C. LE SERVICE MILITAIRE ADAPTÉ : UNE RÉUSSITE SUR LE LONG TERME
1. Le service militaire adapté
Le service militaire adapté (SMA) a été créé à l'initiative de Michel Debré, en 1961 aux Antilles et en Guyane, avant d'être étendu à la quasi-totalité des outre-mer. Sa mission première était d' assurer, dans un environnement à caractère militaire, une formation professionnelle à de jeunes ultramarins volontaires en difficulté ; il contribue désormais également, par le biais de chantiers d'application, au développement économique des départements et collectivités d'outre-mer, ainsi qu'à la protection civile, notamment lors des catastrophes naturelles.
Le SMA s'adresse à de jeunes ultramarins, garçons ou filles, âgés de dix-huit à vingt-six ans, souvent sans diplôme ou en situation d'échec scolaire et n'ayant que peu de chances de trouver un emploi. Si l'engagement à servir dans le SMA est fondé sur le volontariat, il existe une procédure de sélection afin de vérifier que le candidat répond aux critères fixés, y compris en termes de conditions d'aptitude physique, et qu'il n'a pas eu de démêlés trop lourds avec la justice.
Son objectif est de permettre à un jeune en difficulté de recevoir une formation de base, afin de lui permettre ensuite d'obtenir un diplôme ou de trouver un emploi. Ce dispositif constitue pour ce profil de jeunes le « chaînon manquant » entre la formation initiale et la vie professionnelle.
Au total, plus de 120 000 jeunes sont passés par le SMA depuis sa création en 1961. Aujourd'hui, trente-sept métiers sont proposés dans des secteurs de forte demande de main-d'oeuvre tels que le bâtiment, la restauration, la sécurité, la pêche ou le tourisme.
2. Un dispositif qui a fait ses preuves
Le service militaire adapté peut se prévaloir d'un incontestable succès : le bilan 2008 fait ainsi apparaître un taux d'insertion de 80 % pour l'ensemble des jeunes incorporés.
En 2008, le SMA a concerné 2 900 ultramarins volontaires (dont un quart de jeunes filles) répartis dans les sept unités situées à la Martinique, en Guadeloupe, en Guyane, à La Réunion, à Mayotte, en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française, auxquelles s'ajoute une unité en métropole située à Périgueux. Entre 30 % et 40 % peuvent être considérés comme illettrés et 75 % ne sont pas titulaires du brevet des collèges.
Le SMA dispose actuellement d'environ sept cents personnels d'encadrement, en majorité des militaires détachés par le ministère de la défense, ainsi que d'un état-major. Son budget total est de 124 millions d'euros en 2009, comprenant des dotations de l'Etat, des subventions de l'Union européenne et des collectivités d'outre-mer.
Au-delà du bilan quantitatif en termes d'insertion professionnelle, il est important de souligner que le SMA joue un rôle notable pour insérer le volontaire dans la société et l'accent est mis durant l'année de stage, non seulement sur la formation mais aussi sur le comportement et les règles de vie à respecter en société . La formation globale proposée par le SMA est ainsi fondée sur la rupture que supposent l'acte d'engagement et la vie en internat dans une enceinte militaire. D'ailleurs, le SMA met plus l'accent sur « l'employabilité » des jeunes volontaires que sur l'accès direct à un emploi précis.
3. Le régiment de la Martinique
Depuis sa création en 1961, le régiment de la Martinique a dispensé une formation militaire et professionnelle à plus de 20 000 jeunes, contribuant à leur insertion, ainsi qu'à la mise en valeur du département par de nombreux chantiers d'application, dont des travaux routiers de très grande ampleur dans le sud de l'île. Il est régulièrement sollicité lors des passages des cyclones sur les Antilles ou dans la zone Caraïbes ; il est dernièrement intervenu en Haïti à la suite du terrible tremblement de terre de janvier 2010.
En 2010, son budget s'élève à 5,8 millions d'euros, dont 3 en provenance du fonds social européen, et il emploie 127 personnes, militaires et civils.
Le SMA dispose de trois voies de recrutement :
- les volontaires stagiaires , au nombre de 410 à la Martinique, ont entre dix-huit et vingt-cinq ans, sont sans qualification ; ils sont nourris, logés et rétribués 315 euros par mois. Pendant leur premier mois, ils suivent une formation militaire initiale ; ensuite, le processus d'insertion comporte quatre modules : la formation professionnelle proprement dite, une formation citoyenne, une remise à niveau scolaire, qui leur permet de valider un niveau équivalent à la fin du collège environ, et une formation aux premiers secours. 41 % d'entre eux sont illettrés au départ ;
- les volontaires techniciens , au nombre de 123 à la Martinique, ont le même âge mais sont titulaires d'un diplôme niveau CAP, BEP ou Bac Pro. Un contrat d'un an renouvelable quatre fois leur permet d'acquérir une première expérience professionnelle ; ils sont nourris, logés et rémunérés 850 euros par mois ;
- les engagés volontaires , au nombre de 19 à la Martinique, sont titulaires d'un Bac Pro ou plus et, avec un contrat de deux à cinq ans, assurent un rôle d'encadrement et de formation. Ils sont rémunérés 1 250 euros par mois.
Le taux de sélection est de un sur deux, parmi les demandes correspondant aux critères (âge, physique, absence de casier judiciaire...). En 2010, le régiment comprend 26 % de volontaires féminines.
Les formations sont diverses : métiers de la terre, du bois, de la sécurité, du transport de personnes, mais aussi mécanique automobile ou conduite d'engins de voirie. En outre, la délégation a pu tester directement la qualité du travail des volontaires de la filière restauration , le régiment disposant en effet d'un restaurant d'application ; elle souhaite remercier le colonel Pierre Heinzelmeier, chef de corps, de son invitation et féliciter les jeunes et leurs formateurs.
Ces formations débouchent sur des attestations ou des certificats qui, sans être reconnus comme des diplômes ou des titres, sont appréciés des acteurs économiques locaux, si bien que le taux d'insertion est élevé : 82 %. Parmi ces jeunes considérés comme insérés, 49 % ont trouvé un emploi en CDD ou en CDI, 36 % poursuivent une autre formation en Martinique ou en métropole et 15 % sont entrés dans l'armée.
Dans le cadre du plan de doublement du SMA annoncé par le Président de la République en 2009, le régiment de Martinique doit acquérir de nouvelles infrastructures, mettre en oeuvre une ingénierie de formation différenciée entre les stagiaires, dont la durée d'engagement variera entre six et douze mois, garantir le flux de recrutement et maintenir le rayonnement social du SMA. Il doit également maintenir sa capacité d'intervention, notamment en cas de catastrophe. Pour cela, il a programmé la construction de trois bâtiments, de cinq ateliers techniques et d'un restaurant de huit cents couverts. Il souhaite également diversifier les formations, en créant quatre nouvelles filières en 2013 : énergies renouvelables, maraîchers option banane, élagage et charpente métallique.
Le SMA affiche un succès reconnu ; il permet d'insérer des jeunes ultramarins en grande difficulté. 2011 est l'année de son cinquantenaire et de nombreux volontaires, notamment issus du régiment de Martinique, vont défiler sur les Champs-Elysées pour le 14 juillet afin de fêter comme il se doit cet anniversaire. Le plan de doublement des effectifs engagé doit avoir pour résultat de conforter le bilan du SMA, sans affecter le niveau de qualité des formations.