C. LES EFFETS DU CHANGEMENT CLIMATIQUE
A l'horizon 2030, quels pourraient être les impacts du changement climatique sur la pollution de la Méditerranée ?
En l'état, il est probablement difficile de répondre directement à cette question ; principalement, parce que les effets du changement climatique sur les niveaux de pollution ont été assez peu étudiés.
Mais avant d'envisager d'apporter des éléments de réponses à la question posée, il semble utile à votre rapporteur de rappeler que le changement climatique en Méditerranée est déjà un fait acquis.
1. Un fait acquis
Au 20 ème siècle, le climat du Sud-Ouest de l'Europe a enregistré un accroissement des températures moyennes annuelles de 2° C avec une accélération plus perceptible dans les trente dernières années du siècle.
Cette hausse des températures sur longue période est également observable sur la rive Sud, mais quantifiable avec moins d'exactitude compte tenu du manque de données disponibles sur longue période.
Par ailleurs, le niveau des précipitations a diminué de 20 % dans certaines régions du sud du bassin.
Ce qui est vrai de l'atmosphère l'est aussi de la mer , où, sur une période plus récente, la CIESM a enregistré des hausses de température et de salinité aux deux extrémités du bassin :
- des observations effectuées entre 1988 et 2005 en mer Tyrrhénienne font état de ces changements, qui sont assez marqués jusqu'à 2 000 m de profondeur :
- plus récemment, un programme d'observation en temps réel par 270 m de fond dans le détroit de Gibraltar, a montré que les eaux sortantes vers l'Atlantique étaient affectées par les mêmes phénomènes d'augmentation de température et de salinité.
2. Des modélisations globales convergentes à l'horizon 2030
Un premier point doit être souligné.
Si les modèles du groupe intergouvernemental d'experts sur le climat (GIEC) projettent les évolutions du climat vers la fin de ce siècle, l'inertie du système fait que, quelles que soient les mesures prises pour limiter les effets du changement climatique, l'évolution du climat pour 2030 est déjà acquise.
Par ailleurs, on doit aussi mentionner que le « zonage » du GIEC fait que la Méditerranée n'est pas une zone autonome, étudiée spécifiquement, mais qu'elle fait partie de la zone Europe, ce qui est curieux compte tenu de la complexité et des particularités climatiques de cet espace.
a) Les données globales
Les dernières projections du GIEC, datant de 2007, reposent sur trois grandes hypothèses économiques (B1 efficacité de la lutte contre l'effet de serre, A1B hypothèse moyenne et A2 poursuite de la tendance actuelle).
Pour 2030, l'effet du changement sur la température dans la zone méditerranéenne est convergent (augmentation de la température entre 0,5 et 1° C) dans chacune de ces trois hypothèses.
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Les hypothèses ne divergent qu'à partir de 2050 et font état, dans la version la plus pessimiste, d'un réchauffement majeur à la fin du siècle, compris entre 2,2 ° et 5,1° C ; la probabilité d'un réchauffement compris entre 3 et 4° C en 2100 étant évaluée à 50 %.
Parallèlement, le nombre de jours de pluie devrait diminuer et les épisodes de sécheresse augmenter.
S'agissant de la mer proprement dite, les projections faites sur 2070-2099 font état d'une forte augmentation des températures hivernales (jusqu'à 4° C), et d'un accroissement de la salinité de l'eau :
b) Le problème du passage d'un modèle régional à un modèle sous-régional
Indépendamment de l'appréciation que l'on peut porter sur leur « solidité », le problème des modélisations d'ensemble du GIEC est que leur pertinence dépend étroitement de leur degré de résolution géographique.
Dans le meilleur des cas, les prévisions régionales du GIEC concernant l'Europe - et donc la Méditerranée qui fait partie de ce sous-ensemble - ont une précision de l'ordre de 300 km .
Or passer à un modèle sous-régional, valable pour le seul bassin méditerranéen pose un véritable problème compte tenu de la complexité géographique et de l'instabilité atmosphérique du milieu :
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Source : Bolle, 2003
Divers modèles sont actuellement testés (ARPEGE-Climat, ALADIN) pour réduire cette résolution.
Des travaux conduits par une équipe du CNRS qui s'efforce de passer à une résolution de l'ordre de 100 kilomètres prennent mieux en compte les caractéristiques géographiques et climatiques du bassin.
Les résultats obtenus (mais uniquement sur la comparaison 1970-1999/2070-2099) font état d'une baisse de la pluviométrie, mais également d'une forte concertation des précipitations extrêmes sur la période automnale :
Par ailleurs, d'autres travaux reposant sur une projection en 2100 estiment que la Méditerranée sera une des deux régions du monde (avec l'espace russe) les plus affectées par le changement climatique.