B. TROUVER LE BON ÉQUILIBRE ENTRE DES OBJECTIFS CONTRADICTOIRES
Eu égard aux multiples manifestations de la crise, les objectifs de la nouvelle régulation financière sont potentiellement nombreux mais peuvent aussi apparaître contradictoires dès lors qu'il s'agit, par exemple, de renforcer la stabilité du système financier sans éliminer sa sensibilité au risque (et donc sa capacité de le traiter), ou de limiter le risque global sans porter atteinte aux activités potentiellement risquées mais porteuses d'innovation et de développement économiques.
1. Renforcer la stabilité et assurer la réactivité du système financier
Le premier sommet du G 20 en octobre 2008 comme les différents forums de régulateurs ont mis en exergue la nécessité de mettre en place une surveillance transversale et continue des activités financières afin d'appréhender tous les facteurs potentiels de risques, en particulier ceux qui sont apparus au cours des dernières années dans les segments peu ou pas régulés, et d'en atténuer les conséquences. Une telle approche implique de disposer d'une information complète dans ses dimensions horizontale , soit l'ensemble des produits financiers, et verticale , soit tous les maillons de la chaîne de traitement desdits produits.
Pour autant, il importe de se départir de l'illusion de vouloir enserrer toutes les activités dans un corpus de règles strictes , qui crée immanquablement des effets de contournement, comme de la prétention à l'omniscience. Les marchés financiers résistent en effet aux prédictions et leur dimension fortement psychologique, difficilement modélisable, atténue la rationalité et l'efficience à long terme que leur prêtent certaines théories. Les risques financiers sont protéiformes, corrélés et susceptibles de « muter » en fonction des choix et priorités des régulateurs.
La régulation financière doit donc réaliser un difficile compromis entre la prise en compte de tous les facteurs déstabilisants pour améliorer la résistance aux chocs et le maintien d'une certaine tolérance du système au risque , c'est-à-dire garantir que les acteurs conservent leur propre capacité de réaction aux signaux de prix et de risques. Pour être efficace, la régulation ne peut donc se contenter d'une approche par métier ou institution. Elle doit privilégier une approche proportionnée selon la tolérance au risque et se concentrer sur celui qui peut mettre en péril l'équilibre dynamique de l'ensemble par contagion, soit le risque systémique.
A titre d'exemple, il est plus efficace, en termes de stabilité financière, de garantir le bon fonctionnement et l'extension du périmètre des chambres de compensation que l'absence de prise excessive de risques de la part des hedge funds dont la défaillance, sauf cas extrême tel que le fonds LTCM en 1998, ne porte pas atteinte à l'équilibre global.