C- L'USAGE DE LA LUMIÈRE
1- L'optogénétique
L'optogénétique est née en 2002 de l'observation d'une protéine sensible à la lumière découverte dans une algue, la channelrhodopsine (ChR2). La présence ou l'absence de lumière influe sur ces protéines, et modifie le comportement des cellules vivantes et des organismes. Les chercheurs ont donc eu l'idée d'introduire les gènes responsables de la fabrication de ces protéines ( via un virus par exemple, qui infectera le cerveau et y greffera les séquences d'ADN nécessaires) dans des cellules précises, afin de pouvoir les contrôler avec de la lumière.
Lorsque la cellule cible est un neurone, le fait d'y faire s'exprimer des protéines photosensibles permet d'en contrôler l'activité électrique. Une lumière bleue pourra spécifiquement activer un neurone contenant les protéines photosensibles, tandis que le neurone voisin ne sera pas activé. À l'inverse, une lumière jaune inhibera spécifiquement les neurones contenant d'autres protéines, les halorhodopsines.
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Processus d'inhibition et d'activation en optogénétique
Or un neurone (ou un circuit neuronal spécifique), en fonction de sa localisation, peut intervenir dans la motricité, les sentiments, l'apprentissage, le sommeil, l'anxiété, la respiration, l'expression d'une pathologie, etc. Cette technologie a franchi des caps décisifs en 2010, grâce à l'amélioration de l'insertion de gènes dans des zones spécifiques, et à des technologies de mesure des effets biologiques. Les expériences in vivo permettront d'étudier très précisément le rôle de chaque groupe de neurones, et éventuellement d'agir dessus, alors que jusqu'à présent l'analyse des actions cérébrales se faisait par aires, par petites surfaces du cerveau.
Des expériences ont été menées sur une souris, une mouche et un ver en 2010 ; des chercheurs de l'université de Stanford (Californie) ont réussi à tester ce principe sur des souris en leur insérant au niveau cérébral les gènes nécessaires, codant pour la ChR2. Ces gènes ont entraîné l'expression de la protéine photosensible au niveau de certains neurones chargés de la motricité. Une mini-fibre optique a ensuite été "greffée" sur le cerveau des rongeurs. Lorsque cette fibre envoie de la lumière bleue, les protéines cibles sont "excitées", et commandent alors aux circuits neuronaux modifiés d'enclencher un mouvement circulaire vers la gauche. Lorsque la lumière s'éteint, la souris s'arrête.
D'après Philippe Vernier 68 ( * ) , « cette méthode, très simple et peu agressive, est surtout utilisée chez l'animal comme une sorte d'alternative à la stimulation par les électrodes. Mais le transfert de ce type de molécules chez l'homme n'est pas impossible, via des cellules que l'on peut greffer, qui peuvent s'intégrer dans les réseaux de neurones. Et il y a, à l'heure actuelle, des recherches sur le primate qui ont commencé dans divers centres, y compris en France. Ce sont des possibilités de stimulation nouvelles qui nécessiteront sans doute des encadrements. » Il nous appartiendra de suivre ces développements.
* 68 Professeur de neurosciences, directeur de recherches, président de la Société française de neurosciences - (Audition publique du 29 juin 2011).