B. L'ÉVOLUTION VERS UNE UNIVERSITÉ GUYANAISE DE PLEIN EXERCICE : UN PRINCIPE ACTÉ DEPUIS LE DÉBUT DES ANNÉES 2000
1. L'ambition d'une structure universitaire adaptée aux réalités démographiques, géographiques et économiques de la Guyane
a) Le rapport Blamont
M. Claude Allègre, alors ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie, a confié au professeur Jacques Blamont, le 28 octobre 1998, une mission d'étude relative à l'avenir du pôle universitaire guyanais « afin que l'autonomie guyanaise se prépare autour d'un projet cohérent et programmé qui pourrait se dérouler sur deux contrats quadriennaux ». Achevé en 1999 et approuvé par le congrès des membres des conseils régional et général de la Guyane, le rapport n'est finalement publié qu'en 2001 64 ( * ) .
Dans ce rapport, le professeur Jacques Blamont rappelle qu'en novembre 1994 M. Antoine Karam, président du conseil régional de la Guyane a déclaré, lors de la rentrée solennelle de l'UAG, que « la vocation au rayonnement de la Guyane dans son environnement latino-américain milite fortement en faveur d'une Université de la Guyane ».
Une des principales propositions du rapport du professeur Jacques Blamont réside dans la constitution d'un groupement d'intérêt public (GIP) 65 ( * ) , appelé « Pôle universitaire guyanais » (PUG), qui réunirait différents types de partenaires (État, collectivités territoriales, UAG, institut universitaire de la formation des maîtres de Guyane, plusieurs universités métropolitaines et étrangères) et permettrait d'assurer la cohérence de la politique d'enseignement supérieur et de recherche sur le territoire en regroupant autour d'un même projet d'élévation des qualifications :
- l'institut universitaire de la formation des maîtres (IUFM) de la Guyane, non encore officiellement créé à la date de publication du rapport, afin de former un corps professoral stable fondé sur un recrutement local parmi les jeunes guyanais ;
- le premier cycle (licence) avec une forte dimension professionnalisante afin de préparer au mieux l'insertion des jeunes dans la vie active, tout en développant un noyau puissant et performant de formations technologiques courtes (DUT et BTS 66 ( * ) ) ;
- le second cycle (master) appelé à former un corps de cadres guyanais dynamique, aussi bien dans les domaines de spécialisation industrielle (électronique, industrie spatiale) du territoire que dans les domaines des politiques sociales, de la jeunesse, de l'éducation populaire, de l'animation culturelle et des métiers du sport ;
- le troisième cycle (doctorat), avec une recherche de niveau international potentiellement recentrée sur des secteurs clés (espace, environnement, agronomie, biodiversité, recherches tropicales et santé, éco-anthropologie et sciences humaines en Amérique latine...).
À l'issue des travaux préparatoires d'un comité de pilotage installé en 2002, le GIP « Pôle universitaire guyanais » est finalement créé le 18 mai 2004 67 ( * ) et installé sur le site de Troubiran, à Cayenne . Il réunit l'État, les collectivités territoriales (région, département, communauté de communes du centre littoral et ville de Cayenne), l'UAG, l'IUFM de l'académie de la Guyane, six établissements d'enseignement supérieur et de recherche en France métropolitaine (installés à Montpellier et Toulouse) et l'université de Brasilia. Il est constitué pour une durée de six ans . Il était prévu qu'il développe des partenariats en matière de recherche avec le Parc amazonien de Guyane 68 ( * ) et les différents organismes de recherche présents sur le territoire.
Le GIP PUG s'est avéré une plateforme de coordination efficace entre ses membres. Sous son impulsion, un schéma directeur de développement du pôle universitaire guyanais, adopté en juin 2006, prévoit un projet de constructions universitaires ambitieux visant à rassembler sur le site de Troubiran le pôle d'enseignement supérieur, l'IUFM et les bâtiments de la vie universitaire. Les travaux débutent en juillet 2007 et le transfert des enseignements depuis le site de Saint-Denis est opéré à partir de la rentrée 2009.
Après que le GIP a expiré en 2010, plusieurs instances ont manifesté le souhait de le réactiver au cours des deux dernières années. En juin 2012 , l' UAG présente un projet de convention constitutive d'un GIP « Pôle universitaire et d'innovation de la Guyane » , dans la perspective de la constitution d'une université pluri-territoriale des Antilles et de la Guyane. La région Guyane organise, le 28 mars 2013, un séminaire sur la réactivation du GIP PUG.
b) Les États généraux de l'outre-mer de 2009
Parmi les recommandations adoptées par la Guyane dans le cadre des États généraux de l'outre-mer , lancés en 2009 , apparaît une forte volonté d'approfondir le développement et l'autonomie du PUG par :
- l'accélération de la construction des bâtiments, qui suppose le déblocage des financements correspondants programmés pour la période 2007-2013, en particulier pour la réalisation des bâtiments de la recherche, de la bibliothèque et du restaurant universitaire, et des bâtiments complémentaires que sont le centre de ressources, le bâtiment administratif et le pôle santé ;
- le développement du parc de logement étudiant, avec la construction en urgence de 200 logements étudiants, complétés par 300 logements supplémentaires à l'horizon 2015 ;
- la création d'un pôle de recherche et d'enseignement supérieur (PRES) de la Guyane, doté du statut d'établissement public de coopération scientifique (EPCS) ;
- l'augmentation du numerus clausus du concours d'accès aux études médicales pour l'UAG ;
- la création d'un centre de recherche, de formation et de ressources dans le domaine de l'architecture et de l'écoconstruction en zone tropicale.
Dans ce contexte, la région Guyane adopte, en octobre 2009, un schéma régional de la recherche et de l'enseignement supérieur, conformément à l'article L. 214-2 du code de l'éducation, qui acte le principe de la création d'un PRES. La création d'une université de plein exercice en Guyane se profile à l'horizon 2020.
2. L'accélération du projet d'université de plein exercice
Les 11 et 12 avril 2011 , des assises de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation sont organisées au siège du PUG au campus de Troubiran, à l'initiative de la région Guyane et avec le soutien du ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche. Ces assises concluent à la structuration selon un mode fédéral de l'enseignement supérieur et de la recherche dans les Antilles et en Guyane autour de trois pôles à l'autonomie renforcée. À ce titre, chaque pôle aurait vocation à constituer un GIP qui serait compétent pour la vie universitaire, la conclusion de conventions avec les organismes de recherche et d'accords de coopération régionale et internationale avec prise en compte des impératifs locaux. L'UAG verrait ses responsabilités consacrées en matière de gestion des personnels enseignants et de délivrance des diplômes. L' évolution du PUG vers le statut d' université de plein exercice est une nouvelle fois évoquée pour l'horizon 2020.
Dans le cadre des assises de l'enseignement supérieur et de la recherche lancées par la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche à l' automne 2012 , les responsables universitaires et politiques guyanais renouvellent leur souhait d'un approfondissement de l'autonomie du PUG, avec un objectif de création d'une université de plein exercice en Guyane cette fois-ci ramené à 2017-2018 .
* 64 BLAMONT, Jacques, et DÉDÉ, Henri-Claude, Réalisme et vision - Texte du rapport « Blamont » sur la création d'une université en Guyane française , 2001, éditions du Conseil général de la Guyane.
* 65 Le professeur Jacques Blamont indique s'être fortement inspiré, sur la suggestion de M. Alain Némoz, du précédent du GIP « Pôle université Drôme-Ardèche » à Valence.
* 66 Brevet de technicien supérieur.
* 67 Journal officiel de la République française n° 115 du 18 mai 2004, page 8852, texte n° 98.
* 68 Décret n° 2007-266 du 27 février 2007 créant le parc national dénommé « Parc amazonien de Guyane ».