III. RETRAITES : UNE RÉFORME ESSENTIELLE
L'examen du projet de loi portant réforme des retraites constituera un élément essentiel de la stratégie de rétablissement des comptes de la sécurité sociale. La mission d'évaluation et de contrôle de la sécurité sociale (Mecss) a consacré à cette question un important travail afin que le Sénat puisse aborder ce débat en étant pleinement informé 6 ( * ) .
A. LES PROPOSITIONS DE LA MECSS : RÉGLER L'URGENCE, REFONDER L'AVENIR
Le rapport de la Mecss constate que le système de retraite est gravement menacé par des déséquilibres et formule des propositions pour restaurer sa soutenabilité financière et penser une modernisation durable des retraites.
1. Le constat : un système de retraite gravement menacé par des déséquilibres
Le système de retraite français, dont l'organisation complexe est le produit de l'histoire, a permis d'assurer aux retraités un niveau de vie comparable à celui des actifs :
- au fil des générations, la pension moyenne des retraités s'est accrue plus vite que l'inflation ;
- le niveau de vie moyen des plus de soixante-cinq ans représente 95 % de celui de l'ensemble de la population, soit l'un des taux les plus élevés de l'OCDE ;
- en tenant compte des revenus du patrimoine, le niveau de vie moyen des retraités est quasi-équivalent à celui des actifs ;
- le taux de pauvreté des plus de soixante ans est désormais stabilisé à 10 %, soit un niveau inférieur à celui de l'ensemble de la population (13 %) et en net recul par rapport au taux de 30 % des années 1970.
Depuis vingt ans, les difficultés démographiques et financières des régimes de retraite ont fait l'objet de nombreux rapports et entraîné plusieurs réformes : réforme Balladur en 1993, réforme des régimes complémentaires Agirc-Arrco en 1994 et 1996, création du fonds de réserve des retraites en 1998 et du conseil d'orientation des retraites (Cor) en 2000, réforme Fillon en 2003, réforme des régimes spéciaux en 2007-2008.
Malgré ces réformes, le système se trouve dans une situation de déséquilibre financier insoutenable :
- pour des raisons structurelles tenant à l'évolution démographique : le rapport cotisants-retraités est passé de 4 en 1960 à 1,43 aujourd'hui pour le régime général ; l'espérance de vie s'est accrue de six ans depuis les années 1980 ;
- pour des raisons conjoncturelles liées à la crise économique : 5,6 points de masse salariale ont été perdus entre 2008 et 2009 ; une reprise de la croissance à son niveau d'avant la crise ne comblera pas cette perte de recettes ;
- les besoins de l'ensemble du système de retraite atteindront 30 milliards en 2010 , pour une masse totale de prestations de 270 milliards : 11 % des dépenses ne sont donc plus couverts par les recettes ;
- à moyen et long terme, les projections du Cor font apparaître un déficit prévisible d'environ 40 milliards dès 2015 et, selon les hypothèses retenues, de 72 à 115 milliards en 2050.
Plus grave encore, la crédibilité du modèle de retraite est gravement entamée. Le pacte intergénérationnel se fissure puisqu'une fraction de plus en plus réduite de la population prend en charge les besoins d'une fraction de plus en plus nombreuse. La méthode de réforme, avec son rendez-vous manqué en 2008 puis son rendez-vous de 2010 initialement non prévu, est elle-même anxiogène par manque de pédagogie et de transparence.
* 6 Rapport Mecss n° 461 (2009-2010) de Christiane Demontès et Dominique Leclerc, « Retraites 2010 : régler l'urgence, refonder l'avenir ».