3. Rendre obligatoires les stages en médecine générale et faciliter les conditions d'accueil des étudiants
On ne peut pas attendre des étudiants qu'ils choisissent la médecine générale s'ils ne la connaissent pas. Or, leur formation en CHU ne leur fait connaître qu'un mode d'exercice spécialisé, encadré et marqué par une très grande technicité.
Le deuxième cycle des études médicales comporte en théorie un stage d'initiation à la médecine générale d'une durée de huit semaines, qui doit être réalisé au sein d'un cabinet de médecin généraliste. Il est ouvert à tous les étudiants et bénéficie d'une rémunération. En pratique, la proportion d'étudiants en deuxième cycle qui a pu bénéficier de ce stage d'initiation à la médecine générale reste faible : autour de 37 % en 2010.
De ce fait, les étudiants en médecine sont une minorité à avoir eu un contact de terrain avec la spécialité de médecine générale en médecine ambulatoire avant les épreuves classantes nationales, bien qu'un sur deux soit appelé à exercer cette activité. Ignorant l'intérêt de cet exercice, ils sont soumis à l'attrait des autres spécialités découvertes lors de leurs stages à l'hôpital, et le praticien hospitalier en CHU devient leur référence.
Paradoxalement, même ceux qui choisissent la spécialité de médecine générale à l'issue des épreuves classantes nationales peuvent n'acquérir qu'une expérience limitée de l'exercice ambulatoire.
En effet, lors des trois années de formation de la spécialité médecine générale, les futurs généralistes doivent effectuer deux stages de deux semestres dans des services hospitaliers agréés au titre de la médecine générale , et seulement un semestre obligatoire dans le cadre de la médecine ambulatoire auprès d'un médecin généraliste.
Certes, en fin de troisième cycle , ils peuvent effectuer un stage d'une année en situation de responsabilité professionnelle dans un cabinet de médecine générale : le stage autonome en soins primaires ambulatoires supervisé (SASPAS ). Mais ce stage, qui constitue le véritable temps d'autonomisation de l'interne, ne revêt qu'un caractère facultatif. A défaut, cette année est effectuée en établissement hospitalier. En 2010, 30 % seulement des promotions d'internes en médecine générale ont eu accès au SASPAS. Ce qui implique que 70 % des étudiants qualifiés en médecine générale n'ont effectué que 6 mois sur 36 dans un cabinet de médecine générale.
C'est donc tout le système des stages durant les études de médecine qu'il convient de revoir.
Les textes législatifs et réglementaires doivent tout d'abord être appliqués. Il n'est pas admissible que le taux de réalisation du stage d'initiation à la médecine générale, théoriquement obligatoire, varie de 0 % dans certaines facultés de médecine à 100 % dans d'autres, comme Toulouse ou Brest. Le fait que certaines facultés parviennent à respecter cette obligation montre bien que celle-ci n'est pas irréaliste. Les doyens et les départements de médecine générale doivent être impliqués dans l'objectif de généraliser effectivement ce stage de sensibilisation, qui est de nature à susciter des vocations et à rehausser la considération portée par l'ensemble des étudiants à la médecine générale. A brève échéance, la réalisation du stage doit conditionner la validation du deuxième cycle des études médicales.
Le Pacte territoire-santé soumis à la concertation par la ministre des affaires sociales et de la santé le 13 décembre 2012 comporte précisément, comme engagement n° 1, la généralisation du stage d'initiation à la médecine générale « en revoyant notamment l'encadrement réglementaire des stages dans les centres de santé, et en accélérant la recherche des maîtres de stage ». L'objectif est partagé par votre rapporteur, bien que la ministre ne précise pas les moyens qu'elle entend mettre en oeuvre pour y parvenir.
Toutefois, il ne s'agit pas seulement d'atteindre quantitativement cet objectif. Les maîtres de stage doivent être soigneusement sélectionnés et motivés, afin de donner une image positive de la médecine de premier recours aux étudiants qu'ils encadrent. Les indemnités versées sont nécessaires mais sans doute pas déterminantes. Les médecins doivent surtout être convaincus qu'il est de leur propre intérêt d'accepter cette responsabilité. En effet, les témoignages sont concordants pour souligner combien l'accueil d'un étudiant est utile pour le maître de stage lui-même, qui voit sa pratique questionnée par un regard neuf et peut même ainsi bénéficier d'informations actualisées et de bonne source sur les dernières avancées thérapeutiques. La fonction de maître de stage doit d'ailleurs pouvoir être valorisée au titre du développement professionnel continu des médecins. Par ailleurs, l'accueil de stagiaires étudiants peut être un moyen de trouver un successeur pour les médecins en fin de carrière ou un « renfort » dans les secteurs où le nombre de médecins est insuffisant.
Le développement des stages en zones rurale achoppe aussi sur la question des distances de transport ou du logement. Un certain nombre de collectivités territoriales proposent des allocations de transport ou de logement aux étudiants en médecine désireux de faire un stage sur leur territoire. De même, de plus en plus de MSP s'équipent en logements pour l'accueil des stagiaires . Ces initiatives doivent être encouragées et si possible généralisées. Ainsi, la présence d'un logement d'accueil des stagiaires pourrait être l'un des éléments du cahier des charges conditionnant la labellisation des MSP et leur financement.