C. UN DÉBAT PERSISTANT : LE DÉLICAT ÉQUILIBRE ENTRE EFFICACITÉ ET BONNE UTILISATION DE L'ARGENT PUBLIC
1. Le RSA reste complexe pour les bénéficiaires
Dès le stade de la demande, puis pour effectuer les différentes démarches exigées, les futurs allocataires sont confrontés à la complexité de la gouvernance du dispositif du RSA, globalement partagée entre le conseil général, la Caf et Pôle emploi.
Si d'importants progrès ont été réalisés, notamment informatiques, il n'y a pas encore de guichet unique personnel, ce qui supposerait une évolution majeure du système de prise en charge et son décloisonnement.
Ceci peut partiellement expliquer une montée en charge du RSA, notamment pour sa partie « activité », plus lente que les estimations qui en avaient été faites.
Cependant, la complexité administrative ou la difficulté de diffuser des informations simples à des publics cibles n'est pas suffisante pour comprendre ce phénomène ; on peut également estimer que des bénéficiaires potentiels choisissent de ne pas solliciter l'allocation, par exemple parce que le montant estimé serait faible au regard des démarches à effectuer ou parce que le RSA reste assimilé au RMI, ce qui peut amener un sentiment de stigmatisation ou de disqualification sociale pour des gens qui travaillent, même s'ils n'en retirent que des ressources faibles. C'est d'ailleurs ce que montre l'enquête qualitative 11 ( * ) commandée par Marc-Philippe Daubresse, alors ministre de la jeunesse et des solidarités actives, et publiée le 6 juillet 2010.
Il sera par conséquent nécessaire d'approfondir l'analyse de ces comportements individuels dans le cadre d'une évaluation à moyen terme du RSA.
2. Simplifier les procédures sans nuire au contrôle, la quadrature du cercle ?
Le RSA soulève, à l'instar d'autres prestations sociales, le débat sur l'équilibre entre efficacité des politiques publiques, justice sociale et juste niveau des dépenses. Il s'agit souvent de concilier deux objectifs qui peuvent se révéler contradictoires : lutter contre les fraudes et simplifier les procédures.
Par exemple, le RSA est liquidé pour des périodes successives de trois mois et les ressources prises en compte pour le calcul sont égales à la moyenne mensuelle des ressources perçues au cours des trois mois précédant. En découle une obligation de fournir une déclaration trimestrielle des revenus pour les allocataires. Cette obligation part d'une idée positive : adapter l'allocation au plus près de la situation personnelle, au bénéfice de l'allocataire quand sa situation se dégrade, au bénéfice des finances publiques quand sa situation s'améliore.
Pour autant, à quel moment la mesure entraîne-elle un coût disproportionné, tant pour les individus que pour les gestionnaires ? Le Gouvernement l'a bien compris, puisque cette déclaration qui tenait sur deux pages et contenait seize catégories de ressources est depuis peu limitée à une page et cinq catégories. Au-delà, certains conseils généraux militent pour une déclaration mensuelle permettant de limiter les indus perçus par les allocataires et, par conséquent, la procédure de récupération, alors qu'il serait peut-être plus cohérent d'allonger le délai à six mois ou un an pour certains allocataires, par exemple ceux ayant un RSA faible.
Coûteuse en termes de gestion, cette obligation de déclaration est également lourde pour les allocataires ; elle a, qui plus est, des conséquences immédiates : remboursement ou réduction des allocations à venir. Ces multiples mouvements peuvent se révéler décourageants, notamment lorsque les sommes en jeu sont relativement faibles tout en étant importantes dans le budget quotidien des personnes concernées.
Il faudrait donc garder un peu de souplesse et éviter, autant que possible, la rétroactivité des décisions.
* 11 « Les freins à la demande de RSA - Les contraintes du dispositif », enquête TNS-Sofres.