C. UNE ORGANISATION COMPLEXE POUR DES INVESTISSEMENTS DIVERSIFIÉS
1. Les modes d'intervention en direct et en partenariat
a) L'organisation très complexe des financements indirects
Depuis sa création et conformément à son objet, le FSI est intervenu en direct ou indirectement auprès des entreprises, en capital ou quasi-capital (obligations convertibles ou remboursables en actions), et de manière générale en association avec d'autres investisseurs .
Le financement indirect via des fonds (généralement des FCPR) est distinct de la gestion des investissements, assurée par les sociétés de gestion de la CDC ou des sociétés privées, et emprunte plusieurs canaux selon une architecture fort complexe, dont la compréhension est particulièrement malaisée 38 ( * ) .
Ce financement indirect transite en premier lieu par le programme « généraliste » FSI France Investissement, hérité de CDC Entreprises . Il a succédé au dispositif France Investissement créé en novembre 2006 et a été renommé lors de la reprise par le FSI des engagements de la CDC au titre de la convention conclue avec l'Etat le 7 novembre 2006. Fondé sur un partenariat entre le FSI et des investisseurs institutionnels privés, il vise à répondre à l'insuffisance de fonds propres des PME et à favoriser le développement d'une industrie française du capital-investissement. Il prévoit des moyens financiers importants, de l'ordre de 400 millions d'euros par an, et un dispositif d'accompagnement des entrepreneurs (formation, site Internet dédié, lettre d'information, etc .).
Cette initiative est gérée par CDC Entreprises et financée par FSI PME Portefeuille , filiale du FSI apportée par la CDC (ex-CDC Entreprises Portefeuille) en juillet 2009 et dédiée aux participations du FSI sur le segment des PME non cotées, d'un montant inférieur à 10 millions d'euros. D'après les actionnaires du FSI, l'avantage principal de cette structure intermédiaire réside dans la souplesse de gestion qu'elle offre à CDC Entreprises pour gérer l'ensemble des engagements et flux financiers du programme FSI France Investissement, notamment en matière de gestion de la trésorerie. Elle permet d'éviter de solliciter directement le FSI à chaque appel de fonds des FCPR sous-jacents. Il n'est ainsi généralement procédé qu'à une injection nouvelle de liquidités par an, sous la forme d'une augmentation de capital de FSI PME Portefeuille souscrite par le FSI.
Au total, FSI France Investissement alimente 191 fonds dont 70 fonds régionaux , sélectionnés par CDC Entreprises et qui sont également financés par des fonds privés. Début mars 2011, le FSI et ces fonds dits « partenaires » avaient investi environ un milliard d'euros dans 670 entreprises. Une évaluation de l'ensemble du dispositif est actuellement conduite par Jean-Hervé Lorenzi, membre du Conseil d'analyse économique.
Le programme FSI France Investissement couvre également le Fonds de co-investissement direct 39 ( * ) (FCID), dont les parts sont détenues par FSI PME Portefeuille. Il comprend deux FCPR intégralement souscrits par le FSI mais qui interviennent aux côtés d'autres fonds gérés par CDC Entreprises ou des tiers.
En second lieu, le FSI a créé des fonds spécialisés auxquels contribuent également des acteurs privés, industriels ou financiers. Ces fonds ont une dimension de consolidation financière des entreprises - OC+ et le Fonds de consolidation et de développement des entreprises (FCDE) - ou plus sectorielle : Fonds de modernisation des équipementiers automobiles ( FMEA , créé en février 2009 dans le cadre du « pacte automobile », et FMEA de rang 2 créé en mars 2010), Fonds Bois (créé le 25 septembre 2009), Innobio (créé le 26 octobre 2009).
Les fonds OC+, Innobio, Fonds Bois et FCDE ont été intégrés dans le périmètre du programme FSI France Investissement lors du lancement du plan FSI PME en octobre 2009 ( cf . infra ), les FMEA de rang 1 et 2 demeurant distincts.
Le dispositif OC+ Créé en janvier 2010 et géré par CDC Entreprises (pour les opérations comprises entre 2 à 5 millions d'euros, soit OC+ « A ») et Avenir Entreprises (pour celles comprises entre 500 000 et 2 millions d'euros, soit OC+ « B »), filiale conjointe de CDC Entreprises et d'Oséo, pour le compte du FSI, le FCPR OC+ est un outil original de financement des PME disposant d'un réel potentiel de développement. Les entreprises cibles doivent avoir au moins deux exercices clos et approuvés, réaliser au minimum un chiffre d'affaires de 3 millions d'euros, disposer d'un résultat bénéficiaire sur au moins un des trois derniers exercices et être capables de poursuivre une activité pérenne dans le cadre d'un projet de développement. OC+ a été initialement doté de 300 millions d'euros pour répondre rapidement aux besoins en financement des PME, dont 220 millions gérés par CDC Entreprises et 80 millions par Avenir Entreprises, sa filiale. En mai 2011, il a été décidé d'allouer 60 millions d'euros supplémentaires au fonds OC+ B géré par Avenir Entreprises pour lui permettre de poursuivre son activité, près de 70 millions d'euros ayant déjà été investis. OC+ est constitué d'obligations convertibles assorties de bons de souscription d'actions (« BSA A ») et d'une durée de vie de 5 à 7 ans. Il permet ainsi d'apporter à une entreprise (typiquement une entreprise familiale) des fonds considérés sur le plan comptable comme des quasi fonds propres, en préservant la structure de son capital (selon qu'elle ne le souhaite ou ne le peut pas), mais en disposant d'une option d'accès au capital à terme si la société en exprime le besoin. Les obligations convertibles bénéficient d'une rémunération en deux parties : le paiement d'intérêts annuels à hauteur de 5 % et un paiement complémentaire (prime de non-conversion) en fin de période de 7 % à 10 %, qui permet d'atteindre une rémunération globale annuelle comprise entre 12 % et 15 % . Au terme de sa durée, l'obligation est soit convertie en actions, soit remboursée. Les BSA permettent de participer à la croissance de la valeur de l'entreprise au cours de la période d'investissement, et d'acquérir des actions à un prix prédéterminé au moment de l'investissement. Conforme aux pratiques qui régissent le marché français du capital-investissement, ce produit peut être utilisé conjointement avec d'autres investisseurs, qu'ils choisissent d'intervenir en obligations convertibles ou en fonds propres. Début mars 2011, l'équipe du fonds OC+ avait ainsi reçu 593 dossiers , instruit 447 d'entre eux (le solde étant réorienté), engagé 83 opérations et financé 50 PME , dont 16 en Ile-de-France et 8 en région Rhône-Alpes. Source : CDC Entreprises, FSI |
Une autre typologie possible pour ces fonds consiste à les distinguer selon l'entité gestionnaire et les sources de financement, soit :
- ceux gérés par les sociétés de gestion du groupe CDC (CDC Entreprises, Avenir Entreprises, détenue conjointement par CDC Entreprises et Oséo, et Consolidation et Développement Gestion), éventuellement avec l'appui du FSI qui apporte une expertise sectorielle, et qui donnent lieu à des investissements directs dans des PME. Ces fonds sont soit intégralement financés par le FSI (FCID et fonds OC+), soit, le plus souvent, partiellement aux côtés de partenaires industriels ou financiers, publics et privés ;
- les fonds partenaires régionaux ou nationaux du programme FSI France Investissement, gérés par des équipes sélectionnées par CDC Entreprises et au sein desquels le FSI est un des investisseurs via sa filiale FSI PME Portefeuille.
Les fonds spécialisés et sectoriels auquel contribue le FSI
Fonds |
Sources de financement |
Dotation globale (en €) |
Gestionnaire |
Objectif et champ d'action |
OC+ |
Intégralement FSI |
360 millions € |
CDC Entreprises et Avenir Entreprises, filiale de CDC Entreprises et Oséo |
Spécialisé en quasi-fonds propres permettant de financer les investissements ou le besoin en fonds de roulement d'entreprises qui ne peuvent pas ou ne souhaitent pas ouvrir leur capital |
FCDE |
FSI et les principales banques et compagnies d'assurance |
200 millions € (dont
|
CDC Entreprises, via sa filiale Consolidation et Développement Gestion |
Aide au développement de PME de tous secteurs industriels, temporairement fragilisées par la crise mais structurellement saines et qui disposent d'un potentiel de développement |
FMEA (rang 1) |
FSI, Renault et PSA à parité |
600 millions € (dont
|
CDC Entreprises |
FCPR qui intervient en fonds propres ou quasi-fonds propres pour prendre des participations minoritaires dans des acteurs de la filière automobile, porteurs de projets industriels créateurs de valeur et de compétitivité |
FMEA
|
FSI,
|
50 millions € (dont
|
Dédié aux fournisseurs automobiles de plus petite taille (rang 2 et plus) |
|
InnoBio |
FSI et les 9 principaux groupes pharmaceutiques établis en France |
140 millions € (dont
|
CDC Entreprises |
Fonds de capital-risque dédié au financement de sociétés fournissant des produits et services technologiques et innovants dans le domaine de la santé |
Fonds Bois |
A parité FSI, ONF Participations, Eiffage et le Crédit Agricole |
20 millions € (dont
|
CDC Entreprises |
Financement en fonds propres de PME en croissance du secteur de la transformation du bois |
Source : réponses du FSI au questionnaire
Cette architecture, qui mêle plusieurs logiques (communication et marketing, structures de gestion ou de financement, véhicules juridiques de placement), demeure cependant très complexe et résulte d'une accumulation de strates, parfois au gré des initiatives politiques. Ainsi que votre rapporteur spécial a pu le constater lors de ses auditions, elle est souvent peu lisible pour les PME cibles , comme si la préservation de l'organisation de la Caisse constituait le critère dominant . Il perdure encore un sentiment de réelle confusion entre le FSI, sa filiale FSI PME Portefeuille, la société de gestion CDC Entreprises, le partenariat FSI France Investissement et l'appellation « commerciale » FSI PME.
* 38 Y compris pour les actionnaires du Fonds, d'après les propos recueillis par votre rapporteur spécial.
* 39 Ce fonds a pour objet principal d'intervenir de façon minoritaire dans des opérations de capital-développement afin de financer, en fonds propres ou quasi fonds propres, des projets de croissance interne ou externe, de réaménagement d'actionnariat, de transmission de PME françaises rentables, afin de faire émerger des entreprises de plus grande taille, compétitives sur les marchés européens et internationaux, et de faciliter la transmission d'entreprises. Il intervient également sur des opérations de capital-risque dans des PME technologiques ayant déjà été financées par des fonds, et proches de l'équilibre.