B. DES SYNERGIES ET DES COÛTS DE TRANSITION INCERTAINS
1. Des synergies complexes à identifier
En réponse à vos rapporteurs sur la mesure des synergies issues de sa réorganisation en entreprise unique, France Télévisions a déclaré anticiper une économie de l'ordre de 250 à 350 millions d'euros cumulée sur la période 2009-2012, en comparant la trajectoire du plan d'affaires aux chiffres obtenus à partir des données initiales du COM.
Une économie de 66,9 millions d'euros par rapport au plan d'affaires a déjà été réalisée en 2009 ( cf. trajectoire des charges). Elle provient, d'une part, des programmes à hauteur de 43,1 millions d'euros 39 ( * ) , et d'autre part, des dépenses hors programmes qui ont été réduites de 23,8 millions d'euros 40 ( * ) .
Le plan d'économies mis en oeuvre a tout d'abord permis de réduire le coût des programmes grâce à une politique systématique d'audit .
S'agissant des baisses de dépenses hors grille , celles-ci sont rendues possibles par le biais de la négociation des contrats au niveau de l'entreprise publique et non plus des antennes. En effet, des économies d'échelle sont attendues grâce à la maîtrise des consommations en volume ainsi qu'à une appréciation plus précise des besoins de l'ensemble des antennes. France Télévisions a illustré son propos par la réduction du coût de l'ordre de 40 % des dépenses d'assurance.
En outre, les régies de production, ont été rassemblées sous l'autorité de la direction des opérations au sein du domaine Fabrication et technologies, mis en place le 5 janvier 2010. Un projet de regroupement physique des régies finales prévoit d'installer dans le nouvel immeuble de France Télévisions, boulevard du Général Martial Valin, Paris 15 e , les diffusions des chaînes France 2, France 3, France 4 et France 5 ainsi que les mises à dispositions en vidéo à la demande des produits de ces chaînes. Une telle opération doit permettre la réalisation d'économies. Le coût global de ce projet est estimé à 25 millions d'euros.
Vos rapporteurs relèvent également que le coût de la diffusion a été réduit à hauteur de 20 millions d'euros environ , par rapport au budget 2009 41 ( * ) . Cet écart à la prévision s'explique, s'agissant de la diffusion numérique, en partie par le report de certaines opérations prévues en 2009. Il s'agit notamment de la densification en Alsace et en Basse-Normandie et de la sécurisation du réseau en énergie et en alimentation du signal en raison de l'arrêt de l'analogique qui n'intervient qu'en 2010. Ce bon résultat s'explique également par le retard de la télévision mobile portable (TMP), le poste TMP étant inclus dans la rubrique diffusion numérique.
Quant à la diffusion hertzienne analogique , France Télévisions a indiqué avoir renforcé sa stratégie de négociation à l'égard des opérateurs de diffusion afin de réduire fortement ce poste de dépenses.
S'agissant des dépenses de personnel , le contrôle révèle que si la réduction des dépenses est bien réelle, elle demeure modeste. Le choix du maintien « du climat social » a été privilégié afin de permettre la mise en oeuvre de la nouvelle organisation.
Vos rapporteurs en concluent donc que les synergies ne pourront se traduire que par une meilleure utilisation des ressources et non par des économies nettes. La transition sociale constitue, selon eux, le défi majeur à relever dans les prochaines années. Des ajustements en termes de métiers et d'emplois seront nécessaires afin d'adapter les ressources humaines à la nouvelle organisation. Ceux-ci ne pourront se résumer à des dépenses de formation, aussi nécessaires soient-elles, dispensées par l'Université de France Télévisions.
En second lieu, tout en saluant les efforts réels de maîtrise des coûts des dépenses de grille ou hors grille depuis 2007, vos rapporteurs jugent que la création de synergies invoquées par France Télévisions ne sera effective que dans la mesure où l'organisation de l' entreprise unique mise en place deviendra opérationnelle dans tous les domaines. Cette dernière ne peut se réduire à un organigramme .
Enfin, la mise en oeuvre des synergies résultera de l'émergence d'une culture d'entreprise ainsi que de la conception de stratégies cohérentes mobilisant de manière articulée l'ensemble des forces vives de l'entreprise.
2. Des coûts de transition difficilement chiffrables
Le montant des coûts totaux de transition estimés dans le plan d'affaires s'élève pour toute la période 2009-2012 à 89 millions d'euros , S'agissant de 2009 , les coûts de transition 42 ( * ) s'élèvent à 18,4 millions d'euros au lieu d'un montant de 34 millions d'euros inscrit au budget de 2009. Il convient d'y rattacher la partie incitative du plan de départs volontaires en retraite qui a donné lieu à une provision exceptionnelle en 2009. Elle couvrira l'ensemble du dispositif d'incitation au départ à la retraite, dont le coût était lissé jusqu'en 2012 dans le plan d'affaires.
En ce qui concerne l'enveloppe globale prévue pour la transition, en 2010, vos rapporteurs considèrent que si elle devait être respectée , la réalisation des charges ainsi projetées ne sera probablement pas conforme dans le détail aux montants budgétés . En effet, les coûts de reconversion et de formation n'ont pas été mis en oeuvre dans leur totalité en 2009. En revanche, les coûts d'accompagnement, de réaménagement et de mobilité, ainsi que les amortissements accélérés des outils sont en dépassement par rapport aux enveloppes prévues en 2009.
En outre, il convient de souligner qu' en l'absence des hypothèses sous-jacentes du plan d'affaires , il est difficile de rapprocher les données relatives à la prévision avec celles sur l'exécution . En outre, les différentes modalités de comptabilisation des dépenses, selon qu'il s'agit du budget ou du plan d'affaires, ne permettent pas non plus un rapprochement des données comptables.
Ensuite, vos rapporteurs s'interrogent sur une éventuelle dérive des charges de transition. L'estimation globale de 89 millions d'euros sur la période doit notamment permettre de financer le coût de la réorganisation sociale. Or, des dépenses liées à la restructuration seront générées par l'accompagnement des salariés qui ne saurait se réduire à un effort de formation ou de convergence des outils informatiques. En effet, l'« alignement des statuts », la prise en compte des écarts de rémunération entre France 2 et France 3 notamment, la refonte du système de classification , sont autant d'éléments introduisant une incertitude quant au coût final de cette réorganisation et donc quant à la capacité de France Télévisions à respecter la trajectoire de charges.
De surcroît, vos rapporteurs tiennent à souligner toute la complexité de définir une trajectoire de charges transitionnelles . L'année 2009 illustre leur propos. Comme cela a été souligné plus haut, le budget de 2009 avait prévu un déficit d'un montant de 135,4 millions d'euros, revu à la baisse dans le plan d'affaires pour un montant de 98,3 millions d'euros en 2009, pour finalement s'établir à un bénéfice de 23,6 millions d'euros.
C'est pourquoi, seule la définition d'une stratégie ambitieuse allant au-delà de la maîtrise des dépenses, et accompagnée d'une anticipation des moyens nécessaires à sa réalisation sont de nature à permettre la plus grande optimisation possible du financement de France Télévisions.
* 39 Les dépenses au titre des programmes s'établissent en 2009 à 1.937,1 millions d'euros contre 1.980,2 millions d'euros prévus pour 2009 au titre du COM 2007-2010.
* 40 Hors programmes, une dépense réalisée de 517,6 millions d'euros contre 541,4 millions d'euros prévus initialement.
* 41 Le coût de diffusion hertzienne s'élève en 2009 à 154 millions d'euros contre 165,5 millions d'euros budgétés. Quant au coût de la diffusion numérique, il s'établit à 50 millions d'euros en 2009 contre 61,8 millions d'euros dans le budget de 2009. Les coûts prévisionnels pour 2010 se répartissent comme suit :
- France 2 : 69,1 millions d'euros avec 47,6 millions d'euros pour l'analogique et 21,5 millions d'euros pour le numérique (dont coût de France 2 HD de 5 millions d'euros).
- France 3 : 88,3 millions d'euros avec 49,1 millions d'euros pour l'analogique et 39,2 millions d'euros pour le numérique.
- France 4 : 4,4 millions d'euros en numérique uniquement.
- France 5 : 20,8 millions d'euros avec 12,6 millions d'euros pour l'analogique et 8,2 millions d'euros pour le numérique.
- France Ô : 2,9 millions d'euros en numérique uniquement.
- Réseau Outre-mer : 33,2 millions d'euros avec 21,4 millions d'euros pour l'analogique et 11,8 millions d'euros pour le numérique.
* 42 Au sens du plan d'affaires.