2. Le projet du Président de la République de création d'une Maison de l'Histoire de France : origines, réflexion et calendrier
L'idée d'un musée de l'histoire de France avait été suggérée, au départ, par M. Hervé Lemoine, alors conservateur auprès de la direction de la mémoire, du patrimoine et des archives du ministère de la défense, aux responsables de la campagne présidentielle de M. Sarkozy.
Ainsi, dans la lettre de mission qu'il a adressée aux ministres de la défense et de la culture et de la communication en date du 20 novembre 2007, le Président de la République a fait état de son souhait de voir mis sur pied un « centre de recherche et de collections permanentes dédié à l'histoire civile et militaire de la France ».
Dans son discours de présentation de ses voeux aux acteurs du monde de la culture du 13 janvier 2009 à Nîmes, le chef de l'État a annoncé une politique généreuse de l'État à l'égard du monde de la culture, avec en particulier une enveloppe de 100 millions d'euros en faveur des patrimoines. À cette occasion, il a réitéré sa décision de créer un « musée de l'histoire de France ».
Lors de ses voeux en janvier 2010, le Président de la République a, de nouveau, manifesté son ambition de voir se mettre en place une « Maison de l'Histoire de France ». À l'appui de ce projet, deux rapports avaient été rédigés par M. Hervé Lemoine en 2008. En février 2009, c'est M. Jean-Pierre Rioux qui a rendu un rapport attendu sur les sites susceptibles d'accueillir le futur musée de l'histoire de France.
Désireux de voir cette institution s'installer dans « un lieu emblématique de notre histoire », le chef de l'État a annoncé, le 12 septembre 2010 lors de sa visite de la grotte de Lascaux, que la Maison de l'Histoire de France serait installée sur le site des Archives nationales dans le Marais.
À la suite de cette annonce, le calendrier de mise en oeuvre de la mission de préfiguration de la Maison de l'Histoire de France envisagé par le chef de l'État a été publié sur le site de la présidence de la République, et s'articulait autour des dates suivantes :
- automne 2010 : le conseil scientifique de la Maison de l'Histoire de France sera mis en place et sa présidence sera confiée à un grand historien ; - février 2011 : l'association rendra public le préprogramme de la Maison de l'Histoire de France et lancera la consultation pour le choix du scénographe de l'exposition de préfiguration ; - début de l'été 2011 : les jardins des hôtels de Rohan et de Soubise, aujourd'hui fermés, seront ouverts au public ; - fin de l'année 2011 : trois événements :
- 1 er janvier 2012 : création de l'établissement public « Maison de l'Histoire de France » ; - 2015 : ouverture au public de la totalité du site central de la Maison de l'Histoire de France. |
Les statuts 24 ( * ) de l'association de préfiguration de la Maison de l'Histoire de France ont été communiqués à la préfecture de police de Paris le 8 mars 2010. Présidé par M. Jean-François Hebert, également président de l'établissement public du château de Fontainebleau, son conseil d'administration comprend huit membres fondateurs représentant les ministères impliqués dans ce projet ainsi que sept membres ordinaires 25 ( * ) . Son siège social se situe au 56, rue des Francs-Bourgeois dans le IIIe arrondissement de Paris, c'est-à-dire au sein même du quadrilatère parisien des Archives nationales, aux côtés des bureaux du service interministériel des archives de France, désormais dirigé par M. Hervé Lemoine.
L'association, dirigée par M. Charles Personnaz, administrateur civil, est chargée d'élaborer le projet scientifique et culturel de la Maison de l'Histoire de France en s'appuyant sur un double dispositif :
- une équipe scientifique composée de jeunes historiens et conservateurs, chargée de formuler des propositions en vue de concevoir la galerie chronologique ;
- un conseil scientifique composé d'historiens, de conservateurs et de personnalités qualifiées, chargé d'enrichir le propos scientifique et culturel de la nouvelle institution.
Votre rapporteur note que, dans la lettre de mission 26 ( * ) adressée par le Président de la République à M. Éric Besson, alors ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire, la référence au musée de l'histoire de France apparaissait dans les termes suivants : « vous prendrez part, aux côtés du ministre chargé de la culture, à la mise en place du musée de l'histoire de France, qui contribuera à faire vivre notre identité nationale auprès du grand public ». C'est notamment cette référence, dans le prolongement du débat controversé sur l'identité nationale, qui a conduit un certain nombre d'historiens à identifier le projet de Maison de l'Histoire de France comme une instrumentalisation de l'histoire au service d'une politique orientée. Ce soupçon persiste malgré la disparition du ministère de l'identité nationale à la suite du remaniement gouvernemental intervenu au mois de novembre 2010 et son absence au sein du conseil d'administration de l'association de préfiguration de la Maison de l'Histoire de France.
Des lettres de mission adressées le 27 septembre 2010 par le ministre de la culture et de la communication respectivement à M. Jean-François Hebert, président de l'association de préfiguration de la Maison de l'Histoire de France, et M. Philippe Bélaval, directeur général des patrimoines au ministère de la culture et de la communication, il est possible de dégager les grandes orientations suivantes :
- le socle de la Maison de l'Histoire de France devra être constitué des institutions suivantes : le musée national de préhistoire des Eyzies-de-Tayac, le musée d'archéologie nationale de Saint-Germain-en-Laye, le musée national du Moyen-Âge de Cluny, le musée national de la Renaissance d'Ecouen, le château de Pau, le château de Fontainebleau, le musée des plans-reliefs des Invalides, la Malmaison et le château de Compiègne. Le ministre de la culture et de la communication a particulièrement insisté sur la nécessité de veiller à ce que l'insertion de ces établissements dans le projet, qui a vocation à leur « donner une visibilité renouvelée », s'effectue dans le strict respect de « leur identité scientifique et culturelle » , dans « un esprit de concertation avec les directeurs de ces établissements », en garantissant le maintien dans ces musées nationaux d' « une programmation scientifique liée à leur vocation propre ». Il s'agit, en particulier, de s'assurer que, dans le cadre confédéral que constituera la Maison de l'Histoire de France, les établissements du socle continuent à disposer de l'autonomie scientifique et de l'autonomie de gestion qui leur permettront de demeurer « les institutions de référence qu'ils sont aujourd'hui dans leur domaine de spécialité, notamment de l'histoire de l'art et en archéologie », ce qui est notamment le cas des musées de Cluny, d'Ecouen, des Eyzies-de-Tayac et de Saint-Germain-en-Laye ;
- les modalités de la collaboration entre la Maison de l'Histoire de France et les Archives nationales devront être étudiées avec « la plus grande attention », afin d' « unir dans un même lieu la conservation et le traitement des sources de l'Histoire que constituent les archives, et la Maison, chargée de valoriser les travaux réalisés à partir de ces sources ». Le ministre de la culture et de la communication souligne, ainsi, que les Archives nationales ont vocation à participer aux activités de la nouvelle institution, tout en conservant naturellement leur autonomie juridique . Dans cette logique, il prévoit d'associer la direction des Archives nationales aussi bien au conseil scientifique qu'au comité de pilotage scientifique de la Maison de l'Histoire de France ;
- en matière immobilière, le ministre de la culture et de la communication confie au directeur général des patrimoines et au président de l'Opérateur du patrimoine et des projets immobiliers de la culture (OPPIC) respectivement le suivi et la maîtrise d'ouvrage des aménagements extérieurs à venir sur le site du quadrilatère parisien des Archives nationales. Il appelle, en particulier, à un « dialogue fructueux entre les Archives et les musées, afin que tous les aspects patrimoniaux du projet culturel soient pris en compte », étant entendu que la Maison de l'Histoire de France devrait occuper un espace d'environ 10 000 m² ;
- il appartiendra à un comité opérationnel de pilotage scientifique, réunissant le responsable scientifique de l'association de préfiguration et les directeurs des musées nationaux concernés et la direction des Archives nationales, d'assister le président de l'association dans la définition du projet scientifique de la « galerie du temps » qui sera soumis à l'avis du conseil scientifique ;
- il est explicitement mentionné que « la définition de nouvelles relations avec la Réunion des musées nationaux sera un enjeu essentiel afin qu'elle soit, dans le champ de ses compétences, l'un des partenaires majeurs de la Maison de l'Histoire de France et des musées qu'elle fédèrera ».
Le 13 janvier 2011, le ministre de la culture et de la communication, M. Frédéric Mitterrand, a installé un comité d'orientation scientifique, composé de 19 membres nommés pour un mandat de deux ans renouvelable :
- Jean Favier, président d'honneur ;
- Jean-Pierre Rioux, président ;
- Dominique Borne, rapporteur général ;
- Jacques Berlioz ;
- Eric Deroo ;
- Étienne François ;
- Sébastien Laurent ;
- Dominique Missika ;
- Laurent Olivier ;
- Pascal Ory ;
- Jean-Christian Petitfils ;
- Paule René-Bazin ;
- Anthony Rowley ;
- Martine Segalen ;
- Benjamin Stora ;
- Elisabeth Taburet-Delahaye ;
- Laurent Theis ;
- Anne-Marie Thiesse ;
- Emmanuel de Waresquiel.
Ce comité a vocation à se prononcer sur l'ensemble des composantes du projet et sur la politique culturelle de la Maison de l'Histoire de France :
- création d'un portail de ressources documentaires ;
- constitution du réseau des musées et lieux d'histoire et de mémoires ;
- expositions temporaires et autres manifestations ;
- galerie chronologique ;
- échanges internationaux ;
- relations avec le monde éducatif et avec les organismes de recherche ;
- politique des publics.
Depuis la mise en place du comité d'orientation scientifique de la Maison de l'Histoire de France, le calendrier de mise en oeuvre a été désormais précisé :
- le comité d'orientation scientifique devrait rendre, à la fin du mois de juin 2011, un avant-projet scientifique et culturel pour la Maison de l'Histoire de France. Cet avant-projet sera communiqué à un certain nombre de personnalités qualifiées afin que leurs avis et suggestions soient collectés, en vue, le cas échéant, d'enrichir le projet final que le comité d'orientation scientifique présentera au mois de décembre 2011 ;
- dans le même temps, la nouvelle directrice des Archives nationales, Mme Agnès Magnan, a été chargée de finaliser le projet scientifique, culturel et éducatif des Archives nationales, en tenant compte de son articulation avec la future Maison de l'Histoire de France et des éventuelles mutualisations et synergies à développer. Un avant-projet en ce sens devrait être présenté au ministre de la culture et de la communication au mois de juin 2011 ;
- la convergence de ces deux avant-projets devrait permettre le lancement, à partir de juillet 2011 des travaux de répartition des espaces entre les Archives nationales et la Maison de l'Histoire de France ;
- le Gouvernement devrait prendre position sur la solution statutaire à envisager pour l'association au futur établissement public « Maison de l'Histoire de France » des musées nationaux au statut de SCN ;
- l'exposition de préfiguration de la Maison de l'Histoire de France a été reportée à la fin de l'année 2012.
* 24 Cf. annexe 1.
* 25 Cf. annexe 2.
* 26 Lettre de mission du 31 mars 2009.