ANNEXE 1 COMPOSITION DU GROUPE DE TRAVAIL

Président : Jean ARTHUIS

Rapporteurs : Philippe DALLIER

Charles GUENÉ

Pierre JARLIER

Albéric de MONTGOLFIER

Philippe ADNOT

Marie-France BEAUFILS

Nicole BRICQ

Eric DOLIGÉ

François FORTASSIN

Adrien GOUTEYRON

Edmond HERVÉ

François MARC

Philippe MARINI

Gérard MIQUEL

Michel SERGENT

ANNEXE 2 RÉUNIONS ORGANISÉES PAR LE GROUPE DE TRAVAIL SUR LA PÉRÉQUATION FINANCIÈRE ENTRE LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

1. Mardi 15 février 2011

Présidence de M. Jean Arthuis , président

Constitution du groupe de travail

M. Jean Arthuis , président . - J'ai souhaité que nous tenions cette première réunion de notre groupe de travail sur la péréquation financière entre les collectivités territoriales pour préciser les modalités d'organisation de nos travaux.

En effet, comme vous le savez, notre champ d'investigation est particulièrement vaste puisque - mis à part le fonds de péréquation départemental des DMTO, qui entrera en vigueur dès cette année - l'ensemble des dispositifs de péréquation que nous avons votés ne doivent produire leurs effets, au plus tôt, qu'en 2012.

J'en profite pour vous indiquer, concernant le fonds de péréquation départemental des DMTO, que le ministère de l'intérieur disposera des montants définitifs à répartir au plus tard à la fin du mois de février.

S'agissant de notre groupe de travail, comme je vous l'ai indiqué, le Bureau a identifié quatre thèmes particuliers, qui doivent faire l'objet d'investigations :

1) le nouveau mode de calcul des potentiels fiscal et financier ;

2) le fonctionnement du fonds de péréquation des recettes communales et intercommunales ;

3) la particularité francilienne avec le remplacement du fonds de solidarité des communes d'Ile-de-France (FSRIF) ;

4) et les nouveaux fonds régional et départemental de péréquation de la CVAE.

Je vous propose, sur chacun de ces thèmes - qui sont autant de sujets à traiter - de désigner l'un d'entre nous rapporteur. Chacun des quatre rapporteurs pourra ainsi mener sa réflexion en organisant des auditions que je présiderai et qui seront ouvertes à l'ensemble des membres de notre groupe de travail.

Notre objectif est d'achever nos travaux d'ici la fin du mois de juin. Dans cette perspective, nous pourrions déjà convenir de quatre réunions - deux au mois de mars et deux au mois d'avril. Il serait souhaitable que, lors de chaque réunion de notre groupe, deux de nos quatre thèmes de travail soient traités successivement.

Ainsi, à la fin du mois d'avril, chaque thème aura été étudié lors de deux réunions du groupe de travail. Les quatre rapporteurs pourront alors réfléchir à la façon dont ils souhaitent que nous nous organisions pour achever nos travaux d'ici la fin du mois de juin.

Je vous propose que nous nous réunissions, comme aujourd'hui, le mardi après-midi, hors des périodes de suspension des travaux parlementaires. Nos prochaines réunions pourraient avoir lieu :

- le mardi 8 mars, pour évoquer la péréquation communale et intercommunale ainsi que la question de l'Ile-de-France ;

- le mardi 29 mars, pour traiter des notions de potentiels fiscal et financier et de péréquation départementale et régionale de la CVAE ;

- le mardi 12 avril pour travailler à nouveau sur la péréquation communale et intercommunale et sur la problématique francilienne ;

- et le mardi 26 avril pour une deuxième réunion sur les thèmes des potentiels fiscal et financier et sur la péréquation de la CVAE au niveau départemental et régional.

Ce calendrier vous paraît-il compatible avec vos engagements respectifs ?

Mme Nicole Bricq . - Il y a un déplacement de la commission à Berlin prévu le 12 avril.

M. Jean Arthuis , président . - Nous partirons pour Berlin le dimanche soir pour y passer la journée de lundi et nous rentrerons probablement mardi en fin de matinée ou début d'après-midi. La réunion du groupe de travail pourra donc se tenir l'après-midi. Si ce calendrier est à votre convenance, il est adopté. Faute de souhait exprimé de la part des membres du groupe socialiste et CRC, je vous propose de désigner comme rapporteurs, s'ils en sont d'accord :

1) Pierre Jarlier, sur les nouvelles modalités de calcul des potentiels fiscal et financier ;

2) Charles Guené, sur la question du fonds de péréquation des recettes communales et intercommunales ;

3) Philippe Dallier, sur la question spécifique du fonds de solidarité des communes d'Ile-de-France (FSRIF) ;

4) et Albéric de Montgolfier, s'agissant des nouveaux fonds régional et départemental de péréquation de la CVAE.

Mme Nicole Bricq . - Je souhaiterais savoir si, à l'issue de ces réunions, il y aura une réunion plénière.

M. Jean Arthuis , président . - Oui bien sûr et je me propose de présider chacune d'elle, ce sera un moment de confrontation afin de cadrer les hypothèses les plus praticables.

Mme Marie-France Beaufils . - Les élus des groupes seront-ils présent à chaque réunion ?

M. Jean Arthuis , président . - Les quatre rapporteurs nommés ont été les seuls à soumettre leur candidature. Les autres groupes politiques ne se sont pas manifestés, mais ils pourront désigner un des leurs pour assister aux réunions. En ce qui concerne la composition du groupe de travail, il compte seize membres (Michel Sergent, Albéric de Montgolfier, Gérard Miquel, Philippe Marini, François Marc, Pierre Jarlier, Edmond Hervé, Charles Guené, Adrien Gouteyron, François Fortassin, Eric Doligé, Philippe Dallier, Nicole Bricq, Marie-France Beaufils, Philippe Adnot et moi-même) et un seul président qui est en fait un élément modérateur. Ce fonctionnement vous convient-il ?

Acquiescement de l'ensemble des membres.

M. François Fortassin . - Avant de nous séparer, ma question porte sur la ligne de conduite pour la péréquation. Faut-il s'orienter vers des exemples comme l'Espagne où les régions les plus riches ne le sont guère que de trois à quatre fois plus que les plus pauvres ? Ce qui n'est pas le cas de notre pays.

M. Jean Arthuis , président . - Non, la réflexion doit se porter en effet sur l'amplitude des potentiels fiscal et financier et la façon de rendre compatibles les dispositions constitutionnelles qui prévoient à la fois l'autonomie financière et la péréquation. Je vous précise par ailleurs que les réunions se tenant successivement avec l'ensemble des seize membres, il n'y aura pas de conflit de présence. C'est un principe de bonne gouvernance.

Pour revenir à la péréquation, la difficulté sera de la chiffrer. Les bases sont actuellement incompréhensibles. Il y a trois ou quatre ans, j'ai voulu doter le Sénat de ses propres moyens d'expertise et de simulation et je me suis aperçu qu'il n'existait pas de spécialiste en la matière. Tout est dans les mains de la Direction générale des collectivités locales, personne ne comprend ce qu'ils font. L'objectif est donc d'obtenir des statistiques significatives.

M. Philippe Adnot . - Je recommande la lecture du rapport Dexia. Certaines communes ont des charges très importantes.

M. Jean Arthuis , président . - Le problème sera pris en compte.

M. François Fortassin . - Pour ma part, je constate que dans ce pays il n'y a aucune solidarité territoriale.

M. Jean Arthuis , président . - Ce pays s'endette pour ne pas remettre en cause toutes les inégalités. Je vous fais prendre la mesure de ce qui nous attend pour remettre de l'égalité dans la République. Il s'agira dans les auditions de faire le point sur tout ce qui a été voté, de vérifier ce qui est en parfaite cohérence, ce qui est plutôt contradictoire, d'essayer de tendre vers un concept de péréquation et de se faire expliquer les mécanismes de la péréquation (il existe environ cent paramètres actuellement pour la dotation globale de fonctionnement).

Pour terminer, je vous donne rendez-vous pour la prochaine réunion qui aura lieu le mardi 8 mars à 14 h 30, elle durera trois heures et sera répartie entre deux thèmes.

2. Mardi 8 mars 2011

Présidence de M. Jean Arthuis , président

Fonds de péréquation des recettes communales et intercommunales, fonds de solidarité des communes d'Ile-de-France

Audition de M. Eric Jalon, directeur général des collectivités locales, et de Mme Marie-Christine Lepetit, directrice de la législation fiscale

M. Jean Arthuis , président . - Comme nous en sommes convenus lors de notre première réunion, nous aborderons aujourd'hui deux des quatre thèmes qui constituent le périmètre de réflexion de notre groupe de travail sur la péréquation :

- le fonctionnement du fonds de péréquation des recettes communales et intercommunales ;

- la particularité francilienne avec le remplacement du fonds de solidarité des communes d'Ile-de-France (FSRIF).

Nous disposons de deux heures avant la venue du président Migaud. C'est peu et nous ne ferons pas le tour complet de ces deux sujets aujourd'hui, il ne s'agit que d'une première réunion. Je vous propose d'organiser notre temps de la façon suivante.

Dans un premier temps, nos deux rapporteurs (Charles Guené et Philippe Dallier) vont présenter l'état des lieux de ces deux questions afin de repréciser les dispositions votées et de mettre en évidence les questionnements qui en découlent.

Ensuite, nous entendrons les réponses de l'administration (la direction générale des collectivités locales et la direction de la législation fiscale) sur une liste de questions, élaborée par les rapporteurs, qui leur a été adressée et que vous avez vous-même reçue avec la convocation à cette réunion.

Vous pourrez, si vous le souhaitez, compléter cet entretien en posant vos propres questions.

Enfin, s'il nous reste un peu de temps, nous débattrons entre nous afin d'orienter, toujours sur ces deux sujets, la suite de nos travaux. Je vous rappelle, à cet égard, que la prochaine réunion concernant le fonds intercommunal et communal et le FSRIF aura lieu le mercredi 13 avril et non le 12 avril comme initialement prévu (car les membres du bureau de la commission ne rentreront pas suffisamment tôt de Berlin).

Je vous rappelle également qu'avant cela nous aurons tenu notre première réunion sur les notions de potentiels fiscal et financier et sur la péréquation départementale et régionale de la CVAE, le mardi 29 mars.

Si vous le voulez bien, pour entrer dans le vif du sujet, je voudrais revenir brièvement sur l'historique le plus récent de la péréquation intercommunale, depuis la suppression de la taxe professionnelle.

Vous vous souvenez que la loi de finances pour 2010 a commencé de traiter de la question de la péréquation entre collectivités locales. Certes, il ne s'agissait pas du « grand soir de la péréquation » mais un certain nombre de dispositifs ont été créés à l'échelon des départements et des régions notamment le fonds de péréquation des droits de mutation à titre onéreux (DMTO) et les fonds de péréquation sur le produit de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE).

Pour le bloc communal, la loi de finances pour 2010 s'est limitée à des engagements concernant notamment les dispositifs existants de péréquation horizontale, le FSRIF pour l'Ile-de-France et les fonds départementaux de péréquation de la taxe professionnelle (FDPTP). Elle a aussi envisagé dans le cadre de la fameuse clause de « revoyure », mais sans en préciser ni le contenu ni l'échéance, « une réforme de la dotation globale de fonctionnement destinée à conforter sa vocation péréquatrice ».

Un point notable doit être relevé toutefois. Contrairement à l'idée défendue par notre commission des finances, qui consistait progressivement à faire basculer ces sommes au profit d'un fonds de péréquation, le texte définitif de la loi de finances a figé, dans leur répartition et dans leur montant, la dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle (DCRTP) et le fonds national de garantie individuelle des ressources (FNGIR).

C'est donc postérieurement à la loi de finances pour 2010 que la discussion a commencé réellement à s'engager sur la péréquation interne au bloc communal. Quelques pistes ont ainsi été ouvertes par le rapport élaboré au nom du Gouvernement par les inspections générales des finances et de l'administration, en application de la clause de revoyure, dit rapport Durieux.

Ce rapport proposait en particulier le recours à des critères de ressources et de charges, la prise en compte de la totalité de la richesse fiscale et pas uniquement de la fiscalité économique et une addition de deux dispositifs de péréquation, l'un national et l'autre régional.

Le rapport Durieux a été confirmé et complété, en juillet 2010, sur certains points, par les propositions exprimées par les quatre parlementaires en mission désignés par la ministre de l'économie.

Parmi leurs conclusions, je relève le souhait que le système de péréquation porte sur l'ensemble « groupements et communes membres » aussi bien pour les prélèvements que pour les reversements, et celui de la prise en compte de la DCRTP et du FNGIR dans la définition des seuils de prélèvement et de reversement. Les parlementaires en mission ont également émis d'autres propositions, moins consensuelles sans doute, comme lorsqu'ils préconisaient que la redistribution des montants prélevés au titre du fonds national soit placée sous le contrôle du comité des finances locales ou que les critères de charges prennent en compte des indicateurs de « gestion vertueuse ».

Nombre de ces propositions reprenaient d'ailleurs des orientations que notre commission avait elle-même définies en mars 2010 lorsqu'elle avait tenu ses ateliers sur la péréquation. Nous nous étions prononcés à l'époque pour que la péréquation horizontale s'établisse désormais sur un périmètre régional.

Mais c'était avant la loi de finances pour 2011, qui a marqué une nouvelle étape dans cette élaboration progressive d'un dispositif de péréquation pour le bloc communal.

Je passe maintenant la parole à Charles Guené, rapporteur sur la question du fonds de péréquation des recettes communales et intercommunales, auquel succèdera Philippe Dallier, sur la question spécifique de l'Ile-de-France et de son fonds de solidarité.

M. Charles Guené , rapporteur . - Concernant la péréquation intercommunale et communale, partons du droit existant, c'est-à-dire de l'article 125 de la loi de finances pour 2011.

Cet article met en place, à compter de l'année 2012, un fonds dit « fonds national de péréquation des recettes fiscales intercommunales et communales ».

Pour le Gouvernement, cet article constitue la concrétisation d'une promesse formulée lors de la réforme de la taxe professionnelle. Nous avons toutefois voté ce dispositif sans disposer d'estimations ou de simulations de ses effets. Cela s'explique notamment par les difficultés rencontrées pour rassembler de l'information fiscale sur des impositions nouvelles, qui n'avaient pas encore été recouvrées pour leur première année de création.

Je vous indique d'ailleurs que les simulations dont nous disposerons d'ici fin juin seront nécessairement approximatives puisque les données définitives relatives à la CVAE, à la compensation-relais, à la dotation de compensation de la réforme de la TP (DCRTP) et au FNGIR ne seront disponibles qu'entre juillet et décembre.

Enfin, le comité des finances locales travaille, parallèlement à notre groupe, sur un rapport qui doit être remis par le Gouvernement au Parlement avant le 1 er septembre 2011, afin d'adapter et de préciser les modalités de fonctionnement du fonds.

Je vais d'abord vous présenter l'historique de l'article 125 de la loi de finances pour 2011.

Le texte du Gouvernement ne prévoyait qu'un fonds national, dont l'objectif était de s'élever à 2 % des recettes fiscales du bloc communal en 2015. L'Assemblée y avait substitué un double dispositif : un fonds national et des fonds régionaux, chacun devant brasser l'équivalent de 1 % des recettes fiscales communales. Le texte du Sénat, qui a été adopté sans modification par la commission mixte paritaire, a finalement prévu un unique fonds national, avec un objectif de 2 % des recettes fiscales, qui doit s'articuler avec un dispositif spécifique pour remplacer le FSRIF. Le montant du FSRIF devra, en 2012, égaler son montant de 2009.

Le critère et le seuil des prélèvements au profit du fonds ont été précisés au cours de la discussion pour aboutir à un prélèvement à partir de 1,5 fois le potentiel financier - et non fiscal - par habitant national.

En ce qui concerne les reversements, le critère du potentiel financier a également été substitué à celui du potentiel fiscal. Par ailleurs, les communes isolées ont été exclues du bénéfice des reversements. Ceux-ci ne bénéficieront en effet qu'aux établissements publics de coopération intercommunale (EPCI).

Enfin, si le texte du Gouvernement prévoyait d'abonder le fonds à hauteur des 419 millions d'euros versés au profit des FDPTP en 2011, le texte final a rétabli la dotation annuelle au profit des FDPTP. L'Etat ne contribuerait donc pas au financement du fonds.

Dans ce contexte, quelles sont les points à clarifier et à examiner ?

On peut d'abord s'interroger sur la pertinence d'un objectif calculé en pourcentage des recettes fiscales. D'une part, on ne sait pas définir la notion de « recettes fiscales ». D'autre part, ne serait-il pas plus pertinent de fixer un objectif en termes de réduction des écarts de richesse plutôt qu'en fonction d'une masse financière variable ?

Par ailleurs, la question du maintien des 419 millions d'euros versés au profit des FDPTP se pose. Ils privent d'autant le fonds d'une dotation initiale qui aurait été utile. Je vous rappelle à ce sujet que les reversements des FDPTP au profit des communes dites « concernées », c'est-à-dire celles à proximité des établissements exceptionnels, ont été garantis dans le cadre du FNGIR. Par conséquent, les 419 millions d'euros restant ne correspondent qu'aux versements au profit des communes dites « défavorisées », définies par les conseils généraux selon des critères assez peu contraignants.

Venons-en aux questions soulevées par les critères des prélèvements et des reversements. Il me semble que le potentiel financier doit être défini de manière extensive, afin de représenter au mieux la richesse réelle de chaque collectivité. Mais c'est un sujet en soi, qui sera traité dans le cadre du thème rapporté par Pierre Jarlier. Concernant le seuil de prélèvement, faut-il le fixer à 1,5 fois le potentiel financier par habitant, au risque de créer un fort effet de seuil ? On pourrait envisager de prélever l'ensemble des collectivités dont le potentiel financier par habitant dépasse la moyenne, avec un prélèvement proportionnel à l'écart à la moyenne, qui permettrait d'éviter les effets de seuil.

La question se pose par ailleurs de savoir si l'écart à la moyenne servant de critère aux prélèvements et reversements doit être considéré au niveau national ou par strates de communes et par catégories d'EPCI.

A titre indicatif, ce tableau vous montre le potentiel financier par habitant moyen, pour 2010, des communes, classées par strates démographiques. On voit bien que ne pas prendre en compte les strates démographiques conduirait tout simplement à prélever de l'argent sur les communes de grande taille pour le distribuer aux communes les moins peuplées, ce qui ne me semble pas devoir être l'objectif d'une péréquation juste et efficace.

Le même constat peut être dressé concernant les EPCI.

Comment traiter de manière identique les 10 communautés de communes de moins de 700 habitants et les communautés urbaines de plus de 50 000 habitants ? Si l'on veut mettre en place un dispositif qui fonctionne, il me semble nécessaire de répondre à ces questions et de modifier le dispositif actuel de l'article 125 qui ne prend aucunement en compte les strates démographiques et les catégories et strates d'EPCI.

Enfin, la question de la prise en compte de critères de charge se pose également.

Pour les prélèvements au profit du fonds, il me semble logique de prendre en compte le seul critère du potentiel financier par habitant. Il permet de mettre en place un prélèvement sur la richesse réelle de chaque collectivité.

En revanche, concernant les reversements, le seul critère du potentiel financier par habitant n'est peut-être pas pertinent. Faut-il prévoir des reversements en fonction d'un indice synthétique de ressources et de charges et, si oui, quelles charges faut-il prendre en considération ?

Pour répondre à l'ensemble de ces questions, il faut que nous disposions d'un minimum de visibilité sur les communes et EPCI qui seront prélevées et sur ceux qui bénéficieront des reversements.

Le cas échéant, la question de la mise en place d'un plafonnement du prélèvement au profit du fonds pourra se poser. C'est ce que nous avons fait, me semble-t-il de manière pragmatique, lorsque nous avons créé dans la loi de finances pour 2011 le fonds départemental de péréquation des DMTO. C'est également ce qui existait pour le FSRIF. Plafonner le prélèvement peut permettre l'adoption d'un dispositif en le rendant acceptable par les collectivités qui seront les plus gros contributeurs.

Concernant les bénéficiaires, outre la question des communes isolées, on peut s'interroger sur l'absence de distinction, dans les critères de reversement, entre les EPCI en fonction de leur degré d'intégration fiscale. Ne faudrait-il pas utiliser cette péréquation pour favoriser les EPCI les plus intégrés fiscalement, en utilisant le critère du coefficient d'intégration fiscale (CIF) ?

Enfin, je vous rappelle que seuls les EPCI, à l'exclusion de leurs communes membres, sont aujourd'hui bénéficiaires des reversements du fonds.

Se pose donc également la question des modalités d'encadrement du reversement des ressources du fonds par l'EPCI entre ses communes membres.

L'ensemble de ces questions, qui, vous le voyez, sont nombreuses et complexes, s'articule avec les deux autres calendriers relatifs aux collectivités territoriales : la connaissance définitive des produits de la CET, à la fin de l'année 2011, et le bouclage de la carte de l'intercommunalité, qui n'interviendra qu'en 2014.

Je passe maintenant la parole à Philippe Dallier, rapporteur sur la question spécifique de l'Ile-de-France et de son fonds de solidarité.

M. Philippe Dallier , rapporteur . - Je poursuis cette revue de détail de l'état de la péréquation au sein du bloc communal par le sujet de la particularité francilienne avec le remplacement du fonds de solidarité des communes d'Ile-de-France (FSRIF).

Quelques éléments de rappel sur le fonds de solidarité des communes de la région Ile-de-France tel qu'il a fonctionné jusqu'en 2010.

Créé en 1991, le FSRIF assure une redistribution entre les communes (et non pas les intercommunalités) par prélèvement sur les ressources fiscales des communes et EPCI les plus favorisés au profit des communes les plus défavorisées.

Ses ressources proviennent de deux prélèvements qui font appel d'une part, à la notion de potentiel financier, et d'autre part, à la richesse fiscale économique (à travers les bases de la taxe professionnelle).

S'agissant du premier prélèvement, son assiette est constituée par le produit de la population DGF 2010 de la commune par le montant du potentiel financier par habitant de la commune excédant le potentiel financier moyen par habitant des communes de la région d'Ile-de-France.

A cette assiette sont appliqués trois taux de prélèvement, de respectivement 8, 9 et 10 % selon que le potentiel financier par habitant de la commune est égal ou supérieur à respectivement 1,25 ; 2 et 3 fois le potentiel financier moyen des communes de la région.

Pour le deuxième prélèvement, le montant du prélèvement est égal au produit du taux de taxe professionnelle en vigueur dans la commune par 75 % des bases par habitant excédant le seuil précité, multiplié par la population.

Le FSRIF présente deux autres particularités :

- les prélèvements sont plafonnés en pourcentage du montant des dépenses réelles de fonctionnement constatées (5 % pour le premier prélèvement, 10 % pour le second) ;

- ses règles de redistribution reposent sur un indice synthétique de ressources et de charges qui permet de classer les communes de la région Ile-de-France. Cet indice est complexe. Il fait intervenir quatre critères : le potentiel financier par habitant de la commune à hauteur de 55 %, la proportion de logements sociaux dans le total des logements de la commune pour 15 %, la proportion de bénéficiaires d'aides personnalisées au logement (APL) pour 20 % et le revenu par habitant pour 10 %.

Les résultats du FSRIF en 2009 doivent constituer la base de référence puisqu'en 2010, le produit du FSRIF a baissé de manière un peu artificielle, Paris ayant « basculé » des produits de la collectivité communale sur la collectivité départementale, ce qui a faussé les chiffres. En 2011, faute de référence à une TP réelle, on est passé à un régime « théorique » et c'est la loi de finances qui a pris comme référence 2009.

On notera la part des EPCI à taxe professionnelle unique dans le second prélèvement. Cette participation est toute récente puisqu'elle a été introduite par la loi de finances pour 2009 qui a élargi le second prélèvement aux communautés de communes et communautés d'agglomération à taxe professionnelle unique.

Ce tableau a pour objectif de montrer que l'impact de la péréquation horizontale n'est pas négligeable même si elle reste modeste dans ses montants.

Bien entendu, il ne s'agit que de moyennes départementales sur des attributions communales, mais elles font tout de même apparaître les écarts de richesse de la région et l'effet péréquateur du FSRIF.

C'est ce qui explique l'attachement des élus franciliens à cet outil qui reste une réalisation unique en France.

Revenons aux textes. La question du FSRIF a été abordée à l'occasion des deux lois de finances successives, pour 2010 et pour 2011.

Par deux fois, le principe même de l'existence d'un instrument propre à l'Ile-de-France a été réaffirmé de même que celui d'un montant au moins équivalent au produit redistribué en 2009.

Dans la loi de finances pour 2011, deux « nouveautés » :

- il ne s'agit plus de garantir en 2012 le montant 2009, mais de prévoir une progression d'ici 2015, ce qui est aussi l'objectif de temps du fonds intercommunal et communal. On observera cependant que l'ambition pour le FSRIF est plus « raisonnable » puisqu'il est dit dans l'article 125 qu'il augmentera de 1,5 fois son montant 2009, alors que les recettes du fonds national doivent être multipliées par 4 ;

- la reconnaissance d'une spécificité du FSRIF dans le cadre du fonds national, dans des termes qui devraient être précisés. C'est le second alinéa du VII de l'article 125 : « Il (le FSRIF) est alimenté au premier chef par les ressources provenant des prélèvements ci-avant décrits. Il obéit à des règles de fonctionnement de prélèvement complémentaire et de péréquation internes autonomes en raison de la spécificité de la région d'Ile-de-France. »

Un point rapide sur les enjeux. Si l'on ne trouve pas très vite de solution satisfaisante pour le FSRIF, qui garantisse son efficacité actuelle et permette une amélioration de celle-ci pour l'avenir, on risque d'aller vers une solution de type FDPTP après le vote du Sénat, c'est-à-dire une transformation en dotation de l'Etat, soit à montant gelé, soit avec une indexation fixée par la loi. Ce serait totalement en opposition avec l'esprit de ce dispositif qui doit pouvoir évoluer pour s'approcher au plus près des réalités économiques et sociales d'un territoire régional.

Quelles sont les questions à régler et les préalables à lever pour permettre la cohabitation du fonds national et du FSRIF, puisque le Sénat a finalement repoussé l'idée du rapport Durieux et des parlementaires en mission, reprise par l'Assemblée nationale, de créer deux niveaux de péréquation horizontale, l'un national, l'autre régional ?

J'ai listé certaines conditions qui rejoignent souvent les observations faites par Charles Guené. Elles concernent :

- la mesure de la richesse effective des collectivités (effort fiscal, prise en compte des charges, sur la base de critères simples et incontestables comme le potentiel financier élargi et le revenu moyen par habitant...) ;

- et l'introduction d'un plus grand réalisme dans les solutions apportées (stratification démographique des potentiels fiscal et financier, plafonnement du prélèvement).

Le principal sujet reste celui qui ne peut être traité sérieusement faute d'informations de base dont nous ne disposons pas et qui est celui de la « soutenabilité » financière (et politique) du mécanisme. L'ensemble du système de péréquation peut-il être financé par les communes et intercommunalités d'une seule région, l'IDF ?

C'était déjà une question soulevée par le rapport des parlementaires en mission (dont faisait partie Charles Guené). Sur la base de la proposition « Durieux » de coexistence d'un fonds national et du FSRIF, il relevait « l'importance du prélèvement qui sera demandé aux blocs communaux contributeurs. Ces derniers devront en effet assurer une contribution tant au fonds national qu'au fonds de leur région. Ainsi pour l'Ile-de-France, ces contributions atteindraient 541 millions d'euros, 54 millions d'euros pour la région Rhône-Alpes et près de 64 millions d'euros pour la région Provence-Alpes-Côte d'Azur. A l'inverse, des montants conséquents pourraient être attribués aux blocs communaux défavorisés de plusieurs régions (ainsi, 71 millions d'euros aux blocs communaux de Midi-Pyrénées et 59 millions d'euros à ceux du Nord-Pas-de-Calais). »

Faute de données qui ne nous ont pas été fournies lors du vote de la loi de finances, nous avons dû prendre des hypothèses : celle que le montant des recettes fiscales du bloc communal, qui détermine l'objectif chiffré du fonds national, resterait quasiment identique au produit atteint en 2009. Cela donne globalement des objectifs de recettes pour le fonds national qui vont de 250 millions d'euros en 2012 à 1 milliard d'euros en 2015. L'autre hypothèse est que les communes et EPCI de la région Ile-de-France contribueraient pour 80 % aux recettes du fonds national.

Si l'on intègre le financement du FSRIF - a priori exclusivement à la charge des communes et EPCI de l'Ile-de-France - cela donne en 2015 un prélèvement de 800 millions d'euros à la charge de ces communes et EPCI et un taux de retour qui passe de 93 % en 2012 à 35 % en 2015.

Pour que la péréquation horizontale soit juste - en région Ile-de-France mais aussi ailleurs - il faut qu'elle prenne en compte l'ensemble des facteurs qui font la richesse d'un territoire. Parmi ces facteurs figure le taux d'effort fiscal.

Or, la lecture de l'ensemble des taux moyens d'effort fiscal par départements d'Ile-de-France et de quelques exemples des départements de Province montre la diversité des situations.

La diversité serait encore plus grande si l'on descendait au niveau communal.

Je vous rappelle que selon les chiffres donnés devant notre commission par l'IAURIF (Institut d'aménagement et d'urbanisme de la région Ile-de-France) l'année dernière, en Ile-de-France, le potentiel financier par habitant en 2008 variait de 1 à 70, ce qui représente le plus fort écart entre collectivités au sein des régions françaises.

Enfin, un sujet qui n'est peut-être pas central mais qui a toute son importance dans la petite couronne parisienne : celui de sa spécificité s'agissant de l'intercommunalité.

Il faut à ce sujet :

- tenir compte de la réalité des situations (taille des communes de la petite couronne) ;

- et rétablir de la cohérence entre les textes législatifs.

M. Jean Arthuis , président . - Merci à nos deux rapporteurs. On a presque le vertige quand on met sur la table toutes les données et qu'on voit à quel point notre République pratique l'inégalité. L'exercice consiste à rééquilibrer. Quand on parlera de potentiel financier, il faudra se mettre d'accord pour y inclure toutes les ressources, y compris la dotation de fonctionnement minimale (DFM) pour les départements afin de ne pas commettre de grandes injustices. A ce stade, nous allons demander à Eric Jalon et à Marie-Christine Lepetit de réagir à ces présentations. Tout d'abord Eric Jalon.

M. Eric Jalon, directeur général des collectivités locales . - Je suis d'accord avec le président Arthuis sur le fait que notre République tolère des inégalités. Les deux rapporteurs ont marqué les limites de cette réforme et je souhaiterais répondre en reprenant l'ordre des questions.

La première question concerne la notion de recettes fiscales au sens de l'article 125 de la loi de finances.

La direction de la législation fiscale est partie d'un tableau des ressources des communes et des intercommunalités en 2009 auxquelles a été ajoutée la taxe d'enlèvement des ordures ménagères (TEOM), ce qui a donné 49 milliards d'euros. L'objectif d'un milliard d'euros nous a paru raisonnable et a donné le calcul de 2 %. Ce n'est évidemment pas représentatif de ce que pourrait être le panier de recettes prises en compte dans le cadre de cette péréquation. C'est simplement un ordre d'idée.

M. Jean Arthuis , président . - Cela ne prend pas en compte les nouvelles impositions et notamment la territorialisation de la CVAE.

M. Eric Jalon . - Tout à fait. Sur le sujet de la cible il reste un certain nombre de questions restées ouvertes : quelles sont les recettes fiscales prises en compte et quel est le périmètre ? Quelle montée en charge progressive : 0,5, 1, 1,5 puis 2 ? Cette progressivité doit-elle être maintenue ? Est-ce adapté ? Le profil doit-il être plus exponentiel ? L'objectif doit-il être figé ou glissant en fonction des recettes fiscales effectives des collectivités ? Faut-il le fixer en proportion des recettes fiscales ? En valeur absolue (1 milliard d'euros) ou en termes d'objectif de réduction des inégalités, étant entendu qu'il nous faudra mesurer à échéance régulière l'ensemble des mécanismes de péréquation. Quant aux recettes prises en compte dans cette péréquation, nous avons présenté au comité des finances locales un tableau récapitulant l'ensemble des recettes fiscales des communes et des intercommunalités qu'il faut « croiser » avec deux autres critères :

- le mode et le calendrier de recensement de ces données ;

- la proportion que représentent ces recettes fiscales : elle doit être la plus large possible. Mais chaque fois que nous voudrons inclure une recette, il faudra faire attention à la disponibilité des données qui doivent être connues assez tôt dans l'année pour établir des calculs en temps utiles et incontestables. En exemple, on peut citer le versement transport ou la TEOM.

En ce qui concerne la DCRTP et le FNGIR, à prendre en compte ou pas dans le panier de recettes - en plus pour les collectivités qui bénéficient des reversements, en moins pour les collectivités qui sont écrêtées au titre du FNGIR - il nous semble, et c'est l'avis du groupe de travail du CFL, qu'il faut les inclure. Je passe rapidement sur le débat relatif à la nature du potentiel financier et du potentiel fiscal. Pour ce dernier c'est originellement l'application d'un taux moyen national à des bases locales. Avec le potentiel financier, on introduit des dotations qui ne sont pas modulables par les collectivités et, avec la réforme de la TP, on se rapproche de plus en plus d'un produit et pas d'un potentiel. L'important est d'avoir une vision réelle et neutre de la réalité des produits qu'une collectivité peut attendre de son territoire, et pour le potentiel financier, des dotations de l'Etat perçues à titre récurrent.

M. Jean Arthuis , président . - Cela signifie donc que lorsqu'on a des assiettes spécifiques à chaque collectivité et des taux dans la main des collectivités, on prend un taux moyen pour calculer un revenu théorique et on intègre les dotations pour le montant réel, ce qui détermine un montant par habitant.

M. Eric Jalon . - Aujourd'hui ne sont ajoutées que les dotations perçues à titre régulier et forfaitaire, hors dotations de péréquation afin de ne pas créer une référence circulaire. Sur l'objectif de 2 %, il y a un certain nombre de questions posées. D'une part, la manière dont les FDPTP s'articulent : est-ce que leur gouvernance doit évoluer ou pas ? Faut-il revoir la répartition entre les départements (au sein desquels les pratiques ne sont pas homogènes) ? Faut-il mieux les encadrer, améliorer leur connaissance ? Certainement, mais c'est un sujet devenu « latéral ». D'autre part, concernant l'inclusion ou non du FSRIF (186 millions en 2009, 173 en 2010) dans l'objectif de 2 %, j'ai retenu des propos de Charles Guené l'idée de le faire plutôt venir en plus de l'objectif de 2 %. C'est le point le plus compliqué du dispositif et je regrette que le Sénat ait commencé ses travaux par ce point précis.

Trois sujets pour terminer : la question des strates, les critères de ressources et de charges et l'articulation entre EPCI et communes dans le dispositif. En ce qui concerne les strates, il y a trois manières de les intégrer dans notre raisonnement :

- le prélèvement : l'instrument de mesure du potentiel financier doit-il être apprécié strate par strate ou sur la base d'une comparaison nationale ? Non stratifié, un nombre limité de collectivités de très grande taille supporteront l'essentiel des prélèvements ;

- les strates ou groupes démographiques pour les critères de répartition : il faudra alors tenir compte de la typologie des collectivités appelées à bénéficier de la péréquation ;

- l'intersection entre les deux : si on fait des groupes démographiques pour la répartition et le prélèvement, alors la péréquation se fera-t-elle uniquement entre les collectivités de ces groupes ? La réponse est négative car cela diminuerait la puissance globale du mécanisme.

Il y a ensuite la question des critères de ressources et de charges. Il conviendrait de distinguer les prélèvements (avec les critères de ressources) des reversements (avec les critères de charges). Ce qui revient à dire qu'une collectivité peut être bénéficiaire et contributrice à la fois.

Sur les critères de charges à mobiliser pour la répartition de la dotation, le système n'est pas parfait, mais les critères sont fiabilisés et la préoccupation majeure est de tendre vers un équilibre entre la pertinence des critères, leur qualité, leur fiabilité et l'absence de contestation.

Enfin, sur la question de l'articulation entre les communes et les intercommunalités et celle des prélèvements et du reversement, il faut prendre en compte la richesse des territoires et des communes. Moins d'interlocuteurs permettrait de comparer des « blocs » locaux quels que soient par ailleurs les choix fiscaux. Je suis favorable à la répartition du prélèvement entre l'EPCI et ses communes membres au prorata de la contribution de chacune de ces entités à la constitution de ce potentiel fiscal.

S'agissant des reversements, le texte exclut les communes isolées. Cela nous pose trois difficultés : celle propre à l'Ile-de-France car l'objectif de couverture du territoire par l'intercommunalité n'a pas été retenu par le législateur pour les départements de la petite couronne, celle des collectivités qui ne seront probablement pas en intercommunalité (îles mono-communales) et celle des communes qui pendant les périodes transitoires se retrouveront isolées.

Comment répartir les attributions du fonds au sein du bloc des communes ? Par défaut, la règle définie par le législateur est de laisser 50 % à l'EPCI et 50 % aux communes membres. Il faudrait l'approfondir sur le quantum et les modalités de fixation (fixé a priori par le législateur ou par accord local à l'unanimité ou la majorité qualifiée). Je serai à titre personnel assez partisan d'un accord local à défaut duquel s'appliquerait des règles prédéterminées par le législateur.

M. Jean Arthuis , président . - Je vous remercie mais il nous faudrait une simulation suffisamment précise pour permettre au groupe de travail de se prononcer. C'est peut-être Marie-Christine Lepetit qui nous permettra d'obtenir les chiffres.

Mme Marie-Christine Lepetit, directrice de la législation fiscale . - Eric Jalon a été très complet et c'est bien volontiers que je cède le pas à la DGCL sur les questions où la compétence de la DLF trouve ses limites. Je souhaite rappeler brièvement l'historique du texte. Sur les questions d'objectif de péréquation, il souffre quelques ambigüités sur la portée du 2 % (à partir de quelle masse est-elle calculée, la façon dont ces 2 % s'articulent avec les FDPTP, avec le FSRIF) ? Le Gouvernement a été probablement un peu timide dans son projet de loi initial car le raisonnement que nous avions fait partait des anciens FDPTP (les communes défavorisées et aussi les communes concernées) qui étaient à l'époque de l'ordre d'un milliard d'euros. Ce montant n'était pas complètement péréquateur mais a servi de point de référence. Le Parlement a accru l'ambition de ce texte puisqu'il en a doublé le montant final, passant ainsi à 2 milliards. Le Gouvernement n'a pas retenu un objectif directement exprimé en souhait de rétrécir les écarts de richesse entre territoires.

M. Jean Arthuis , président . - C'est un choix implicite.

Mme Marie-Christine Lepetit . - Le Gouvernement a choisi d'incarner en chiffre, pour la première fois, un objectif de péréquation à 2 % mais ce pourcentage est soumis à discussion puisqu'il a été renforcé. A l'époque (et encore maintenant), on n'avait pas de vision très claire, en situation de post réforme TP, du besoin de péréquation exprimé en réduction des inégalités puisque les chiffres disponibles, figurant dans le rapport Durieux, et qui mesuraient les écarts de richesse étaient en fonction des impôts connus. C'est par prudence qu'on ne s'engage pas sur quelque chose dont on ne connaît pas précisément le diagnostic.

M. Jean Arthuis , président . - Surtout que les valeurs locatives qui servent d'assiette au calcul du produit du potentiel fiscal ne sont pas homogènes et peuvent varier du simple au double.

Mme Marie-Christine Lepetit . - Monsieur le président, ce n'est pas quelque chose de nouveau du fait de la réforme. Il sera utile de faire un point régulier car les chiffres post-réforme sont à produire et ils seront éclairants.

M. Jean Arthuis , président . - Tout à l'heure, nous allons recevoir Didier Migaud, qui a fait un gros travail sur la convergence entre la France et l'Allemagne. Cette dernière est arrivée à réduire les écarts.

Mme Marie-Christine Lepetit . - Mais là-bas c'est facile puisqu'il n'y a plus de foncier, pas d'impôts locaux, et un partage des impôts nationaux. Deux points complémentaires sur la production des chiffres, ces derniers doivent nécessairement intégrer les questions de dotations de l'Etat et ils sont la propriété exclusive de la DGCL qui les produira dans le détail.

M. Jean Arthuis , président . - Il y a bien un moment où ils devront être communiqués.

Mme Marie-Christine Lepetit . - Un rapport est en préparation à la DLF. Je souhaite revenir sur la façon dont se répartissent le prélèvement et le reversement, surtout le prélèvement entre EPCI et communes. Il y a un hiatus important entre le texte conçu par le Gouvernement et le texte adopté (sans grand débat). Celui-ci organise les prélèvements séparément et d'une manière étanche, en ne tenant pas compte des différents types d'organisation et des flux qui interviennent entre EPCI et les communes membres, dans un exercice de péréquation qui me laisse assez perplexe. Cette question mérite une grande attention car elle n'est techniquement pas bouclée.

M. Jean Arthuis , président . - Si on devait raisonner en termes de faisabilité, on pourrait imaginer que l'intercommunalité soit l'interface de l'Etat en ce qui concerne les dotations et les prélèvements, à charge pour les collectivités membres d'une intercommunalité de trouver les conventions localement.

M. Eric Jalon . - C'est l'esprit dans lequel avait été conçu le texte du Gouvernement s'agissant de cette péréquation des recettes fiscales communale et intercommunale. C'est par défaut de compréhension qu'il a été écarté.

Mme Marie-Christine Lepetit . - L'incompréhension portait sur le caractère automatique ou non automatique du dispositif. L'idée première était d'organiser seulement un quantum de prélèvement sur le territoire. Lors des discussions en juin-juillet, le partage entre ceux qui avaient envie de cette liberté et ceux qui disaient : « attention il y a des situations locales d'espèce », a conduit à globaliser afin d'éviter de prélever deux fois sur le même territoire, d'avoir des distorsions de situation selon que les EPCI seront plus ou moins intégrés, les prélèvements se répartissant d'une manière mécanique. Eric Jalon a raison car c'était vraiment l'esprit du texte avec l'étage EPCI et l'étage communes membres. Mais on n'a pas su faire comprendre qu'il était à la fois pertinent dans l'organisation de la péréquation au niveau du bloc communal et en même temps protecteur et simple dans la mécanique de répartition entre EPCI et communes.

M. Eric Jalon . - Pour répondre à votre question en termes de faisabilité, l'instrument de mesure qui est le potentiel fiscal agrégé entre communes et intercommunalité figure dans la loi puisqu'il a été adopté dans l'article 183 de la loi de finances. Sa définition devra être retravaillée en fonction du nouveau panier des recettes et du souhait, notamment du Sénat, d'évoluer de manière générale vers les potentiels financiers au détriment des potentiels fiscaux, mais le prototype du « thermomètre » existe déjà. C'est un peu différent s'agissant des dotations.

M. François Fortassin . - Je retiens de cette réunion l'extrême prudence et l'hyper-technicité de cette réforme. Pour en revenir à la définition de la péréquation, il s'agit de donner un peu plus aux communes défavorisées. C'est la solidarité territoriale. Dans ce pays, il existe une solidarité sociale qui fait que dans les conseils généraux on y consacre 50 % du budget et parfois plus, mais je me demande si on peut aller aussi loin dans la péréquation. Je suis favorable à la solidarité territoriale mais j'estime que 2 % ce n'est pas suffisant.

M. Jean Arthuis , président . - Ce qui est formidable c'est qu'on est arrivé à mettre dans la Constitution qu'il fallait à la fois l'autonomie financière et la péréquation. C'est une totale contradiction. On y a ajouté un principe de précaution qui permet à Eric Jalon et Marie-Christine Lepetit de ne pas mettre les chiffres sur la table, mais nous on veut voir vos simulations car c'est la seule façon de réguler.

M. Eric Jalon . - Ce que vous dites monsieur le sénateur correspond à ce qu'on essaie de faire à bien des égards, et là on traite un des points incontestablement nouveaux qui est la péréquation horizontale, c'est-à-dire la redistribution, certes que de 2 %, des recettes fiscales entre collectivités.

M. Jean Arthuis , président . - C'est l'ISF pour payer le RMI.

M. Eric Jalon . - En quelque sorte, mais, par ailleurs, il y a eu une réforme de la DGF en 2004-2005 pour avoir un montant forfaitaire par habitant et nous écrasons progressivement ce qui est le substrat d'inégalité historique entre collectivités : le complément de garantie. On ne l'écrête que de 2 % par an, mais en redéploiement progressif entre collectivités, surtout cette année où nous le ferons en prélevant sur le complément de garantie des collectivités les plus favorisées. Pour ce qui est des simulations, nous ne cachons rien. Il y a un calendrier de mise à disposition des recettes fiscales par les services de la DGFIP dont nous sommes tributaires. Le Parlement a modifié les modalités de la CVAE dans la dernière loi de finances avec les critères de territorialisation, cela décale d'autant la disponibilité des données.

M. Jean Arthuis , président . - Concernant la CVAE, à la DLF, les déclarations faites par les entreprises vont faciliter votre travail de répartition, de territorialisation. Comment cela se présente-t-il ?

Mme Marie-Christine Lepetit . - Il y a eu une exploitation des chiffres l'année précédente mais les critères ont changé depuis et maintenant il faut attendre la prochaine livraison des entreprises. Les données de juin dernier vont servir à notifier les sommes ce mois-ci mais ce n'est pas une version définitive.

M. Jean Arthuis , président . - Nous souhaitons néanmoins avoir les chiffres provisoires.

Mme Marie-Christine Lepetit . - Pour la notification des budgets, les sommes de CVAE qui seront précisées aux collectivités locales tiennent comptes des déclarations de CVAE de l'année dernière sur la base des règles adoptées par le Parlement en 2009. Mais comme les règles de répartition ont changé, si la garantie de ressources est organisée de la même façon entre avril et décembre 2011, la répartition de ce qui sera strictement fiscal, c'est-à-dire la CVAE, et de ce qui sera la DCRTP et le FNGIR peut évoluer en fonction des nouvelles règles de répartition.

M. Jean Arthuis , président . - Nicole Bricq souhaitait poser une question.

Mme Nicole Bricq . - Il me semble que la péréquation par rapport à l'objectif quantitatif est celui de la mesure de la diminution des inégalités. Il n'est pas impossible d'y arriver mais compliqué. Je souhaite qu'on ait une appréciation de cette complexité. Concernant le problème des strates, je m'interroge sur la possibilité de parvenir à une sorte de « SMIC des collectivités » , c'est-à-dire fixer un niveau minimal de richesse à atteindre pour permettre aux collectivités de faire face à leurs besoins, à leurs difficultés, car ce sont les collectivités les plus urbaines qui paient pour les plus rurales. Quant au problème du plafonnement du prélèvement, il a une fonction d'assurance de la fiscalité locale. Un prélèvement progressif en fonction des richesses de la collectivité serait plus indiqué qu'un plafonnement.

Mme Marie-France Beaufils . - Mon interrogation porte d'abord sur le panier de recettes pour la mesure de la richesse des collectivités et de leur potentiel financier. J'aimerais avoir une vision plus claire sur ce panier des richesses d'une collectivité territoriale, certaines communes engrangent des recettes indépendamment de la richesse de leur population (recettes des paris sur les jeux en ligne, PMU...). Par ailleurs, il y a un problème fondamental dans le fait de transférer totalement la péréquation aux intercommunalités.

M. Jean Arthuis , président . - L'intercommunalité est un vrai lieu de péréquation entre les communes membres d'un EPCI. Je vous précise qu'il y aura une réunion le 29 mars qui traitera des potentiels fiscal et financier, et nous verrons cela à ce moment-là. Quant aux deux fois 10 millions qui ont été votés dans le cadre de la loi sur l'ouverture à la concurrence et la régulation des jeux en ligne, ces recettes là devront être prises en compte au titre des ressources du potentiel financier des communes. La parole est à François Marc.

M. François Marc . - Je comprends les interrogations de l'administration fiscale française car cette réforme est complexe. On est en train d'inventer des dispositifs spécifiques pour la gestion des collectivités territoriales. Pourquoi ne pas préserver une forme d'autonomie de gestion des collectivités et utiliser des mécanismes déjà existants en DGF en les améliorant et on pourrait s'appuyer sur l'exemple allemand pour un système simplifié et péréquateur ?

M. Jean Arthuis , président . - Il va falloir trancher puisqu'il y a deux péréquations :

- une verticale, l'Etat verse les dotations aux collectivités territoriales, ce système n'est pas égalitaire ;

- une péréquation horizontale, l'Etat prend 2 % des recettes fiscales aux collectivités pour le redistribuer à celles qui sont défavorisées.

M. Philippe Adnot . - Je salue le travail de fond de la DGCL et je ne trouve pas cela complexe. Les engagements de l'Etat ont été tenus grâce aux FDPTP. Je crois important de connaître la richesse nouvelle avec la CVAE qui permettra des comparaisons. Mais je m'oppose à ce que la DLF communique ses simulations car il convient de raisonner sur les principes. Sinon, tous les raisonnements vont être faussés.

M. Philippe Dallier , rapporteur . - Nous souhaiterions disposer d'une répartition Ile-de-France/reste de la France, même si elle va évoluer d'ici l'automne. Cette communication est indispensable pour le FSRIF. Je voudrais attirer votre attention sur les critères de charges dans le calcul de l'indice synthétique : le potentiel financier, le revenu par habitant et le nombre de logements sociaux. Est-il bien nécessaire d'avoir autant de critères différents ?

M. Jean Arthuis , président . - Merci, la parole est maintenant à Pierre Jarlier.

M. Pierre Jarlier , rapporteur . - Eric Jalon a évoqué tout à l'heure le problème des seuils, nous pourrions profiter aujourd'hui de ce travail pour éviter les difficultés auxquelles nous avons été confrontées. Si on pouvait inventer un nouveau système avec une péréquation progressive cela permettrait une répartition plus juste. Il faut des initiatives et des accords territoriaux et à défaut de ceux-ci, il devrait exister une règle pour éviter les inégalités. Une parfaite connaissance des disparités actuelles est indispensable pour avoir une photographie des richesses territoriales et combattre les inégalités.

M. Jean Arthuis , président . - Je me félicite que dans le texte de loi sur la péréquation, celle-ci vise à « favoriser l'égalité entre les collectivités ».

M. Eric Jalon . - En conclusion, je reviens sur la question de Nicole Bricq relative à l'articulation entre un objectif général de réduction des inégalités et des objectifs sectoriels de péréquation : il est indispensable à mon sens de mettre de la cohérence dans les dispositifs de péréquation et qu'une mesure globale de la réduction des inégalités soit faite avant et après péréquation. Actuellement, nous avons une approche partielle des résultats car nous ne disposons que des travaux universitaires tous les quatre ou cinq ans. Il est difficile de ce fait de créer des dispositifs juridiques contraignants. Concernant les strates et le plafonnement, la progressivité et la dégressivité de certains dispositifs, c'est exactement ce qui a été fait sur les droits de mutation cette année. Sur le panier de recettes nous y reviendrons puisque celles dont nous disposions datent d'avant la réforme. Sur la péréquation de la DGF évoquée par François Marc, les dotations pour les communes ont doublé d'ores et déjà entre 2004 et maintenant (DSR, DSU). Pour les simulations, dès lors qu'il y a accord provisoire sur le fait d'intégrer dans le potentiel financier les montants de DCRTP et de FNGIR, comme ils sont calculés ex-post pour atteindre les ressources 2010, on devrait pouvoir prendre un peu d'avance pour explorer ce point, de même que pour la TaSCom. Sur les critères, il y en a deux insuffisamment pris en compte et à étudier de plus près : le revenu par habitant...

M. Jean Arthuis , président . - Quand on parle du revenu s'agit-il du revenu de référence ou du revenu fiscal, pour peu que le contribuable bénéficie de niches fiscales. Quel est le revenu pris en compte pour le calcul du revenu moyen par habitant ?

M. Eric Jalon . - Nous allons vérifier ce point. L'autre critère c'est soit l'effort fiscal, soit le coefficient de mobilisation du potentiel fiscal.

M. Jean Arthuis , président . - Merci à Marie-Christine Lepetit et à Eric Jalon d'être venus.

3. Mardi 29 mars 2011

Présidence de M. Jean Arthuis , président

Potentiels fiscal et financier, Fonds régional et départemental de péréquation de la CVAE

Audition de MM. Eric Jalon, directeur général des collectivités locales, et Michel Klopfer, président du cabinet CMK, et de Mme Céline Bacharan, consultante au cabinet CMK

M. Jean Arthuis , président . - Mes chers collègues, pour la troisième réunion de notre groupe de travail sur la mise en oeuvre de la péréquation financière entre les collectivités territoriales, nous aborderons aujourd'hui les deux autres thèmes qui constituent le périmètre de réflexion de notre groupe de travail sur la péréquation :

- les nouveaux fonds régional et départemental de péréquation de la CVAE ;

- et le nouveau mode de calcul des potentiels fiscal et financier.

Dans un premier temps, nos deux rapporteurs (Albéric de Montgolfier et Pierre Jarlier) vont présenter l'état des lieux de ces deux questions.

Ensuite, nous entendrons nos deux intervenants extérieurs :

- Eric Jalon, qui apportera les réponses de l'administration (la DGCL) sur une liste de questions, élaborée par les rapporteurs, qui leur a été adressée et que vous avez vous-mêmes reçue avec la convocation à cette réunion ;

- et Michel Klopfer, que beaucoup d'entre vous connaissent déjà, qui présentera les conclusions que son cabinet a publiées récemment sur les conséquences de la nouvelle définition du potentiel financier.

Enfin, nous débattrons afin d'orienter, toujours sur ces deux sujets, la suite de nos travaux.

Avant de passer la parole à Albéric de Montgolfier, je vous rappelle que la prochaine réunion de notre groupe de travail concernera le fonds intercommunal et communal et le FSRIF et qu'elle aura lieu le mercredi 13 avril à 14 h 30.

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur . - Monsieur le Président, cette deuxième réunion de notre groupe de travail traite plus spécifiquement de deux sujets : les fonds de péréquation de la CVAE des régions et des départements, d'une part, et les notions de potentiel fiscal et financier, d'autre part, notions sur lesquelles interviendra Pierre Jarlier, qui en est le rapporteur.

Concernant la péréquation de la CVAE des régions et des départements, revenons rapidement sur l'historique de nos votes.

Dans la loi de finances pour 2010, nous avions dû adopter, un peu en « urgence », des dispositifs de péréquation rendus nécessaires par l'adoption du choix, proposé par l'Assemblée nationale, d'une territorialisation intégrale de la CVAE. C'est donc en lecture des conclusions de la CMP que nous avons voté, sans évaluation préalable, la création d'un dispositif complexe : quatre fonds de péréquation de la CVAE - deux pour les régions, deux pour les départements.

Pour chaque catégorie de collectivités étaient prévus un fonds de péréquation sur le stock de CVAE, redistribué selon des critères de charge, et un fonds de péréquation sur le flux de CVAE, redistribué selon des critères de ressources.

Le rapport Durieux, de mai 2010, a pointé les lacunes de ce dispositif :

- les fonds de péréquation sur stock s'apparentaient en réalité à des fonds de péréquation sur flux cumulé puisque les recettes des collectivités étaient garanties via les fonds nationaux de garantie individuelle des ressources (FNGIR) ;

- l'effet péréquateur de ces fonds restait assez faible, notamment parce que les fonds de péréquation sur flux ne prélevaient de la ressource qu'aux collectivités dont la croissance de CVAE était supérieure à la croissance moyenne. Ainsi, par exemple, en cas de croissance égale de la CVAE pour tous les départements, aucun prélèvement n'aurait été effectué ;

- enfin, rien ne justifiait que l'un des fonds redistribue ses dotations en fonction de critères de charges tandis que l'autre les redistribue selon des critères de ressources.

C'est pourquoi le rapport préconisait notamment la simplification du dispositif par l'adoption, pour chacune des deux catégories de collectivités, d'un unique fonds de péréquation sur le flux cumulé de CVAE, c'est-à-dire, chaque année à partir de 2012, sur le surplus de CVAE constaté par rapport à l'année 2011.

Les préconisations du rapport des parlementaires en mission ont confirmé cette analyse et comprennent :

- la suppression du dispositif de péréquation sur stock ;

- l'augmentation de 25 % à 50 % du prélèvement opéré sur le flux cumulé de CVAE, pour les départements comme pour les régions ;

- une redistribution en fonction d'un indice synthétique prenant en compte des critères à la fois de ressources et de charges.

Je vous présenterai quelques éléments de cadrage avant d'en venir au dispositif adopté dans la dernière loi de finances.

La CVAE devrait rapporter en 2011 environ 15,7 milliards d'euros, dont 7,61 milliards au profit des départements (soit plus de 30 % de leurs ressources fiscales) et 3,93 milliards d'euros au profit des régions (soit 80 % de leurs ressources fiscales).

Avec l'adoption de l'article 124 de la loi de finances pour 2011, les préconisations des rapports de l'IGF et des parlementaires ont été mises en oeuvre : les fonds ont été fusionnés, pour créer deux fonds de péréquation sur flux cumulés, l'un pour les départements, l'autre pour les régions, et la redistribution s'opère sur des critères à la fois de ressources et de charges.

Un débat s'est toutefois tenu entre l'Assemblée nationale et le Sénat sur l'ampleur de cette péréquation et sur les critères de prélèvement de ressources au profit des fonds.

Concernant les prélèvements, la version du texte proposée par le Gouvernement prévoyait un prélèvement des seuls départements et régions dont le potentiel fiscal était supérieur à la moyenne. Parmi ces collectivités, la moitié du produit de la CVAE excédant, en année « n », le produit de 2011, serait prélevée au profit de la péréquation.

L'Assemblée nationale a profondément restreint le prélèvement au profit du fonds. Elle a en effet prévu que les collectivités dont le potentiel fiscal est supérieur à la moyenne ne seraient prélevées que si la croissance de leur CVAE a excédé, depuis 2011, la croissance moyenne de la CVAE de leur catégorie.

Le Sénat n'avait pas retenu cette option pour les départements et était revenu, les concernant, au dispositif proposé par le Gouvernement en adoptant un amendement de notre collègue Philippe Adnot. Nous avons en outre remplacé la notion de potentiel fiscal par celle de potentiel financier.

Au final, la CMP a débouché sur un texte qui conserve la notion de potentiel financier mais qui revient au texte de l'Assemblée nationale concernant les prélèvements.

Quelques chiffres pour comprendre ce que cela implique.

Prenons l'hypothèse d'un département A avec 100 de CVAE en 2011 et d'une croissance moyenne de la CVAE de 2 % par an entre 2011 et 2015. Si le département A croît comme la moyenne, il disposera donc d'environ 108 de CVAE en 2015.

Plusieurs cas de figure :

- si le département est en dessous de 108 de CVAE en 2015, il ne sera pas prélevé. En effet, bien que son produit de CVAE ait augmenté, il a augmenté moins vite que la moyenne ;

- si le département est au-dessus de 108 de CVAE en 2015 mais que son potentiel financier par habitant est inférieur à la moyenne, il ne sera pas prélevé non plus en raison de la faiblesse de son potentiel financier ;

- le département ne sera donc prélevé que s'il est au-dessus de 108 de CVAE et que son potentiel financier est supérieur à la moyenne. Alors, par exemple, pour un produit de CVAE de 120, supérieur de 12 à la moyenne, il sera prélevé de la moitié de ce surplus, c'est-à-dire de 6.

Comme le montre ce nouveau tableau, le dispositif que nous avions voté au Sénat était différent puisque, avec les mêmes hypothèses, il aurait prélevé de la ressource à l'ensemble des départements dont le potentiel financier serait supérieur à la moyenne et dès le premier euro de surplus de CVAE par rapport à celui de l'année 2011, quelle qu'ait été la croissance de la CVAE par rapport à la croissance moyenne.

Ainsi, pour un produit de 120 de CVAE en 2015, le prélèvement aurait été égal à la moitié du surplus par rapport à 2011, c'est-à-dire à 10.

Venons-en aux modalités de reversements des produits du fonds, qui - à part le remplacement, à l'initiative du Sénat, du potentiel fiscal par le potentiel financier - n'ont pas été modifiées par le Parlement.

Tout d'abord, seuls les départements dont le potentiel financier est inférieur à la moyenne pourront bénéficier de reversements.

Le reversement s'opèrera pour moitié en fonction du potentiel financier et pour moitié en fonction de critères de charges (population, minima sociaux et population de plus de 75 ans, longueur de voirie).

Pour les régions, le dispositif est identique, sauf que le plafond pour bénéficier de reversements est plus strict : il faut que la région ait un potentiel inférieur à 0,85 fois la moyenne. Cette différence ce justifie par la répartition des potentiels des régions. En outre, les critères de charge diffèrent : population, lycéens et stagiaires en formation professionnelle, superficie.

Voilà où nous en sommes aujourd'hui, ce qui soulève plusieurs questions de fond.

Tout d'abord, deux pré requis : il faut définir un potentiel financier pour les régions, puisque cette notion n'existe pas actuellement dans la loi et, plus largement, il faut que nous décidions de l'ampleur à donner aux notions de potentiel financier des départements et des régions. Cette question sera traitée par Pierre Jarlier, dans le cadre de l'autre thème de travail.

Concernant les prélèvements, il me semble qu'est acquis le principe d'une péréquation sur flux cumulé. Une péréquation sur stock n'est en effet par compatible avec le principe de la compensation à l'euro près des effets de la réforme. De plus, cette péréquation sur flux cumulé sera, à terme, importante. En effet, en 2020 par exemple, ce sera sur l'ensemble de la croissance de la CVAE entre 2011 et 2020 que se fera la péréquation, ce qui n'est pas négligeable.

La principale question à traiter est celle du critère de prélèvement : faut-il prélever uniquement la part de la CVAE qui excède la croissance moyenne, comme nous l'avons voté dans la dernière loi de finances, ou faut-il revenir à un prélèvement dès le premier euro de croissance supplémentaire, comme l'avait souhaité notre assemblée ? Dans sa rédaction actuelle, dans l'hypothèse d'une croissance de CVAE uniforme sur l'ensemble du territoire, aucun euro ne serait prélevé au profit de la péréquation.

Si l'on choisit de revenir au texte du Sénat, il faudra traiter la question, soulevée par Gilles Carrez à l'Assemblée nationale, du cas d'un département dont la CVAE croîtrait mais à un rythme moins élevé que l'inflation. En effet, la CVAE croîtra naturellement avec la hausse des prix. Donc, si un département voit son produit passer de 100 à 108, mais que cette croissance est inférieure à celle de l'inflation, il perd en réalité une partie de son « pouvoir d'achat fiscal ». Dans ce cas, on peut douter qu'il soit pertinent de prélever tout de même une partie de sa croissance de CVAE au profit de la péréquation.

Enfin, concernant les reversements, il faut que nous traitions du problème des effets de seuil induits par le mécanisme actuel. En effet, il suffirait qu'un département passe au-dessus du seuil du potentiel financier moyen pour perdre tout reversement en provenance du fonds. Or, une partie des reversements se fait en fonction des charges du département. Donc un département légèrement en dessous du seuil pourrait bénéficier de versements importants et les perdre intégralement l'année suivante s'il dépasse ce seuil.

Cette remarque pose la question d'une éventuelle unification des critères d'éligibilité et de reversement. On pourrait imaginer la création d'un indice synthétique de ressources et de charges qui serve au calcul du montant de ces reversements (seuls seraient bénéficiaires les collectivités dont l'indice est plus défavorable que la moyenne et le reversement pourrait croître avec l'écart du département par rapport à cet indice moyen).

Enfin, d'après les informations dont nous disposons sur le potentiel financier actuel des collectivités, il faudra probablement prévoir un traitement à part des collectivités territoriales d'outre-mer, dont la situation est spécifique.

Sur l'ensemble de ces questions et notamment sur l'obtention de données chiffrées sur les potentiels financiers des départements et des régions, nous attendons beaucoup des éléments que la direction générale des collectivités locales peut nous fournir.

Je vous remercie de votre attention.

M. Pierre Jarlier , rapporteur . - La présentation d'Albéric de Montgolfier sur les futurs fonds de péréquation de la CVAE (départements et régions) comme les exposés que nous avons eus le 15 mars sur le fonds intercommunal et communal et le FSRIF ont, chacun à leur tour, évoqué la question centrale pour la péréquation des modalités de détermination du degré de richesse d'une collectivité.

Compte tenu de la complexité de ce sujet, j'ai choisi, en tant que rapporteur du quatrième thème, celui du potentiel fiscal et financier, de limiter mon propos d'aujourd'hui à un rappel des définitions applicables jusqu'en 2011 et de leur évolution à compter de 2012 et à soulever un certain nombre d'interrogations pour alimenter notre réflexion.

Je crois aussi important de préciser en introduction que la définition d'un instrument de mesure doit se faire de la manière la plus neutre et objective possible. C'est dans un second temps, et grâce à la combinaison de différents critères, que l'effort de péréquation pourra être orienté dans un sens ou dans un autre. Là encore, une appréciation la plus objective possible des ressources et des charges d'une collectivité est nécessaire. Et pour cette appréciation, les notions de potentiel fiscal et de potentiel financier sont centrales.

C'est à partir de ces indicateurs qui devront sans doute évoluer que nous pourrons, si nous disposons d'évaluations fiables, mieux connaître l'impact de la péréquation et mieux orienter les critères d'attribution.

Deux notions d'appréciation existent aujourd'hui : le potentiel fiscal, qui concerne plutôt les régions et les EPCI, fondé sur un indicateur de richesse fiscale ; le potentiel financier, qui concerne plutôt le bloc communal et les départements, fondé sur un indicateur plus large de ressources.

Je vous propose de revenir tout d'abord sur la notion de potentiel fiscal.

La définition traditionnelle du potentiel fiscal, vous la connaissez. Indicateur de richesse fiscale, défini pour les communes à l'article L.2334-4 du code général des collectivités territoriales, le potentiel fiscal est égal à la somme que produiraient les quatre taxes directes d'une collectivité si l'on appliquait à ses bases le taux moyen national d'imposition à chacune de ces taxes.

Pour information, ces taux moyens étaient en 2009 les suivants :

Régions

Départements

Communes

TH

7,39 %

14,97 %

TFB

2,66 %

10,84 %

19,32 %

TFNB

6,48 %

25,01 %

45,50 %

TP

2,82 %

8,96 %

16,13 %

On ajoutait, depuis 1999, la compensation versée au titre de la suppression de la part salaires des bases de taxe professionnelle.

Le potentiel fiscal par habitant est obtenu en divisant ce total par le nombre d'habitant selon la définition retenue pour le calcul de la DGF.

Cette définition pose cependant le problème de la diversité des territoires à potentiel fiscal par habitant équivalent.

Cette règle générale est complétée par quelques dispositions particulières. En ce qui concerne les EPCI par exemple, le taux moyen de référence est défini par catégorie d'EPCI.

D'autres dispositions particulières existent :

- pour les départements avec la prise en compte des DMTO ;

- pour les régions, avec la prise en compte d'un produit potentiel dont le calcul est complexe. Ce montant est calculé en divisant dans un premier temps chaque compensation de l'année précédente par le taux de l'année précédant sa mise en place et, dans un deuxième temps, en multipliant l'équivalent bases ainsi obtenu par le taux moyen national de la taxe concernée. Le tout est divisé par la population Insee du dernier recensement général. Le potentiel fiscal régional n'est donc pas un strict potentiel fiscal ;

- notons, enfin, que pour 2011, nous avons un calcul spécifique du potentiel fiscal puisqu'il s'agissait d'écarter l'effet de la compensation-relais perçue en 2010. Il a donc été décidé de se référer aux bases de TP utilisées en 2010.

Je citerai quelques chiffres pour 2009.

Le potentiel fiscal moyen régional par habitant était de 111,36 euros (étagé entre 49 euros pour la Guyane et 158 euros pour l'Ile-de-France).

Le potentiel fiscal moyen départemental par habitant était de 505 euros (étagé entre 278 euros pour la Creuse et 1 091 euros pour Paris).

Le potentiel fiscal moyen communal par habitant était de 740 euros en 2010, mais il est évidemment très différent selon les strates démographiques (entre 399 euros et 1 155 euros en moyenne par strate).

A quoi sert le potentiel fiscal ?

Depuis 2005, cette notion a été remplacée de manière assez générale par celle de potentiel financier dans l'ensemble de la législation et plus spécialement le code général des collectivités territoriales.

Toutefois, le potentiel fiscal est encore utilisé dans quelques cas. Ils concernent pour l'essentiel les EPCI et les régions.

Ce sont en effet les deux niveaux d'administration territoriale pour lesquels il n'existait pas encore de définition de potentiel financier jusqu'à la loi de finances initiale pour 2011.

Nous retrouvons donc le potentiel fiscal pour le calcul de la dotation d'intercommunalité et pour définir l'éligibilité des EPCI à la DETR, la nouvelle dotation d'équipement des territoires ruraux.

Le potentiel fiscal est également utilisé comme critère de l'éligibilité et du calcul de la dotation de péréquation des régions, avec l'ajout de critères territoriaux notamment de densité de population, uniquement au stade de la répartition de la péréquation, ce qui nous a valu des débats animés ici au Sénat l'an dernier.

Enfin, tout récemment, la notion de potentiel fiscal a été utilisée pour cibler l'écrêtement du complément de garantie de la part forfaitaire de la DGF. La loi de finances pour 2011 a minoré de 130 millions d'euros le complément de garantie et cette minoration a été répartie entre les communes en fonction de leur potentiel fiscal.

Avec la disparition de la taxe professionnelle, la notion de potentiel fiscal devait nécessairement évoluer. C'est ce qui est advenu avec l'adoption de l'article 183 de la loi de finances pour 2011.

La référence aux bases de TP multipliées par le taux moyen national est remplacée par la référence à un « panier » de recettes fiscales ou assimilées comprenant :

- la CET, c'est-à-dire la cotisation foncière des entreprises et la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises,

- l'imposition forfaitaire sur les entreprises de réseaux  (IFER) ;

- ainsi que la dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle et le produit du Fonds national de garantie individuelle des ressources (FNGIR).

Je signale s'agissant du FNGIR qu'il conviendra de préciser clairement ce qui se passe pour les collectivités contributrices. Pour les collectivités qui versent au FNGIR, il convient de déduire ce versement de leur potentiel fiscal.

Mais le point principal reste que - sous réserve de ce qui nous sera peut être indiqué tout à l'heure - nous ne disposons d'aucune indication sur les effets de cette nouvelle définition quant à l'appréciation de la richesse des collectivités.

Compte tenu de cette absence totale d'évaluation, le Sénat avait choisi dans un premier temps de ne pas approuver cette définition applicable à compter de 2012. Le Gouvernement l'avait fait adopter en promettant des simulations très rapides mais nous ne les avons pas reçues.

Autre nouveauté de la loi de finances pour 2011, la création de la notion de potentiel agrégé permettant de mesurer la richesse fiscale d'un territoire en cumulant le potentiel de l'EPCI et celui de ses communes membres.

Il sera utilisé dès 2011 pour le calcul de la part péréquation de la dotation d'intercommunalité.

Une question qui se pose concernant le potentiel fiscal est celle de son exhaustivité très relative.

En effet, aujourd'hui, il exclut nombre de recettes fiscales, notamment la TaSCom, taxe sur les surfaces commerciales, qui a été transférée de l'Etat aux communes par la loi de finances pour 2011.

Un certain nombre de caractéristiques pourraient conduire à intégrer certaines de ces recettes dans le calcul du potentiel fiscal : le caractère obligatoire de telle ou telle taxe pourrait par exemple être retenu. Il aboutirait à ajouter au panier actuel la taxe sur l'électricité, la taxe sur les pylônes ou l'impôt sur les spectacles.

La DGCL a toutefois fait valoir, avec raison, que l'on devait tenir compte aussi de l'époque à laquelle sont disponibles les informations relatives aux recettes fiscales.

Par ailleurs, la question de l'opportunité d'intégrer des taxes affectées à des services particuliers doit se poser.

Passons maintenant à la notion de potentiel financier.

Il s'agit là d'un indicateur de ressources plus large que la notion de potentiel fiscal puisqu'il prend en compte non seulement les ressources fiscales mais aussi certaines dotations versées par l'Etat, c'est-à-dire la part forfaitaire de la DGF.

Cette définition n'a pas été modifiée par la loi de finances pour 2011 et le Gouvernement a fait preuve à cet égard d'une grande prudence.

Toutefois, à l'initiative du Sénat, et dans le cadre du vote des nouveaux dispositifs de péréquation, la référence au potentiel financier a été appliquée également aux EPCI et aux régions. Ceci nous obligera à introduire des définitions spécifiques dans la loi pour établir un nouveau mode de comparaison de leurs richesses.

C'est un point important car, par exemple, ce sont précisément les EPCI qui seront les premiers réceptacles de la nouvelle péréquation horizontale.

A quoi sert la notion de potentiel financier ? A presque tout puisqu'elle est devenue la référence, la mesure de la richesse des collectivités.

Elle est donc utilisée, de manière très générale pour le calcul des dotations de péréquation des communes et des départements.

Elle sert également à définir, en partie ou exclusivement, les collectivités contributrices et bénéficiaires des dispositifs de péréquation horizontale, qu'il s'agisse des mécanismes anciens, comme le FSRIF, ou des nouveaux dispositifs créés par les lois de finances pour 2010 et 2011.

Comme pour le potentiel fiscal, la question qui se pose est celle de l'adaptation de la définition actuelle du potentiel financier à la réalité des moyens dont disposent les collectivités. L'instrument de mesure paraît en effet un peu limité.

La situation est très différente selon le niveau de collectivité. Pour le bloc communal, une très large partie des dotations n'est pas prise en compte par le potentiel financier.

Mais il faut relativiser les chiffres car pour une large partie, cet écart est dû aux dotations d'intercommunalité.

Les informations dont nous disposons, fournies par la DGCL et qui portent sur l'année 2010, permettent d'apprécier les masses financières concernées, sachant que seule la dotation forfaitaire est ajoutée au potentiel fiscal pour constituer le potentiel financier.

Au delà de la DGF, on peut s'interroger aussi sur l'opportunité de prendre en compte d'autres recettes des collectivités qui pourraient être intégrées au potentiel financier.

Il ne s'agit là bien sûr que d'une liste non limitative et purement indicative et au sein de laquelle on voit facilement que certaines recettes doivent être exclues d'office et que d'autres ne représentent, au demeurant, que des produits négligeables.

Elle comprend les dotations hors DGF, pour un montant global important mais dont on pourra légitimement objecter qu'elles correspondent à des compensations de transfert de charges, des circonstances exceptionnelles et qu'elles ne sont pas fixes d'une année sur l'autre. Ce sont souvent en effet des dotations affectées aux investissements.

Il en est de même du FCTVA qui a le statut très particulier de « remboursement ».

Cette particularité ne peut pas être opposée, en revanche, aux subventions inscrites sur les missions budgétaires de l'Etat.

Celles-ci représentent près de trois milliards d'euros et cinq missions sont principalement concernées : « Ville et logement », « Culture », « Outre-mer », « Ecologie, développement et aménagement durables », et, enfin, « Politique des territoires ».

Et puis, c'est un sujet relevé par Philippe Adnot, on pourrait aussi envisager de prendre en compte certaines recettes que tirent les collectivités de l'exploitation de leur domaine et qui sont sans doute mal connues et très inégalement réparties.

Il ne s'agit, à ce stade, que de pistes sur lesquelles, comme Albéric de Montgolfier l'a dit, nous attendons beaucoup des données chiffrées qui nous serons certainement fournies.

En conclusion de cette présentation, je souhaite souligner trois points.

Il faut tout d'abord parvenir à un système plus simple et plus uniforme entre les niveaux de collectivités que celui que je vous ai exposé. La simplicité et la clarté des définitions et des calculs seront le gage de l'absence de contestation mais aussi celui d'une meilleure connaissance des écarts de richesse entre les collectivités et de leur évolution avec l'appui d'une nouvelle péréquation.

Il faut ensuite relativiser l'influence des dotations de péréquation verticale dans les écarts de richesse entre collectivités. L'essentiel reste dans les écarts de la richesse fiscale, surtout dans un contexte de prélèvement de cette péréquation verticale sur une masse de dotation de l'Etat figée.

Je pense, enfin, que la mesure de la richesse des collectivités doit se faire sur le plus grand périmètre possible. C'est le moyen d'assurer la plus juste péréquation.

Je vous remercie de votre attention.

M. Jean Arthuis , président . - Je conclus qu'il faut mesurer le plus complètement la richesse pour assurer une juste péréquation. Je vais donner maintenant la parole à Eric Jalon, pour la DGCL, puis à Michel Klopfer, président du cabinet CMK.

M. Eric Jalon, directeur général des collectivités locales . - Je vous remercie et je souhaite rebondir sur l'intervention d'Albéric de Montgolfier en rappelant l'histoire très complexe de la péréquation sur la CVAE qui a connu des variations importantes. Celles-ci expliquent en partie les difficultés rencontrées et à venir pour fournir les simulations qui nous ont été demandées, car nous ne disposons pas encore des fameux états 1259 avec les premières notifications de recettes de la CVAE, prévues pour avril. De plus, la CVAE sera calculée sur la base des critères de répartition adoptés en LFI 2010, modifiés en LFI 2011, ce qui rend les données imparfaites. Mais nous pensons disposer d'éléments pertinents prédictifs pour comparer les divers dispositifs de péréquation envisagés ; dans les différentes hypothèses, on a une péréquation qui prend en compte les écarts à la moyenne. Pour les simulations nous devons prendre, non seulement, la croissance moyenne de la CVAE, mais l'appliquer à chaque région ou à chaque département.

Une hypothèse autre est la péréquation sur stock de 1 %. Mais on constate, sans simulations, que le prélèvement basé sur une croissance supérieure à 2 % est plus péréquateur que celui sur stock.

Je reviens aux questions concernant les potentiels fiscaux et financiers.

Pour les régions : en 2009, un groupe de travail s'était penché sur la DGF des régions pour trouver la manière de construire un potentiel fiscal des régions, d'abord en introduisant des critères de charges dans la péréquation régionale et ensuite passer du potentiel fiscal au potentiel financier en intégrant la dotation forfaitaire des régions. Nous avons rencontré de très importantes difficultés car les dotations forfaitaires des régions, contrairement à celles des communes et départements, n'ont pas été revues et comprennent encore un certain nombre d'éléments qui rendent la comparaison difficile, tel fut le cas pour l'Ile-de-France et la Corse.

A la mi-avril, un groupe de travail a pour mission de remettre ce sujet à l'ordre du jour.

J'envisage trois niveaux de potentiel fiscal et financier.

Le potentiel fiscal est conservé pour les communes, notamment pour l'écrêtement du complément de garantie, afin d'éviter les références circulaires de calcul.

Une autre option débattue concerne un potentiel financier vertical auquel s'ajouterait un potentiel financier horizontal intégrant le résultat dans le calcul du potentiel financier enrichi de la péréquation via les dotations de l'Etat, qui pourrait être mobilisé pour le calcul de la péréquation horizontale. C'est une hypothèse sur laquelle nous travaillons.

Les difficultés sont de faire de la péréquation horizontale l'ajustement en dernier ressort de l'ensemble des mécanismes de péréquation ; enchaîner des calculs complexes avec le risque qu'ils puissent s'annuler.

Je ne suis pas certain de disposer de temps pour mener à bien ces opérations, d'autant plus que les trois premiers mois de l'année à la DGCL sont consacrés à répartir les concours financiers de l'Etat.

Mes services continuent de travailler sur ce qui pourrait constituer un potentiel financier pour les communes et les intercommunalités. L'un des sujets est l'enrichissement du potentiel fiscal à d'autres ressources avec des critères de fond et techniques :

- écarter les recettes affectées et les recettes correspondant peu ou prou à un service rendu (TEOM par exemple) ;

- la faisabilité technique. Nous sommes en train d'analyser les données pour pouvoir présenter dans les prochaines réunions un avis sur chacune des recettes à intégrer dans le potentiel fiscal. Pour toutes les autres recettes de type domanial ou subventions diverses versées par l'Etat, le travail fastidieux de passer en revue les comptes administratifs des collectivités, en décalé dans le temps, ne permettra pas un gain conséquent.

Le même travail est effectué sur les EPCI qui n'ont pas de potentiel financier parce que dans les dotations d'intercommunalité il y a des dotations de péréquation et des dotations « standards » qui n'ont pas été intégrées dans le potentiel fiscal ou financier.

Il faudra avoir :

- un potentiel financier à deux niveaux utilisé pour les dotations verticales ;

- un potentiel financier enrichi en dernier ressort pour les dotations de péréquation horizontale.

Notre objectif est de clarifier ces notions, les scénarios, le panier de ressources pour avril-mai et lancer une première série de travail de simulations avant l'été.

Je comprends bien la frustration des membres de la commission devant l'absence de données et de simulations, mais comme exposé précédemment, nous ne sommes pas en mesure de les fournir.

M. Michel Klopfer, président du cabinet CMK . - Je remercie l'assemblée de nous recevoir et je reviendrai sur la difficulté de la tâche. Les LFI 2010 et 2011 ont permis de construire le schéma concernant les fonds de péréquation de la CVAE alors que le montant de cette dernière n'est pas connu. Ce montant sera bâti sur la territorialisation de 2010 et sur le rapport « Durieux » dont l'une des erreurs est la projection de la croissance. J'attire également l'attention sur le fait que le poids du potentiel fiscal va être amené à se renforcer d'une manière considérable. Si, jusqu'à présent, le potentiel fiscal servait pour des éléments de péréquation verticale, il était accompagné d'indicateurs de charges. Or, dans le mécanisme actuel, il y a un seuil d'admissibilité. Le potentiel fiscal ou financier devient un indicateur d'admissibilité, pour les départements ou les régions, avec des seuils différents, en-dessous desquels une redistribution pourrait se faire avec des critères de charges qui ne sont pas pris en compte dans les critères d'admissibilité.

En ce qui concerne le passage du potentiel fiscal au potentiel financier, je rappellerai que nous avons travaillé avec le Sénat en 2003-2004, au niveau des départements et des régions, sur la façon de bâtir un modèle en imaginant des critères de charges normatifs qui n'ont pas été retenus. Mon autre interrogation concerne la fiabilité du potentiel fiscal sur lequel doit s'appuyer le travail de la commission des finances. Avant, les collectivités avaient trois impôts sur lesquels on pouvait calculer les bases servant à identifier leur potentiel fiscal. Actuellement, les régions n'ont plus de taux, quant aux départements ils n'en ont plus qu'un ; ce qui crée un hiatus par rapport aux méthodes retenues.

Mme Céline Bacharan, consultante au cabinet CMK . - Je vais maintenant commenter quelques graphiques qui vont montrer qu'une réflexion profonde doit être menée pour établir un dispositif d'ici neuf mois. On constate que les mécanismes actuels et l'application des textes vont conduire à des résultats inattendus.

Les simulations sont fondées sur des données existantes (fichier de dotation globale de la DGF et simulations de la mission Durieux) pour modéliser les effets qui vont se produire puisque le montant de la CVAE est inconnu.

Avant la réforme, on voit comment était calculé le potentiel fiscal.

Après, le potentiel fiscal est calculé en prenant le nouveau panier des impôts de chaque échelon. De ce fait, le bloc communal conserve un vrai potentiel fiscal avec des bases valorisées aux taux moyens nationaux. Pour les départements, il reste du potentiel fiscal pour le foncier bâti, valorisé au taux moyen national, et des produits fiscaux. Les régions n'ont plus que des produits fiscaux.

Les communautés de communes dont le potentiel fiscal est inférieur à la moitié de la moyenne sont les gagnantes de la réforme.

En fait, par potentiel fiscal, on devrait entendre indicateur de ressources.

Concernant le potentiel financier des régions : il y a un problème de périmètre dans la forfaitaire. L'effet taux est très variable et spectaculaire pour certaines régions.

Sur les intercommunalités, nous avons fait également des calculs dont les résultats sont assez peu significatifs avec des exceptions pour quelques perdants (plus de 50 % de leur potentiel fiscal est constitué de produits fiscaux).

La notion de potentiel fiscal ne peut plus rester telle quelle.

M. Jean Arthuis , président . - Je considère qu'il faudrait garder un taux moyen, et dans ce cas l'inverse doit être fait pour le FNGIR.

M. Michel Klopfer . - On peut garder un taux moyen pour le bloc communal. Un prélèvement maximal ne devrait jouer que sur les recettes dynamiques. On ne peut pas écrêter de trop des recettes qui sont figées.

M. Eric Jalon . - Il faut éviter de confondre ce qui relève de la photographie avec la constatation des écarts et des différences de dynamique, et ce qui relève du « cinéma ». Sont pris en compte les prélèvements, les charges et les ressources. Certains départements seront contributeurs et bénéficiaires. On mesure la richesse pour calculer les prélèvements, et on mesure les charges pour la redistribution. Les derniers résultats relevés correspondent à l'objectif poursuivi. Par ailleurs, 60 % de la croissance est laissée à tous les départements.

Mme Céline Bacharan . - Le dernier effet de la LFI sur le calcul du potentiel fiscal se voit notamment sur les intercommunalités. Jusqu'à présent, ce potentiel se calculait par catégorie de communes et sur les produits touchés. L'innovation réside dans le calcul des potentiels fiscaux de territoires. Cette base commune permet une meilleure comparaison et une réduction des écarts.

M. Jean Arthuis , président . - Je me demande si le calcul des dotations par communauté de communes, plutôt que par commune, n'apporterait pas plus de facilités, y compris pour les services d'Eric Jalon.

M. Eric Jalon . - Le potentiel fiscal agrégé est le moyen de comparer les territoires en neutralisant les écarts de structure fiscale. Nous avons constaté l'année dernière un double effet puisque la dotation forfaitaire par habitant évolue plus que proportionnellement au nombre d'habitants, et, par ailleurs, les dotations d'intercommunalité varient en fonction du niveau d'intercommunalité.

M. Jean Arthuis , président . - Je remercie Céline Bacharan et Michel Klopfer pour leurs exposés. Je m'interroge sur l'intégration de toutes les dotations dans le potentiel financier.

M. Eric Jalon . - Je souhaite apporter un début de réponse consistant à envisager, dans la péréquation horizontale, un potentiel financier enrichi des dotations de péréquation pour venir en fin de parcours.

M. Jean Arthuis , président . - Le revenu moyen par habitant est-il un indicateur de dépense ?

M. Eric Jalon . - Il synthétise assez bien les charges des collectivités. L'année dernière, nous avons mis en évidence que plus de 60 % des écarts de dépenses entre collectivités territoriales est directement explicable par des écarts de richesse. La péréquation doit être calée sur des indicateurs objectifs, exogènes et non sur les dépenses.

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur . - Des indicateurs de richesse plus clairs et des indicateurs enrichis pour la péréquation horizontale permettront de mesurer assez facilement l'écart de la richesse entre les collectivités. On pourrait imaginer un indicateur sur l'année « n » et les comparaisons sur l'année « n - 1 ».

M. François Marc . - Il existe un lien entre les recettes et les dépenses. Pourquoi ne pas adopter un système à l'allemande où le prélèvement est lié aux revenus, avec une redistribution aux collectivités sur la base d'une négociation, au lieu d'aller vers un ensemble de mécanismes complexes ?

M. Jean Arthuis , président . - Je n'imagine pas la disparition des impôts fortement territorialisés comme les impôts fonciers. Le vrai chantier est la réévaluation des bases puisque la valeur immobilière ainsi celle du foncier non bâti ne sont pas homogènes sur le territoire. De plus, le champ communal est trop étroit, la répartition serait plus équitable entre communautés de communes.

M. Eric Jalon . - Nous avons effectivement souhaité asseoir la péréquation horizontale sur les blocs territoriaux et les EPCI. Il est apparu dans les travaux de l'année dernière l'idée de répartir les reversements entre les EPCI, à charge pour ces derniers de se mettre d'accord entre eux sur la base d'un modèle local ou de critères fixés par la loi.

M. Pierre Jarlier , rapporteur . - Il faut privilégier l'intercommunalité et la concertation, et en l'absence de concertation il faut des règles équitables. Il me semble que revoir les critères de définition de potentiel fiscal pour les régions serait nécessaire au vu des résultats peu cohérents.

M. Jean Arthuis , président . - Je pense qu'on trouvera des paramètres pertinents au lieu de rajouter trop de correctifs pénalisants pour la faisabilité. En conclusion, un retour à des principes généraux s'impose, avec des parlementaires lucides et courageux.

4. Mercredi 13 avril 2011

Présidence de M. Jean Arthuis , président

Fonds de péréquation des recettes communales et intercommunales, fonds de solidarité des communes d'Ile-de-France

Audition de MM. Michel Piron, président délégué aux territoires ruraux et périurbains de l'Assemblée des Communautés de France (AdCF),
et Philippe Laurent, président de la commission des finances locales de l'Association des Maires de France (AMF) et de l'Association des Maires d'Ile-de-France (AMIF)

M. Jean Arthuis , président . - Notre réunion de ce jour a pour thèmes d'une part le fonds de solidarité communal de la région Ile-de-France et d'autre part le fonds intercommunal et communal nouvellement créé par la loi de finances pour 2011.

Après la mise en perspective des deux sujets à laquelle nous avons procédé lors de notre première réunion sur ces deux sujets, nos deux rapporteurs vont nous présenter l'état des réflexions des autres instances qui réfléchissent en vue de la loi de finances pour 2012. Ils nous proposerons également des orientations sur lesquelles nous débattrons.

En effet, je vous rappelle mes chers collègues que ce groupe de travail a pour but de définir - si possible - une position commune qui sera celle de la commission des finances sur la plupart des questions que soulève la mise en place des dispositifs de péréquation qui entreront en vigueur au 1 er janvier 2012.

Lorsque nous en aurons terminé avec les réunions préparatoires, nous tiendrons une réunion de bilan pour définir ces propositions qui feront l'objet d'une publication à la fin de la session ordinaire sous la forme d'un rapport d'information.

Mais avant cela nous aurons sans doute à demander à la DGCL de travailler pour nous fournir des simulations sur les orientations de principe que nous aurons définies. Il nous sera ainsi possible de les affiner et de les corriger si nécessaire.

Revenons à notre réunion d'aujourd'hui.

Je vais dans un premier temps, passer la parole à nos deux rapporteurs, Philippe Dallier et Charles Guené.

Nous pourrons ensuite engager un premier débat sur leurs propositions avant d'entendre ensuite deux intervenants extérieurs :

- Michel Piron, qui nous rejoindra vers 15 h 30, présentera les positions de l'AdCF (association des communautés de France) sur le fonds de péréquation communal et intercommunal ;

- Philippe Laurent nous rejoindra à 16 h 00. Il s'exprimera pour l'Association des maires d'Ile-de-France mais aussi pour l'AMF. Nous lui demanderons notamment comment il imagine la conciliation entre les deux systèmes de péréquation, le national et le régional.

Je vous rappelle, enfin, que la prochaine réunion de notre groupe de travail aura lieu le mardi 26 avril à 14 h 30.

M. Philippe Dallier , rapporteur . - Notre première réunion sur le thème de la spécificité de l'Ile-de-France nous avait permis de faire le point sur le fonctionnement actuel du FSRIF et sur les textes votés.

J'avais également fait part de mes interrogations sur les conséquences financières des nouvelles dispositions, mais nous n'avons toujours pas reçu de réponse de la DGCL et nous sommes toujours dans la plus grande incertitude.

Je renouvelle donc ma demande de disposer d'éléments d'appréciation sur le produit fiscal des collectivités (communes et EPCI) de la région Ile-de-France.

Je souhaite aujourd'hui vous faire part des réflexions en cours dans les instances représentatives des élus d'Ile-de-France et des premières propositions qui ont été présentées.

Je vous ai sélectionné tout d'abord une déclaration un peu « rude » figurant dans le programme du congrès de l'Association des maires d'Ile-de-France qui a eu lieu la semaine dernière. Philippe Laurent a accepté notre invitation à venir exprimer le sentiment des maires de l'AMIF. Il confirmera ou infirmera ces propos.

La seconde instance qui s'est exprimée est Paris Métropole, le syndicat d'études qui regroupe 188 collectivités adhérentes.

Les propositions de sa commission « Développement et Solidarité » ont été présentées à l'assemblée plénière du syndicat le 11 mars dernier. Il n'y a pas encore unanimité mais Paris-Métropole devrait être en mesure de présenter des propositions définitives en avril.

Les réflexions de Paris-Métropole s'organisent autour de quatre axes :

- le principe selon lequel l'ensemble des communes de plus de 5 000 habitants est potentiellement contributeur et bénéficiaire ;

- la progressivité du barème de contribution s'appliquant au potentiel financier de chaque commune ;

- la simplification des attributions calculées en fonction de deux indicateurs : le potentiel financier et le revenu par habitant ;

- un objectif général : assurer à chaque commune de plus de 5 000 habitants, un niveau minimal de potentiel financier par habitant (60 % de la moyenne régionale). Cet objectif, que j'estime a priori insuffisamment ambitieux, aurait à lui seul un coût de 41 millions d'euros.

Je vais revenir sur ces points en abordant successivement la question du ou des prélèvements, celle des modalités des prélèvements (seuils, exonérations, plafonnements, taux), le sujet de l'éligibilité et des critères de redistribution et enfin le point particulier de la coexistence du FSRIF et de la DSU.

Première question : faut-il un ou deux prélèvements ? Le FSRIF actuel comprend deux prélèvements. Le premier qui ne concerne que les communes est fondé sur le potentiel financier. Le second, applicable aux communes et EPCI, s'appuyait sur les bases de TP.

Pour l'avenir, plusieurs choix sont possibles :

- entre un double prélèvement, comme aujourd'hui et un prélèvement unique, plus simple ;

- entre un prélèvement assis sur le potentiel financier qui serait applicable aux communes et aux EPCI, et qui serait une péréquation sur stock, et un prélèvement assis sur la CVAE soit sur le stock soit sur le flux, c'est-à-dire l'accroissement de CVAE. Dans cette hypothèse le système serait du même type que celui qui alimente les fonds départemental et régional de CVAE ;

Pour ma part, et je rejoins le choix qui est d'ailleurs le plus couramment évoqué, celui d'un prélèvement unique assis sur le potentiel financier « élargi » (c'est-à-dire celui qui intègre la DGF dans son intégralité).

Le système actuel est particulièrement complexe notamment du fait de l'application de règles nombreuses d'exonération et de plafonnement.

Il en résulte des pertes de produit conséquentes et un fort décalage entre le nombre affiché de collectivités contributrices et le nombre réel de ces collectivités.

Ainsi, en 2010 nous avions, pour le premier prélèvement, 85 communes contributrices avant exonérations et plafonnements. Mais en définitive, sur ce total, il y a eu 8 exonérations et 44 plafonnements.

Les résultats sont identiques pour le deuxième prélèvement : au départ 22 communes et 4 EPCI, à l'arrivée, 8 communes et 3 EPCI.

Il ne faudrait pas que le nouveau système reproduise ces défauts. C'est pourquoi je suis favorable à la suppression de tous ces régimes dérogatoires (exonérations liées à la DSU ou aux prélèvements FDPTP, plafonnements divers).

Le deuxième principe sur lequel devrait se fonder le nouveau FSRIF est lié à la suppression des seuils d'éligibilité. Il consiste en ce que chaque commune est potentiellement contributrice et bénéficiaire, le solde étant positif pour certaines et négatif pour d'autres. Cette règle de fonctionnement me semble faire l'unanimité.

Son corollaire, c'est l'application d'un système de prélèvement progressif qui supprime les effets de seuil à l'entrée du système de contribution mais aussi entre les paliers des taux successifs.

Aujourd'hui, le système du FSRIF est différent selon le nombre d'habitants des collectivités (il existe un régime pour les collectivités de plus de 10 000 habitants et un autre pour les collectivités de 5 000 à 9 999 habitants).

Cette distinction, de l'avis général, devra être supprimée pour toutes les collectivités, au moins pour les communes de plus de 5 000 habitants. Cette règle aura pour conséquence d'augmenter le nombre de collectivités bénéficiaires et il faudra éviter le risque du saupoudrage mais elle aura l'immense avantage de supprimer les effets de seuil.

Il reste encore deux points sur lesquels on doit s'interroger.

D'abord que faire pour les collectivités de moins de 5 000 habitants en Ile-de-France ? Elles étaient exclues du FSRIF (ni prélevées, ni bénéficiaires). Je pense qu'il n'y a pas de sens à ce qu'elles soient intégrées dans le nouveau mécanisme. Elles peuvent d'ailleurs être éligibles aux FDPTP en tant que communes défavorisées.

Le deuxième point concerne le ciblage du FSRIF. Actuellement, le FSRIF repose sur une logique communale et non intercommunale, s'agissant de la définition des bénéficiaires. Faut-il modifier cette spécificité qui permet un ciblage très fin ? Je ne le pense pas du fait notamment de la taille des communes de l'Ile-de-France.

Se pose également la question des critères de répartition entre les bénéficiaires. Une alternative se présente :

- soit on reconstitue un indice synthétique faisant appel à divers critères comme dans le système actuel du FSRIF (potentiel financier par habitant, logements sociaux, bénéficiaires d'aides au logement, revenu par habitant). Mais plus il y a de critères, plus ils sont contestés. D'autres critères ont d'ailleurs été envisagés, comme la proportion de jeunes ;

- soit on réduit au maximum le nombre de critères en se limitant à un critère de richesse et un critère de charge : potentiel financier par habitant, que je n'envisage que stratifié, et revenu par habitant. Il est à noter que selon les statistiques disponibles, l'indicateur de revenu par habitant se révèle finalement être un assez bon indicateur de charges car il évolue en corrélation avec les charges des collectivités. C'est ce que nous a confirmé Eric Jalon lors de la dernière réunion du groupe de travail.

Cette carte me permet d'aborder le sujet de la combinaison du FSRIF et de la dotation de solidarité urbaine. En effet, la réforme du FSRIF et de la péréquation communale va entrainer nécessairement une réflexion sur les outils de péréquation verticale au profit des communes, et en particulier la DSU.

Comme on le voit, il y a souvent convergence entre les géographies des deux outils. En vert figurent les contributeurs, en orange les bénéficiaires du FSRIF qui perçoivent également la DSU, soit 130 communes

Il y a cependant des exceptions à cette convergence.

13 communes perçoivent les versements du FSRIF mais pas la DSU et 41 communes sont éligibles à la DSU mais ne bénéficient pas du FSRIF.

Deux facteurs expliquent ces divergences : d'abord les différences de seuils entre les deux dispositifs. Il y a plus de communes de plus de 10 000 habitants éligibles à la DSU qu'au FSRIF et c'est l'inverse pour les communes de 5 000 à 10 000 habitants.

Mais aussi les écarts de pondération entre critères qui ne sont pas les mêmes pour la DSU et le FSRIF en ce qui concerne le potentiel financier (plus important pour le FSRIF) et les bénéficiaires d'aides au logement (plus important pour la DSU).

Ce graphique met en parallèle les montants des trois instruments de péréquation (verticale et horizontale) en Ile-de-France. La DSU et la DSR d'un côté (pour leur part destinée à l'Ile-de-France) et le FSRIF de l'autre dont on voit qu'il est encore modeste.

Au total, je pense qu'il est difficile de fusionner dans un « pot commun » le FSRIF et la DSU versée en Ile-de-France. Certes, il y a des éléments de rapprochement, mais la DSU a une vocation d'instrument de politique sectorielle, celle de la ville, alors que le FSRIF vise avant tout à réduire des inégalités de richesse.

Sur tous ces sujets, l'IAURIF, mandatée par Paris-Métropole, a fait tourner plusieurs scénarios avec des modes de prélèvement et des règles d'attribution différents.

L'idée est de tester les différentes combinaisons dans l'optique d'un FSRIF à 270 millions d'euros en 2015, réservé aux communes d'Ile-de-France de plus de 5 000 habitants.

L'efficacité du système étant mesurée par la réduction de l'écart de richesse entre les collectivités après prélèvement et reversements du fonds, il apparait que le meilleur résultat est obtenu par le scénario cumulant un système de prélèvement progressif et un double critère potentiel financier par habitant et revenu par habitant pour les reversements.

Avant de conclure, un point particulier mérite d'être évoqué.

Les départements d'Ile-de-France disposent de FDPTP, à l'exception du Val-de-Marne et de la Seine-Saint-Denis.

La DGCL m'a transmis un tableau récapitulatif de l'utilisation de ces FDPTP qui représentent un montant total de 144 millions d'euros dont 68 millions d'euros au titre des communes défavorisées. C'est cette part qui, à compter de 2012, sera alimentée par une dotation budgétaire de l'Etat.

Reversements prioritaires

Communes concernées

Communes défavorisées

77 Seine-et-Marne

9 131 280

6 190 222

12 178 341

78 Yvelines

3 277 748

21 424 185

22 926 876

91 Essonne

5 889 306

7 783 601

15 115 425

92 Hauts-de-Seine

7 124 224

4 951 552

93 Seine-Saint-Denis

94 Val de Marne

95 Val d'Oise

8 983 857

6 868 480

12 687 677

Total

27 282 191

49 390 712

67 859 871

144 532 774

Je ne me prononce pas sur l'utilisation qui sera faite, dans les autres départements, de cette dotation budgétaire remplaçant les FDPTP. Mais pour ce qui concerne l'Ile-de-France, on pourrait proposer que l'équivalent de la dotation, puisqu'il constitue un outil supplémentaire de péréquation verticale, fasse l'objet d'une mutualisation au niveau régional. Mais il s'agit bien d'une dotation de l'Etat qui, en aucun cas, ne peut être assimilée au nouveau FSRIF.

En guise de conclusion, on peut revenir sur la compatibilité entre le FSRIF et le nouveau fonds de péréquation intercommunal et communal.

Il me semble que l'adoption de principes de fonctionnement identiques ou similaires est envisageable. Dans la mesure où le FSRIF fonctionne depuis vingt ans, il serait bienvenu de s'inspirer de cette expérience pour définir les règles du FPIC.

Pour autant, la préservation de l'outil de péréquation intra régionale propre à l'Ile-de-France amène aussi à garantir la part FSRIF actuelle et on peut s'interroger sur notre capacité à trouver des critères communs applicables à des situations si différentes.

Je pense donc qu'il nous faudra obtenir des simulations sur trois hypothèses : un système unique commun à l'Ile-de-France et au reste du territoire, un système de séparation étanche entre FPIC et FSRIF, ou un système de double couche. Le tout avec des règles de prélèvement et de répartition qui prennent en compte la diversité des situations et soient politiquement acceptables.

Je vous remercie de votre attention.

M. Jean Arthuis , président . - Je remercie Philippe Dallier pour son intervention. Si le surcroit de ressources de l'Ile-de-France contribue à l'inflation du prix du loyer, est-ce qu'on n'entretient pas alors le mécanisme ? Excusez-moi, je sais que ce n'est pas l'objet du débat maintenant...

Je vais donner la parole à Charles Guené de façon à ce qu'il puisse nous exposer son intervention.

M. Charles Guené , rapporteur . - Nous allons aborder la question du fonds de péréquation intercommunal et communal.

Comme pour le nouveau FSRIF, sur lequel Philippe Dallier vient d'intervenir, la réunion de notre groupe de travail du 8 mars dernier a permis de faire le point sur les textes adoptés en loi de finances pour 2011.

Sur certains éléments qui faisaient débat, cette réunion du 8 mars, ainsi que celle du 29 mars, nous ont permis d'avancer en dégageant parfois un consensus sur le chemin à suivre.

Il me semble aujourd'hui qu'il faut progresser vers des propositions plus concrètes et recueillir sur ces propositions l'avis des principales associations d'élus concernées que sont l'Association des maires de France et l'Assemblée des communautés de France, qui réfléchissent également à ces sujets.

Commençons par les sujets qui, me semble-t-il, peuvent faire l'objet d'un accord.

Je souhaiterais partir d'un constat : le dispositif du FSRIF était, comme nous l'a rappelé Philippe Dallier, un exemple convaincant de péréquation intercommunale efficace et acceptée. Il me semble donc que nous aurions intérêt, pour mettre en place une péréquation qui fonctionne au niveau national, à nous inspirer autant que possible de cette expérience.

Philippe Dallier propose pour l'Ile-de-France un unique prélèvement, à un taux progressif, assis sur l'écart entre le potentiel financier de la commune ou de l'EPCI et le potentiel financier moyen de leur strate ou de leur catégorie.

Il me semble que cette proposition pourrait être également appliquée pour le prélèvement sur l'ensemble des communes et des intercommunalités françaises, hors Ile-de-France.

La question à trancher sera celle des modalités pratiques de progressivité du prélèvement.

En outre, il me semble qu'un consensus s'est dégagé pour supprimer tout critère d'éligibilité aux prélèvements. Je rappelle que la loi prévoit pour le moment que seuls sont prélevées les collectivités dont le potentiel par habitant excède 1,5 fois le potentiel moyen. Cela aboutit à un effet de seuil qui peut être injuste et qui posera problème. En choisissant un unique prélèvement, dès que le potentiel financier par habitant d'une collectivité dépasse la moyenne, on évite cet écueil. Le prélèvement étant progressif, plus le potentiel financier sera éloigné de la moyenne, plus la collectivité territoriale sera prélevée.

Le montant résultant des prélèvements opérés au profit de la péréquation doit, en 2012 :

- d'une part, permettre une péréquation à hauteur de 186 millions d'euros en Ile-de-France, qui correspondra au niveau de l'ancien FSRIF ;

- d'autre part, permettre, au niveau national, une péréquation équivalente à 0,5 % des recettes fiscales du bloc communal, soit environ 250 millions d'euros.

Il faudra donc ajuster les modalités de prélèvement national afin de garantir que chacun de ces objectifs sera atteint.

Aujourd'hui, faute de chiffrages fournis par la DGCL, comme Philippe Dallier l'a rappelé, nous ne savons pas quelles modalités de prélèvement permettront de parvenir à ces objectifs.

Comment calculer les montants redistribués ?

Il me semble qu'un consensus s'est dégagé, depuis le début de nos travaux, sur le fait de prendre en compte à la fois des critères de ressources et de charges.

Le critère de ressources qui s'impose sera celui du potentiel financier par habitant. Evidemment, il nous faut travailler, dans le cadre du thème rapporté par Pierre Jarlier, sur la définition nouvelle de ce potentiel élargi.

Il me semble également que nous pouvons nous accorder sur la stratification de la prise en compte du potentiel financier par habitant. Chaque potentiel financier par habitant sera ainsi comparé, non à la moyenne nationale, mais à la moyenne de la strate de commune ou de la catégorie d'EPCI correspondante. Nous avons en effet constaté, lors de nos précédentes réunions, qu'il était impossible de comparer le potentiel financier par habitant d'une commune de 20 habitants et celui d'une ville de 100 000 habitants.

A ce sujet, je relève deux éléments :

- d'une part, cette stratification s'apparente à un début de prise en compte des charges des communes ;

- d'autre part, si l'on peut s'accorder sur le principe d'une stratification, il sera très important d'étudier ses modalités pratiques de mise en oeuvre. Une stratification extrêmement fine n'aurait pas les mêmes conséquences qu'une stratification plus souple qui, à mon avis, doit être privilégiée.

Concernant le critère de charges, il me semble que l'on peut avancer en prenant en compte ce qui a été dit par Éric Jalon lors de notre dernière réunion : le revenu moyen par habitant fournit une information synthétique et fidèle des charges supportées par les collectivités. Sa prise en compte nous évite de considérer que des équipements très chers, financés par des collectivités riches, constituent pour elle des charges. Elle permet également de viser à la fois les territoires urbains en difficulté et les territoires ruraux où le revenu par habitant est le plus faible.

La question se posera toutefois de savoir quel revenu prendre en compte et s'il faut, ou non, pondérer ce revenu par une prise en compte du coût de la vie. En effet, si l'on part du principe que ce n'est pas pareil de vivre avec 1 000 euros dans une ville de Seine-Saint-Denis et de vivre avec 1 000 euros dans une ville d'une taille comparable dans une zone rurale, on pourra envisager une pondération de ce critère du revenu par habitant. Alors, en fonction de quels indices ? Faudrait-il pondérer en fonction d'un indice du coût de la vie régionalisé ? En fonction du prix des loyers ? La question reste ouverte et devra être traitée sans rendre le dispositif si compliqué qu'il devienne inopérant.

Quoi qu'il en soit, un indice synthétique construit à partir du potentiel financier par habitant stratifié et du revenu moyen par habitant me semble une bonne base de travail. Les communes et EPCI bénéficieraient de reversements proportionnels à leur écart par rapport à cet indice.

En outre, une collectivité ayant été prélevée, parce que son potentiel financier moyen par habitant est supérieur à la moyenne, pourrait toutefois être bénéficiaire, si son indice synthétique de ressources et de charges le justifie. Cette possibilité d'être à la fois contributeur et bénéficiaire doit être vue comme un atout du dispositif. En effet, elle permet de gommer les effets de seuil.

C'est d'ailleurs ce système que nous avons choisi en créant le fonds de péréquation des DMTO départementaux dans la dernière loi de finances et il a permis de rendre le dispositif à la fois efficace et acceptable pour l'ensemble des départements. Il permet aux collectivités qui ont relativement beaucoup de ressources de bénéficier de retours du fonds de péréquation si leurs charges sont parallèlement plus élevées que celles de la moyenne des collectivités.

Venons-en aux modalités de reversements des fonds, au sein des EPCI.

Nous avons vu, lors de la précédente réunion de notre groupe de travail sur cette question, que les dispositions actuelles excluent les communes isolées des reversements en provenance du fonds de péréquation. Cette exclusion me semble en pratique difficilement justifiable.

En revanche, il me semble pertinent de prévoir, lorsqu'existe un EPCI, que les reversements ne bénéficient qu'à cet EPCI. Cette mesure est gage de simplicité pour le fonctionnement du fonds qui, je le rappelle, concerne l'ensemble des EPCI et des 36 000 communes françaises.

Au sein des EPCI, la loi de finances pour 2011 a prévu que l'EPCI reverse au moins 50 % des fonds à ses communes membres, selon des modalités fixées par une délibération prise à la majorité qualifiée.

Cette disposition présente deux lacunes :

- d'une part, le seuil de 50 % ne me paraît pas particulièrement pertinent, l'intégration fiscale des EPCI pouvant très largement varier ;

- d'autre part, je pense qu'il faudrait prévoir une disposition législative en cas d'absence d'accord au sein de l'EPCI.

Je serais donc assez favorable à ce que la loi prévoie que la redistribution au sein de l'EPCI se fasse, sans condition ni seuil particulier, par une délibération de l'EPCI à la majorité qualifiée.

Puis, en cas d'absence de délibération, la loi pourrait prévoir une redistribution automatique : l'EPCI bénéficierait d'une somme proportionnelle au coefficient d'intégration fiscale (CIF) et les communes membres du reste. Entre les communes, le débat reste ouvert : faudra-t-il répartir les sommes en fonction, par exemple, du nombre d'habitant ou du produit fiscal ?

Trois scénarios ont été évoqués par Philippe Dallier à la fin de son intervention.

En effet, nous avons compris de l'audition du directeur général des collectivités locales, le 8 mars dernier, que le Gouvernement ne sera en mesure de faire des simulations que dans le courant de l'été, à partir des scénarios qui seront proposés par le comité des finances locales. Ce que nous souhaitons proposer au groupe de travail, si Monsieur le Président vous en êtes d'accord, c'est de bâtir des scénarios qui seront ceux de la commission des finances du Sénat et sur lesquels le Gouvernement devra également fournir des simulations précises, en même temps que celles qu'il produira sur les hypothèses dégagées par le CFL.

Ainsi, nous serons en mesure, je l'espère, au moment de l'examen du projet de loi de finances pour 2012, de prendre position en connaissance de cause.

Le premier scénario pourrait correspondre à un prélèvement unifié pour l'ensemble du territoire.

Dans ce cas, il faudrait garantir, dans un premier temps, que les prélèvements opérés sur les communes et les EPCI d'Ile-de-France bénéficient uniquement à l'Ile-de-France. Cette auto-alimentation de la péréquation francilienne permettra de reconstituer un dispositif équivalent d'un montant égal à l'ancien FSRIF : 186 millions d'euros en 2012 puis une montée en puissance progressive jusqu'en 2015.

Il est possible que les prélèvements opérés en Ile-de-France excèdent le niveau garanti pour le FSRIF. Ainsi, par exemple, si le prélèvement opéré sur les communes et EPCI d'Ile-de-France produit 200 millions d'euros, ce sont 14 millions d'euros qui seront excédentaires.

Cet excédent pourra alors servir à alimenter le dispositif de péréquation intercommunal et communal au niveau national.

En ce qui concerne les modalités de redistribution, celle-ci se ferait nécessairement en deux temps.

Dans un premier temps, les fonds prélevés sur l'Ile-de-France et garantis à l'Ile-de-France feraient l'objet d'une redistribution interne à cette région (nous avons reconstitué notre FSRIF).

Dans un second temps, l'éventuel surplus prélevé sur les communes et EPCI d'Ile-de-France viendrait abonder les sommes prélevées sur les communes et EPCI du reste de la France, au sein du Fonds de péréquation intercommunal et communal.

Ces sommes feraient alors l'objet d'une seconde redistribution, bénéficiant à l'ensemble du territoire (y compris l'Ile-de-France). Toutefois, pour cette seconde redistribution, il faudrait prendre en compte le fait que les communes d'Ile-de-France ont déjà perçu des sommes péréquées (par exemple en calculant un deuxième potentiel financier qui intégrerait les sommes déjà perçues par ces communes).

Le second scénario envisagé serait celui d'une étanchéité totale entre les deux dispositifs de péréquation : l'Ile-de-France finance l'Ile-de-France et le reste de la France finance, seul, sa propre péréquation.

L'avantage de ce dispositif est sa simplicité. Il évite de poser la question des modalités de comparaison entre la richesse francilienne et celle des communes du reste de la France.

Il impliquerait toutefois d'acter le fait que l'Ile-de-France ne contribue ni à la réduction des écarts de richesse en dehors de l'Ile-de-France ni à la réduction des écarts de richesse entre l'Ile-de-France et la province.

Enfin, le troisième scénario sur lequel le Gouvernement pourrait produire des simulations serait celui d'une double couche de prélèvements :

- tout d'abord, des prélèvements spécifiques à l'Ile-de-France pour financer la seule péréquation francilienne visant à remplacer le FSRIF ;

- puis, dans un second temps, une péréquation nationale, avec un prélèvement commun à l'ensemble des communes et EPCI, y compris en Ile-de-France, qui bénéficierait à l'ensemble du territoire.

Trois difficultés se poseront alors :

- comment prendre en compte la première « couche » de péréquation avant de mettre en oeuvre la seconde ?

- comment définir des critères communs de reversement pour les communes et les EPCI d'Ile-de-France et ceux du reste de la France ? On revient sur la question d'une éventuelle régionalisation du revenu par habitant, en fonction du coût de la vie dans chaque région ;

- enfin, comment éviter de pénaliser excessivement les communes de la région Ile-de-France qui contribueront aux deux péréquations ?

Voilà les trois scénarios aujourd'hui envisagés et sur lesquels les avis de l'AMF et de l'AdCF pourront nous être très utiles.

Merci de votre attention.

M. Jean Arthuis , président . - Je remercie Charles Guené. Cette intervention dissipe quelques brumes et nous permet de commencer à avoir une méthode, des principes et des propositions. Est-ce que le coût de la vie est élevé en Ile-de-France parce que ses communes ont beaucoup d'argent ou ont-elles beaucoup d'argent parce que le coût de la vie est élevé ? Ce qui est certain, c'est qu'on n'est pas gêné par les simulations car on ne les a pas...

Mme Nicole Bricq . - Je remercie Philippe Dallier, car il n'est pas courant de rencontrer un défenseur de l'Ile-de-France. D'abord, on n'est pas parisien mais francilien. On avait prévu des dispositifs de sauvegarde dans la loi de finances pour 2011. Je me suis interrogée sur la croissance de 50 % d'ici à 2015. Pas de problème par rapport au chiffre fixe, on me dit que c'est déjà un premier pas pour y arriver, une articulation entre le fond régional et national. Toutefois, je n'y suis pas favorable.

Si les fonds affectés au fonds francilien sont affectés au fonds national, à ce moment là, c'est une double contribution qu'on va demander à l'Ile-de-France, il ne faut jamais séparer la fiscalité locale de la fiscalité nationale. Cela devrait servir à la redistribution, et ce n'est pas en appauvrissant l'Ile-de-France qu'on permet aux autres d'être plus riches, il faut faire attention ! Mon département est pénalisé par une démographie dynamique. L'hypothèse de travail est la suivante : tout le monde paie et tout le monde reçoit : c'est correct et cela règle les problèmes. Quels sont les critères, quels indices synthétiques ? Les critères de revenus sont bons. Je veux bien participer à la discussion sur le point que vous avez signalé, mais on n'a pas d'éléments...

M. Philippe Dallier, rapporteur . - J'avais initialement souhaité une progression par 2 du FSRIF mais j'ai finalement dû rectifier cette hausse à 1,5.

Il faudrait 219 millions d'euros pour ramener les plus pauvres, et seulement eux, à la moyenne de la région, le FSRIF est un outil « faiblard » même s'il a le mérite d'exister. Je le considère comme un plancher, les disparités sont énormes et les pauvres sont vraiment très pauvres !

M. Charles Guené, rapporteur . - A propos du déshabillage de l'Ile-de-France et de ce qu'a dit Nicole Bricq, l'idée serait d'instaurer un système national en équité. Toutefois, on a déjà fait très attention de préserver le système de l'Ile-de-France avec une autonomie de gestion sur son territoire. On met déjà en place un système de strates qui n'était pas évident et on est prêt à évoquer une sorte de régionalisation des strates.

Mme Nicole Bricq . - Nous travaillons aussi entre part forfaitaire et péréquatrice, attention à ce que l'Etat ne se désengage pas !

M. François Fortassin . - La solidarité n'existe pas, ceux qui ont une certaine exigence considèrent qu'ils ont plus de besoins que les plus défavorisés. Pourrait-on s'inspirer du système « à l'espagnole » où on ne peut pas dépasser une certaine limite : « pas de 4 fois plus que les autres » et se fixer une véritable limite ?

M. Pierre Jarlier, rapporteur . - Il faut trouver des points convergents, éviter les effets de seuil, le critère d'effort fiscal n'a pas été évoqué.

M. Jean Arthuis, président . - On ne prend pas sur le supplément fiscal ?

M. Pierre Jarlier, rapporteur . - C'est une péréquation verticale, une redistribution par l'intermédiaire de l'EPCI à laquelle j'adhère. Il faut assurer le FSRIF, je ne suis pas d'accord avec ceux qui souhaitent réduire la solidarité sur l'ensemble du territoire.

M. Jean Arthuis, président . - Autrement dit : « s'il y a du rab, cela va dans le pot commun » ?

M. Michel Piron, président délégué aux territoires ruraux et périurbains de l'Assemblée des Communautés de France . - Doit-on penser que les communes les plus riches sont les plus heureuses ? Pourtant, j'ai fait le présupposé que l'Ile-de-France était en France...

M. Jean Arthuis, président . - Mais c'est sur une île !

M. Michel Piron . - Je ne voudrais pas être redondant mais on veut la mise en place d'un fond unique national sans nier la spécificité de l'Ile-de-France. Je crois que laisser fonctionner le FSRIF en circuit fermé serait un curieux message. Il serait préférable de penser à des critères de reversement en ayant un fonds opérationnel dès 2012. Il est primordial d'intégrer l'idée d'évolutivité. On pourrait aussi tenter quelques principes pour réguler le concret car nous sommes encore dans la « demie brume » faute d'éléments.

Le principe serait un large panier de ressources comprenant les recettes fiscales directes et indirectes. La question la plus difficile est que le prélèvement ne touche pas le stock et se fait uniquement sur le flux. Je ne suis pas certain non plus, au vue de nos finances publiques, qu'on puisse se contenter uniquement de regarder le stock.

M. Jean Arthuis, président . - Le flux risque d'être négatif.

M. Michel Piron . - Concernant la stratification exposée par M. Guené, il est important de trouver un juste milieu. Je suis d'accord avec la redistribution des ressources de péréquation et avec le fait de prendre en compte le niveau d'intégration. Il reste toutefois des questions non tranchées comme la spécificité du fonds francilien et l'articulation avec le FSRIF qui restent à définir. Il est regrettable également d'oublier l'intégration nationale des spécificités franciliennes. En fait, il y a le débat intra Ile-de-France et le débat national. Dans ce débat, si l'Ile-de-France est considérée comme étant en France, c'est intéressant.

M. Jean Arthuis, président . - Aujourd'hui, il existe quinze strates. Comment voyez-vous les strates ?

M. Michel Piron . - Quatre strates pour les communautés de communes ? On ne peut pas rester uniquement sur la vision juridique des choses, en sachant que le constat démographique en est une autre, mais il faudra sûrement plus de quatre strates.

M. Philippe Dallier, rapporteur . - L'Ile-de-France est bien en France, et pourtant, lorsque le FSRIF a été instauré, c'était uniquement pour l'Ile-de-France. Il faudrait sortir de cette opposition un peu caricaturale : a priori riche, a priori pauvre, sans nier la possibilité de garder un mécanisme particulier, en envisageant deux mécanismes. Même si on ramène les plus pauvres d'Ile-de-France à la moyenne de la région, ce ne sera pas suffisant de toute façon.

M. Jean Arthuis, président . - Nous sommes au Parlement de la République française et nous recherchons l'intérêt général.

M. Charles Guené, rapporteur . - La notion de péréquation doit être évolutive, non figée, le contrat est prévu jusqu'en 2015, après, il faudra établir un autre contrat.

M. Jean Arthuis, président . - Le FSRIF était une grande communauté de communes où les plus fortunés venaient en aide aux plus modestes.

Mme Nicole Bricq . - Je suis élue et parlementaire et je prends en vision l'ensemble du territoire dont je suis la représentante. En effet, je suis élue dans le département de la Seine-et-Marne qui comprend nombre de communes rurales, on ne va pas me dire que je ne comprends rien à la ruralité, pas de procès en ce sens !

M. Michel Piron . - Loin de moi l'idée de créer une tension entre l'Ile-de-France et le reste de la nation, je voulais juste ouvrir le débat, je n'ai d'ailleurs pas parlé de ruralité. A propos de la question de l'intercommunalité, s'ajoutent à cela des aides modulées en fonction des territoires, comme la Bretagne par exemple.

M. Jean Arthuis, président . - Chacun reconnaît la spécificité de l'Ile-de-France, la solidarité intercommunale, mais on ne met pas l'Ile-de-France hors du champ de péréquation nationale.

M. Philippe Laurent, président de la commission des finances locales de l'Association des Maires de France (AMF) et de l'Association des Maires d'Ile-de-France (AMIF) . - On revient à l'opposition entre Ile-de-France et province, en référence à la citation de Philippe Dallier en début d'intervention « déshabiller l'Ile-de-France pour habiller la province ». On met les choses sur la table avec des discussions franches. C'est un système spécifique au sein de l'Ile-de-France. Bien que les travaux de Paris Métropole aient été repris, les communes ne devraient pas être amenées à contribuer deux fois. Mais tout le monde n'a pas cette vision-là, la situation est différente en Ile-de-France.

Les écarts de ressources entre les communes sont plus importants en Ile-de-France qu'en province et ne sont pas corrigés par les intercommunalités. Donc, la base pour le FSRIF est la commune. L'idée de créer un SMIC des communes à 60 % du niveau moyen concerne vingt-huit communes, rien n'empêche de remonter le système par la suite, mais, même si elle est convenablement appliquée, cette mesure ne peut pas réparer de « gros dégâts », car cela dépasse une simple redistribution et concerne carrément la politique de la ville.

Pour aboutir à une forme d'égalisation, le système ne doit pas être trop violent ou confiscatoire comme c'est le cas aujourd'hui. Tout le monde doit se sentir concerné, sans effet de seuil. Chacun contribue et chacun peut recevoir, mais cette approche ne permet pas de résoudre tous les problèmes. Le système doit être très simple et très lisible avec un potentiel financier élargi auquel on ajoute des ressources. Je pense qu'il faut aller assez loin : les taxes sur les casinos sont des ressources par exemple pour les collectivités locales, de même qu'on pourrait prendre en compte la taxe d'urbanisme.

M. Jean Arthuis, président . - En ce qui concerne la taxe d'urbanisme, le taux varie d'une commune à l'autre. Le potentiel fiscal nous paraît plus judicieux.

M. Philippe Laurent . - Oui, mais la collectivité n'a pas toujours la possibilité de fixer le taux, il existe un prix au mètre carré déjà établi. On prend donc un potentiel financier le plus large possible et on fait des calculs et des simulations. C'est relativement simple. Puis on arrive au problème des strates où deux positions s'opposent. La position majoritaire est celle qui pense que les strates sont nécessaires car ce n'est pas pareil selon que l'on se trouve dans les grandes communautés ou les petites communautés. L'AMF est favorable à trois ou quatre strates au niveau communal.

M. Jean Arthuis, président . - Il en existe quinze aujourd'hui. Et au plan intercommunal ?

M. Philippe Laurent . - Pas trop de strates car les différences ne sont pas si grandes que ça. En ce qui concerne le prélèvement, faut-il prélever les intercommunalités ou les communes ? Dans les intercommunalités, des communes ont des richesses très différentes, et il ne faudrait pas que les communes riches dans les intercommunalités pauvres échappent à l'effort et, inversement, que les communes pauvres dans les intercommunalités riches soient pénalisées.

Il faut prendre en compte l'effort fiscal pour le reversement. Le revenu par habitant est une bonne indication. La corrélation est prouvée entre le revenu par habitant et le nombre de jeunes ou autre. Le revenu est représentatif des besoins de la société.

Cela mériterait un débat car certains maires veulent maintenir les logements sociaux pour aider les maires bâtisseurs.

M. Jean Arthuis, président . - Le revenu est-il un bon indicateur de la densité de logements sociaux ?

M. Philippe Laurent . - On trouve des concentrations de riches et des concentrations de pauvres, et on rentre trop dans le détail, trop de paramètres seraient à prendre en compte.

M. Philippe Dallier, rapporteur . - Qui habite les logements sociaux dans les villes où on en trouve plus de 20 % ? Ce n'est pas forcément un bon critère, le revenu est un meilleur indicateur.

M. Jean Arthuis, président . - Vous l'avez dit, le revenu est un meilleur indicateur, on a bien compris.

M. Philippe Dallier, rapporteur . - Je suis d'accord avec Philippe Laurent. Je voudrais toutefois préciser que si le revenu est un bon indicateur, ne faut-il pas malgré tout régionaliser le revenu ? Etre smicard en Ile-de-France est différent d'être smicard dans le Limousin par exemple. Comment alors l'intégrer ? J'ai bien noté également que vous êtes favorable à la préservation du FSRIF, mais j'aimerais que vous soyez plus précis.

M. Philippe Laurent . - Sur la question de la prise en compte du revenu moyen, je trouve que l'idée de prendre le revenu moyen pour comparer est excellente. Ensuite, l'idée que la masse du FSRIF soit élevée fait consensus. Certaines communes pensent qu'on ne peut pas être soumis à la double peine avec plusieurs prélèvements. Il faut que cela soit progressif. Les collectivités d'Ile-de-France doivent être dans le fonds national. Je pense que c'est juste.

M. Edmond Hervé . - J'ai apprécié l'intervention de Philippe Laurent, mais on ne peut pas oublier l'héritage historique de l'Ile-de-France qui a profité à la France et qu'il ne faut pas mettre sur le compte de la péréquation. Les provinciaux tiennent le même raisonnement : « le chef-lieu est riche et la ruralité est pauvre ». J'évoque la Bretagne : en 1993, l'écart de TP pour la ville de Rennes par exemple était de 1 à 60 ; en quatre ans, il a été ramené de 1 à 4 ! Cela est dû à la responsabilité des élus locaux. C'est un piège où il ne faut pas tomber. On ne peut pas demander à la péréquation ce que nous ne pouvons pas demander à l'Etat.

Sur la question du logement, il faut tenir compte des efforts concrets par les collectivités territoriales. Deux sujets restent importants : le logement et les transports. Je suis favorable à des principes dirigistes. Si vous arrivez au taux que vous vous êtes fixé, vous aurez déjà fait des efforts tout à fait méritoires.

M. Philippe Laurent . - J'aimerais répondre à Edmond Hervé. Concernant la question du logement : le fait d'avoir un certain nombre de logements conventionnés entraîne une population à revenus moyens et bas. Il existe deux types de péréquation :

- une péréquation verticale, quasiment inexistante à l'heure actuelle ;

- et une péréquation horizontale, car les dotations de l'Etat sont gelées, à mettre en oeuvre avec des budgets en baisse.

M. Jean Arthuis, président . - Ne vous faites pas trop d'illusions... Une autre façon de procéder serait de revoir les critères d'attribution car les injustices deviennent insupportables. Je remercie donc le Gouvernement qui persiste à ne pas nous communiquer de chiffres en nous permettant de travailler sur les principes.

5. Mardi 26 avril 2011

Présidence de M. Jean Arthuis , président

Potentiels fiscal et financier, Fonds régional et départemental de péréquation de la CVAE

Audition de MM. Jean-Christophe Moraud, directeur général de l'Assemblée des départements de France (ADF), Michel Yahiel, délégué général de l'Association des régions de France (ARF), Mme Anne Bosche-Lenoir, directrice générale adjointe de la région Ile-de-France, MM. Jean-Pierre Poncet-Montange, directeur financier de la région Midi-Pyrénées, Ludovic Magnier, directeur financier de la région Bretagne, Philippe Laurent, président de la commission des finances de l'Association des maires de France (AMF) et de l'Association des maires d'Ile-de-France (AMIF), et Bernard Granié, président du Syndicat d'agglomération nouvelle (SAN) Ouest-Provence

M. Jean Arthuis , président . - Mes chers collègues, cette cinquième réunion de notre groupe de travail sur la péréquation des ressources des collectivités territoriales a pour objet, d'une part, les nouvelles définitions des potentiels fiscal et financier et, d'autre part, les fonds départemental et régional de la CVAE créés en loi de finances pour 2011.

Lors de notre réunion du 29 mars dernier, les rapporteurs, Pierre Jarlier et Albéric de Montgolfier, nous ont rappelés, sur chacun de ces deux thèmes, les définitions fondamentales ainsi que les dispositions que nous avons votées. La réunion d'aujourd'hui sera l'occasion de poursuivre notre réflexion plus avant, voire de proposer des pistes concrètes d'évolution, sur lesquelles nous pourrons débattre.

Comme je vous l'ai indiqué il y a deux semaines, nous tiendrons une réunion de bilan pour définir les propositions de notre groupe de travail. Je vous propose que cette réunion ait lieu le mardi 24 mai prochain. D'ici là, nos rapporteurs pourront parachever leurs travaux.

Le ou les scénarios que nous établirons devront être suffisamment précis pour que la DGCL puisse nous fournir des simulations sur ces orientations. Ils ne constitueront pas des choix définitifs de notre commission mais des axes de réflexion, étant entendu que le choix définitif s'opèrera dans le cadre de l'examen du projet de loi de finances pour 2012, une fois les simulations établies.

En ce qui concerne notre réunion d'aujourd'hui, nous allons tout d'abord entendre nos deux rapporteurs, Pierre Jarlier puis Albéric de Montgolfier.

Je donnerai ensuite la parole à plusieurs intervenants extérieurs :

- M. Jean-Christophe Moraud, directeur général de l'Assemblée des départements de France (ADF), qui pourra nous donner les orientations de cette association, tant sur la définition des nouveaux potentiels que sur la péréquation de la CVAE ;

- plusieurs représentants des régions : M. Michel Yahiel, délégué général de l'Association des régions de France (ARF), M. Jean-Pierre Poncet-Montange, directeur financier de la région Midi-Pyrénées, M. Ludovic Magnier, directeur financier de la région Bretagne et Mme Anne Bosche-Lenoir, directrice générale adjointe de la région Ile-de-France. Cela nous permettra de voir si les régions sont en mesure de prendre une position commune sur la définition de leur potentiel financier et sur la péréquation de leur CVAE ;

- par ailleurs, M. Philippe Laurent, que nous avons déjà eu la chance d'auditionner il y a deux semaines, s'exprimera au nom de l'Association des maires de France sur les nouvelles notions de potentiel fiscal et de potentiel financier ;

- enfin, M. Bernard Granié, président du syndicat d'agglomération nouvelle (SAN) Ouest Provence a souhaité nous faire part de ses préoccupations relatives aux collectivités territoriales à forte densité industrielle.

Je vous rappelle, enfin, que la prochaine réunion de notre groupe de travail aura lieu le mardi 24 mai à 14 h 30.

M. Pierre Jarlier, rapporteur sur le thème de la définition des potentiels fiscal et financier . - Monsieur le Président, mes chers collègues, lors de notre dernière réunion, je vous avais présenté les définitions traditionnelles des potentiels fiscal et financier ainsi que celles qui ont été retenues par la loi de finances pour 2011 et nous avions débattu des différentes options possibles pour 2012.

Il me semble que nous sommes en état aujourd'hui d'acter certaines orientations même s'il reste encore des difficultés à résoudre, s'agissant notamment du niveau régional.

J'aborderai successivement trois sujets :

1) Le nouveau potentiel fiscal ;

2) Les deux « indicateurs de produits financiers » remplaçant l'ancien potentiel financier. Je dois dire sur ce point que je n'ai pas encore trouvé les appellations que nous pourrions suggérer ;

3) et, enfin, le cas particulier des régions.

Le nouveau potentiel fiscal tout d'abord.

Le concept de potentiel fiscal est un instrument de mesure de la richesse fiscale des collectivités qui doit permettre de comparer les collectivités les unes par rapport aux autres en annulant les écarts d'effort fiscal.

En conséquence, dans sa définition la plus pure, il doit prendre en compte les ressources sur lesquelles les collectivités disposent d'une marge de manoeuvre (bases et/ou taux) et uniquement ces ressources.

Si le potentiel fiscal n'est plus utilisé qu'exceptionnellement pour les calculs de dotations, il reste un élément important puisqu'il est partie intégrante des autres instruments de mesure de la richesse des collectivités, notamment le potentiel financier.

L'article 183 de la loi de finances pour 2011 a intégré dans le potentiel fiscal, à la place de l'élément bases brutes de TP x taux moyen national, un ensemble constitué de : CFE + CVAE + IFER + DCRTP et FNGIR.

Cette définition appelle plusieurs observations.

1) Elle intègre des ressources fiscales pour lesquelles les collectivités ne disposent d'aucune liberté de taux (IFER, CVAE). Dès lors, faut-il reporter ces éléments dans le potentiel financier ou considérer qu'en tout état de cause, il existe une marge de manoeuvre indirecte pour les collectivités qui seraient à même d'influer sur l'implantation d'activités nouvelles ? Je penche pour cette seconde option et le maintien de la CVAE et des IFER dans le potentiel fiscal.

2) De la même façon, on peut s'interroger sur le bien-fondé d'intégrer des compensations (part salaires, DCRTP, FNGIR) au sein du potentiel fiscal. Certes, le pli a été pris avec la compensation part salaires de la TP, mais il n'est peut-être pas souhaitable de continuer à ajouter des garanties, correspondant à une situation datée, dans le potentiel fiscal. Je n'ai pas, cela dit, de position tranchée sur cette question.

3) Enfin, il me paraît nécessaire d'intégrer dans le potentiel fiscal de nouvelles ressources : la TaSCom, taxe sur les surfaces commerciales, pour laquelle les communes et EPCI disposent d'une capacité de faire évoluer les taux, même si elle est encadrée, et les nouvelles taxes d'urbanisme qui ont été rénovées par la loi de finances pour 2011. Mais je ne retiendrai personnellement que la nouvelle « Taxe d'Aménagement » qui sera d'application générale sur le territoire et non le nouveau versement pour sous-densité car son intégration serait techniquement très délicate, en particulier pour la définition des bases.

Cette diapositive résume, pour les communes, ce que pourraient être les éléments intégrés dans le calcul du potentiel fiscal, avec, d'un côté, ceux qui devraient nécessairement y figurer, et de l'autre, les éléments qui ont moins de raison d'être pris en compte et sur lesquels nous pouvons nous interroger.

La diapositive suivante présente les mêmes éléments appliqués au potentiel fiscal des départements.

Nous en arrivons au second étage qui est celui de l'ancien potentiel financier et pour lequel je vous propose de reprendre à notre compte l'idée de créer un double indicateur.

C'est une idée que nous avions abordée lors de la dernière réunion et sur laquelle, malgré quelques légères réticences tenant au fait qu'elle exigerait des calculs complémentaires en début d'année, le directeur général des collectivités locales avait donné son soutien.

L'existence d'un indicateur de base et d'un indicateur élargi donne du sens à la distinction entre péréquation verticale et péréquation horizontale et va dans le sens d'une plus grande justice.

Le premier serait utilisé pour les calculs de dotations de péréquation verticale (DSU, DSR, DFM, DPU, part péréquation de la DGF régionale sous des réserves que je vous exposerai dans quelques instants). Il intègrerait les ressources des collectivités sur lesquelles elles n'ont pas de marge de manoeuvre ainsi que les dotations forfaitaires versées par l'Etat.

Le second serait utilisé pour les calculs des prélèvements et reversements de péréquation horizontale (Fonds départemental DMTO, fonds de péréquation CVAE, FPIC et FSRIF) et intègrerait les dotations de péréquation verticale.

Pour les communes et les départements, l'indicateur de base serait l'équivalent du potentiel financier actuel, c'est-à-dire qu'il ajouterait au potentiel fiscal la part forfaitaire de la DGF.

La seule question à régler est de savoir si les compensations et certaines ressources fiscales sans liberté de fixation de taux doivent figurer dans le potentiel fiscal ou dans cet indicateur de base.

Pour les régions, la question est plus complexe et plus simple à la fois, du fait de l'absence totale de marge de manoeuvre fiscale sur les impositions directes. Cette caractéristique a pour effet de réduire considérablement l'intérêt de la distinction entre potentiel fiscal et indicateur de base.

L'indicateur élargi, dont je rappelle qu'il devrait servir pour la péréquation horizontale, ajoute à l'indicateur de base les parts péréquation de la DGF : DSU ou DSR ou garantie de sortie pour les communes, DPU ou DFM ou garantie de sortie pour les départements.

Une question spécifique se pose pour les versements des EPCI à leurs communes membres (attributions de compensation, dotations de solidarité communautaire). Doivent-ils être intégrés à cet indicateur ?

J'en viens au cas très particulier des régions.

Ces collectivités ne disposent plus de pouvoir fiscal. On ne peut donc plus parler de « potentiel » fiscal mais seulement d'un produit fiscal comme le montre la nouvelle définition issue de la loi de finances pour 2011.

Le « potentiel fiscal » des régions après la réforme de la taxe professionnelle est désormais calculé exclusivement par la somme des produits de CVAE + IFER + DCRTP et FNGIR net.

Cela a pour conséquence un bouleversement du rang « traditionnel » de richesse des régions qui aboutit à pénaliser des régions à taux élevés et bases faibles. Celles-ci se retrouvent avec une réévaluation relative de leur « potentiel » fiscal.

Or, les mécanismes de péréquation (vertical et horizontal) font toujours appel directement ou indirectement au « potentiel fiscal » même quant il est intégré à l'indicateur financier.

Il y a donc une difficulté particulière à résoudre pour retenir un indicateur de richesse objectif mais en atténuer les effets. Peut-être faudrait-il retenir des critères complémentaires ?

J'attends beaucoup sur ce point précis des pistes qui pourront nous être présentées par les trois spécialistes des affaires régionales qui ont accepté notre invitation.

Je vous remercie de votre attention.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur sur le thème des fonds départemental et régional de péréquation de la CVAE . - Mes chers collègues, mon propos prolonge celui de Pierre Jarlier puisqu'il faudra partir des définitions nouvelles du potentiel financier des départements et des régions pour faire fonctionner les fonds de péréquation de la CVAE des régions et des départements, qui doivent être instaurés en 2012.

Je vous ai déjà présenté, lors de notre réunion du 29 mars dernier, les dispositions relatives à ces deux fonds que nous avons votées dans la dernière loi de finances. Suite au débat que nous avons eu, je souhaiterais, comme l'a fait Charles Guené pour le fonds de péréquation communal et intercommunal, vous proposer d'adopter les grands principes d'un dispositif sur lequel nous pourrons demander au Gouvernement de fournir des simulations, dès qu'il disposera des données nécessaires.

Sur l'architecture générale du dispositif, il me semble que nous pouvons nous accorder sur le fait de soutenir la position qui a été celle du Sénat lors du débat sur le projet de loi de finances pour 2011.

Ainsi, il faut privilégier un dispositif qui met à contribution l'ensemble des départements et des régions dont la CVAE augmente et non seulement ceux dont la CVAE augmente plus rapidement que la moyenne. Ce choix présente de mon point de vue plusieurs avantages : les fonds alloués à la péréquation seront plus importants, ils seront également moins volatils que dans un dispositif conditionné par l'évolution globale de la CVAE et enfin, le mécanisme de péréquation sera plus simple, plus compréhensible et fera plus facilement l'objet de simulations par la DGCL.

Il me semble toutefois qu'il faut répondre à l'objection qui avait été soulevée par Gilles Carrez et que j'avais évoquée lors de notre dernière réunion sur ce sujet. Il indiquait en effet qu'en prélevant dès le premier euro de CVAE supplémentaire, on risquait de prendre de la ressource à des régions et à des départements dont la CVAE augmente, certes, mais moins rapidement que l'inflation et donc qui perdent en « pouvoir d'achat ».

La solution que je préconise est de garantir à chaque collectivité prélevée que le montant du prélèvement n'augmentera pas, entre les années n et n+1, plus rapidement que l'inflation associée au projet de loi de finances pour l'année n+1. Ainsi, on crée une sorte de plafond de prélèvement pour chaque collectivité qui évitera qu'on les pénalise et qui répond à la principale objection formulée par l'Assemblée nationale.

Sous réserve que cette condition relative à l'inflation soit remplie, le prélèvement serait égal, comme nous l'avons voté, à 50 % de la croissance de la CVAE entre l'année n et l'année 2011.

Cette péréquation en flux cumulé permet à la fois de produire au profit de la péréquation des ressources qui augmenteront progressivement et de garantir le principe essentiel de compensation à l'euro près des conséquences de la suppression de la taxe professionnelle.

L'Assemblée nationale avait critiqué le dispositif en estimant qu'il revenait à « déterritorialiser » la CVAE. Nous pouvons faire deux objections sur ce point :

- toute péréquation est une « déterritorialisation ». Ainsi, par exemple, le fonds de péréquation des DMTO départementaux peut être analysé comme une entorse au principe de la territorialisation mais s'arc-bouter sur ce principe ne sert à rien ;

- la « déterritorialisation » ne portera que sur la croissance de la CVAE, non sur le stock, et uniquement sur la moitié de cette croissance.

Enfin, nous pouvons conserver le principe de ne prélever qu'aux collectivités dont le potentiel financier par habitant est supérieur à la moyenne. En effet, grâce au mécanisme de l'effet « cliquet », le prélèvement ne peut avoir pour effet de faire repasser le potentiel financier par habitant d'une collectivité en dessous de la moyenne nationale. On évite ainsi les effets de seuil et on garantit aux collectivités donc le potentiel financier passerait au dessus de la moyenne de ne pas subir, la première année, un prélèvement trop important.

S'agissant des reversements, nous avons vu, lors de la dernière réunion de notre groupe de travail, qu'ils risquaient de produire des effets de seuil importants. Or, en pratique, ces effets de seuil risquent de rendre le dispositif inacceptable pour les collectivités qui auront à les subir.

Dans son état actuel, le mécanisme reverse des fonds en fonction d'un indice synthétique de ressources (le potentiel financier par habitant) et de charges. Il ne se contente toutefois pas de calculer ce qui est dû à chacun par application de cet indice, puisqu'il réserve les reversements aux seules collectivités dont le potentiel financier par habitant est supérieur à la moyenne.

Or, l'ajout de ce critère d'éligibilité risque de produire des effets de seuil importants. Certaines collectivités peuvent percevoir des sommes en provenance du fonds en année n, parce que, par exemple, leurs charges sont élevées. Si, en n+1, leur potentiel financier par habitant passe juste au-dessus de la moyenne, elles ne percevront alors plus rien.

Pour éviter ces effets de seuil, il me semble qu'il faut supprimer le critère d'éligibilité et prévoir des reversements au profit de l'ensemble des collectivités dont l'indice synthétique de ressources et de charges est inférieur à la moyenne.

Ce choix me paraît cohérent. Si l'objectif du dispositif est de soutenir financièrement les collectivités défavorisées au regard à la fois de la faiblesse de leurs ressources et de l'importance de leurs charges, il n'y a pas de raison d'en exclure a priori les collectivités dont les ressources sont supérieures à la moyenne. Quoi qu'il en soit, le critère de ressources étant intégré à l'indice servant à calculer les reversements, les collectivités dont les ressources seraient trop élevées seront de facto exclues du bénéfice de tout reversement.

Ce choix permet aussi d'éviter d'avoir à fixer un seuil d'éligibilité pour les reversements des régions. Ce seuil avait été fixé arbitrairement à 0,85 fois la moyenne du potentiel financier par habitant. Mais comme nous ne savons pas encore quelle définition du potentiel financier sera retenue pour l'application du dispositif, ce seuil d'éligibilité pouvait difficilement être validé.

Enfin, se pose la question du choix des critères de redistribution pris en compte dans le calcul de l'indice synthétique de ressources et de charges.

Il me semble que pour les ressources, le potentiel financier par habitant, tel qu'il sera redéfini, peut faire l'unanimité au sein de notre groupe de travail.

Concernant le critère de charges, nous nous trouvons en revanche dans une situation différente de celle dans laquelle sont les communes et les intercommunalités. En effet, il me semble que le lien entre les charges des régions et des départements et le revenu de ses habitants et beaucoup moins évident que celui entre une commune et le revenu de ses habitant. Par conséquent, choisir le revenu par habitant comme critère de charges pour les reversements de CVAE ne me semble pas pertinent.

Nous avons voté, en loi de finances pour 2011, des critères de charge qui n'ont pas été modifiés tout au long de la discussion du projet de loi de finances. Il me semble donc qu'ils pourraient, dans un premier temps, être maintenus tels quels. Le Gouvernement les utilisera pour effectuer les simulations que nous lui demanderons et cela nous permettra d'évaluer s'il est possible ou non de trouver des critères plus pertinents.

Il sera également possible de pondérer, au sein de l'indice synthétique, la prise en compte du critère de ressources et des critères de charges. Nous avons voté un dispositif qui prend en compte pour moitié les ressources et pour moitié les charges mais il est tout à fait envisageable, s'il s'avère que c'est plus pertinent, de davantage prendre en compte les ressources ou les charges.

Je vous rappelle les critères de charge que nous avons retenus et qui diffèrent selon que l'on traite des régions ou des départements.

Pour les régions, ce sont trois tiers correspondant à : la population (un tiers) ; l'effectif des élèves scolarisés dans les lycées publics et privés et de celui des stagiaires de la formation professionnelle de la collectivité concerné, inscrits dans les établissements de leur ressort (un tiers) ; et la superficie, plafonnée au double du rapport entre leur population et la densité moyenne des régions (un tiers).

Pour les départements, trois tiers également : la population (un tiers) ; l'effectif du nombre de bénéficiaires de minima sociaux au cours de l'année précédant celle du prélèvement et la population âgée de plus de 75 ans (un tiers) ; la longueur de la voirie départementale rapportée au nombre d'habitants de chaque département (un tiers).

Ces critères ne sont pas nécessairement parfaits mais ils ont été validés par le Gouvernement, ce qui signifie qu'il est concrètement en mesure de les appliquer, et ils résultent largement des propositions qu'avait faites notre commission des finances lorsqu'elle avait proposé une mutualisation des ressources de la CVAE dans le débat sur la suppression de la taxe professionnelle.

Voilà, mes chers collègues, les propositions qui me semblent pouvoir être celles de notre groupe de travail s'agissant de la péréquation départementale et régionale de la CVAE. Comme je l'ai déjà indiqué, je vous rappelle que c'est une base de travail, sur laquelle le Gouvernement devra fournir des simulations, et non un choix définitif auquel il faudra se tenir quels qu'en soient les conséquences effectives.

Je vous remercie de votre attention.

M. Jean Arthuis , président . - Je passe la parole à Eric Doligé qui va maintenant suppléer Albéric de Montgolfier, obligé de s'absenter.

M. Éric Doligé . - Je tiens tout d'abord à rappeler quelques chiffres qui dénotent la difficulté d'établir un budget sur un système actuellement imprécis : en janvier dernier, les 86 millions d'euros de CVAE annoncés pour mon département ont été ramenés à 70 millions, ce qui équivaut à 25 % d'écart. On nous a versé une compensation en TSCA (31 millions) jugée trop importante, d'où le prélèvement au titre du FNGIR de 20 millions, j'ai perdu 4,5 millions en tout. Cet exemple montre qu'il serait intéressant qu'on nous fasse des simulations au préalable suffisamment précises pour éviter de nous retrouver dans des situations assez difficiles.

M. François Fortassin . - Je souhaiterais commenter l'un des critères de charges pour les départements, car si on ne rapporte pas le nombre des bénéficiaires des minima sociaux à la population du département, ce n'est pas parlant, parce qu'un département comme le Var qui est millionnaire et est un département très jeune, va cependant avoir plus de personnes âgées que la Lozère.

M. Jean Arthuis , président . - C'est le cas puisque le potentiel financier se fait en fonction de la population. A priori, cela ne doit pas contrevenir à l'idée que nous nous faisons de l'équité, à charge de le vérifier. Plus personne ne souhaitant intervenir, on va faire appel à un expert qui a bien connu la direction des collectivités locales et qui aujourd'hui a intégré l'équipe de l'ADF, M. Jean-Christophe Moraud, directeur général.

M. Jean-Christophe Moraud, directeur général de l'Assemblée des départements de France . - Je débuterai mon propos par quelques remarques liminaires.

La question est très délicate dans un contexte flou en termes de produits pour la CVAE. Les conseils généraux et les collectivités de premier niveau ainsi que les régions ne connaîtront qu'en juillet le montant global de la CVAE. Le législateur ne pourra pas se prononcer sur des éléments dont on ne connaît pas le comportement.

Ensuite, une distinction entre ce qui relève ou non de la responsabilité locale est nécessaire pour corriger les inégalités de ressources dont la collectivité n'est pas responsable.

Puis, je dirai que la notion d'effort fiscal n'a plus aucun sens pour les régions et est atténuée pour les conseils généraux. Pour les régions, les départements et les communes, des choix politiques fiscaux, via les taux, faits par le passé et toujours pris en compte, rendent le dispositif imparfait et créent un biais dans les futurs systèmes.

Faut-il inclure la DCRTP et le FNGIR dans le potentiel fiscal ? S'il faut les intégrer cela contredit même l'idée de potentiel fiscal, avec pour conséquence un changement de classification entre les collectivités favorisées et défavorisées.

Faut-il inclure la dotation de péréquation ? Non, lorsque le potentiel fiscal est utilisé pour les transferts; oui si ces dotations sont destinées à mesurer le pouvoir péréquateur des dotations dans une optique d'égalisation du ratio avantage/effort.

L'autre difficulté en partie occultée est la formidable concentration de la CVAE sur la région Ile-de-France et les grandes agglomérations. Une ressource inégalement répartie qui complique les dispositifs de péréquation.

M. Jean Arthuis , président . - Je me demande de quelle façon la DGFIP va territorialiser la valeur ajoutée et procéder au contrôle.

M. Jean-Christophe Moraud . - Pour les départements, la notion de potentiel fiscal n'a plus lieu d'être. Si on intègre la FNGIR et la DRCTP dans le potentiel financier net, il faut les prendre et les mettre dans le potentiel financier et le recalculer.

M. Jean Arthuis , président . - Ce qui compte, c'est le potentiel financier pour calculer les éléments de péréquation ; pour le potentiel fiscal il faudrait s'en tenir à un taux moyen pour connaître le potentiel et gommer l'effort fiscal. Je m'interroge sur l'utilité du potentiel fiscal aujourd'hui.

M. Jean-Christophe Moraud . - Je rappelle qu'il servait principalement à déterminer pour les dotations de péréquation les collectivités éligibles (c'est un premier filtrage). La notion de potentiel fiscal reste pertinente pour les intercommunalités et les communes et celle de potentiel financier sert aux régions et aux départements.

M. Jean Arthuis , président . - Il s'agit d'appréhender le niveau de ressources d'une collectivité pour déterminer la fraction de prélèvements qu'elle aurait à consentir ou de dotations dont elle pourrait bénéficier pour faire vivre une idée de péréquation équitable. Le potentiel fiscal s'est beaucoup réduit pour les départements et les régions mais il n'est qu'un élément dans le potentiel financier et c'est celui-ci qui sert de calcul pour la péréquation. Vu des régions alors ? M. Adnot ?

M. Philippe Adnot . - Cela n'a pas plus d'importance qu'on doive jouer sur les stocks et non sur les flux ? En somme, sur la richesse réelle et non sur l'évolution de la richesse ?

M. Jean Arthuis , président . - Les deux.

M. Philippe Adnot . - Non, on peut être pauvre et connaître une grande évolution de sa richesse et être prélevé, on peut être très riche avec une faible évolution de sa richesse et ne pas être prélevé, et c'est insupportable.

M. Jean Arthuis , président . - Oui mais je pense qu'il y a un seuil en-deçà duquel on n'est pas prélevé. Si ce n'est pas prévu il faudra le faire. Est-ce qu'on peut demander à M. Michel Yahiel, délégué général de l'association des régions de France de nous donner son point de vue ?

M. Michel Yahiel, délégué général de l'Association des régions de France . - Jean-Christophe Moraud a présenté un certain nombre de remarques auxquelles nous ne pouvons que souscrire. Le consensus parmi les régions se dégage difficilement. En effet, la perte de tous éléments de taux rend les réflexions fiscales surréalistes car pour l'IFER, par exemple, les régions se payent à elles-mêmes un impôt qu'elles sont censées recevoir. Elles se trouvent dans une situation particulièrement perturbante

M. Jean Arthuis , président . - Il n'y a guère que sur la taxe intérieure sur les produits pétroliers (TIPP) que la région peut jouer.

M. Michel Yahiel . - Oui, avec la carte grise. En ce qui concerne la CVAE, la situation est incertaine, l'assiette de la CVAE réincorporant les salaires va donner des résultats probablement inattendus. Il y a à la fois perte de main sur les taux et des perspectives peu claires sur le produit attendu de cet impôt. Je rappelle au passage que la dotation de compensation pèse dans le panier de la région plus lourdement que pour les autres niveaux de collectivités, ce qui ajoute encore à la complexité. La question que nous devons nous poser c'est la définition des nouveaux critères de pesage de la « richesse » ou la situation financière des régions, critères qui n'existent pas dans la législation actuelle. La richesse d'un territoire ne signifie pas ipso facto la richesse de la collectivité qui est censée le gérer.

L'effet mécanique de l'application des textes provoque un large bouleversement de la hiérarchie traditionnelle entre régions bénéficiaires et régions pourvoyeuses de péréquation. Les interrogations concernent aussi bien la péréquation horizontale entre régions que la péréquation verticale. Il y a une nécessité de maintenir un parallèle sur ces deux notions.

Actuellement, nous essayons d'éviter une situation caricaturale où l'Ile-de-France se retrouverait contributrice et les autres régions bénéficiaires. Les effets pervers du système nous interpellent beaucoup et nous travaillons énormément pour dégager une vision cohérente des choses.

M. Jean Arthuis , président . - A propos de la territorialisation, nous nous sommes demandé ici au Sénat si la CVAE ne serait pas le prototype de la ressource pour la péréquation.

M. Michel Yahiel . - C'est une bonne question. Ce qui nous met dans une situation difficile c'est l'opacité dans laquelle nous nous trouvons. J'observe que les dispositions fiscales votées par le Parlement ont des effets mécaniques pronostiqués et non effectifs. Seuls les résultats de l'expérience prouveront le bien fondé de la territorialisation.

M. Jean Arthuis , président . - Merci monsieur le délégué général. Pourrions-nous avoir le point de vue des praticiens des régions ? M. Poncet-Montange représente la région Midi-Pyrénées. Comment voyez-vous cette réforme et que vous inspirent les propos de nos rapporteurs ?

M. Jean-Pierre Poncet-Montange, directeur financier de la région Midi-Pyrénées . - Ce qui nous préoccupe c'est la péréquation de la DGF, étant donné que le potentiel financier n'existe pas pour les régions. La prise en compte de la DGF comme ressource produit une inversion totale de l'ordre des ressources entre les collectivités Toutes les régions deviennent contributrices pour la péréquation de la CVAE, au profit notamment de l'Ile-de-France même s'il n'est pas question de priver cette dernière du bénéfice de ses contributions, mais le résultat se révèle curieux.

En ce qui concerne la DGF régionale, à la différence de celle des autres collectivités, elle inclut ou non un certain nombre d'éléments liés au transfert de tout ce qui est ferroviaire. Les régions ne sont pas à égalité en raison des dates de transfert des charges différentes - ceux-ci se sont déroulés entre 4 et 5 ans - puisqu'on avait une dotation, la DGD, dont 95 % a été basculé dans la DGF.

M. Jean Arthuis , président . - La compensation ferroviaire représente quelle fraction de la DGF perçue par la région ?

M. Jean-Pierre Poncet-Montange . - Environ 60 %.

M. Jean Arthuis , président . - Donc, les bases ne sont pas homogènes.

M. Jean-Pierre Poncet-Montange . - Pas plus que les régimes ne sont identiques.

M. Jean Arthuis , président . - Dans les critères de charges il faudrait tenir compte des kilomètres de lignes. Si ce n'est pas prévu, il faudrait peut-être les inclure.

M. Jean-Pierre Poncet-Montange . - La contribution de l'Ile-de-France au STIF n'est pas comparable à ce que paient les autres régions à la SNCF. Je rajouterai simplement qu'au niveau des réseaux ferroviaires, les différences entre régions varient aussi.

Une modeste contribution relative aux chiffres : pour Midi-Pyrénées, sur 1,1 milliard de budget et 300 millions de fiscalité, la région va se retrouver avec 127 millions de CVAE, et 11 millions d'IFER, et tout le reste en DCTRP qui passe de 50 à 110 millions.

M. Jean Arthuis , président . - La CVAE correspond-t-elle à la taxe professionnelle ?

M. Jean-Pierre Poncet-Montange . - Nous avons 80 % de l'ancienne taxe professionnelle.

M. Jean Arthuis , président . - Donc 20 % en moins. Très franchement je me demande comment l'administration peut donner des chiffres aujourd'hui sur la CVAE puisque pour les établissements multi sites ils en sont bien incapables et ce sont ceux qui impactent lourdement la CVAE territorialisée. Je ne vois pas comment ils peuvent faire une répartition.

M. Jean-Pierre Poncet-Montange . - En tout cas, nous avons les chiffres des IFER qui ont été divisés par deux avec pour conséquences : la région Ile-de-France va percevoir moins de produits, donc une baisse de FNGIR, et donc par corrélation une augmentation de la participation.

M. Jean Arthuis , président . - Merci monsieur le directeur pour ce point de vue de la région Midi-Pyrénées, maintenant celui de la Bretagne qui est une région extrêmement riche. C'est M. Ludovic Magnier, qui est directeur financier de Bretagne.

M. Ludovic Magnier, directeur financier de la région Bretagne . - La Bretagne est une région riche qui connaît un rattrapage depuis une dizaine d'années. Elle est historiquement pauvre et bénéficie de la forte croissance de ses bases traditionnelles qui sont la taxe professionnelle et la taxe foncière. Aujourd'hui, notre inquiétude porte sur l'écart entre la croissance passée et celle résultant de la réforme. Les propos des rapporteurs sont intéressants et ont le mérite de distinguer deux enjeux différents : la définition de la richesse potentielle d'une région et la réponse dont une partie se trouve dans le fonctionnement même de la réforme, au moins au niveau départemental et régional, dans la mesure où cette réforme pose des questions et qu'une partie de ses effets est endogène et contre péréquatrice.

Vous avez raison d'intégrer dans vos réflexions sur la péréquation l'amélioration de la partie structurelle de la réforme, c'est-à-dire la manière dont on prélève la CVAE avant de la répartir. Je voulais revenir sur ce que disaient MM. Yahiel et Montange, à savoir que les régions sont difficilement assimilables à un bloc homogène puisqu'elles ont des compétences et des natures de ressources différentes. La définition d'un bon indicateur de richesse et de charges est essentielle et l'un des exemples typiques est la compétence transport. Pour conclure, quelques idées, dans quelle mesure peut-on travailler sur la notion de potentiel fiscal qui était à l'époque le meilleur indicateur de richesse, de pouvoir d'achat des collectivités, en l'améliorant, en tenant compte de la fiscalité résiduelle des régions : les cartes grises, la part très marginale de la TIPP encore modulable, et éventuellement les fiscalités spécifiques des uns et des autres.

M. Jean Arthuis , président . - Merci et maintenant l'Ile-de-France, Mme Anne Bosche-Lenoir.

Mme Anne Bosche-Lenoir, directrice général adjointe de la région Ile-de-France . - La situation de l'Ile-de-France a été beaucoup évoquée et j'interviens à mon tour pour présenter quelques éléments expliquant le classement de la région qui paraît surprenant :

- depuis 2004, les taux de fiscalité ont augmenté (sur le foncier de 46 % de 2005 à 2006, de presque 70 % pour la taxe professionnelle). A l'issue de cette hausse, les taux de fiscalité directe sont restés inférieurs de moitié environ aux taux moyens des autres régions ;

- le choix fait par les élus régionaux d'avoir une fiscalité plus faible avec une assiette plus large et un endettement supérieur aux autres régions.

M. Jean Arthuis , président . - Cela signifie-t-il plus de CVAE que de TP ?

Mme Anne Bosche-Lenoir . - Les recettes réelles de fonctionnement de l'Ile-de-France sont inférieures de 14 % en moyenne par rapport à la moyenne métropolitaine ainsi que le taux d'épargne brute qui est inférieur de 15 %.

Le taux de couverture des dépenses d'investissement est de 50 % en Ile-de-France alors que le taux moyen métropolitain est de 63 %. A compétences similaires, les dépenses de fonctionnement sont inférieures de 15 % à la moyenne des autres régions.

A la suite de la réforme, le territoire francilien se trouve dans une situation où pour les ressources de la collectivité la région n'a plus de marges de manoeuvre. Notre pouvoir fiscal est limité à la carte grise et à la modulation de la TIPP. S'agissant de la DGF, il y a eu un transfert de compétences en ce qui concerne les transports. Le transfert du STIF, très important, s'est élevé à plus de 400 millions d'euros.

Le potentiel fiscal est le reflet de la situation des ressources des régions et il n'est pas question de réintégrer le FNGIR dans l'assiette de calcul des ressources de l'Ile-de-France puisque cette ressource est destinée à financer la péréquation des autres régions. Nous avons une assiette de CVAE très large à laquelle est appliqué un taux national qui sert au calcul d'une assiette théorique sur laquelle est imputée la FNGIR. Après la réforme, nos recettes sont demeurées inchangées. Le problème vient plutôt de l'évolution de cette ressource dans le temps. Elles sont compensées par la CVAE grâce à une assiette très large. L'une des pistes de réflexion consisterait à caler le calcul de la péréquation sur l'analyse de l'évolution du potentiel fiscal. Il conviendrait de regarder les régions dont le potentiel fiscal intègrerait toutes les recettes (CVAE et dotations) afin de noter le taux réel d'évolution de l'ensemble des ressources et faire de la péréquation sur cette assiette globale.

Les curseurs à partir desquels on devient contributeur ou bénéficiaire devraient être fixés sur la base des résultats de simulations de la DGCL.

M. Jean Arthuis , président . - En Ile-de-France, la compétence transport IDF qui ouvre droit à prélèvement sur salaires et son versement, qui est compétent pour voter le taux et qui perçoit cette taxe ?

Mme Anne Bosche-Lenoir . - Le plafond du versement transport est fixé par la loi et c'est le STIF qui perçoit la ressource.

M. Jean Arthuis , président . - Là encore c'est un élément de potentiel fiscal.

Mme Anne Bosche-Lenoir . - La compensation versée à la région et aux différents départements d'Ile-de-France a été calculée sur la base des dépenses engagées précédemment par l'Etat et sur celle du taux de versement transport tel qu'ils étaient à cette époque là.

M. Jean Arthuis , président . - C'est en quelque sorte un élément de potentiel fiscal, il y a des régions où ce n'est pas la région mais l'agglomération qui perçoit. C'est très compliqué car dans tel secteur géographique cette ressource peut être une ressource régionale, ce qui est le cas en Ile-de-France alors qu'à Rennes ce sera une ressource de la communauté urbaine.

Mme Anne Bosche-Lenoir . - Ce n'est pas une ressource de la région, c'est une ressource du syndicat.

M. Jean Arthuis , président . - Mais imaginez que le STIF décide de mettre un taux extrêmement bas, ça supposerait qu'il y ait une compensation sous forme de subventions pour faire face au financement des transports collectifs. Dans mon esprit, cela reste un élément de potentiel fiscal.

Mme Anne Bosche-Lenoir . - En Ile-de-France, l'autorité organisatrice des transports finance les bus, les métros, les tramways et les trains de banlieue. De ce point de vue, le versement transport est une ressource du STIF qui n'a pas bougé son taux depuis plusieurs années. Dans ces conditions, il est difficile d'en faire une assiette de potentiel.

M. François Fortassin . - Des éléments intéressants se sont dégagés des exposés, mais l'objectif de la péréquation n'a pas été défini. Pour apporter un peu à ceux qui ont moins, il faut prendre l'argent quelque part. Ceux qui sont riches objectent aux prélèvements leurs dépenses. Dans ce cas, il y a difficilement péréquation.

M. Jean Arthuis , président . - Il faut effectivement concilier autonomie et péréquation. Maintenant la vue très large de l'association des maires de France.

M. Philippe Laurent, président de la commission des finances de l'Association des maires de France . - Je voudrais juste dire un mot sur le débat qui vient d'avoir lieu parce que la question qui a été posée concerne la territorialisation de la CVAE. La raison de cette territorialisation réside dans l'absence d'une capacité de discussion entre les régions et l'Etat, avec une répartition basée sur une négociation. Au niveau des communes, il y a encore un potentiel fiscal au niveau du bloc local. Le système qui doit être mis en oeuvre n'est pas destiné à régler les cas particuliers d'inégalité territoriale. L'objectif recherché est un système progressif qui concerne le plus de collectivités et ne soit pas confiscatoire. Il doit rester simple et mettre de côté les origines des différentes ressources des collectivités. Il ne faut pas oublier que les dépenses sont conditionnées par les recettes.

Nous sommes nombreux à penser que cette richesse doit être appréciée en prenant en compte le maximum de données, de ressources. Pour le bloc local nous avons encore un potentiel fiscal puisqu'il y a des bases multipliées par des taux moyens. Je souhaite revenir sur deux ou trois idées reçues. On parle de sommes certes importantes, mais pour les communes et les intercommunalités cela représente moins de 1 milliard d'euros. Si on arrive à bien répartir ces contributions et ces retours sur un nombre important de collectivités territoriales, la première année elles ne représenteront que ¼ de cette somme.

M. Jean Arthuis , président . - Au début, c'est 2 % mais lorsque la mécanique sera bien rodée...

M. Philippe Laurent . - Justement, nous avons la possibilité de mettre en oeuvre de manière réelle un système de péréquation qui ne sera pas trop difficile.

M. Jean Arthuis , président . - C'est un instrument qu'il faut rendre opérant.

M. Philippe Laurent . - C'est pour cela qu'il ne doit pas être trop sophistiqué. On prend la masse globale à l'instant T : le potentiel fiscal et l'ensemble des ressources, et on retient l'écart par rapport à la moyenne. Là se pose le problème des strates car les clivages sur cette notion apparaissent entre les « petits » et les « gros ».

M. Jean Arthuis , président . - C'est à débattre au sein de l'AMF où les « petits » sont majoritaires.

M. Philippe Laurent . - Je voudrais évoquer une autre idée reçue qui consiste à ne pas prendre en compte une ressource lorsque son montant est très faible. C'est une fausse bonne idée car elle représente peu au niveau national mais beaucoup pour tel ou tel type de collectivité.

M. Jean Arthuis , président . - Il faut tout prendre, il y a les taxes sur les casinos, et il y a ce qui est arrivé avec les jeux en ligne pour les villes avec des hippodromes. Cela fait 10 millions.

M. Philippe Laurent . - Il faut aller le plus loin possible, je serais partisan d'englober toutes les ressources, affectées ou pas.

Mme Marie-France Beaufils . - Cela touche le versement transport et la question qui nous est posée est de savoir si oui ou non on l'élargit à toutes les autorités organisatrices de transport. Il faut traiter cette question.

M. Philippe Laurent . - Pour résumer, monsieur le président, on introduit un maximum de ressources avec une modulation du potentiel fiscal pour les ressources fiscales avec une possibilité de taux.

M. Jean Arthuis , président . - Après le point de vue des maires et des communautés de communes, nous entendons le président du Syndicat d'agglomération nouvelle Ouest Provence, M. Bernard Granié.

M. Bernard Granié, président du Syndicat d'agglomération nouvelle Ouest Provence . - Je me fais le porte-parole des 49 intercommunalités dont 40 % du produit de TP est remplacé par les dotations FNGIR et DCRTP. Cela va de 40 % à 76 %.

M. Jean Arthuis , président . - C'était pour éviter que vous perdiez la taxe professionnelle parce que sans cela l'industrie était condamnée à se délocaliser en Europe centrale ou ailleurs.

M. Bernard Granié . - Au-delà d'une perte importante de ressources, le problème en termes financiers sur la dynamique des ressources concerne le taux de croissance prévisionnel de 4 % qui peut passer à 1 % avec des dotations représentant 75 %.

L'autre point sensible est l'aménagement du territoire : dans les Bouches-du-Rhône, sur les cinq intercommunalités fortement industrielles, trois ont déjà mis en révision leur PLU avec des cabinets d'étude spécialisés pour essayer d'avoir des zones plus urbaines qui rapporteraient plus que des implantations industrielles. Nous avons eu l'implantation d'un terminal méthanier début 2010, la TP estimée est de 15 millions d'euros, les différentes taxes 1,280 million, c'est-à-dire moins de 9 %. Avec 12 à 20 % des recettes potentielles que nous avions jusqu'à présent, les principaux maires des communes concernées ne souhaitent pas de nouvelles implantations d'industrie lourde fortement contraignantes type « Seveso ». Dans le groupe de travail de ces intercommunalités, nous sommes favorables à un dispositif de péréquation ambitieux, mais affiné et solidifié.

Nous préférons cibler notre intervention sur le développement industriel : les collectivités concernées sont conscientes de l'enjeu, mais elles doivent pouvoir investir. Les premières simulations montrent que le nouveau dispositif de péréquation va toucher une part importante d'intercommunalités industrielles (Martigues, Dunkerque, Le Havre, Montbéliard, etc.) en raison de leur stock de ressources supérieures à la moyenne mais dont la dynamisme va être fortement affectée par le remplacement de plus de 50 % de leur fiscalité actuelle par des dotations figées. Ces territoires ne profiteront pas des reversements alors qu'ils sont fortement ouvriers avec des ménages disposant de ressources nettement inférieures à la moyenne nationale et cela ne sera pas pris en compte. Je rappelle que notre territoire s'est fortement endetté en vue de sa construction, nous sommes écrêtés alors que nous supportons les charges de cette dette.

J'attire votre attention sur le fait qu'il ne faut pas stigmatiser systématiquement les collectivités industrielles dont les ressources dépassent la moyenne, elles correspondent à d'importants investissements et participent à l'équilibre des territoires industriels qui fournissent une part conséquente de foncier disponible. Aujourd'hui, il existe vingt sites majeurs en France susceptibles d'accueillir des sites « Seveso ». On ne leur permet pas d'assumer le risque et en plus on les pénalise puisque les contraintes ne sont pas partagées.

Un dispositif de péréquation mal calibré risque de réduire le lien entre territoire et industries et menace l'équilibre de ces territoires. Dans l'évaluation qu'on va faire, elle s'effectuera de la même manière pour deux collectivités qui présentent un potentiel financier d'un territoire identique mais dont la part de recettes fiscales dynamique après réforme fiscale serait très différente.

Nous vous soumettons quelques propositions :

- des prélèvements de la péréquation sur ces collectivités industrielles non confiscatoires ;

- ne pas entraîner la déstabilisation financière de ces collectivités afin de ne pas constituer un obstacle à l'accueil de nouvelles unités industrielles complémentaires.

Nous proposons également quelques pistes de réflexion :

- la réduction du prélèvement, en fonction du poids des dotations dans les ressources fiscales ;

- la réduction du prélèvement de + 50 % pour les territoires (au nombre de quatorze) qui regrouperaient plus de dix sites « Seveso »;

- la prise en compte d'un critère « risque industriel » dans ceux de reversement des solidarités financières.

D'après nos estimations, ces propositions seraient suffisamment ciblées pour ne pas remettre en cause l'équilibre général du dispositif de péréquation. Il faut rester dans une dynamique de ré-industrialisation du territoire national.

M. Jean Arthuis , président . - Cette réforme avait pour objet d'alléger une contribution qui pesait sur le coût de la production industrielle, favorisant ainsi la délocalisation. Je reconnais que là où il y avait des activités industrielles très lourdes, les recettes fiscales ont baissé. Les observations et les souhaits de M. Granié ont été bien enregistrés par le groupe de travail. Je laisse la parole à mes collègues.

M. Charles Guené , rapporteur . - Je remarque que beaucoup de départements ont des zones « Seveso » vides et attendent désespérément. La réforme avait sans doute pour but de réduire les délocalisations, mais en même temps de faire en sorte qu'on puisse aussi faire de l'aménagement de territoire puisque les ressources vont toujours au même endroit. Il faudra essayer de composer sur ce type d'argument.

Mme Marie-France Beaufils . - Pour connaître d'autres sites « Seveso » mais moins regroupés, je crois que la plupart des industriels qui ont choisi leur implantation en fonction de leur activité l'ont fait ensuite, souvent en accord avec l'Etat, sur le point stratégique permettant à l'activité de fonctionner. L'un de mes sites «Seveso », je suis prête à vous le donner, mais ni l'un, ni l'autre n'a l'intention de partir et ils continuent à investir.

M. Jean Arthuis , président . - Est-ce qu'ils investissent parce qu'il y a eu la réforme de la taxe professionnelle ?

Mme Marie-France Beaufils . - Absolument pas. Aujourd'hui le problème de maintien de l'activité industrielle n'a rien à voir avec la taxe professionnelle et son coût. Avec la réforme, on a un manque de visibilité et on ne se donne pas les moyens d'avoir un outil de péréquation efficace. Il nous aurait fallu une vraie recette à l'échelon national qui nous aurait permis de faire de la péréquation.

M. Jean Arthuis , président . - A quelle recette pensiez-vous ?

Mme Marie-France Beaufils . - L'impôt sur les placements financiers pourrait être une solution.

M. Jean Arthuis , président . - Nous ne reprendrons pas ce débat.

Mme Marie-France Beaufils . - On est à un point aujourd'hui où la loi ayant été votée, essayons de faire un outil de péréquation le plus simple et le plus lisible que possible. Il faut mesurer ce qu'est la richesse réelle des collectivités.

M. Jean Arthuis , président . - On est d'accord pour mesurer la richesse réelle.

M. Charles Guené, rapporteur . - Je relève que l'exposé des invités met en avant la crainte pour la dynamique. Elle n'est pas aussi menacée qu'on le croit. Même lorsqu'on est écrêté on continue de progresser sur ses bases et lorsqu'on reçoit des compensations tout dépend en fait de la dynamique qui restera. Le point fondamental est l'appréciation de la richesse réelle au regard des charges et les critères à utiliser pour régler ce dossier. On n'est que sur des progressions à la marge et sur un contrat temporaire (2015 pour le bloc communal), on verra comment on pourra avancer et quel nouveau contrat on pourra faire.

M. Jean Arthuis , président . - Bien sûr et pour peu que l'intercommunalité prenne plus de consistance et que chaque intercommunalité devienne un lieu de péréquation entre les communes du secteur.

M. Eric Doligé . - Monsieur le président je ne reviendrai pas sur la péréquation. Quant on parle de potentiel c'est la capacité qu'on a à faire varier sa richesse. Or, aujourd'hui sur mon territoire je n'ai plus de potentiel fiscal, plus de potentiel financier, en réalité j'ai un potentiel national. Je ne vois pas dans ces conditions comment développer ma fiscalité qui ne représente plus rien.

M. Jean Arthuis , président . - Si, si vous faites venir une entreprise nouvelle dans le Loiret dans la territorialisation de la contribution à la valeur ajoutée vous aurez un supplément.

M. Eric Doligé . - Je constate seulement la chute considérable que j'ai eue. Mon potentiel il est pour les autres, en dehors de faire venir plus de personnes âgées de plus 75 ans, de construire plus de routes, et de jouer sur les trois tiers pour essayer de récupérer le maximum de péréquation. Le mot potentiel devient plus national que local même avec l'implantation d'entreprises.

M. Jean Arthuis , président . - Si évidemment dans la mesure où c'est territorialisé, le supplément de valeur ajoutée et qui est développé localement ouvre droit à un supplément de CVAE. Le taux n'est pas entre vos mains mais l'assiette l'est.

M. Eric Doligé . - Mon seul potentiel à mon avis il se trouve à la direction des finances. Il n'y a qu'au mois de juillet que je le saurai. Aujourd'hui je suis totalement dans le flou.

M. Jean Arthuis , président . - Nous sommes à la veille de bonnes nouvelles puisqu'on applique le principe de précaution avec des notifications très décevantes.

M. Edmond Hervé . - Je comprends la définition de potentiel que notre collège Eric Doligé vient de donner et si j'ai bien compris la source du potentiel se trouve à l'administration centrale. Quel conseil donneriez-vous au ministre dans le cadre de l'application de la RGPP pour que l'administration centrale puisse accueillir toutes les personnes en situation de responsabilité qui vont présenter la définition de potentiel fiscal ? Je pense aux élus que nous sommes.

M. Pierre Jarlier , rapporteur . - Quand on écoute les différents intervenants on se rend bien compte qu'on ne peut pas avoir de réponse globale. Pour les communes, le potentiel financier a un sens et on doit pouvoir mettre en place les critères d'évaluation des richesses, ensuite on peut y ajouter un critère de potentiel corrigé en tenant compte des dotations de péréquation pour voir comment on corrige les inégalités. Pour les conseils généraux, on va avoir du mal à effacer les éléments historiques de rééquilibrage des ressources. Pour les régions il faut parler de produits ; on a une option de calculer un produit fiscal et un indice synthétique de charges. Je retiens que notre idée d'un double indicateur a un sens parce qu'on peut avoir un indicateur de la richesse réelle objective du territoire et un deuxième indicateur qui tienne compte de la réalité de la péréquation dont bénéficie le territoire. Pour les régions, on attend vos contributions, on n'a pas suffisamment d'éléments pour définir l'indice de charges.

M. Michel Sergent . - Deux mots pour dire que le dynamisme ne sera plus jamais ce qu'il a été. Je suis en faveur de la solidarité, mais l'ensemble du mécanisme est complexe et bâtir des budgets devient difficile. Un langage compris des élus est indispensable. Décomplexifier et simplifier font aussi partie de notre tâche de parlementaires.

M. Jean Arthuis , président . - Et s'interdire de s'amender pendant dix ans ! Parce que vous faites la taxe professionnelle de Jean-Pierre Fourcade version 1975 de trois pages et la réforme en compte cent trente, parce qu'entre-temps on a pris en compte plusieurs cas particuliers. C'est difficile, mais si on régule les recettes, on régule les dépenses. Je conviens de l'esprit de solidarité, mais je m'interroge sur ce qu'on va répartir et où prendre les ressources. Or, s'il n'y a pas de dynamique économique et création de valeur ajoutée, on n'aura pas de CVAE. C'est probablement au niveau de l'intercommunalité que se fera l'appréciation juste de la ressource et à partir de là on pourra commencer à péréquer. Trouver les indicateurs de niveau de dépenses va être moins aisé car certains vivent sobrement et, par exemple, les dépenses sociales sont difficiles à apprécier.

Dans la première phase, la péréquation horizontale jouera dans une infime proportion et il ne faudra pas taxer les pauvres tant qu'ils n'auront pas rattrapé leur retard, tenir compte des progressions quand le stock est supérieur à un certain niveau.

Je remercie nos invités qui ont eu la gentillesse, la disponibilité et le franc-parler pour nous éclairer. Croyez bien mesdames, messieurs que tout ce que vous nous avez rendu compte enrichit notre réflexion et il faudra un important effort de concentration et d'analyse pour être en mesure à la fin mai de faire des propositions mais je n'ai pas d'inquiétude parce que c'est M. Jarlier, M. de Montgolfier, M. Doligé, M. Guené et M. Dallier qui sont à la manoeuvre. Essayons de faire progresser la péréquation car jusqu'à présent le dispositif n'a pas bien fonctionné. Les travaux ont bien avancé au niveau de l'appréciation des ressources, le potentiel fiscal ne peut s'appliquer utilement que là où la collectivité a gardé le pouvoir de fixer les taux et pour le reste, ce qui sera pris en compte c'est le potentiel financier. Merci mesdames et messieurs.

6. Mardi 24 mai 2011

Présidence de M. Jean Arthuis , président

Présentation des conclusions des rapporteurs

M. Jean Arthuis , président . - Mes chers collègues, notre réunion marque une étape importante dans les travaux du groupe de travail que nous avons constitué sur la péréquation entre les collectivités territoriales.

Aujourd'hui, en effet, nos rapporteurs vont présenter les orientations qu'ils ont retenues et qui seront la base du rapport qui fera l'objet d'un débat devant la commission des finances, a priori le 6 juillet prochain.

D'ici là, nous espérons disposer de simulations de la part des services de l'Etat sur les effets des mesures votées en loi de finances 2011 et sur les hypothèses que nous aurons transmises.

Compte tenu de l'importance de notre réunion et de l'obligation impérative de lever notre séance à 16 h 30 pour l'audition de MM. Michel Mercier, garde des Sceaux, ministre de la justice et des libertés, et François Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État, sur le projet de loi constitutionnelle relatif à l'équilibre des finances publiques, je vous propose d'entrer immédiatement dans le vif du sujet.

Si toutefois, nous ne pouvions épuiser notre ordre du jour, une prochaine réunion pourrait se tenir mardi prochain, soit le 31 mai, à 14 h 30. Nous déciderons de cette éventualité en fin de réunion.

Nous allons successivement entendre, dans un ordre qui est celui de la logique :

- Pierre Jarlier, sur la définition des potentiels ;

- Philippe Dallier et Charles Guené sur la péréquation au sein du bloc communal, le FPIC et le FSRIF ;

- et, enfin, Albéric de Montgolfier sur les deux fonds, régional et départemental, de péréquation de la CVAE.

M. Pierre Jarlier , rapporteur . - Monsieur le Président, chers collègues, la réforme de la taxe professionnelle a été une excellente occasion d'engager un débat sur les notions de potentiel fiscal et de potentiel financier. Ce débat est nécessaire puisque ces notions sont au coeur même de la définition de la richesse de chaque collectivité territoriale. C'est ainsi l'idée que le potentiel financier est plus représentatif de la richesse d'une collectivité que le seul potentiel fiscal qui nous a guidés pour modifier, en de nombreux points, les dispositions relatives à la péréquation lors de la discussion des lois de finances pour 2010 et pour 2011.

Grâce à notre groupe de travail, nous avons pu mener une réflexion approfondie, hors de l'urgence liée à la discussion des projets de loi de finances, sur les critères qui devront servir de base aux nouveaux dispositifs de péréquation. Au terme de nos nombreuses réunions, je vous présente donc aujourd'hui, sur ce sujet, les orientations que je propose à notre groupe d'adopter.

De manière générale, il se dégage de nos travaux que la péréquation doit se fonder sur deux grandes notions :

- d'une part, la notion de « potentiel financier de base », qui doit servir de fondement à la péréquation verticale. Ce potentiel financier de base a deux composantes : une composante fiscale (on retrouve ici la notion de potentiel fiscal, qui n'est plus utilisée en soi mais uniquement comme un des éléments du potentiel financier) et une composante de dotations et de compensations (notamment la DGF) ;

- d'autre part, la création d'un nouvel indicateur de richesse : la notion de « potentiel financier corrigé ». Il sera utilisé dans le cadre de la péréquation horizontale, comme seul critère ou en association au sein d'un indice synthétique, ainsi que le détaillerons nos collègues Charles Guené et Philippe Dallier. Cette notion de potentiel financier corrigé ajoute au potentiel financier de base les dotations versées par l'Etat dans le cadre de la péréquation verticale. Il est ainsi plus représentatif de la richesse réelle d'une collectivité. Seule cette prise en compte permet d'avoir un indice de richesse fiable et juste. Sinon, deux collectivités ayant un même niveau de richesse pourraient être traitées de manière inéquitable si l'une tient sa richesse de compensations versées par l'Etat tandis que celle de l'autre provient d'une dotation de péréquation. De même, les écarts constatés entre les dotations de péréquation versées à l'une ou l'autre des collectivités ne seraient pas du tout pris en compte, alors qu'ils ont parfois un impact majeur sur leur richesse.

C'est dans ce cadre là : un potentiel financier de base, d'une part, et un potentiel financier corrigé, d'autre part, que doivent être examinées les questions suivantes.

Traitons tout d'abord des questions communes à l'ensemble des trois catégories de collectivités territoriales et qui résultent de la réforme de la taxe professionnelle.

- comment traiter la DCRTP et FNGIR ? Si ces dotations représentent en quelque sorte des substituts à une ressource fiscale, elles n'ont plus du tout le caractère de ressources fiscales. Les collectivités n'en maîtrisent d'ailleurs pas du tout le montant, qui est figé. Par conséquent, Il semble logique de les intégrer, en valeur nette, dans le potentiel financier de base. Elles ont davantage leur place dans la composante compensation que dans la composante fiscale de ce potentiel ;

- quel traitement pour l'ex-part salaires de l'ex-TP ? Par cohérence avec le traitement réservé à la DCRTP et au FNGIR, il convient d'intégrer cette compensation dans le potentiel financier de base, mais pas dans sa composante fiscale. Cette compensation sera donc sortie de la notion de potentiel fiscal ;

- la CVAE et les IFER ? Même si le taux de ces impôts est national, on peut considérer que les collectivités ont un impact sur leur produit par l'aménagement de zones industrielles et commerciales ou en acceptant l'implantation d'éoliennes par exemple. Par conséquent, il convient de les intégrer au potentiel financier de base, dans sa composante fiscale.

Venons-en aux questions spécifiques à chacune des trois catégories de collectivités territoriales, en commençant par les trois questions relatives au bloc communal.

Il me semble que de nouvelles taxes doivent être intégrées au calcul de la composante fiscale du potentiel financier de base des communes et des EPCI. Il en est ainsi de : la taxe sur les surfaces commerciales (TaSCom) ; la taxe d'aménagement ; la taxe sur les casinos ; la taxe sur les remontées mécaniques ; la taxe sur les paris hippiques (Article 302 bis ZG du CGI). Plus le champ des taxes prises en compte sera large, plus la notion de potentiel financier sera objective et moins elle sera sujette à contestations. En revanche, par cohérence, il me semble qu'il faut exclure les taxes affectées du potentiel financier de base. En effet, ces taxes ont vocation à financer des dépenses spécifiques et ne constituent donc pas à proprement parler une richesse pour la collectivité territoriale. Il faut donc exclure notamment la TEOM et la taxe de séjour. Je me suis également interrogé sur la question du produit des amendes de police. Il me semble que cette recette correspond largement à l'activité des services de police de chaque collectivité et qu'à ce titre elle doit être traitée comme une recette affectée et ne pas être prise en compte dans le potentiel financier.

Deuxième étape : la construction du potentiel financier corrigé. Comme indiqué précédemment, il convient pour le déterminer d'ajouter au potentiel financier de base toutes les dotations de péréquation verticale, c'est-à-dire la DSU, la DSR ou la garantie de sortie. C'est le seul moyen de traiter équitablement l'ensemble des communes, en prenant en compte dans le calcul de leur richesse la plus ou moins grande part de dotation de péréquation qu'elles ont perçu. Il convient par ailleurs, également pour éviter des injustices entre deux communes, de prendre en compte dans le potentiel financier corrigé les versements perçus par chaque collectivité en provenance des FDPTP. C'est une demande formulée par Charles Guené qui me paraît de bon sens. En effet, les FDPTP sont financés, depuis la réforme de la TP, par des dotations de l'Etat et non par des prélèvements sur des établissements exceptionnels. Ils font donc partie de la péréquation verticale est il est juste de traiter différemment une commune qui n'a rien reçu du FDPTP et une commune qui a perçu de ce fonds des montants importants.

Enfin, comment déterminer le potentiel financier corrigé des EPCI, qui sera à la base du fonctionnement de la péréquation horizontale ? Pour mesurer la richesse d'un territoire, et englober les ressources de l'ensemble du bloc communal, le potentiel financier agrégé d'un EPCI doit être égal à la somme : du potentiel financier de base de l'EPCI. Ce potentiel de base intègre les dotations d'intercommunalité, puisque ces dotations correspondent bien à une richesse de l'EPCI ; des potentiels financiers corrigés des communes membres de l'EPCI.

Concernant maintenant les départements, deux questions spécifiques se sont posées.

La première est relative à la TSCA (taxe spéciale sur les conventions d'assurances), qui a été affectée aux départements en compensation des pertes de recettes résultant de la suppression de la TP. Il est logique de l'intégrer au potentiel financier de base, puisque cette recette correspond à une richesse des départements qui en bénéficient. Concernant la composante fiscale de ce potentiel financier, c'est-à-dire l'équivalent du potentiel fiscal, il me semble que cette notion n'a plus de réelle pertinence s'agissant des départements (et encore davantage s'agissant des régions) étant donnée la faiblesse des marges de manoeuvre qui leur restent suite à la réforme de la TP (en pratique, uniquement la taxe foncière sur les propriétés bâties).

Deuxièmement, la détermination du potentiel financier corrigé. Il suffit, pour passer du potentiel financier de base au potentiel financier corrigé, d'y intégrer les dotations de péréquation verticale : DPU, DFM ou garantie de sortie. Ce potentiel financier corrigé servira pour mettre en oeuvre la péréquation horizontale.

Enfin, les deux sujets relatifs aux seules régions :

1. La détermination du potentiel financier de base des régions. La CVAE, les IFER, la DCRTP et le FNGIR doivent intégrer le potentiel financier de base des régions. Il faudra par ailleurs, pour calculer ce potentiel, parvenir à exclure de la DGF les éléments qui y ont été intégrés mais qui visent à compenser des transferts de compétences pour certaines régions. Le Gouvernement devra mener ce travail à bien pour garantir que la notion de potentiel financier traite équitablement l'ensemble des régions.

Quel périmètre pour le potentiel financier corrigé ? Enfin, comme pour les départements, il convient d'ajouter la dotation de péréquation verticale des régions pour passer du potentiel financier de base au potentiel financier corrigé. Je rappelle que notre commission a demandé, dans un rapport de juillet 2009, la réforme de cette dotation, qui ne présente pas les garanties de justice satisfaisantes, notamment en raison des effets de seuil qu'elle induit.

Voilà, mes chers collègues, les orientations que je propose au groupe de travail d'adopter.

De manière générale, la notion de potentiel fiscal ne me semble plus pertinente pour les départements et les régions et, s'agissant du bloc communal, elle doit également laisser la place à une notion de potentiel financier de base, la plus large possible, et plus représentative de la richesse des collectivités. Le potentiel financier corrigé doit pour sa part servir à mettre en place la péréquation horizontale. Lui seul garantit une mesure juste et équitable de la richesse des collectivités. Il ne sera toutefois pas nécessairement retenu comme unique critère, les reversements prévus par les dispositifs actuels prennent d'ailleurs en compte largement les charges (et non seulement la richesse) des collectivités.

Enfin, je vous informe que, selon la DGCL, les premières estimations concernant les nouveaux potentiels devraient être disponibles la deuxième quinzaine du mois de juin.

Merci de votre attention.

M. Jean Arthuis , président . - Je vous remercie pour ce rapport qui tire les conclusions des différentes auditions et échanges en groupe de travail. L'appréciation de la richesse relative se fait par le potentiel financier qui intègre ce qui subsiste du potentiel fiscal mais avec un correctif qui permet de l'appliquer à la péréquation horizontale. Cette présentation reflète, à mon sens, l'idée de la recherche d'un indicateur de richesse qui permette une répartition équitable des fonds de péréquation.

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur . - Je partage les observations de Pierre Jarlier et je me demande comment concilier la volonté d'inclure les ressources que sont les amendes de police et les DMTO par exemple, ces derniers ne sont pas perçus directement par les communes.

M. Pierre Jarlier , rapporteur . - Je propose de ne pas intégrer les amendes de police. Pour ce qui concerne les DMTO, ils ne sont intégrés qu'au niveau des départements.

M. Éric Doligé . - En ce qui concerne les charges, comment sont-elles prises en compte, dans la mesure où elles ne sont pas toutes identiques dans les mêmes collectivités ? Le potentiel financier est comparable mais pas les dépenses d'une collectivité à une autre.

M. Philippe Dallier , rapporteur . - C'est un autre sujet.

M. Jean Arthuis , président . - Je rappelle qu'il s'agit actuellement de définir un nouvel indicateur de richesse.

M. François Marc . - Je me demande ce qu'on fait de la dotation de solidarité communautaire en ce qui concerne l'évaluation du potentiel des communes. Les simulations du Gouvernement se basent-elles sur ces définitions de potentiel ou sur l'effet de ces définitions ?

M. Jean Arthuis , président . - Il est plus facile d'arrêter des principes quand on n'a pas de simulation...

M. Pierre Jarlier , rapporteur . - Je précise que les simulations seront établies sur la base du potentiel financier tel que défini dans la loi de finances 2011. Cette base est beaucoup moins élargie que celle préconisée par le groupe de travail. Le Sénat avait recommandé de ne pas arrêter le potentiel financier en prévision des débats. Les dotations de solidarité communautaire ne sont pas intéressantes à intégrer car prises en compte d'un côté, elles sont retirées de l'autre. Elles sont neutres dans le calcul du potentiel financier agrégé.

M. François Marc . - C'est neutre pour l'Etat mais pas pour les communes.

M. Pierre Jarlier , rapporteur . - Je confirme que c'est neutre puisque agrégé.

Mme Marie-France Beaufils . - Je ne partage pas l'avis sur le potentiel financier agrégé puisque la péréquation se fait automatiquement vers l'intercommunalité. La différence d'une intercommunalité à une autre est trop grande pour une notion de solidarité à l'intérieur.

M. Jean Arthuis , président . - Une péréquation entre 37 000 communes serait impossible.

Mme Marie-France Beaufils . - Sur le fond, les différences territoriales ne seront pas résolues si sur le territoire elles ne sont pas prises en compte en tant que telles.

M. Jean Arthuis , président . - En faisant masse de toutes les ressources au plan de l'EPCI, on arrive à des données qui sont de bons indicateurs de la richesse relative.

M. François Fortassin . - Je me pose la question sur l'association de deux notions aussi antinomiques que celles d'autonomie fiscale et de péréquation.

M. Jean Arthuis , président . - C'est constitutionnel.

M. François Fortassin . - Je prendrai l'exemple de deux communautés de communes ayant les mêmes potentialités, mais dont l'une a fait de gros efforts de fiscalité et l'autre non. La plus pauvre, disposant moins de ressources, bénéficiera-t-elle d'une péréquation plus importante que celle qui a consenti des efforts ?

M. Jean Arthuis , président . - Nous aborderons le sujet et je souhaiterai demander à notre collègue Pierre Jarlier s'il prend en compte d'autres ressources comme celles votées dans la loi relative à l'ouverture à la concurrence et à la régulation du secteur des jeux d'argent et de hasard en ligne. Un certain nombre de communes sur lesquelles sont situés des champs de courses ou des casinos perçoivent des sommes non négligeables.

M. Pierre Jarlier , rapporteur . - Oui puisque nous avons proposé d'intégrer les taxes sur les paris hippiques et les taxes sur les casinos.

La question qui n'a pas été traitée dans le rapport et qui me semble importante concerne le potentiel financier élargi. Si on veut avoir des indicateurs de comparaison de différence de richesse entre les collectivités, ne faut-il pas intégrer les produits de la péréquation horizontale de l'année N-1 ? Si on prend en considération la péréquation verticale, il en va de même pour la péréquation horizontale, sinon on risque d'aider des collectivités qui reçoivent déjà énormément des produits de la péréquation horizontale et qui ne méritent peut-être pas d'en bénéficier.

M. Jean Arthuis , président . - Effectivement, il faudrait prendre en compte l'ensemble des ressources.

M. Pierre Jarlier , rapporteur . - Je pense que ça vaudrait la peine de regarder même si techniquement on ne sait pas comment faire.

M. Jean Arthuis , président . - Je note que la communication de Pierre Jarlier a permis de constater un consensus à l'exception du bémol de Marie-France Beaufils, peu convaincue par la répartition au sein des intercommunalités.

Je donne maintenant la parole à Charles Guené et à Philippe Dallier pour l'articulation du FSRIF et du FPIC et la péréquation au sein du bloc communal.

M. Charles Guené , rapporteur . - Monsieur le président, chers collègues, au terme de notre série de réunions sur la péréquation au sein du bloc communal et sur l'articulation du Fonds de solidarité des communes d'Ile-de-France (FSRIF) et du nouveau fonds de péréquation intercommunal et communal (FPIC), nous allons vous présenter les orientations que nous vous proposons de retenir et sur lesquelles nous avons trouvé des points d'accord, après des discussions nourries.

Ces orientations concilient à nos yeux les intérêts nationaux pour une solidarité partagée entre toutes les collectivités du bloc communal, sans exception, et les intérêts propres à l'Ile-de-France, qui peut souhaiter légitimement restreindre prioritairement les déséquilibres internes à la région.

Nous espérons en conséquence que les débats à venir dépassent les clivages qui avaient été évoqués - de manière quelque peu provocatrice - par un texte de l'AMIF qui avait parlé d'un climat de défiance réciproque.

Nous tenons à souligner que toutes nos propositions ont été formulées sans que nous disposions de simulations. Nous nous sommes donc appuyés exclusivement sur des principes et des raisonnements. Cela signifie que nos orientations doivent être appréciées « sous toutes réserves » et, au nom du groupe de travail, nous souhaitons faire simuler ces hypothèses par les services de la DGCL. Nous avons d'ores et déjà averti le directeur général que nous lui adresserions des demandes pour un nombre limité de simulations. Nous les sélectionnerons afin qu'elles soient les plus pertinentes mais aussi les plus éloignées des schémas classiques, dont nous sommes sûrs qu'ils feront l'objet d'évaluations à la demande du Gouvernement ou du CFL. Notre travail prend tout son intérêt, en effet, si nous avons des propositions « originales » à formuler.

Nous avons listé dix-huit orientations, d'importance variable, que nous avons regroupées en trois blocs.

M. Philippe Dallier , rapporteur . - Le premier bloc concerne l'articulation générale du FSRIF et du FPIC et la définition des objectifs aux échéances 2012 et 2015. Il comprend quatre propositions.

Sur la question de l'articulation entre le FPIC et le FSRIF : Nous avons tranché pour une superposition des deux fonds de péréquation, qui doivent fonctionner de manière indépendante, l'Ile-de-France étant contributrice et bénéficiaire des deux fonds, le « reste de la France » étant contributeur et bénéficiaire du seul FPIC. Cela signifie que nous écartons un système de type préciput prélevé pour l'Ile-de-France sur le produit d'un fonds unique.

Sur la question de la définition de l'outil de mesure de l'objectif à atteindre. Nous préférons un chiffrage en valeur absolue au chiffrage actuel défini par la loi en pourcentage des recettes fiscales du bloc communal. Ce sera plus parlant et moins sujet à interprétation, en l'absence d'accord sur la notion de recettes fiscales

Sur la définition de l'objectif à atteindre. Nous penchons pour une augmentation linéaire de l'objectif du FPIC, soit : 2012 : 250 millions d'euros, 2013 : 500 millions d'euros, 2014 : 750 millions d'euros, 2015 : 1 milliard d'euros.

En tout état de cause, nous sommes défavorables à un report à 2013 de la mise en oeuvre du FPIC. Nous sommes également défavorable à une courbe qui commencerait plus bas et progresserait plus rapidement, car elle donnerait des arguments aux opposants à la péréquation. Pour ce qui est du FSRIF nous aurions souhaité soumettre deux hypothèses à la DGCL afin d'en voir les conséquences :

- une première hypothèse d'augmentation linéaire de l'objectif du FSRIF, soit : 2012 : 200 millions d'euros ; 2013 : 233 millions d'euros ; 2014 : 266 millions d'euros ; 2015 : 300 millions d'euros. Ce qui correspond à l'augmentation prévue par la loi de finances pour 2011 ;

- une seconde hypothèse selon laquelle le montant du FSRIF devrait permettre à chaque commune d'Ile-de-France d'atteindre 70 % de l'indice synthétique moyen de ressources et de charges servant de critères aux reversements du FSRIF. Nous saurions ainsi quel est le montant nécessaire. Toutefois la DGCL nous a souligné la difficulté technique à répondre à cette seconde hypothèse. De manière générale nous serions favorables à ce que la loi prévoie une clause expresse de « revoyure » en 2015 au vu des résultats du dispositif sur la réduction effective des écarts de richesse (calculés en référence à l'indice synthétique servant aux reversements c'est-à-dire intégrant les ressources et les charges). Qui sait, il y aura peut être un accord à cette date pour renforcer encore la péréquation ?

S'agissant de l'articulation des deux objectifs chiffrés. Il va donc de soi que les montants péréqués par le FSRIF (par exemple les 200 millions d'euros en 2012 dans la première hypothèse) s'ajoutent chaque année à ceux du FPIC (par exemple aux 250 millions d'euros en 2012). Le montant total de la péréquation horizontale au sein du bloc communal atteindrait donc la première année 450 millions d'euros.

Enfin, nous souhaitons, que pour chacun des deux fonds, il y ait un démarrage de la mise en oeuvre dès l'année prochaine, en 2012. On entend certains dire qu'il faudrait reporter d'une année. N'avoir qu'un FSRIF rénové l'année prochaine, sans fonds de péréquation national serait une mauvaise hypothèse.

M. Charles Guené , rapporteur . - Passons maintenant au sujet important des prélèvements. Nous avons dégagé six orientations :

- il faut d'abord répondre à la question : quelles sont les collectivités concernées et le ou les critères de prélèvement. Il est fondamental pour y répondre de faire appel au concept (que Pierre Jarlier a défini) de potentiel financier agrégé. Ce concept qui établit la mesure de la richesse réelle d'un territoire permet de comparer entre elles des structures différentes (EPCI et communes isolées) et de ne faire appel qu'à un seul potentiel financier moyen qui leur est commun. Dans notre idée, les prélèvements ne doivent porter directement que sur les EPCI et sur les communes isolées. Les communes membres d'EPCI ne feraient pas nécessairement l'objet de prélèvements directs au profit du fonds. Le prélèvement serait fonction du potentiel financier de chaque commune isolée ou EPCI par rapport au potentiel financier moyen. Le potentiel financier moyen serait égal à la moyenne des potentiels financiers des communes isolées et de ceux des EPCI, pris en compte au sein d'une unique catégorie. Pour les EPCI, le potentiel financier est le potentiel financier agrégé c'est-à-dire le potentiel financier de l'EPCI ajouté à celui de ses communes membres. Pour la commune isolée, il est le potentiel financier de celle-ci. On peut ainsi comparer un EPCI de 20 000 habitants en Province à une commune isolée de 20 000 habitants en petite couronne parisienne. Le potentiel financier est bien sûr un potentiel élargi mais c'est une question qui a été traitée dans le cadre du thème rapporté par Pierre Jarlier. S'agissant du prélèvement, il nous semble qu'il ne doit pas y avoir de prise en compte, à ce stade, de critères de charge. Nous attirons votre attention sur la nouveauté de ces propositions par rapport au texte de la loi de finances 2011 qui mettait en place un système très complexe et complètement impossible à faire fonctionner, de trois parts distinctes (EPCI, communes membres et communes isolées) en fonction de la répartition des recettes fiscales nationales du bloc communal entre ces trois catégories ;

- abordons ensuite la question de la prise en compte des strates. Il nous semble logique et raisonnable que le potentiel financier moyen servant de référence au prélèvement soit stratifié. Nous partons sur le principe d'un nombre réduit de strates (les strates s'appliquant indifféremment aux EPCI ou aux communes isolées). Ces strates sur lesquelles nous souhaitons que la DGCL effectue des simulations sont les suivantes : de 0 à 20 000 habitants ; de 20 000 à 100 000 habitants ; de 100 000 à 200 000 habitants ; au-delà de 200 000 habitants ;

Toutefois, la DGCL devrait fournir aussi des simulations sur un potentiel non stratifié. Il n'est pas sûr que cela donne des résultats très différents et la focalisation sur la question des strates est peut-être excessive. Le prélèvement FSRIF n'est pas stratifié actuellement. Nous pensons que cette caractéristique doit être maintenue puisqu'on est dans un cadre régional. Il faut signaler aussi que logiquement, le potentiel financier moyen utilisé pour le FSRIF est le potentiel de l'Ile-de-France.

- sur le seuil de prélèvement : Nous sommes favorables à la suppression du seuil d'éligibilité actuel prévu par la loi de finances 2011 soit 1,5 fois le potentiel financier moyen. Il est préférable en effet d'éviter les inconvénients des seuils et un prélèvement diffus est meilleur qu'un prélèvement trop concentré. Pour le nouveau FSRIF, nous sommes favorables à la suppression de tout seuil d'éligibilité ainsi que des régimes d'exonération existants (ex DSU) dont nous avions montré les effets incohérents ;

- les taux de prélèvement. Pour définir les taux, nous proposons de concevoir un système de taxe par répartition. Il s'agit de déduire les taux à partir du produit attendu. Ce système permet de garantir le niveau du produit prélevé. Pour assurer une progressivité du taux en fonction de l'écart au potentiel financier moyen de la strate, il serait nécessaire de définir cinq ou six paliers. A cet effet, nous souhaitons que la DGCL effectue trois simulations sur trois types de structures de prélèvement :


• dans la première hypothèse, on prévoit que le prélèvement s'applique à l'ensemble des communes et EPCI. Il touche donc des communes en dessous de la moyenne mais 1) la moyenne est élevée et 2) il faut raisonner évidemment en net, après imputation des reversements. C'est « l'hypothèse Philippe Laurent » : tout le monde participe et bénéficie ;


•  dans la deuxième hypothèse, on ne prélève qu'aux communes et EPCI dont le potentiel est supérieur à 80 % de la moyenne. Le risque de ce choix est que le prélèvement soit excessivement concentré sur certaines communes ;


• dans la troisième hypothèse, on ne prélève qu'aux communes et EPCI dont le potentiel est supérieur à la moyenne. Cette hypothèse présente les mêmes inconvénients renforcés que la deuxième.

Pour le nouveau FSRIF il y aurait lieu d'appliquer un mécanisme similaire avec un ajustement des taux de prélèvement au montant à prélever en faveur du FSRIF.

- Nous nous sommes posé la question du plafonnement du prélèvement. A priori nous ne souhaitons pas en prévoir avant de connaître les résultats des simulations. Mais il est vrai que tous les mécanismes de prélèvement actuels (FSRIF, écrêtement du complément de garantie) en prévoient un. Dans tous les cas, la DGCL souhaite éviter le plafonnement rapporté aux dépenses de fonctionnement, qui est très lourd à calculer ;

- dernier point de ce volet : la répartition du prélèvement au sein des EPCI. Nous pensons que la répartition du prélèvement entre l'EPCI et chacune de ses communes membres doit s'effectuer au prorata de la contribution de chacun au potentiel financier agrégé. Cette règle est la plus incontestable. Certes, une ville riche dans un EPCI pauvre contribuera moins que si elle était une commune isolée, et une ville pauvre dans un EPCI riche contribuera davantage que si elle était isolée. Mais il faut partir du « postulat » que l'EPCI joue déjà un rôle de péréquation, leur laisser leur part de responsabilité dans la mise en oeuvre de la péréquation.

M. Philippe Dallier , rapporteur . - Passons maintenant au sujet des reversements. Nous avons dégagé huit orientations :

- il convenait d'abord de définir les bénéficiaires des reversements. Comme pour les prélèvements, les reversements ne bénéficient directement qu'aux EPCI et aux communes isolées (qui ont vocation à disparaître, sauf en petite couronne parisienne).

Les communes membres d'EPCI ne recevront pas directement de reversements du FPIC.

Pour le nouveau FSRIF, nous proposons de conserver les deux règles actuelles : le FSRIF est communal. Les EPCI ne bénéficient donc pas de reversements. En outre, les communes de moins de 5.000 habitants sont exclues du reversement.

- pour les principes de reversement. Nous préconisons d'utiliser un indice synthétique de ressources et de charges et de prévoir des reversements pour l'ensemble des collectivités en deçà de la moyenne, afin d'éviter les effets de seuil, proportionnellement à l'écart à la moyenne ;

- en ce qui concerne la composition de l'indice synthétique. Nous avons retenu, d'une part, le potentiel financier par habitant de l'EPCI (ou de la commune isolée) et, d'autre part, le revenu moyen par habitant de la population de l'EPCI (ou de la commune isolée). Pour l'EPCI, le potentiel financier est le potentiel financier agrégé. Nous serions assez favorables à la prise en compte de l'effort fiscal (à travers une pondération de l'indice synthétique comme pour la DSR). L'effort fiscal est déjà pris en compte dans la notion de potentiel financier (qui inclut le potentiel fiscal). Toutefois, la notion de taux moyen ne fait que neutraliser les écarts de taux, ce qui est sans doute une prise en compte insuffisante de l'effort fiscal.

Nous souhaitons faire effectuer des simulations sur trois hypothèses :


• une prise en compte des deux critères (potentiel et revenu) à 50 % / 50 % sans pondération par l'effort fiscal ;


• une prise en compte des deux critères (potentiel et revenu) à 50 % / 50 % avec pondération par l'effort fiscal ;


• une prise en compte du potentiel à 70 % et du revenu à 30 %.

Pour le nouveau FSRIF, nous sommes favorables à prendre le même indice synthétique (avec éventuellement une modulation différente).

Par conséquent, par rapport à l'indice synthétique actuel du FSRIF, nous sommes pour la suppression des critères liés au logement social, qui ont des effets pervers évidents (les logements sociaux ne sont pas toujours occupés par les plus pauvres). Nous ne croyons pas que les communes les plus pauvres en pâtiront, compte tenu du critère du revenu par habitant.


• La pondération du revenu moyen par habitant. C'est une suggestion que nous avions présentée pour tenir compte des écarts de « coût de la vie » entre les territoires, notamment en ce qui concerne le logement, qui représente la dépense principale qui pèse sur le revenu des ménages.

Il nous semble intéressant de tester une pondération partielle du revenu par habitant en faisant effectuer deux simulations :


• l'une qui pondèrerait 40 % du revenu moyen de la commune ou de l'EPCI par un indice représentatif du coût du logement dans la zone considérée dont relève la commune ou l'EPCI (utiliser l'écart existant dans le zonage Robien/Scellier A, B, C) ;


• l'autre, sans pondération.

- En ce qui concerne la stratification du potentiel financier. Logiquement, nous proposons de prévoir la même prise en compte des strates dans le potentiel financier servant à la redistribution que dans celui servant aux prélèvements. En ce qui concerne l'Ile-de-France, il faut rappeler que le FSRIF actuel est stratifié par la distinction de deux régimes : un pour les communes de plus de 10 000 habitants, un pour les communes de 5 000 à 9 999 habitants. Il nous semble que ce système pourrait être maintenu dans le nouveau FSRIF, mais il ne s'agit pas là d'un point essentiel ;

- nous nous sommes posé la question de la nécessité d'un mécanisme de garantie de sortie. Bien entendu, cette question ne se pose que pour le FSRIF puisque le FPIC est quant à lui totalement nouveau. Compte tenu des évolutions que nous envisageons, il nous semble important de prévoir des modalités de sortie de l'ancien système FSRIF sur une durée par exemple de 2 ans :


• la redistribution au sein des EPCI des reversements du FPIC est une question très importante. La loi doit prévoir des règles de répartition qui s'appliqueront à défaut :


• la répartition entre l'EPCI et leurs communes membres proportionnellement au coefficient d'intégration fiscale ;


• la répartition entre les communes membres de manière inversement proportionnelle au potentiel financier par habitant de chaque commune multiplié par son nombre d'habitants.

Toutefois, il nous semble possible de prévoir que les EPCI seront libres de déterminer, par une décision prise à l'unanimité, d'autres modalités de répartition voire qu'ils pourront, à la majorité qualifiée habituelle -2/3 des communes représentant la moitié de la population ou l'inverse- choisir entre deux options de répartition ouvertes par le législateur.

- il convenait enfin de définir le calendrier des deux prélèvements. A cet égard, nous proposons que le prélèvement et les reversements du FSRIF soient effectués en premier. Ceci permettrait que pour le FPIC, les prélèvements du FSRIF soient déduits du potentiel financier et les reversements FSRIF intégrés au potentiel financier.

Dans un premier temps, le FSRIF intervient pour réduire les écarts au sein de la région Ile-de-France, puis le fonds national s'applique de manière uniforme comme dans l'ensemble des autres régions.

M. Charles Guené , rapporteur . - En conclusion, il nous paraît important de mettre l'accent sur le fait que la loi de finances 2012 est une occasion qu'il ne faut pas manquer de mettre en place un système de péréquation très novateur.

Certes compte tenu des délais, de la complexité et du caractère innovant, ce mécanisme ne peut pas viser du premier coup la perfection. Mais qu'il sera possible, comme pour le fonds DMTO ou les fonds CVAE de l'ajuster progressivement.

Restent, enfin deux questions qui ont toute leur importance mais sur lesquelles nous avons un peu « botté en touche ».

La question des FDPTP : Sur ce sujet, nous pensons qu'il faut laisser les conseils généraux libres de mettre en place des modalités de répartition des FDPTP plus péréquatrices que celles prévues actuellement.

Mais il serait bon de prévoir un rapport du Gouvernement, à l'horizon 2015, sur l'effet péréquateur des FDPTP. Par ailleurs, mais ce point a été évoqué par Pierre Jarlier auquel nous l'avons transmis, nous souhaitons que les versements FDPTP soient pris en compte dans le potentiel financier élargi des collectivités qui en ont bénéficié.

Sur l'outre-mer : Nous n'avons pas de suggestion à proposer et nous laissons au Gouvernement le soin de traiter cette question, compte tenu de sa complexité et du fait que nous ne disposons pas des données qui permettraient de faire des propositions construites.

M. Jean Arthuis , président . - Charles Guené a répondu à la question que posait Pierre Jarlier sur les fonds départementaux de péréquation de la taxe professionnelle.

M. Charles Guené , rapporteur . - J'observe que certains départements ne font pas de péréquation.

M. François Marc . - J'apprécie la qualité d'investigation et de travail menés par les deux rapporteurs, d'autant plus que le Gouvernement a laissé de nombreuses pages blanches. Il y a beaucoup d'idées de bon sens et nécessaires à formuler. Je me pose des questions sur les éléments de simulation qui sont laissés en suspens. En ce qui concerne le seuil de prélèvement à supprimer, quel dispositif mettre en oeuvre pour aboutir à quelque chose de satisfaisant ? Pour la pondération par le pouvoir d'achat, qu'est-ce que ça peut donner ? Au niveau de la pondération par l'effort fiscal des communes, quel est son impact ? Les strates constituent un sujet à problème même si je n'ai pas d'opinion tranchée. Un certain nombre de précisions reste à obtenir pour une meilleure visibilité. Et la question fondamentale sur la raison de ce dispositif : au niveau de la péréquation horizontale pourquoi prendre la valeur absolue de 1 milliard d'euros, et ne pas adopter une approche en pourcentage pour avoir un sentier qui se rapproche de plus en plus de la moyenne ?

M. Philippe Dallier , rapporteur . - Je suis assez d'accord avec François Marc. Je vois bien la difficulté de l'exercice qui se profile. Avec la clause de revoyure pour la réforme raisonner en montant est plus rassurant et plus facile à défendre. C'est une approche prudente et les efforts pour une régularisation pourront être accentués d'ici à 2015.

Mme Marie-France Beaufils . - Je souhaite revenir sur les conditions du reversement. Je partage le point de vue de François Marc sur les sommes concernées par la répartition. Je suis également d'accord sur le reversement, la prise en compte du revenu, l'abandon du nombre des logements sociaux et pour réfléchir sur une pondération. Je voudrais des précisions sur les revenus. Est-ce le revenu fiscal ou le reste à vivre ? Pour ce dernier, l'analyse est différente.

M. Charles Guené , rapporteur . - Je répondrai d'abord à François Marc sur les prélèvements. Pour ce qui concerne les strates c'est politiquement plus astucieux et on intègre déjà une idée de charges. Sur la problématique du seuil d'éligibilité, celui de 1,5 est exclu et à la place sont proposés trois autres seuils :

- à compter du premier euro où tout le monde est prélevé ;

- à partir de 80 % du potentiel financier moyen ;

- à partir de la moyenne.

Les simulations fourniront des éléments. L'effet de seuil est gommé. Cependant, il faudra faire très attention au système de redistribution et avoir des critères habilement trouvés. Ce système bien balisé avec trois hypothèses a été soumis à la DGCL pour les simulations.

M. Philippe Dallier , rapporteur . - Je confirme à Marie-France Beaufils que l'approche se fait au niveau de la notion de reste à vivre pour la famille, le logement étant la dépense principale. Le revenu fiscal de référence constitue le point de départ et est pondéré avec le coût du logement en utilisant le zonage Robien/Scellier. Je considère que compter le nombre de logements sociaux n'est pas une bonne approche, le revenu moyen par habitant devrait suffire. Les communes les plus pauvres n'ont pas à craindre ce système.

Mme Marie-France Beaufils . - Je constate qu'on a du mal à se faire une idée précise sur les strates. Comment éclaircir la situation ?

M. Charles Guené , rapporteur . - Je suis intellectuellement contre le principe des strates mais il ne faut pas oublier qu'on raisonne sur des moyennes. Les strates c'est un peu ennuyeux si on ne prend pas d'éléments graduels de prélèvements à cause des problèmes de seuil. Si ces derniers partent de 0 par exemple, cela gommera l'effet de seuil et les écarts ne seront pas immenses. Une culture des milieux urbains veut que les villes se garantissent par un système de strates et elles craignent en conséquence sa disparition.

M. Pierre Jarlier , rapporteur . - J'observe que l'examen du potentiel financier par habitant sur les différentes strates révèle un gros écart entre 0 et 20 000, ensuite cet écart devient moins important. La faisabilité de la prise en compte d'une strate assez faible va dépendre du système adopté entre l'écart à la moyenne et le premier euro. Dans certains cas, remonter la première strate à 50 000 ou plus présenterait l'intérêt d'éviter un effet pervers dans le système.

M. Philippe Dallier , rapporteur . - Je crains qu'il n'y ait pas de système parfait et que la définition des strates soit difficile. Par conséquent, il faudrait disposer d'un maximum de simulations. Malheureusement la DGCL peine à les fournir, certainement par manque de moyens informatiques.

Mme Nicole Bricq . - Je me demande si les rapporteurs veulent que cela soit inscrit dans le projet de loi de finances pour 2012 en dépit de l'absence de simulations d'ici septembre.

M. Charles Guené , rapporteur . - Nous sommes censés les avoir avant la réunion du 6 juillet. Quant à l'interrogation de Pierre Jarlier sur les strates, je précise qu'il est possible de diminuer leur effet en prenant l'hypothèse « Philippe Laurent ». La simulation montre que les petites communes ne sont pas pénalisées, ce qui n'est pas le cas des deux autres hypothèses, d'où l'utilité d'obtenir les simulations demandées.

M. Jean Arthuis , président . - Je relève que c'est la péréquation verticale qui va jouer et comme il n'y a pas d'enveloppe supplémentaire, il faudra convaincre ceux qui sont surdotés de contribuer à la péréquation. L'excellent rapport de Philippe Dallier et Charles Guené va dans la bonne direction et suscite un consensus assez large au sein de notre commission.

Mme Nicole Bricq . - Le mot consensus est un peu fort. Je préfère reconnaître que les rapporteurs ont bien travaillé « à l'aveugle » mais qu'il reste à voir ce que cela donne.

M. Jean Arthuis , président . - Je prends bien note de votre commentaire sur la qualité du travail des rapporteurs.

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur . - Monsieur le président, mes chers collègues, la question des fonds départemental et régional de la CVAE pose moins de problèmes que les deux autres puisque nous avons déjà pu en définir les principales modalités le 26 avril dernier et qu'elles n'ont, depuis, pas été remises en cause.

Ainsi, nous défendrons la position qui a été celle du Sénat lors du débat sur le projet de loi de finances pour 2011.

Il faut privilégier un dispositif qui met à contribution l'ensemble des départements et des régions dont la CVAE augmente et non seulement ceux dont la CVAE augmente plus rapidement que la moyenne.

Pour répondre à l'objection soulevée par l'Assemblée nationale, il faut garantir à chaque collectivité prélevée que l'augmentation de la CVAE entre l'année « n » et 2011 sera prise en compte nette de l'inflation cumulée. Ainsi, on est sûr de ne pas prélever de richesse à une collectivité dont la CVAE aurait augmenté moins vite que l'inflation.

Comme nous l'avons voté dans la dernière loi de finances, le prélèvement serait égal à 50 % de la croissance de la CVAE - nette d'inflation - entre l'année « n » et 2011.

Nous pouvons conserver le principe de ne prélever qu'aux collectivités dont le potentiel financier par habitant est supérieur à la moyenne. En effet, grâce au mécanisme de l'effet « cliquet », le prélèvement ne peut avoir pour effet de faire repasser le potentiel financier par habitant d'une collectivité en dessous de la moyenne nationale.

S'agissant des reversements, il faut supprimer tout critère d'éligibilité et prévoir des reversements au profit de l'ensemble des collectivités dont l'indice synthétique de ressources et de charges est inférieur à la moyenne, proportionnellement à cet écart.

Enfin, se posait la question du choix des critères de redistribution pris en compte dans le calcul de l'indice synthétique de ressources et de charges.

Il me semble que pour les ressources, le potentiel financier corrigé par habitant, tel que défini par Pierre Jarlier, peut faire consensus.

S'agissant des critères de charges, je propose pour que le Gouvernement réalise nos simulations de conserver les critères votés en loi de finances pour 2011, et qui n'ont pas été modifiés tout au long de la discussion du projet de loi de finances.

Voilà, mes chers collègues, les propositions qui me semblent pouvoir être celles de notre groupe de travail s'agissant des simulations que nous demanderons au Gouvernement sur la péréquation départementale et régionale de la CVAE.

M. Jean Arthuis , président . - Je vous remercie et j'invite les membres du groupe de travail à poser leurs questions.

M. Charles Guené , rapporteur . - Je m'interroge sur la correction de certains critères de redistribution, notamment celui de la longueur de la voirie. La simulation demandée porte-t-elle bien sur la longueur de voirie par habitant ?

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur . - C'est le cas.

M. François Fortassin . - Si on ne prend pas la voirie par habitant, on pénalise les zones rurales.

Mme Marie-France Beaufils . - Je déplore que l'analyse ne paraisse pas sérieuse étant donné que la voirie départementale est la plus utilisée et ce par une grande diversité d'usagers.

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur . - J'insiste sur le fait qu'il faut bien prendre des critères de répartition des charges importantes.

M. Pierre Jarlier , rapporteur . - Je répète que si on ne pondère pas au nombre d'habitants, ce critère n'a pas de sens.

M. Jean Arthuis , président . - Je reconnais que le potentiel financier par habitant a un sens mais il me paraît imparfait de prendre la longueur de voirie par habitant.

M. François Fortassin . - Je me demande comment mesurer les charges. En fonction des dépenses ou des kilomètres ?

M. Charles Guené , rapporteur . - Je rappelle que tous les autres critères tiennent compte de données objectives. Les dépenses de voirie viennent pondérer l'ensemble pour tenir compte de la ruralité et des charges qu'elle peut avoir. Si on n'intègre pas la voirie par habitant il serait inutile de mettre ce critère qui figure dans le dernier rapport de M. Jalon. Elle est la seule notion tenant compte de l'espace.

M. Jean Arthuis , président . - Je m'interroge sur la pertinence de ce critère.

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur . - Pour les minima sociaux c'est pareil, on peut prendre soit des critères démographiques objectifs (le pourcentage de population de jeunes, de personnes de plus de 75 ans...) ou le nombre de bénéficiaires des minima sociaux avec toutes les variations possibles. Il faut savoir quels critères retenir.

M. Jean Arthuis , président . - Pour conclure, je note que faire de la péréquation verticale efficace implique la prise en compte de potentiel financier corrigé par habitant et de critères de charges s'appréciant par le revenu de référence moyen. Pensez-vous qu'on doive prolonger cette réunion le mardi 31 mai ?

Mme Marie-France Beaufils . - Lorsque nous aurons reçu les éléments des présentations faites, nous pourrons nous décider pour une réunion ultérieure.

M. Pierre Jarlier , rapporteur . - Je reviens sur ce que disait Charles Guené tout à l'heure. Ce critère c'est le seul critère territorial qui existe. Il y a des départements qui ont des longueurs de voirie extrêmement importantes avec des charges fixes liées à ça, qui pour autant ont peu d'habitants. Il faut à un moment introduire cette notion pour corriger cette difficulté. Il me semble important de le conserver. Sinon il faudrait le supprimer totalement car il n'aurait aucun sens.

M. Jean Arthuis , président . - Même divisé par le nombre d'habitants, cela n'a pas un sens extraordinaire.

M. Charles Guené , rapporteur . - Comme il y a la même longueur dans chaque département et étant donné que la voirie, et l'espace en général, est une compétence de département de manière assez forte, au niveau de l'imposition la contribution de l'habitant d'un département donné est plus importante pour l'entretien. Même s'ils sont moins nombreux, ils ne sont pas les seuls usagers

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur . - La simulation a été demandée par la longueur de voirie par habitant qui n'est pas le critère idéal mais c'est le seul critère territorial parfois proche de la densité.

M. Jean Arthuis , président . - Je propose d'en reparler ultérieurement.

M. François Marc . - S'agissant des départements et des régions, il y a un désaccord profond avec ce qui a été soumis par le Gouvernement puisqu'il y a eu un arbitrage qui a été fait dans un sens où on prend les flux et pas les stocks. Il a été démontré d'une façon significative que c'était anti péréquateur et que la réforme de la taxe professionnelle à travers les mécanismes de correction mis en place a un effet contre péréquateur. En rester au flux et ne pas s'attaquer au stock ne va pas dans le sens d'une correction satisfaisante des inégalités existantes. On ne peut pas être d'accord sur le fond de cette affaire puisque vous nous dites suivre un peu l'esprit de ce qui a été suggéré jusque là.

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur . - Il y a une différence entre les départements et les régions par rapport au bloc communal. On péréque la CVAE et la croissance de la CVAE qui est un impôt dont on n'a pas idée du produit réel et on est sur quelque chose de très virtuelle en l'absence de recettes mieux connues. Avant d'envisager une péréquation sur le stock, je partage ce point de vue, par prudence il vaut mieux commencer sur la croissance de la CVAE même si les taux de croissance risquent d'être très différents selon la nature de l'activité et la répartition des activités sur le plan national.

M. Jean Arthuis , président . - Si on voulait être efficace, simple et lisible, et tendre vers une vraie péréquation, on ne la ferait pas sur la CVAE. On renoncerait aux péréquations intermédiaires et c'est au niveau de la DGF que l'on ferait la régulation. Ce serait plus simple.

M. Pierre Jarlier , rapporteur . - On revient au projet de loi de finances initiale monsieur le président.

M. Jean Arthuis , président . - On est en train d'essayer d'imaginer un tas de péréquations, et une fois qu'on aura fait tout ça on se demandera où on en est. On pérèque dans tous les sens et comme on ne touche pas au stock...Et, en effet, François Marc a raison de le souligner, on touche au stock quand on prend le potentiel financier corrigé et qu'on modifie en conséquence les dotations versées par l'Etat en péréquation verticale.

M. François Marc . - Nous devrions faire un système à l'allemande.

M. Jean Arthuis , président . - Mes chers collègues je suis obligé de suspendre. Si vous y tenez je suis prêt à organiser une réunion complémentaire dans une semaine.

Puisque vous n'en manifestez pas le désir, je propose de me faire connaître vos observations et de nous réunir le 6 juillet. Je vous remercie d'être venus aussi nombreux et je remercie les rapporteurs qui ont été excellents ainsi que nos administrateurs qui ont été formidables. Je donne mon bon à diffuser pour le communiqué de presse.

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