2. Réviser la finalité et la carte des options
Une des illusions majeures que votre rapporteure souhaite dissiper réside dans l'intérêt des options ou des parcours spécifiques comme les CHAM ou les sections internationales pour rendre attractifs des établissements évités. Il est parfaitement légitime que les élèves de l'éducation prioritaire puissent bénéficier au même titre que les autres de l'éventail des formations proposées au collège et au lycée. En revanche, il faut garder à l'esprit que si le collège est déjà ghettoïsé, les classes moyennes n'y reviendront pas, quelle que soit l'offre curriculaire. Les options sont utilisées principalement, non pas pour leur valeur éducative mais parce qu'elles constituent un motif de dérogation particulièrement commode. Elles ne servent pas à entrer dans un collège ou un lycée moins réputé, mais au contraire à en sortir.
Ce ne sont pas les options qui rendent le projet d'un établissement pédagogiquement intéressant. Ce ne sont pas non plus des instruments qui peuvent renverser des dynamiques d'évitement de la carte scolaire. Bien au contraire, étant donné l'organisation générale du système éducatif, elles constituent essentiellement un outil de contournement au service des stratégies des initiés. En outre, elles sont un facteur de ségrégation interne des élèves au sein des établissements. Elles aboutissent à la recréation de classes homogènes, rendant ainsi caduque la mixité apparente au niveau de l'établissement et occasionnant tensions et frustrations parmi les élèves.
Considérant enfin le coût très élevé de leur démultiplication ces dernières années, votre rapporteure préconise au niveau national une révision drastique de l'offre d'options et de parcours spécifiques. Grâce à l'homogénéisation relative de l'offre de formation qu'elle induira, cette seule mesure étouffera bien des stratégies de dérogations et affaiblira la ségrégation scolaire, aussi bien externe entre établissements qu'interne au sein d'un même établissement. Les moyens économisés pourront être déployés vers des objectifs plus utiles, par exemple l'amélioration sensible du taux d'encadrement dans l'éducation prioritaire ou de l'efficacité du remplacement.
Au niveau local, l'implantation d'options dans tel collège ou lycée devra être cohérente avec les projets éducatifs propres mis en place dans les établissements. Elles ne doivent plus servir de produit d'appel ou de levier de réputation comme peuvent être tentés de les utiliser certains chefs d'établissement soucieux de défendre l'image de leur collège ou de leur lycée. Il s'agira de privilégier une carte de formation qui ne stimule pas la concurrence entre les établissements et l'adoption de politiques d'attractivité pour capter des flux d'élèves. La différenciation entre les établissements passera par le projet pédagogique, l'offre d'options n'étant que subsidiaire et subordonnée. Seule devrait être autorisée l'ouverture des sections et des options cohérentes avec le projet pédagogique global et directement utile à sa mise en oeuvre.
En outre, votre rapporteure recommande que dans les filières sélectives, il soit tenu davantage compte de la motivation des enfants, appréciée lors d'entretiens, plutôt que de leur niveau scolaire. A défaut, on continuera de favoriser tacitement la constitution de classes de niveau homogène. De plus, malgré les contraintes d'emplois du temps, que la réduction générale de l'offre d'options devrait contribuer à desserrer, tout doit être fait pour éviter qu'à une classe réponde un seul type de public. Si l'on ouvre une classe CHAM par exemple, il vaut mieux répartir les élèves dans plusieurs classes et stimuler les projets communs associant des élèves CHAM et les autres. Votre rapporteure prend cet exemple à dessein car elle ne peut qu'émettre de grandes réserves sur ce dispositif après avoir été confrontée à son application concrète. Elle souhaite que le Gouvernement rende au Parlement un rapport d'évaluation des classes CHAM, avant toute extension .
Enfin, le calibrage des places devrait être revu pour éviter les effets d'aubaine et limiter les déperditions de moyens sans utilité pédagogique dans un contexte budgétaire très tendu. Les places offertes en seconde pourraient être estimées sur la base des inscrits aux épreuves du baccalauréat. En 6 e ou en 4 e , on pourra ensuite se caler sur les places offertes en lycée au sein du secteur. Il pourrait également être demandé aux élèves s'inscrivant en seconde dans une option de s'engager à la présenter au baccalauréat, afin de vérifier leur motivation et leur intérêt pour la discipline, tout en facilitant la gestion des ressources qui y sont consacrées.
La rationalisation de l'offre d'options constitue un levier très important pour favoriser la mixité sociale au sein des établissements, en comprimant les possibilités de concurrence entre les établissements et en faisant tomber un des motifs essentiels de dérogation à la carte scolaire.