IV. PISTES ET PRÉCONISATIONS POUR UNE RÉFORME DE LA TAXE D'APPRENTISSAGE
A. ENGAGER UNE REFONTE PROFONDE, NÉCESSAIRE ET URGENTE
1. Une situation insatisfaisante
a) Des réformes ont été engagées...
Il faut regretter que trop de préconisations formulées par l'IGAS et l'IGF soient restées sans suite. Ainsi, les rapports des corps d'inspection et de la Cour des comptes se sont succédés depuis dix ans 8 ( * ) , émettant des critiques largement convergentes sur l'inefficience du système de collecte et son absence de pilotage : le système est jugé complexe, lourd, peu transparent ; son absence de pilotage et l'ineffectivité des contrôles sont des critiques récurrentes qui n'ont pas trouvé de remède, ni sur le plan législatif, ni sur le plan réglementaire.
Pourtant plusieurs réformes importantes de simplification du dispositif de collecte ont été introduites en 2005, notamment les suivantes :
- le contrôle a priori par les administrations déconcentrées des versements libératoires venant en déduction de la taxe due a été supprimé ;
- le rôle d'intermédiation des OCTA a été renforcé par la loi de janvier 2005 prévoyant le versement obligatoire des dépenses libératoires par leur intermédiaire.
b) ... mais trop de recommandations sont restées sans suite
De nombreuses mesures jugées nécessaires pour la professionnalisation et la plus grande efficacité du réseau de collecte des OCTA, passant par leur restructuration, n'ont toujours pas été engagées :
- les procédures d'habilitation des OCTA n'ont pas été modifiées dans le sens d'une simplification et d'une unification des règles d'agrément ;
- aucun relèvement du seuil de collecte n'est intervenu, pas plus pour les OCTA habilités que pour ceux ne faisant pas l'objet d'un agrément (OCTA consulaires et OCTA habilités par simple convention) ; la collecte reste donc fractionnée en un grand nombre d'OCTA. La possibilité pour les entreprises de s'acquitter simultanément de leurs obligations auprès de plusieurs OCTA est restée ouverte. Les obligations de contrôle des déclarations des entreprises par les OCTA n'ont pas été précisées et aucun plan comptable, prévoyant une obligation de comptabilité analytique, n'a été mis en place.
Or l'ensemble de ces recommandations demeurent d'actualité et devront être intégrées dans la réforme de la taxe d'apprentissage que votre rapporteur spécial appelle de ses voeux.
2. Les orientations devant sous-tendre la réforme
L'ensemble de ces constats et dérives plaident pour une réforme profonde de la collecte qui doit précéder ou accompagner une non moins importante refonte du mécanisme de répartition. Votre rapporteur spécial propose que cette réforme respecte trois principes , la simplification, la décentralisation et le paritarisme .
a) Simplification
Le premier des principes à mettre en oeuvre doit être la simplification, avec pour corollaire la réduction des frais de gestion. A cet égard, il importe de réaffirmer que toute réforme devrait se traduire par des économies.
C'est pourquoi il faut d'abord simplifier, clarifier et homogénéiser la collecte en réexaminant les procédures d'agrément délivrées au niveau national et par le transfert de la collecte soit aux URSSAF - comme cela est le cas pour l'assurance chômage -, soit par un adossement au réseau des organismes paritaires de collecte agréés qui ont été réformés dans le cadre de la formation professionnelle. Une autre solution, celle qui est ici privilégiée, serait de rationaliser le réseau des OCTA , comme cela est en cours pour les OPCA (réduction de leur nombre, conventions d'objectifs et de moyens).
b) Décentralisation
Ensuite il est proposé d'introduire un pilotage régional dans la répartition de la TA en fonction des priorités de formation définies, par exemple, au travers du contrat de plan régional de développement de la formation professionnelle (CPRDFP).
c) Paritarisme
Enfin, le recentrage régional de la gouvernance de la taxe d'apprentissage pourra être accepté par l'ensemble des acteurs s'il les associe étroitement en introduisant le paritarisme dans la collecte et la répartition des fonds . Deux préconisations concrètes sont faites à cet effet :
- donner un rôle au fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels (FPSPP) dans l'harmonisation des pratiques des OCTA ;
- requérir l'avis du Comité de coordination régional de l'emploi et de la formation professionnelle (CCREFP), lequel comprend des représentants des salariés et des employeurs, dans les décisions d'affectation des fonds libres par les régions.
* 8 S'agissant des corps d'inspection, trois rapports peuvent être cités :
- le rapport sur la collecte de la taxe d'apprentissage établi dans le cadre de la mission d'audit de modernisation (IGF n° 2005-M-071-03 - IGAS n° 2005-172 - décembre 2005) ;
- le rapport sur le contrôle de plusieurs OCTA « Un dispositif mal maîtrisé dont près de la moitié des dépenses sont littéralement saupoudrées » (IGAS RM 2008-131P - mars 2009) ;
- et le rapport d'évaluation des modalités de recouvrement et de contrôle de la contribution supplémentaire à l'apprentissage dans le cadre de la mise en oeuvre du bonus-malus (IGAS RM 2011-209P - décembre 2011).
S'agissant des contrôles de la Cour des comptes, peuvent être mentionnés les rapports d'observations définitives concernant l'association pour le développement de la formation professionnelle dans les transports (AFT), l'association Union inter-professions enseignement (UNIPE-enseignement), l'institut de formation aux techniques d'implantation et de manutention (IFTIM), l'association pour la promotion des métiers de la presse (PEMEP) et l'association pour la promotion sociale et la formation professionnelle dans le transport routier et activités auxiliaires (PROMOTRANS).