2. Les denrées alimentaires
Une étude réalisée dès avril 2002 par la Direction des affaires sanitaires et sociales de la Martinique avait mis en évidence la contamination des légumes-racines (igname, dachine, patate douce) cultivés dans les sols pollués par la chlordécone.
En conséquence, des arrêtés préfectoraux ont été pris en mars 2003 en Martinique, et en octobre 2003 à la Guadeloupe, contraignant les agriculteurs à faire analyser les sols avant toute mise en culture de légumes-racines - les analyses étant financées à l'aide d'un programme de l'Union européenne. Les agriculteurs persistant à cultiver des légumes-racines dans des sols pollués devaient s'astreindre, à leur charge, à un contrôle des végétaux, et, en cas de positivité du contrôle, leur production était interdite à la commercialisation.
Ce dispositif a été efficace.
Par exemple, si on se réfère au plan de contrôle effectué par la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) en Guadeloupe, le nombre d'échantillons contaminés a notamment baissé :
- en 2004, 144 prélèvements et 22 échantillons contaminés,
- en 2006, 200 prélèvements et 2 échantillons contaminés,
- en 2007, 211 prélèvements et 3 échantillons contaminés.
Mais, il laissait subsister des secteurs de plus faible vigilance.
D'une part, les arrêtés qui visaient à interdire la culture des légumes-racines potentiellement pollués et à prohiber leur commercialisation ne permettaient pas de résoudre d'éventuels problèmes sanitaires liés à l'autoconsommation, aux échanges villageois ou à la commercialisation foraine le long des routes des îles.
D'autre part, demeurait également en suspens le sort réservé aux produits de pêche : la pêche en rivière, la pêche à pied dans les estuaires et la pêche côtière.
À titre indicatif, et pour la seule zone côtière, une mission menée par deux scientifiques de l'IFREMER dans la baie Robert à la Martinique à la fin de 2007 a révèlé que :
- les poissons d'élevage maritime étaient épargnés par la pollution à la chlordécone,
- les langoustes étaient les plus contaminées, entre 8 et 1 000 ug par kilo - il est vrai sur seulement 10 prélèvements,
- et que les poissons de la baie (chirurgien, marignan, vivaneau, sarde) révélaient des teneurs en chlordécone variant entre quelques ug et 70 ug par kilo.
Mais on doit relever qu'à la suite de la modification de la réglementation européenne, entrée en application à compter du 1 er septembre 2008, deux novations importantes ont été introduites qui ont rendu caducs les mécanismes de surveillance mis en oeuvre en 2003 :
- les limites maximum de résidus (LMR), c'est à dire de présence de chlordécone dans les aliments mis en vente, ont été abaissées de 50 ug/kg de produit frais à 20 ug/kg de produit frais ,
- le « paquet hygiène » de l'Union européenne qui introduit de nouvelles obligations pour les exploitants agricoles est entré en application au 1 er janvier 2006. Cette réglementation qui regroupe et simplifie 17 directives antérieures, renverse la charge de la preuve pour les exploitants qui devront fournir tous les éléments de preuves propres à justifier la conformité de leur production, ceci sous forme déclarative circonstanciée (identification de la parcelle, informations sur les noms, les volumes et les dates d'épandage des produits phytosanitaires employés, etc.)