B. LES MÉTHODES D'ÉVALUATION DE FRANCE DOMAINE

Le chef de service de France Domaine, Mme Nathalie Morin, l'a constaté devant vos rapporteurs : l'évaluation d'un bien est une opération très complexe. Les biens soumis sont très divers, certains sont atypiques, d'autres ne correspondent à aucune référence connue.

1. Les méthodes d'évaluation

L'évaluation d'un bien peut être déterminée selon deux méthodes : la méthode dite par compte à rebours et la méthode par comparaison. Le choix de l'évaluateur dépend de l'objet du projet.


• Le compte à rebours consiste à soustraire le coût estimé des aménagements des recettes attendues de la cession des terrains aménagés.

Il s'agit donc d'une méthode prospective qui estime la valorisation financière de ces biens en tenant compte de plusieurs paramètres : l'usage de destination du terrain ; sa constructibilité ; la valeur des aménagements qui y seront réalisés.


• L' évaluation par comparaison procède par collation des mutations les plus récentes intervenues dans un même secteur géographique que le bien à estimer et portant sur des actifs similaires en termes de caractéristiques physiques, de constructibilité, de sujétions...

L'évaluation sera d'autant plus certaine que le nombre de références prises en compte aura été nombreux.

Cette méthode, statique, apparaît plus adaptée pour fixer la valeur vénale d'un immeuble bâti puisqu'elle n'a pas à prendre en compte la valeur des constructions qui sont l'objet du projet d'aménagement.

Cependant, le principe général sur lequel s'appuie France Domaine est de caler l'évaluation sur ce que le bien peut potentiellement représenter à terme et non sur ce qu'il est au jour de l'estimation, c'est-à-dire l'application du compte à rebours.

La méthode est notamment très utilisée pour les terrains à aménager et les terrains situés en centre-ville.

Pour que France Domaine puisse y recourir, la collectivité demanderesse doit présenter à l'appui de sa demande un bilan retraçant les divers postes de dépenses et de recettes afin que l'évaluation soit au plus juste. Il importe donc que les dossiers transmis par les collectivités soient complets.

Le chef de France Domaine a toutefois indiqué à vos rapporteurs que son service ne disposait pas de l'expertise nécessaire à la prise en compte des coûts de dépollution qui peuvent représenter un poste important de l'opération projetée.

L'évaluateur dispose de plusieurs outils : des bases de données dont celle mise en place par le Conseil supérieur du notariat ; les informations publiées sur les mutations.

2. Les difficultés

L'évaluation n'est pas incontestable. Il y entre forcément une part d'aléa. Mme Nathalie Morin en est convenue : cette opération s'apparente à un jugement professionnel qui prend en compte des critères qualitatifs.

Il ne s'agit pas, pour vos rapporteurs, de contester le travail difficile accompli par les agents de France Domaine.

Ils observent simplement que l'évaluation est une opération d'autant plus délicate que le temps de l'aménagement est long et que la situation du marché demeure à terme difficilement appréciable.

Les éléments recueillis au cours des auditions auxquelles ils ont procédé, conduisent à penser que ces aléas sont « compensés » par les caractéristiques des opérations conduites par les collectivités locales : leurs programmes d'aménagement comprennent, le plus souvent, la construction de logements sociaux et des équipements publics qui minorent les recettes estimées du projet.

Il n'en reste pas moins que les critères de la méthode du compte à rebours reposent sur une circulaire. En raison de l'importance majeure de l'évaluation ainsi réalisée pour la conduite des projets d'aménagement des collectivités locales, il importe d'en clarifier les modalités et d'en assurer la publicité.

Proposition n° 18

Encadrer, par voie réglementaire, les méthodes d'évaluation par catégories de biens et clarifier leurs critères.

Au-delà des interrogations sur les critères d'évaluation, se pose la question du délai de réponse aux demandes des collectivités qui constituent 60 % de l'activité de France Domaine. Cette difficulté réside principalement dans l'insuffisance des effectifs affectés au service : 2 000 agents dont 800 évaluateurs (les 1 200 autres sont affectés à la gestion du patrimoine privé, à la vente des biens mobiliers de l'État).

Or, cette administration est sollicitée par de multiples intervenants : au premier chef l'État, les collectivités territoriales mais aussi divers intervenants comme Réseau Ferré de France. Le champ de l'évaluation est très vaste : cessions, acquisitions, prises à bail, échanges.

Notons que France Domaine repose sur un réseau local sous la responsabilité d'une direction nationale spécialisée qui peut être saisie, par ses délégations locales, de toute évaluation d'un bien exceptionnel. Cette organisation, somme toute naturelle, permet de diffuser l'expertise acquise au niveau national.

Vos rapporteurs s'interrogent sur l'opportunité de réévaluer les seuils déterminant la consultation de France Domaine sur les opérations immobilières des collectivités locales. Si la question mérite d'être légitimement posée, il convient de mesurer les conséquences pour les autorités locales de toute modification des critères de saisine. Un tel changement ne doit pas fragiliser la régularité des programmes d'aménagement, faute pour les collectivités d'avoir bénéficié des conseils correspondants.

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