouse (13 000 salariés), au nord, et celui de Sochaux (15 000 salariés), au sud. Nous sommes dans le cadre d'une activité en continu, ce qui pose, en termes de rythme et médiation, un certain nombre de questionnements.
Troisième exemple, celui d'un « attracteur éphémère », le stade de Sochaux qui attire 20 000 personnes par soir de match, ce qui posait des problèmes en termes de mobilité : l'autoroute était bloquée, le train n'était pas utilisé, les horaires des bus n'étaient pas adaptés. A partir d'une représentation - une carte animée heure par heure - qui montre l'arrivée des spectateurs au stade, le remplissage des parkings, etc., on a pu mettre en place de nouveaux réseaux de transport. . .
Quatrième exemple, celui du réseau de bus de Belfort, à partir duquel on a élaboré le réseau « heure par heure ». Il s'agit tout simplement d'un outil de dialogue avec la population destiné à repenser les horaires. On a étudié l'offre de transport heure par heure. On se rend compte qu'à partir de 19h30 il y a un problème de desserte. Alors que par ailleurs on parle de droit à la mobilité et de droit à la ville, on voit apparaître des inégalités, que je qualifie, de spatiotemporelles. Voilà donc quelques exemples qui doivent nous inciter à regarder la ville un peu autrement.
Deuxième proposition, une fois que l'on a modifié notre regard, que l'on est un peu perturbé, on va essayer d'investir la nuit urbaine.
Premier constat : la nuit est longtemps restée - même si le pouvoir a toujours cherché à contrôler la nuit urbaine - un domaine oublié, que ce soit par les édiles, les techniciens de l'aménagement, ou même les chercheurs. On a continué à penser la ville comme si elle fonctionnait 16h/24 et du lundi au samedi. Désormais, évidemment, on a une autre approche. Mais pendant longtemps il y a eu très peu de travaux, de réflexions, sur cette question de la nuit. J'ai parlé en introduction de la nuit des données. Quand on fait de la prospective, de l'aménagement du territoire, des schémas d'urbanisme ou autres, on réfléchit essentiellement sur du spatial, on intègre très peu la dimension temps. C'est le rôle des Bureaux du temps, des SCOT (schémas de cohérence territoriale), des PLU (plans locaux d'urbanisme), d'inciter à aussi réfléchir en termes de temps.
Même notre quotidien est victime de cet oubli. Prenons l'exemple des agendas : essayez de prendre un rendez-vous après 22 heures et de l'inscrire dans un agenda papier. C'est difficile parce qu'ils s'arrêtent généralement à 22 heures. Alors, deux explications : soit on a oublié la nuit, soit ce sont des rendez-vous qui n'ont pas à être notés dans un agenda. Je penche plutôt pour la deuxième explication. Les Italiens ont inventé « horario de la luna », un agenda pour noter leurs rendez-vous de la nuit.
Par contre, ceux qui avaient investi la nuit, ceux qui y avaient réfléchi, ce sont les écrivains, les artistes - celui qui me fascine le plus sur la nuit c'est Novalis. Les artistes, c'est vrai qu'on les imagine toujours de nuit, dans un endroit enfumé, en train de discuter, de réfléchir et d'imaginer.
Aujourd'hui, une nouvelle peuplade investit la nuit, ce sont les industriels et les commerçants. Il va pour le moins falloir prendre en compte cette dynamique, qui risque de nous poser des problèmes.
Pourquoi ne s'est-on pas intéressé plus tôt à la nuit ? La nuit c'est d'abord un moment du sommeil. On a besoin de dormir entre six et neuf heures par jour. Ce moment est évidemment centré sur la nuit. Deuxième élément d'explication : la lucarne magique qui phagocyte les soirées, c'est-à-dire la télévision. Selon des statistiques parues dans Télérama la semaine dernière, les Français passent quotidiennement en moyenne trois heures et vingt minutes devant leur télévision, un temps centré notamment sur la soirée. Et le temps passé devant la télévision, c'est évidemment un temps que l'on ne consacre pas à rencontrer les autres ni à se promener dans la ville. Troisième difficulté : penser simultanément l'espace et le temps.
Après ces préalables, essayons de définir la nuit. Le mot « nuit » vient du latin nox qui désigne la période de temps au cours de laquelle le soleil disparaît sous l'horizon. Mais qui s'en aperçoit, à Rennes, du soleil qui disparaît sous l'horizon ? Qui s'en aperçoit à Belfort ou à Strasbourg ? Soyons plus précis : la nuit apparaît comme une discontinuité essentielle. Nous sommes structurés par cette alternance jour/nuit. Dans la Genèse, dans toutes les mythologies, on retrouve cette thématique de l'alternance. Il y a eu un jour, il y a eu une nuit. La nuit c'est le temps des ténèbres, de l'obscurité, du sommeil et puis, par extension, le temps du repos social, lequel est symbolisé, aujourd'hui encore dans les pays qui connaissent des problèmes de sécurité, par le couvre-feu. Le couvre-feu, à l'origine, c'était l'arrêt de toutes les activités. Cette notion n'est pas réservée aux dictatures. C'est même une thématique qui réapparaît régulièrement» On a parlé, il y a quelques années, de couvre-feu pour les adolescents en France. Dans nos villes, il y a des couvre-feux, des fermetures des portes de la cité. À Strasbourg, une cloche sonne chaque jour à 22 heures, c'est un héritage du Moyen Age. À l'origine, la Zehnerglock signifiait à une partie de la population - les Juifs - qu'elle devait quitter la ville. Il y a régulièrement un débat à Strasbourg à propos de la suppression de cette cloche. Ghardaïa et les villes saintes du sud de l'Algérie sont également soumises à ce système de fermeture des portes. Le couvre-feu, c'était aussi l'arrêt de toute activité et l'interdiction de faire du feu, tout simplement parce qu'une partie de nos villes étaient construites en bois. La ville donc, tout comme l'être humain, est encore rythmée par l'alternance jour/nuit.
Définir la nuit est difficile aussi parce que le terme est très ambigu. La nuit, c'est le temps des conspirations, le moment où l'on réinvente le monde. La conspiration de la nuit peut aboutir à la révolution du matin. La nuit, c'est donc le moment où tout paraît possible, où l'on réinvente. Bien sûr, tout ne résiste pas à la lumière du jour. La nuit correspond aussi à ce qui est indéterminé : s'y mêlent les cauchemars, les monstres, les rêves. Nos esprits sont marqués par le siècle dit des Lumières, donc de la raison. La nuit effraie parfois parce que l'on n'arrive pas à bien la comprendre, ni à la dominer : c'est une part de nous-mêmes qui souvent nous échappe.
La nuit, c'est aussi le moment de la transgression et du plaisir. On est structuré par l'alternance. L'enfant devient adolescent avec sa première nuit blanche, quand il fait le mur. L'initiation au plaisir, au sexe, à l'alcool, à la drogue, se fait avec rite ou sans rite, la plupart du temps en soirée ou la nuit.
Enfin, je vous livre cette définition empruntée aux cruciverbistes, pour qui la nuit est ce qui peut être blanc et noir à la fois. Difficile de trouver plus ambigu.
La nuit suscite des représentations très contrastées, mêlant un aspect négatif et un aspect positif. Pour une partie de la population, la nuit fait peur, elle renvoie à des angoisses millénaires. On parle même de petite mort à propos de la nuit. Elle fait peur aussi parce que 80 % de notre perception vient de la vue. Si on la supprime ou qu'on n'en conserve que 20 %, on entre dans quelque chose de plus animal : les odeurs, les sons, le toucher, c'est-à-dire quelque chose d'un peu exacerbé, soit en positif, soit en négatif. Pour 60 % des personnes interrogées, la nuit c'est dangereux. Et plus on vieillit, plus on a peur la nuit. Mais la nuit peut également représenter un moment de liberté.
Je vous demande d'accepter cette idée d'une colonisation de la nuit, de penser la nuit comme un Far West. On assiste en effet à un phénomène de grignotage qui s'est mis peu à peu en place au cours des siècles. L'homme a toujours rêvé de repousser la nuit, de faire la lumière pour repousser les bêtes sauvages, les monstres. La conquête de la nuit a d'abord été rendue possible par le progrès technique, depuis le feu jusqu'aux lampes à sodium sur les autoroutes aujourd'hui. Ensuite, il a fallu l'affirmation politique. Les différents pouvoirs ont toujours essayé de contrôler la nuit. Je vous renvoie à la notion de Roi-Soleil, à la théorie des deux corps, selon laquelle le corps du roi s'endort la nuit, mais le corps politique, lui, reste éveillé. Dès Louis XIII, le roi de France était appelé le « chasse-ténèbres ». La France était ce pays où le soleil ne se couchait jamais. Charles Quint avait déjà travaillé à l'élaboration de ce concept, qui correspond à l'affirmation d'une continuité politique.
Finalement la nuit de nos villes, c'est un peu comme un théâtre. La scène, c'est la ville. On commence par mettre de la lumière, des acteurs apparaissent parce que l'on a fermé les portes et que l'espace est sécurisé. Une ville apparaît : c'est la ville de garde, incarnée par la police, mais aussi par le personnel de santé. Cette ville veille pendant que le reste de la population dort, se repose.
Et puis il y a l'apparition de la fête, à partir d'un cadre sécurisé, à partir du moment où une partie de la population, l'aristocratie notamment, dispose de moyens suffisants, et de temps. On assiste à l'époque baroque à une explosion des fêtes nocturnes. On peut retrouver de belles pages dans la littérature sur ces grandes fêtes nocturnes en Angleterre ou en France. Au XIX e siècle, cette notion de fête se banalise, connaît une diffusion de plus en plus large, à partir d'un certain nombre de lieux ouverts la nuit en ville, les estaminets par exemple. On assiste alors à l'apparition du by night. C'est Paris Ville lumière, ce sont les Expositions universelles. J'ai retrouvé l'article d'un journaliste, qui, en 1889, pendant l'Exposition universelle conseillait de visiter tel endroit et découvrir Paris autrement. Ce n'est donc pas tout à fait nouveau, notre histoire de découverte et de traversée de ville.
La nouveauté aujourd'hui, c'est ce phénomène de diurnisation, le fait que des activités du jour entrent dans la nuit. Est-ce une phase ultime de l'artificialisation de la ville ? L'homme a toujours voulu échapper au rythme de la nature. Il s'est fabriqué une coquille - la ville - qui a ses rythmes propres, de plus en plus continus. On est donc passé de la nuit à la ville de garde. Aujourd'hui, il y a les activités de garde, les activités festives et puis des activités du jour qui grignotent la nuit. Le phénomène s'inscrit dans un contexte nouveau, qui se caractérise par la mondialisation de l'économie certes, mais aussi surtout par l'individualisation des modes de vie et le développement des technologies de l'information et de la communication, qui rendent possible une certaine ubiquité, tout au moins la possibilité de dialoguer en pleine nuit avec un interlocuteur habitant à l'autre bout de la planète, où il fait jour.
La diminution du temps de travail a dégagé des marges de temps, même si 34 % des Français estiment ne pas avoir la maîtrise de leur temps. De nouveaux besoins sont apparus et aujourd'hui se dégage une nouvelle figure de la ville : la ville à la carte. On veut tout, partout et à toute heure, mais sans toujours en mesurer les conséquences.
Voilà retracée une évolution sur la longue durée, comme aurait dit Braudel. Aujourd'hui, notre quotidien est confronté à une série de pressions nouvelles. Je vous propose une liste de ces pressions sur la nuit :
• la mise en lumière des villes. D'une mise en lumière sécuritaire, de garde, on est passé à une mise en lumière pour l'agrément, qui va jusqu'à la cacolumie, l'excès de lumière - trop de lumière tue la lumière ;
• le développement d'une industrie en continu, qui cherche à optimiser ses moyens de production ;
• la banalisation des services 24h/24. Aujourd'hui, n'importe quel artisan affiche la mention « 24h/24 » sur son véhicule professionnel - même s'il ne se déplace pas toujours. Quand c'est effectivement le cas, il facture son intervention très cher mais, comme ce sont toujours des urgences, le client est prêt à payer ;
• le développement des distributeurs automatiques. Nous disposons de distributeurs automatiques de monnaie, accessibles 24h/24, depuis des années déjà. Aujourd'hui, des épiceries automatiques s'installent auprès des points de flux. Ces magasins proposent 100 ou 200 références, de la boisson au papier toilette. Ils font jusqu'à 60 % de leur chiffre d'affaires en pleine nuit ;
• la fin du couvre-feu médiatique. Lorsque j'étais gamin, la fin des programmes était annoncée par la mire puis la neige sur l'écran après l'intervention de la speakerine. Aujourd'hui, la télévision émet 24h/24 ;
• le développement du travail de nuit. En Europe, 18 à 20 % de la population active est concernée. Tous les secteurs sont touchés, y compris le monde agricole, avec des moissons ou des labours de nuit ;
• le développement des commerces de nuit, et aussi des bars, des discothèques, des lieux de nuit ;
• le développement des nuits thématiques - Notte bianca (à Rome), la Nuit des musées, etc., démarches qui connaissent un succès fou ;
• le développement des services de mobilité nocturne. A partir du moment où une partie de la population est dehors la nuit, pour la fête ou pour le travail, se pose la question des services, notamment des transports de nuit. C'est une question de philosophie. Soit on interdit le travail de nuit, on ferme, on impose le couvre-feu, on obtient un pays fermé la nuit. Soit on laisse ouvert. Dans ce cas, ceux qui sont dehors, pour leur travail notamment, ont autant le droit à un bus et à un certain nombre de services que ceux qui y sont le jour Sinon on admet qu'il y a des citoyens de jour et des citoyens de nuit, et donc une citoyenneté à deux niveaux, ou à deux vitesses. Je pense aussi à la question des crèches, qui fait débat un peu partout en France aujourd'hui, c'est-à-dire les demandes d'ouverture tardive des crèches par les parents qui travaillent selon des horaires atypiques. Il y a aussi le décalage de l'heure d'endormissement : on dort une heure de moins que nos grands-parents et on se couche beaucoup plus tard qu'eux.
La question de la nuit est d'actualité dans tous les pays européens. Citons l'Italie avec le débat sur l'heure de fermeture des établissements de nuit (Berlusconi, à une voix près, n'a pas pu imposer la fermeture des discothèques à 3 heures du matin ). Mentionnons les débats à propos de l'ouverture plus tardive des commerces ou la grève des urgences dans les hôpitaux en France. En Allemagne aussi, l'ouverture des commerces en soirée ou le dimanche a fait l'objet d'âpres débats. Depuis 2003, des points de vente situés autour des gares peuvent rester ouverts.
Il y a périodiquement des projets de loi pour interdire le travail de nuit - c'est un retour de balancier -, mais ils n'ont pas beaucoup de succès. Il y a un projet de métro de nuit à Paris, où la SNCF et la RATP ont mis en place le Noctilien, un réseau de transport de nuit, en septembre.
Enfin, je vous invite à observer les conséquences de l'entrée en vigueur à Londres, à partir du mois de novembre, du « Licensing Act », qui met fin à l'interdiction de vente d'alcool dans les pubs au-delà de 23 heures. Il s'agit notamment d'éviter les problèmes liés aux attroupements à la sortie des pubs.
Tous ces exemples doivent nous inciter à mener la réflexion suivante : face à ces pressions, qu'en est-il de la nuit aujourd'hui, en France et dans les autres pays européens ? J'ai essayé de borner la nuit dans le temps, puis dans l'espace. Premier type de bornage, élaboré à partir d'une liste d'indicateurs concernant le fonctionnement de nos villes : consommation d'électricité, de gaz, circulation de piétons, de cyclistes, de bus... Quand on examine l'offre de services, on s'aperçoit que la nuit aujourd'hui, dans les grandes métropoles, est un espace-temps très court, un creux de trois heures, compris entre 1h30 et 4h30 du matin. Plus ces grandes métropoles sont internationales, plus la ville est ouverte la nuit. Il y a ensuite une graduation en fonction de l'échelon urbain. Cet espace-temps de trois heures environ, c'est le coeur de la nuit, et puis il y a les marges. Des marges, grignotées, plutôt le soir mais aussi un peu le matin.
Nous autres géographes - c'est le cas des sociologues aussi -, consacrons une partie de notre temps à essayer de continuer à différencier la ville de la campagne. Un critère le permet encore : c'est l'alternance jour/nuit. Il suffit de sur: voler une région de nuit. On constate alors cette coupure. ville/campagne. En termes de lumière, d'offre de transports, de services, il existe encore un vrai creux dans nos campagnes. On constate ce phénomène qu'a décrit le philosophe Michel Serres : autrefois des métropoles cloutaient la planète, un peu comme les étoiles cloutent le ciel ; désormais, on a des nébuleuses urbaines, c'est-à-dire des taches de lumière la nuit, puis de loin en loin des sombrières, c'est-à-dire des endroits où subsiste encore un peu de sombre. On n'est plus dans un rapport nature/culture, on a basculé dans une autre logique.
Deuxième type de bornage spatial, c'est le décalage centre/périphérie. Quand on traverse les villes, on constate qu'il y a vraiment des limites d'exténuation des réseaux, qu'il fait bien plus nuit en banlieue qu'en centre-ville, où le patrimoine, notamment, est éclairé. On peut même parler à ce propos de manipulation, de mise en avant d'une certaine image de la ville - patrimoniale - par rapport à un autre type de ville.
A propos des bornes spatiales, précisons enfin que les centralités dans la ville ne sont pas définies une fois pour toutes. La centralité se « déplace » au fil des heures.
Je vous propose de considérer la ville, la nuit, comme un archipel. D'ailleurs, quand on est noctambule, que l'on est amoureux de la nuit ou que l'on travaille sur la nuit, on repère vite dans son quartier la personne qui, à 2 heures du matin, a encore sa petite lumière allumée. Plus on avance dans la nuit, plus les pôles allumés se réduisent. Entre îlots de l'archipel nocturne, l'accessibilité intra-urbaine est limitée. En l'absence de ligne spécifique, les transports publics sont arrêtés. Les taxis sont moins nombreux et surtout plus chers. Le temps d'accès est allongé et le coût d'accès à l'espace urbain est augmenté. L'accessibilité interurbaine aussi est réduite. Les transports par bus sont quasi inexistants la nuit, le transport ferroviaire est réduit, l'aéroport est fermé : on n'accède donc plus à la ville, un peu comme s'il existait des ponts-levis spatiotemporels.
À l'intérieur de la ville même, se met en place une certaine géographie, avec des quartiers qui dorment, d'autres qui travaillent en continu, certains qui s'amusent, d'autres encore qui s'approvisionnent. Évidemment, c'est une image idyllique. Dans les faits, ils ne sont pas séparés, ils s'interpénètrent. Des différences marquées apparaissent entre les espaces en continu temporel (quartiers situés près des gares, des aéroports, ou au bord des autoroutes) et des espaces en rythme circadien, c'est-à-dire où l'on suit le rythme du soleil - on dort la nuit et on s'active le jour -, ce qui peut engendrer des conflits.
Premier type de conflit : les nuisances sonores. Dans l'est de la France, on se souvient de l'affaire DHL, un transporteur de colis à la recherche d'un aéroport où baser son activité - une activité internationale de flux, 24h/24 donc -, qui s'est heurté à l'opposition des riverains de l'aéroport de Strasbourg. Le problème vient de l'absence d'aménagement du territoire à long terme, puisqu'on a laissé la ville s'approcher du cône de bruit de l'aéroport, d'où ce conflit entre une ville qui essaie de dormir et une ville en continu. Les nuisances sonores sont également un sujet important à Rennes, comme dans toutes les villes universitaires en Europe. L'Université génère une vie sociale, une forme de socialisation : la soirée étudiante. Et on se retrouve cette fois confronté à des frottements entre la ville qui dort et la ville qui s'amuse.
Autre conflit lié à l'activité nocturne : il est apparu dès 1996-1997dans des villes comme Lyon, Strasbourg, etc. Lié à la prostitution, c'est le conflit entre la ville qui dort et la ville « qui s'amuse ou qui travaille ». Quand la nuit tombe 22 ou 23 heures, pas de problème ; quand elle tombe à 16 heures en plein hiver à Strasbourg, les gamins qui sortent de l'école croisent les prostituées qui travaillent au pont Pasteur.
Mentionnons aussi les conflits en banlieue, que nous renvoient les images des incendies de véhicules dans certains quartiers de Strasbourg, par exemple. On constate que les voitures brûlent dans des zones éloignées du centre-ville, dans des endroits et à des heures où il n'y a plus de ville : ce sont des quartiers où il n'y a plus de commerces (il n'y en a y déjà pas beaucoup en journée), plus de police (elle s'est retirée au centre-ville), où les centres socioculturels sont fermés, où il n'y a donc plus d'encadrement social.
Autre conflit, non spatialisé celui-là : le conflit entre la terre et le ciel, je pense aux pollutions lumineuses. Pour réfléchir à ces conflits, je vous propose de revenir aux deux clés d'entrée que je vous ai proposées : la nuit, temps de la liberté ou temps de la peur.
Je pense que la nuit est un espace-temps de liberté limitée. L'être humain réagit comme les papillons : il est attiré, voire manipulé, par la lumière. De plus, il est manipulé par les médias. Les médias peuvent survaloriser un centre-ville parce qu'il est l'objet d'un travail sur l'attractivité et la qualité de la vie, mais ils peuvent aussi le dévaloriser à cause de conflits, de petites nuisances. Ils peuvent aussi surtout dévaloriser des banlieues ou des espaces périphériques, qu'on a alors tendance à éviter, même s'ils ne sont pas dangereux.
Par ailleurs, à mesure que l'on avance dans la nuit, l'offre urbaine est réduite, en nombre et dans l'espace. C'est le cas des commerces, notamment l'alimentaire. L'offre urbaine est également plus spécialisée. Essayez d'acheter un costume en pleine nuit : c'est impossible. L'espace collectif, c'est-à-dire l'espace public et les grands magasins, est réduit. La nuit, donc, il y a moins de lieux accessibles, moins de variété, moins de services et moins de qualité.
La nuit est réputée favoriser les mélanges, les rencontres, la convivialité. En fait, la ville, la nuit, génère de véritables ségrégations. Le mélange est une illusion parce que, dans la ville la nuit, chaque tribu a ses propres codes, en fonction de sa tenue et de son âge aussi éventuellement, d'où des typologies spécifiques d'accès, qu'il s'agisse des discothèques ou des bars d'ambiance. De plus, le coût d'accès à la nuit est prohibitif. Dans la ville, la nuit, tout est payant, et cher. Les espaces collectifs sont payants ; les taxis sont plus chers qu'en journée ; même le verre de bière est plus cher.
En ce qui concerne l'insécurité, la nuit - me semble-t-il -n'est pas un territoire dangereux, où il vaudrait mieux ne pas s'aventurer. S'agissant de la mortalité tout d'abord, vous connaissez cette expression qui dit : « Ah, le pauvre, il ne passera pas la nuit ! » Les chronobiologistes ont effectivement montré qu'un creux de température affecte le corps humain à 3 h 30 du matin, qu'il est donc plus fragile à ce moment-là. A ce propos, j'ai consulté les données de l'état civil et celles des hôpitaux de trois grandes villes de l'est de la France. J'ai constaté qu'on n'y meurt pas plus la nuit que le jour. Les grands accidents industriels (Three Mile Island, Bhopal, Tchernobyl) sont tous survenus en pleine nuit. Pourquoi ? Parce que l'homme n'est pas un animal nocturne : il calcule moins bien, surveille moins bien, est moins vigilant la nuit.
Quant à la délinquance de voie publique, elle est moins importante la nuit qu'en journée. C'est le cas aussi des cambriolages d'habitations. Par contre, ce n'est pas vrai pour les cambriolages de bâtiments industriels ou commerciaux, qui ont lieu, eux, plutôt la nuit. Les violences urbaines ne sont pas nocturnes au sens strict. Elles ont plutôt lieu à partir de 21 heures jusqu'à 1 heure-1h30 du matin que la nuit, entre 1h30 et 4h30 du matin.
Enfin, dernier signe d'insécurité, les accidents de la circulation : ils sont moins nombreux la nuit. Les pics d'accidents se produisent le matin à l'entrée et à la sortie des villes. Mais ils sont plus graves la nuit à cause des feux de croisement clignotants, de la vitesse ou des substances que les conducteurs ont pu ingurgiter.
En guise de conclusion, la ville, la nuit, se présente donc comme un système amputé. Les villes ne sont pas « complètes » la nuit. Certaines fonctions sont assurées : l'alimentation en énergie de la ville, l'élimination des déchets, la production (Peugeot, par exemple), la protection et la sécurité, la santé. En revanche, d'autres fonctions sont déficientes : l'offre de biens et de services (l'ouverture au public des administrations prend fin vers 16h-16h30) ou l'offre culturelle (la nuit, pas le soir) sont limitées, les loisirs sont spécialisés, la communication est limitée.
Cette alternance ville/non-ville renvoie à une question qui me semble essentielle, celle de la citoyenneté. Dans la ville, la nuit, certains droits sont respectés dans l'espace et dans le temps : le logement, la santé, par exemple. Certains droits sont respectés dans le temps, mais pas dans tous les quartiers : la sécurité ou le droit à un environnement dit sain (les entreprises rejettent leurs polluants, selon des relevés effectués à Strasbourg, plutôt le soir qu'en pleine journée). Certains droits ne sont pas respectés, ni dans l'espace ni dans le temps : ce sont les droits à la mobilité, à l'emploi, à la culture, au sport et aux loisirs. Au final, la nuit se caractérise donc par une alternance citoyenneté/non-citoyenneté.
Autre façon de conclure : considérer la nuit comme un front pionnier, à l'image du Far West. La nuit est un espace-temps qui n'est pas totalement exploré ni peuplé, mais qui subit une conquête progressive par les activités et la population du jour. La nuit est peuplée par une population singulière, majoritairement masculine. Plus on avance dans la nuit, moins on rencontre de femmes, moins elles sont seules. Les territoires sont enclavés, comme au Far West, il y a peu de moyens de transport, peu de commerces, des coûts élevés, une insécurité relative et un contrôle lointain. Ça brûle au quartier du Neuhof : les pompiers, l'armée et la police interviennent dans une zone de non-droit, nous dit-on, puis ils repartent. Ce sont des endroits où la police ne peut plus aller, car elle en est absente la nuit, ses bureaux sont fermés, donc on organise l'opération Rintintin, puis on rentre au fort.
La nuit, c'est aussi le règne des activités particulières -souvenez-vous des films de John Ford -, comme le jeu, la prostitution, la drogue, l'alcool, l'argent qui circule - on utilise un peu moins sa carte bleue. On y retrouve aussi le conflit entre les colons et les Indiens. Qui sont les colons ? Ce sont ceux qui vivent le jour et qui se disent : « Il y a un endroit super branché à Rennes, il faut que j'y aille ce week-end. » Cet endroit super branché est peuplé par des tribus de nomades (ce sont les Indiens), qui rechignent à voir les colons débarquer. Dès qu'ils arrivent, ils partent ailleurs pour créer un autre endroit branché, pendant que les colons avancent. Dans les villes de la taille de Rennes, les vrais noctambules, ceux qui vivent vraiment en rythme décalé la nuit, ne sont que 100 voire 150. Généralement, ils ont une constitution physique vigoureuse, qui leur permet de travailler le lendemain, ou alors ils sont clochards le jour et noctambules la nuit. Et puis, évidemment, l'image du front pionnier renvoie au fait que ce milieu obéit à des règles particulières.
À partir de ces constats, on peut avancer quelques pistes de travail. Comment rendre la ville plus hospitalière, plus accessible ? Cela passe par un travail sur l'espace public, sur la lumière, sur les transports de nuit, sur des pôles de services. Je ne pense pas à une ville ouverte 24h/24 mais, un peu comme dans le modèle haussmannien, elle doit pouvoir offrir des pôles, des oasis dans un désert social, qui regroupent des services publics, des services privés et quelques activités, autour des gares par exemple, où cela ne gêne personne.
Il s'agit aussi d'anticiper les conflits. Je pense au type de négociations qui ont abouti à une charte de la nuit à Lille, à l'animation nocturne pour renforcer l'attractivité de la ville. Plus on peuplera la ville en soirée, moins on aura peur.
Et puis, il y a aussi cette idée de définir un droit de la ville, dans l'espace et dans le temps. Bruxelles vient de créer un Observatoire de la nuit. Helsinki propose des crèches de nuit depuis plus de dix ans. À Oviedo, des centres sociaux restent ouverts la nuit. Les bibliothèques et les universités sont ouvertes la nuit aux États-Unis (il y a également des projets de ce type aux Pays-Bas). À New-York, des cours de justice fonctionnent la nuit. Paris vient de mettre en place le Noctilien, Amsterdam a un maire de nuit. Les astronomes font pression pour que le ciel soit classé dans le patrimoine mondial de l'humanité.
Va-t-on vers une ville en 24/7 (ouverte vingt-quatre heures sur vingt-quatre, sept jours sur sept) ? C'est à nous de le décider. Je cite Jean-Claude Vidal, qui à propos des questions de temps disait toujours : « Est-ce que le jeu en vaut la chandelle ? » Pouvoir acheter le dernier Harry Potter à minuit, profiter des soldes nocturnes sur les Champs-Élysées, faire ses courses le dimanche : très bien ! Mais cela implique que les collectivités locales proposent des services de bus. On assiste en fait au détricotage de tout un système.
À Belfort, par exemple, les faucons pèlerins, qui sont normalement diurnes, chassent désormais la nuit depuis que l'on a illuminé les alentours du château. On constate qu'ils ont modifié leur régime alimentaire. Or, contrairement au faucon pèlerin, l'homme reste un animal diurne. C'est du moins ce qu'affirme mon ami Bernard Millet, le chronobiologiste. C'est pourquoi le travail de nuit pose un vrai problème. Ceux qui travaillent de nuit disent qu'ils l'ont choisi, qu'ils gagnent plus, qu'ils subissent moins la hiérarchie, qu'ils peuvent s'occuper de leurs enfants le lendemain. C'est peut-être vrai pour l'instant, mais le jour où le travail de nuit sera banalisé, comme aux États-Unis, on gagnera la même chose la nuit que le jour. Autres problèmes liés au travail de nuit : les risques cardiaques, d'obésité, et surtout une diminution de l'espérance de vie de cinq ans.
Au slogan d'un club de vacances qui disait : « Si tu dors, t'es mort », j'opposerai la vision d'un autre ami des politiques de temps, qui rappelait qu'il n'y a pas de vie sans rythme. S'il n'y a pas de rythme, si on est dans la continuité, il n'y a pas de vie. Bernard Millet a tranché : selon lui l'homme est et restera un animal diurne.
Quant à moi, je pensais que l'on pouvait rêver de nuits plus belles que le jour. Pour sourire ensemble, je vous propose ma vision de Rennes en 2047.
A cette époque, l'homme a tout exploré, tout colonisé. Il s'ennuie un petit peu, comme aujourd'hui ; le chômage est élevé, cela n'a pas beaucoup changé de ce point de vue. Le sentiment d'insécurité est répandu, le développement séparé, l'urbanité se meurt. Il n'y a plus d'endroits où se rencontrer. Les Américains ont renoncé à aller sur Mars, il n'y a donc plus de frontière.
L'idée revient au maire de Rennes (j'ignore qui ce sera), qui s'est souvenu que, lors d'un colloque, un géographe avait proposé de faire de la nuit un espace de convivialité, de projets, pour l'emploi, contre les crispations sécuritaires et pour une nouvelle urbanité. Avec son adjointe aux politiques de transports, il a réussi à convaincre le gouvernement : une Assemblée nationale de la nuit a été élue au suffrage universel. Un gouverneur a été désigné par le président de la République pour s'occuper des DON-TON : les départements et territoires d'outre-nuit. Il occupera ce poste pour une durée de trente ans, jusqu'à l'indépendance de ces territoires. Un maire de nuit est élu dans chaque commune.
Dans les sommets du G24, le président de la République, avec son ami Lula, se bat pour une nouvelle gouvernance nocturne. Edmond Hervé a été nommé ambassadeur de la nuit auprès de l'Unesco. Tous les services publics et les transports en commun fonctionnent 24h/24, et Rennes se prend pour New York. Une journée sans télé est instaurée par le ministère de la Culture, et les citadins se réfugient dans les musées, les bibliothèques, ouverts de nuit, tout comme les piscines.
Les scolaires, dès l'âge de 14 ans, et les étudiants ont le choix entre un enseignement diurne ou nocturne. Depuis des années déjà, Rennes est devenue le centre européen du spectacle de nuit. Son université de la nuit a été lancée en 2005, après un colloque. Hambourg, Milan, Madrid, Porto et Rotterdam suivent le mouvement. Il a fallu revoir la notion d'intercommunalité, pour mettre en place des intercommunalités temporelles, et non pas uniquement spatiales comme aujourd'hui. Concernant le développement économique, la nuit est transformée en zone franche. Les entreprises qui travaillent la nuit sont exonérées de taxe professionnelle, la TVA de nuit est diminuée, une prime d'aménagement du temps a été créée. Les avantages qui découlent de ces mesures sont en partie redistribués aux salariés.
Toute ouverture d'un commerce de jour - parce que l'on y s'oppose à leur développement - est soumise à l'accord préalable du Haut Comité de la nuit (nouvelle appellation du Bureau du temps). En termes d'aménagement du territoire, un schéma de nuit, concernant l'ouverture des commerces et la politique de la lumière, a été mis en place dans chaque commune. Enfin, chaque commune met à disposition un terrain, un dazibao spatial, où, comme cela s'est passé au Far West, si l'on est capable d'y construire sa maison en une nuit, on en devient propriétaire.
Rennes est devenue la capitale du Nigbt Art : des pépinières artistiques de nuit permettent l'éclosion de nouveaux talents. Pour répondre aux exigences de protection, des réserves de nuit et des zones d'obscurité et de silence ont été mises en place. On a aussi lancé la manifestation Nuit noire, consistant une fois dans l'année à éteindre toutes les lumières de la ville de Rennes. La luciole est devenue l'emblème de la République française - ou européenne. En ce qui - concerne le bien-être, des toilettes publiques ouvertes la nuit ont été installées dans chaque quartier, des hamacs ont été disposés dans chaque arrêt de bus.
Résultat : l'insécurité a diminué et, plus que jamais, pour renvoyer à Richard Bohringer, on peut dire que « c'est beau une ville la nuit ».
26. La construction d'un projet éducatif territorial
Circulaire n° 2013-036 du 20 mars 2013 adressée aux préfets de région et de département (DRJSCS, DDCS / DDCSPP), aux rectrices et recteurs d'académie ; aux directrices et directeurs académiques des services de l'éducation nationale ; aux inspectrices et inspecteurs chargés des circonscriptions du premier degré ; aux directrices et directeurs d'école.
Le projet éducatif territorial (PEDT), mentionné à l'article D. 521-12 du code de l'éducation, formalise une démarche permettant aux collectivités territoriales volontaires de proposer à chaque enfant un parcours éducatif cohérent et de qualité avant, pendant et après l'école, organisant ainsi, dans le respect des compétences de chacun, la complémentarité des temps éducatifs.
Ce projet relève, à l'initiative de la collectivité territoriale compétente, d'une démarche partenariale avec les services de l'État concernés et l'ensemble des acteurs éducatifs locaux. À l'occasion de la nouvelle organisation du temps scolaire qui se met en place dans les écoles primaires à compter de la rentrée 2013, cette démarche doit favoriser l'élaboration d'une offre nouvelle d'activités périscolaires, voire extrascolaires, ou permettre une meilleure mise en cohérence de l'offre existante, dans l'intérêt de l'enfant.
La présente circulaire a pour objet de préciser les objectifs et les modalités d'élaboration d'un projet éducatif territorial, et de faciliter la coopération entre les collectivités territoriales engagées dans cette démarche de projet et les services de l'État chargés de l'accompagner jusqu'à sa contractualisation .
I - Les objectifs et les principes
Le projet éducatif territorial est un outil de collaboration locale qui peut rassembler, à l'initiative de la collectivité territoriale , l'ensemble des acteurs intervenant dans le domaine de l'éducation : le ministère de l'éducation nationale, le ministère des sports, de la jeunesse, de l'éducation populaire et de la vie associative, les autres administrations de l'État concernées (ministère de la culture et de la communication, ministère délégué à la ville, ministère délégué à la famille, notamment), les caisses d'allocations familiales ou la mutualité sociale agricole, les autres collectivités territoriales éventuellement impliquées, ainsi que des associations de jeunesse et d'éducation populaire, ou d'autres associations et institutions à vocation sportive, culturelle, artistique ou scientifique notamment, et des représentants de parents d'élèves.
L'objectif du projet éducatif territorial est de mobiliser toutes les ressources d'un territoire afin de garantir la continuité éducative entre, d'une part les projets des écoles et, le cas échéant, les projets des établissements du second degré et, d'autre part, les activités proposées aux enfants en dehors du temps scolaire. Il doit donc permettre d'organiser des activités périscolaires prolongeant le service public d'éducation et en complémentarité avec lui . Il peut être centré sur les activités périscolaires des écoles primaires ou aller jusqu'à s'ouvrir, selon le choix de la ou des collectivités intéressées, à l'ensemble des temps scolaire, périscolaire et extrascolaire, de l'école maternelle au lycée, à l'instar de certains projets éducatifs locaux actuels.
Le projet éducatif territorial permet un partenariat entre les collectivités territoriales qui en ont pris l'initiative et les services de l'État afin de soutenir des actions correspondant à des besoins identifiés sur chaque territoire. Il favorise les échanges entre les acteurs tout en respectant le domaine de compétences de chacun d'entre eux, et contribue à une politique de réussite éducative et de lutte contre les inégalités scolaires ou d'accès aux pratiques de loisirs éducatifs. La commune ou l'EPCI assure la coordination des actions et leur conformité avec les objectifs retenus. Un comité de pilotage réunit l'ensemble des acteurs pour élaborer et suivre la mise en oeuvre du projet éducatif territorial.
Dans le cadre de la consultation des conseils d'école sur l'organisation des activités périscolaires, en application de l'article D. 411- 2 du code de l'éducation, ceux-ci sont associés à la réflexion sur l'élaboration des PEDT.
Le projet éducatif territorial est élaboré à l'initiative de communes ou d'établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) et destiné aux enfants scolarisés sur le territoire de ces collectivités. Il formalise l'engagement des différents partenaires à se coordonner pour organiser des activités éducatives et assurer l'articulation de leurs interventions sur l'ensemble des temps de vie des enfants, dans un souci de cohérence, de qualité et de continuité éducatives.
Il prévoit prioritairement, mais non exclusivement, des activités proposées pendant le temps périscolaire aux jeunes scolarisés dans les écoles primaires du territoire concerné. Ce temps est lié aux horaires de début et de fin de l'école, ainsi qu'à l'horaire de la pause méridienne, arrêtés par le directeur académique des services de l'éducation nationale en application des articles D. 521-10 à D. 521-13 du code de l'éducation modifiés par le décret n° 2013-77 du 24 janvier 2013 relatif à l'organisation du temps scolaire dans les écoles maternelles et élémentaires.
Les activités éducatives que propose le projet éducatif territorial peuvent s'articuler, le cas échéant, avec les projets d'éducation artistique et culturelle mis en oeuvre sur le temps scolaire, de même qu'avec les projets conçus sur le temps extrascolaire notamment en matière d'offre d'activités physiques et sportives (APS).
L'élaboration, la mise en oeuvre et le suivi du projet éducatif territorial relèvent des collectivités territoriales et de leurs partenaires, notamment associatifs, qui doivent présenter les garanties nécessaires au regard de la sécurité physique et morale des mineurs.
Elles sont garantes de sa qualité.
Les activités proposées dans ce cadre n'ont pas de caractère obligatoire, mais chaque enfant doit avoir la possibilité d'en bénéficier.
Le projet éducatif territorial prend la forme d'un engagement contractuel entre les collectivités, les services de l'État et les autres partenaires. Des conventions complémentaires peuvent, le cas échéant, lui être adossées pour préciser la nature et le niveau des moyens mobilisés par chacun des organismes partenaires.
II - L'appui des dispositifs existants
Le projet éducatif territorial prend en compte l'offre périscolaire existante et peut s'appuyer sur les différents dispositifs qui peuvent déjà exister dans les communes concernées.
Ainsi, il peut s'appuyer sur les projets éducatifs locaux (PEL) et les contrats éducatifs locaux (CEL) existants : ces derniers constituent, par leurs finalités et les moyens qu'ils mobilisent, un cadre de collaboration locale visant à l'articulation et à la complémentarité de tous les temps et acteurs éducatifs. Ils pourront tenir lieu d'avant-projet en vue de l'élaboration d'un projet éducatif territorial (voir §3 - La méthode et le calendrier). Cela nécessitera éventuellement une adaptation des projets actuels pour tenir compte des modifications des rythmes éducatifs.
Les collectivités territoriales, souhaitant contractualiser avec l'État dans le cadre de la politique de la ville, pourront intégrer les activités du projet éducatif territorial dans les actions éducatives du contrat de ville . Inversement, les actions éducatives conçues dans le cadre du contrat de ville pourront servir de base, le cas échéant, au projet éducatif territorial.
Afin de nourrir son volet artistique et culturel, le projet éducatif territorial peut prendre en compte les dispositifs de contractualisation existant dans le domaine culturel : contrat local d'éducation artistique (CLEA), projet territorial d'éducation artistique (PTEA), contrat « territoire lecture » (CTL) ainsi que les enseignements artistiques spécialisés dispensés sur le territoire.
Il peut également être articulé avec le contrat local d'accompagnement à la scolarité (CLAS) piloté dans le cadre des comités départementaux de soutien à la parentalité.
Le projet éducatif territorial se construira en cohérence avec le contrat « enfance - jeunesse » (CEJ) , que de nombreuses collectivités ont conclu avec les caisses d'allocations familiales.
L'accompagnement éducatif après la classe proposé aux élèves des écoles de l'éducation prioritaire et des départements d'outre-mer a également vocation à être articulé avec le projet éducatif territorial.
Enfin, le projet éducatif territorial peut s'élargir aux activités extrascolaires afin d'assurer une complémentarité des activités éducatives tout au long de l'année.
III - La méthode et le calendrier
La construction du projet éducatif territorial suppose au préalable :
• de délimiter un périmètre d'action cohérent (la commune ou l'EPCI compétent ou un territoire plus large intéressant plusieurs collectivités territoriales) ;
• d'identifier les besoins, notamment en fonction des caractéristiques du public scolaire (voir, ci-dessous, les éléments de cahier des charges) ;
• de définir les grandes priorités communes aux différents partenaires en matière d'éducation ;
• d'analyser les principales ressources du territoire concerné (inventaire de l'offre locale d'activités dans les champs culturel, artistique, sportif, etc.).
Pendant la phase d'élaboration du projet éducatif territorial, les collectivités qui souhaiteront être accompagnées peuvent bénéficier de l'aide d'un groupe d'appui départemental, mis en place par le préfet de département (DDCS/DDCSPP) et la direction des services départementaux de l'éducation nationale (DSDEN), avec le concours éventuel d'autres services de l'État, des caisses d'allocations familiales et caisses de la mutualité sociale agricole) et du conseil général. Ce groupe veillera, dans toute la mesure du possible, à associer les services compétents des collectivités et les associations dont l'expertise est reconnue dans la mise en oeuvre de projets éducatifs.
Cet accompagnement pourra se poursuivre pendant toute la phase d'élaboration, jusqu'à la signature du projet afin de faciliter la mise en place d'activités périscolaires ou d'adapter l'existant au futur projet éducatif territorial.
Dans un premier temps , la collectivité propose aux services de l'État partenaires un avant-projet précisant :
• le périmètre du territoire concerné ;
• les données générales relatives au public concerné (nombre d'écoles, d'enfants concernés, etc.) ;
• les ressources mobilisées (humaines et matérielles) et les domaines d'activités prévues (sport, activités culturelles et artistiques, éveil citoyen, etc.) ;
• le cas échéant, les demandes de dérogation à l'organisation du temps scolaire, élaborées en fonction du PEDT, à solliciter avant une date qui sera communiquée aux maires et présidents d'EPCI par le directeur des services de l'éducation nationale (DASEN).
Dans un second temps , la collectivité qui a l'initiative du projet éducatif territorial approfondit la concertation avec la direction des services départementaux de l'éducation nationale et la direction départementale de la cohésion sociale (DDCS/DDCSPP), ainsi qu'avec les autres partenaires éventuels du projet, afin de l'enrichir en tenant compte des éléments de cahier des charges, lequel doit indiquer :
• l'état des lieux (activités périscolaires et extrascolaires existantes, besoins non satisfaits, atouts et contraintes) ;
• les publics cibles (nombre d'enfants, classes d'âge) et les modalités de leur participation ;
• les objectifs poursuivis en matière éducative et les effets attendus ;
• les activités proposées (en cohérence et en complémentarité entre elles et avec les projets d'école) ;
• les tarifs des prestations éventuellement facturées aux familles ;
• l'articulation avec les éventuels dispositifs existants ;
• les acteurs (services et associations) engagés ;
• le cas échéant, l'articulation avec les activités extrascolaires (petites et grandes vacances) et/ou avec les activités périscolaires proposées aux élèves de l'enseignement secondaire ;
• la structure de pilotage (composition, organisation) ;
• les modalités d'information des familles ;
• les éléments prévus dans le bilan annuel (nombre d'enfants concernés, actions menées, etc.) ;
• les modalités d'évaluation (périodicité et critères).
Le projet est transmis à la direction des services départementaux de l'éducation nationale et à la DDCS/DDCSPP qui organiseront conjointement l'examen des éventuelles demandes de dérogation en matière d'horaire des écoles et/ou des conditions d'encadrement.
Le projet éducatif territorial prend la forme d'un engagement contractuel signé entre la collectivité porteuse, le préfet, le DASEN par délégation du recteur et les autres partenaires, auquel le conseil général peut s'associer, notamment pour adapter les transports scolaires.
La signature par le préfet ou son représentant du projet éducatif territorial permet de bénéficier des dérogations aux conditions d'encadrement (voir annexe 5 ).
La durée maximale de cet engagement est de trois ans.
Le conseil départemental de l'éducation nationale (CDEN) est informé des PEDT réalisés dans le département.
IV - Le fonctionnement
a) Les intervenants
Le projet éducatif territorial s'appuie sur les personnels d'animation, et mobilise le mouvement associatif (associations complémentaires de l'enseignement public, mouvements de jeunesse et d'éducation populaire, mouvement sportif local, institutions culturelles, associations locales, etc.). Il peut également mobiliser les bénévoles et les associations de parents.
Pour les accueils collectifs de mineurs, notamment les accueils de loisirs périscolaires, organisés dans le cadre d'un projet éducatif territorial, la qualification des membres de l'équipe d'animation doit être conforme à l'article R. 227-12 du code de l'action sociale et des familles. Lorsque des activités physiques y sont organisées, les qualifications des intervenants pour ces activités sont précisées à l'article R. 227-13 du même code.
Le maire ou le président de l'EPCI peut par ailleurs recourir à des enseignants volontaires pour assurer l'encadrement du temps périscolaire, comme cela est déjà parfois le cas aujourd'hui. Les enseignants sont alors rémunérés et assurés pour cette activité par la collectivité.
b) Les locaux
Les activités prévues dans le cadre d'un projet éducatif territorial, comme toute activité périscolaire organisée par la commune, peuvent se dérouler dans les locaux et les équipements scolaires conformément à l'article L. 212-15 du code de l'éducation.
Celui-ci prévoit que le maire ou le président de la collectivité propriétaire des bâtiments de l'école peut y organiser des activités à caractère sportif, culturel ou socio-éducatif pendant les heures où les locaux ne sont pas utilisés pour les activités liées aux besoins d'enseignement. Il doit consulter le conseil d'école sur le projet d'organisation de ces activités.
Le maire ou le président de l'EPCI peut aussi, sur le temps dont il assure la coordination, accueillir les enfants dans un autre lieu que l'école, sous réserve que les enfants soient confiés à la sortie de l'enceinte scolaire à un ou plusieurs adultes. Le trajet jusqu'au lieu du déroulement de l'activité se fera alors sous la responsabilité de ce(s) dernier(s). En conséquence, il convient de veiller à ce que le déplacement ne soit pas trop long et que le parcours puisse s'effectuer en toute sécurité.
c) Les activités
Les activités proposées dans le cadre du projet éducatif territorial ont vocation à s'adresser à tous les enfants . Elles doivent favoriser le développement personnel de l'enfant, de sa sensibilité et de ses aptitudes intellectuelles et physiques, son épanouissement et son implication dans la vie en collectivité. Elles ne doivent pas se limiter à des activités dites d'éveil, mais prendre en compte l'enfant dans toutes ses dimensions et dans son environnement. Elles doivent rechercher la cohérence et la complémentarité entre elles et avec le projet d'école.
Ainsi organisé, le projet éducatif territorial a l'ambition de mieux articuler les différents temps de l'enfant en s'appuyant sur la mobilisation de tous les acteurs impliqués, et de donner une nouvelle cohérence à la journée de l'enfant, afin de contribuer à mettre en place les conditions de sa réussite scolaire et de son épanouissement.
* 82 Voir « Le temps des parents après une naissance », par Denis Bauer, Études et résultats n°483, avril 2006.
* 83 « Les conditions d'une paternité active », par Dominique Méda, dans Conciliation travail-famille : attention travaux, par Chantal Nicole-Drancourt (dir.), coll. Logiques sociales, L'Harmattan, 2009. Voir aussi Les temps des femmes. Pour un nouveau partage des rôles, par Dominique Méda, Flammarion, 2001.
* 84 « After the Family Wage : Gender Equality and the Welfare State », par Nancy Fraser, Political Theory vol. 22, n°4, 1994.
* 85 Délais : - 4 à 6 mois donnés à l'autorité saisie (préfet pour le PACC et le président de la structure intercommunale pour le PACT) pour l'instruction de la demande ;
- 2 mois donnés au préfet de département (PACT) ou au préfet de région pour approuver ou rejeter la création de la zone, et déterminer son périmètre ; à l'expiration de ce délai, la proposition faite par l'autorité en charge de l'instruction sera réputée acceptée.
* 86 Le guide méthodologique est disponible sur le site de Tempo territorial : http://tempoterritorial.free.fr/
* 87 Cf « interminables files d'attente : supermarché, commissariat, préfecture, palais de justice, hôpital, cinéma, musée ... on fait la queue partout » (Le Monde, 10 juin 2011).
* 88 Note n° 10 - Fondation Jean-Jaurès / Observatoire de l'innovation locale - 14 octobre 2013 - www.jean-jaures.org
Les collectivités locales et leurs acteurs inventent chaque jour nos vies de demain. Dans de nombreux domaines, les initiatives des territoires participent à faire émerger une France durable, solidaire et citoyenne. L'Observatoire de l'innovation locale de la Fondation Jean-Jaurès s'emploie à repérer, analyser et valoriser ces innovations. Il est le lieu où se découvre et se partage une invention locale porteuse de solutions pour notre société tout entière.
* 89 Voir le dossier « L'Homme débordé : peut-on retrouver le temps ? », Philosophie magazine, no 57, mars 2012.
* 90 Cf. le chrono-aménagement à Grenoble.
* 91 A l'instar des villes « cittaslow », qui prônent le bien vivre et s'engagent à ralentir le rythme de vie de leurs citoyens.
* 92 Mindmap réalisé par Chrystelle Amblard, chargée de mission « temps et territoire », communauté d'agglomération de Montpellier.
* 93 Ici, il conviendrait de pouvoir repérer les rythmes de la vie dominicale, ce que ne permettait pas cette enquête (mais aucune enquête à notre connaissance ne produit de telles données, sauf l'enquête emploi du temps à travers l'usage de semainiers. Mais pour l'instant ces données n'ont pas été exploitées). On peut ici imaginer que regarder la télévision est une activité qui, pour les actifs, se déroulent en fin de journée, tandis que pour les retraités cette activité peut se dérouler sur l'ensemble de la journée.
* 94 On observera que l'enquête ayant été effectuée en septembre/octobre, les 6 mois précédents incluent la période des congés. Signe d'une assez faible mobilité durant les congés annuels.
* 95 L'écart observable entre la part de ceux qui indiquent travailler le dimanche dans le tableau 1 avec la part de ceux qui ont répondu par l'affirmative à la question précise « vous arrive-t-il de travailler le dimanche (plus de deux heures) » vient de ce que, dans le tableau 1, plusieurs réponses étaient possibles et les répondants ont pu cocher les activités qui leur paraissaient caractériser le dimanche.
* 96 Il s'agissait dans cette enquête d'une question ouverte « quelles sont les activités que vous souhaiteriez pouvoir pratiquer le dimanche ? » à laquelle les personnes répondaient avec leurs propres mots. Ces réponses ont ensuite été recodées en les regroupant par nature d'activités.
* 97 « se promener », « balade », « randonnée » ont été codées comme activités sportives.
* 98 Intervention préparée dans le cadre de la rencontre franco-suisse des urbanistes « concevoir la ville pour vivre le temps », juillet 2013. Plus d'information sur la mission « temps et services innovants » sur www.espacedestemps.grandlyon.com.
* 99 Enquête Kéolis.
* 100 Enquête covoiturage Grand Lyon, avril 2013.
* 101 www.tempoterrorial.free.fr
* 102 Chiffres ADEME.
* 103 Lverchere-tortel@grandlyon.org
* 104 Jean Marc Jancovici, expert, bilan carbone ADEME.
* 105 « les entreprises au défi de l'ubiquité », Futuribles, mars 2011.
* 106 Cisco n'est pas forcément neutre puisqu'il vent des solutions techniques facilitant le travail à distance.
* 107 Étude de Cabinet Forrester, indépendant, autre étude du cabinet Stratégy Analytics.
* 108 Cf news de Chronos mai 2011.
* 109 Cf. www.paristechreview.com/pourquoi la révolution douce du télétravail ne prend pas, 24 mars 2011.
* 110 Cf. www.paristechreview.com/pourquoi la révolution douce du télétravail ne prend pas, 24 mars 2011.
* 111 Cf. article de Futuribles.
* 112 Direction stratégie et rayonnement métropolitain - service prospective, évaluation et développement durable - dossier suivi par Evelyne Reeves : e.reeves@agglo-rennesmetropole.fr
* 113 Avant de rejoindre l'équipe de l'Agence associative de développement territorial (Aider), elle a coordonné des projets culturels et de solidarité internationale. Elle a également administré une structure d'accès aux soins pour les publics en situation d'addiction. Basée en Drôme, l'Aider vise l'émergence et l'expérimentation d'actions innovantes et alternatives. Elle intègre les politiques temporelles à ses modes d'action depuis 2008.
* 114 Luc Gwiazdzinski est géographe, professeur à l'université de Strasbourg. 11 dirige la Maison du temps et de la mobilité de Belfort et poursuit depuis les années 90 une réflexion sur la nuit urbaine et s'emploie à trouver des solutions pratiques aux problèmes posés par l'éclatement des rythmes urbains. 11 est l'auteur de La ville 24h/24 (éd. de L'Aube, 2003) et La nuit, dernière frontière de l'aube (éd. de L'Aube, 2005).