TABLE RONDE - MERCREDI 16 AVRIL 2008

La séance est ouverte à 9 heures 50, sous la présidence de M. Nicolas About, président.

M. Nicolas About, président : Mes chers collègues, voici quinze mois, vous vous en rappelez, nous avons adopté, sur le rapport de notre collègue Marie-Thérèse Hermange, la loi organisant l'application de la convention Aeras pour permettre l'accès à l'assurance et à l'emprunt des personnes présentant un risque de santé aggravé.

Notre commission est bien sûr particulièrement concernée par cette question qui avait déjà été étudiée dans le cadre de la fameuse convention Belorgey. Nous nous étions alors engagés à vérifier quelques mois plus tard l'effectivité et l'efficacité de ce dispositif. C'est ce que nous allons faire maintenant.

J'ai le plaisir d'accueillir M. Bernard Asselain, président de la commission des études et des recherches sur la convention Aeras ; M. Emmanuel Constans, président de la commission de médiation de la convention Aeras ; M. Karim Felissi, conseiller de l'association des accidentés de la vie ; M. Marc Keller, médecin délégué aux affaires médicosociales et internationales, responsable de la ligne « Aidea » (accompagner pour emprunter) à la Ligue nationale contre le cancer ; M. Gérard Méneroud, directeur général adjoint de CNP Assurances et Mme Agnès Canarelli, responsable technique à la direction des assurances de personnes à la fédération française des sociétés d'assurance ; M. Marc Morel, directeur, et Mme Marie Annick Lambert, vice-présidente du collectif interassociatif sur la santé ; Mme Françoise Palle-Guillabert, directrice, et M. Pierre Bocquet, chargé de mission du département banque de détail et banque à distance de la fédération bancaire française ; M. Vincent Pelletier, directeur général de l'association Aides ; MM. Olivier Selmati, Anthony Requin et Mme Dominique Legay, membres de la commission de suivi et de propositions de la convention Aeras.

La parole est au rapporteur.

Mme Marie Thérèse Hermange, rapporteur : Merci de nous réunir aujourd'hui pour exercer notre mission de contrôle. Nous sommes réunis dans une formation quelque peu spéciale, due à la forme de la loi que nous avons votée puisque nous avalisions une convention. Vous nous aviez proposé, monsieur le président, de faire un bilan. C'est ce que nous faisons aujourd'hui. C'est important pour nous.

Aujourd'hui, l'ensemble des partenaires sont là, partenaires institutionnels, assureurs et associations. Nous voudrions connaître concrètement le bilan que chacun tire de cette convention, les difficultés qui demeurent et savoir si les trois commissions se sont réunies et ont travaillé.

Quels dossiers la commission de médiation a-t-elle eu à traiter ? La commission chargée des études et des recherches a-t-elle pu lancer des programmes de recherche ?

Peut-être pourrait-on donner la parole aux associations pour savoir si elles ont eu le temps de faire un bilan, puis aux assureurs et enfin à la commission de suivi et de propositions.

M. Nicolas About, président : La parole est aux associations.

Mme Marie-Annick Lambert : Je suis vice-présidente du Ciss, collectif qui regroupe les associations de santé ; j'appartiens aussi à une association de consommateurs qui est l'union féminine civique et sociale, qui est signataire de la convention Aeras, comme elle était signataire de la convention Belorgey.

Cela fait un certain temps que nous travaillons tous ensemble. Le paradoxe est que vous nous recevez alors que l'on est en phase préparatoire du rapport d'évaluation qui doit être déposé en juillet et donc en cours d'évaluation. Cela n'a pas été simple. C'est un peu le problème que l'on avait déjà avec la convention Belorgey et que l'on continue à essayer de résoudre. Il faut établir des indicateurs et sortir des données objectivées. Depuis des années, chacun a ses impressions et ses éléments et il est extrêmement difficile de les quantifier.

M. Nicolas About, président : Nous sommes aussi dans cette phase de début d'évaluation. Cela ne veut pas dire que l'on ne se reverra pas plus tard.

Mme Marie-Annick Lambert : Ceci étant, chacun de nous a un certain nombre de bilans, en particulier à partir d'enquêtes flash.

Que dire sur les éléments essentiels ? Pour ce qui est de l'information, Aeras est bien plus connue que ne l'était Belorgey. Quand on en parle, on a l'impression que les gens connaissent Aeras, ce qui ne veut pas dire qu'ils savent ce que c'est. Pour beaucoup, elle est perçue comme un accès au crédit et non à l'assurance. Je pense que l'information n'est donc pas la plus adéquate.

En second lieu, la mise en place du principe des référents, destinée à faire en sorte que l'information fonctionne mieux et que l'on ait une meilleure connaissance technique au sein des systèmes bancaires, manque encore pour nous de lisibilité. D'un réseau à l'autre, le fonctionnement n'est pas du tout le même. Les associations aimeraient pouvoir identifier plus clairement qui et où sont les référents.

La grande question reste la couverture de l'invalidité, qui était pour nous le grand progrès d'Aeras et sur laquelle il faut bien reconnaître que l'on a très peu avancé.

Un autre point qui reste encore extrêmement obscur et sur lequel on a très peu de lisibilité est le mécanisme d'arasement des surprimes et de la mutualisation. On essaie d'établir des indicateurs car si cela reste difficilement lisible, on a néanmoins besoin d'avoir des données les plus objectivées possible.

Un point nous est extrêmement cher et a progressé très nettement depuis Belorgey mais n'est pas suffisant pour nous. Il s'agit de l'application des garanties alternatives. C'est essentiel pour les associations.

La commission, pivot du progrès d'Aeras, est évidemment la commission des études et des recherches ; nous pouvons en tirer une objectivation et surtout une harmonisation du risque que représentent les pathologies. C'est d'elle que dépendront tous les bénéfices que l'on peut attendre d'Aeras.

Je laisserai M. Constans parler de la commission de médiation. Elle fonctionne très bien.

M. Gérard Méneroud : Dans la ligne de ce qui vient d'être dit, je crois qu'au cours des deux ans qui viennent de s'écouler, les différents acteurs ont essayé de travailler le plus professionnellement possible dans un dialogue ouvert aussi bien avec les associations, le monde bancaire, celui des assureurs ou l'administration pour bâtir un système plus efficace que celui qui était mis en oeuvre précédemment.

Comme Mme Lambert l'a dit, tout n'est pas encore parfaitement au point pour ce qui est des indicateurs. Cela devrait être le cas vers le milieu de cette année mais des progrès importants ont été faits.

La convention est mieux connue dans les réseaux de distribution des banques, ainsi que des candidats aux prêts qui essayent d'obtenir une couverture d'assurance lorsqu'ils ont un risque aggravé de santé.

Nous avons eu, au cours de l'année 2007, plus de 4 300 000 demandes d'assurance pour des prêts professionnels ou immobiliers, sur l'ensemble des sociétés.

Sur ces 4 300 000, 10 % présentaient un risque aggravé de santé...

M. Marc Morel : Déclaré...

M. Gérard Méneroud : Déclaré, oui, mais 90 % ont été considérés sans risque aggravé et ont donc eu une proposition d'assurance et une couverture qui les satisfaisaient.

Dans 93 % des cas présentant un risque aggravé de santé, soit un peu plus de 400 000, nous avons eu une proposition directe et personnalisée des sociétés d'assurance, ce que, dans le jargon de la convention, nous appelons le niveau 2, portant sur le décès et l'invalidité. Sur les 431 000 dossiers que j'évoquais, 399 000 propositions portaient sur l'assurance décès et 313 000 sur l'invalidité.

L'essentiel des personnes présentant un risque aggravé de santé ont reçu une proposition, de temps en temps sans surprime, de temps en temps avec surprime ou avec des limitations de garantie mais, en tout cas, permettant de faire progresser leur dossier de prêt.

Au cours de l'année 2007, nous avons transmis au pool des risques très aggravés, mis en place entre les différents acteurs, 7 279 demandes, soit autant que ce qui avait été transmis pour toutes les années antérieures dans le cadre de la convention Belorgey.

La mise en place de la convention Aeras, le caractère solennel qu'a apporté la loi, ont fortement augmenté le nombre des dossiers traités au pool des risques très aggravés ; sur ces 7 279 demandes, un peu plus de 20 % ont fait l'objet d'une proposition d'assurance. Aujourd'hui, 93 % des demandes présentant un risque aggravé de santé ont trouvé une solution en termes d'assurance.

En matière de risques aggravés, 85 % des 430 000 dossiers ont eu des surprimes inférieures à 100 %.

Troisième donnée : les pathologies les plus répandues sont les pathologies cancéreuses. Elles représentent plus de la moitié des dossiers concernés par un risque très aggravé. La moitié des personnes arrivées à ce niveau est traitée sans surprime et un tiers avec surprime.

Pour le reste, il s'agit de personnes dans des phases relativement proches de la détection de la maladie, pour lesquelles les pronostics et la capacité à faire une proposition d'assurance sur le très long terme sont difficiles techniquement parce que l'on ne connaît pas l'issue des traitements en cours.

Des progrès importants ont été faits concernant les cancers. Ils n'interdisent pas l'autocensure de la part des postulants. Beaucoup de personnes ayant eu un cancer plusieurs années auparavant s'autocensurent et préfèrent ne pas s'assurer. L'information sur le fait qu'il existe des solutions doit donc être diffusée.

Des efforts pour y parvenir ont été faits à travers des dépliants diffusés de manière large et importante par l'ensemble des réseaux bancaires et les associations. L'information sur la convention a été mise en place sur tous les sites des associations, des banques et des compagnies d'assurance.

Nous avons également entrepris avec les médecins conseils des sociétés d'assurance et un certain nombre de médecins experts de l'administration ou représentant les associations de malades d'activer et d'accélérer les travaux de la commission scientifique. En effet, les thérapies évoluent. Il faut en faire le bilan pour être capable de mesurer leur impact sur les statistiques de survie. Il faut savoir que nous nous engageons de plus en plus sur des durées supérieures à vingt ans et que le pronostic sur des durées aussi importantes, du fait des thérapies récentes, est difficile à établir car nous n'avons pas de recul pour savoir si l'impact sera réel les premières années.

Globalement, tout n'est pas terminé. Les indicateurs doivent être complétés. Nous devons faire des progrès en termes de prise en compte des statistiques. Nous sommes dans un climat de dialogue parfois ferme et direct avec les associations mais on doit essayer de progresser afin de couvrir le plus grand nombre de personnes et repousser les limites de l'assurabilité le plus loin possible.

M. Olivier Selmati : Comme vous le savez, l'Etat est signataire de cette convention et a pris comme engagement de faire connaître celle-ci ; en collaboration avec le ministère des finances, nous avons créé le site Aeras, hébergé par le site du ministère des finances, qui a permis de faire connaître la convention sous les réserves que Mme Lambert exprimait, auxquelles je souscris : faire connaître l'existence de la convention est une chose, en comprendre les mécanismes, l'objet et les limites en est une autre.

Par ailleurs, pour ce qui concerne la santé, nous avons mobilisé les caisses d'assurance maladie. Dans le cadre de leurs relevés de prestations, il est possible d'indiquer certains messages ; nous avons donc utilisé ce support qui touche des millions de personnes pour faire connaître l'existence de la convention et du site.

Au-delà de cette obligation d'information, nous assurons l'animation de la commission de suivi ; notre position consiste à nous inscrire dans la démarche politique qui a été actée en 2007, qui est de faire confiance au champ conventionnel, de faire vivre cette convention, de pousser chacune des parties signataires aux limites de leurs engagements et de demander où l'on en est.

Nous avons donc pris l'initiative, avec le ministère des finances, de ne pas attendre le dernier moment pour mettre en place un processus d'évaluation. Nous avons commencé il y a quasiment huit mois un exercice où toutes les parties signataires ont cherché les indicateurs pertinents qui nous permettront, au 1 er juillet 2008, comme nous l'impose la loi, d'évaluer la convention.

L'objectif est de répondre à deux questions. La première est de savoir si toutes les parties signataires ont respecté les engagements qu'elles ont pris dans la convention.

Je pense aussi que l'évaluation doit conduire à répondre à une autre question. Indépendamment de la première, la convention a-t-elle amélioré l'accès au crédit des personnes présentant un risque aggravé de santé ? Le lien entre les deux questions n'est pas forcément automatique ; il peut l'être et nous l'espérons car il faut bien comprendre que le respect de la convention consiste uniquement, pour les parties signataires, en des obligations de moyens : faire en sorte que la convention soit connue, que l'on réponde dans les délais, que l'on motive, que l'on mette en place un dispositif de mutualisation. En aucun cas il n'existe une obligation d'accepter toutes les personnes qui présentent un risque aggravé de santé.

Pour nous, l'exercice d'évaluation consiste à savoir si tout le monde a respecté ses engagements et si on a amélioré la situation.

Comme Mme Lambert l'a mentionné, cet exercice d'évaluation n'a pas été simple. Nous avons été confrontés à certaines difficultés de la part de parties signataires qui ont des difficultés objectives, liées notamment à l'impossibilité pour elles de connaître l'état de santé du public concerné et de produire des statistiques qu'elles n'ont pas, par définition, la possibilité de connaître. Nous avons donc travaillé ensemble, parfois à travers des échanges un peu vifs.

Roselyne Bachelot a également été amenée à intervenir dans l'exercice d'évaluation ; elle est en effet très attachée à cette convention et je crois être habilité à dire qu'elle va s'impliquer dans le cadre de l'exercice d'évaluation.

Certains blocages ont pu être levés et je pense qu'on a aujourd'hui élaboré un tableau de bord d'indicateurs qui permettra de répondre aux deux questions que j'ai indiquées.

Mme Françoise Palle-Guillabert : Je voudrais compléter certains points.

S'agissant des indicateurs de suivi de la mise en oeuvre de la convention, on a établi une liste qui a été validée à la dernière commission de suivi et de propositions, après des travaux qui ont été un peu longs, notamment parce que, du point de vue de la profession bancaire, il est très difficile d'établir des statistiques, la confidentialité des données médicales de santé de nos clients étant parfaitement respectée. On ne sait pas, quand un client remplit un dossier de crédit, s'il présente ou non un risque aggravé de santé. C'est très bien ainsi sans doute et il n'y a pas lieu de changer la loi sur ce sujet mais cerner la population concernée et donner des indicateurs statistiques nous est extrêmement difficile.

Ce n'est pas le cas des assureurs, le médecin conseil de la compagnie d'assurance connaissant l'état de santé du client qui demande à bénéficier d'une assurance. On a donc des données statistiques exhaustives qui viennent des assureurs.

Les travaux se poursuivent. On a une liste d'indicateurs statistiques la plus objective possible. On s'est tous mis d'accord. Il faut maintenant la compléter et nourrir les éléments sur lesquels nous nous sommes engagés. Cela va être fait dans le cours des mois qui viennent.

La profession bancaire y est évidemment très attachée. C'est un dossier qui est suivi à la FBF au plus haut niveau. L'enjeu pour nos clients est extrêmement important en termes d'image, tout comme pour la profession. Vous pouvez donc être certains de l'implication totale de la FBF pour faire aboutir ce dossier dans de bonnes conditions.

Je voudrais revenir sur les problématiques d'information et les ambiguïtés qu'il peut y avoir sur ces modalités d'application de la convention.

Comme vous le savez, en France, il n'y a pas de droit au crédit et la convention constitue donc un juste équilibre entre la protection qu'il convient de donner à l'ensemble des clients, y compris ceux qui souffrent d'un risque aggravé de santé, et le fait qu'il n'existe pas de droit au crédit.

Il est de la responsabilité du banquier, qui procède à une analyse de la solvabilité du client très approfondie, de refuser certains dossiers. J'insiste sur ce point qui est important. Dans certains pays, il n'y a pas d'analyse de la solvabilité. On prête sur la seule valeur du gage, c'est-à-dire de l'hypothèque. Ce n'est pas le système français. On a une jurisprudence de la Cour de cassation qui est extrêmement exigeante sur ce point et qui nous demande de nous assurer que le client aura bien les flux futurs de revenus qui lui permettront d'honorer sa dette jusqu'à l'échéance.

L'objectif de la convention Aeras est de faciliter l'accès à l'assurance et au crédit mais en aucune manière cela ne constitue un droit d'accès au crédit.

Un point sur l'information qui est une question importante. C'était un des grands enjeux de la convention. Peut-être la convention Belorgey avait-elle montré des insuffisances sur ce point. On a vraiment progressé, notamment parce que toutes les parties signataires - et pas seulement les banquiers et les assureurs - ont des obligations pour faire connaître la convention, que ce soient les pouvoirs publics ou les associations de consommateurs.

Même quand on ne connaît pas l'existence de la convention, on peut en bénéficier. Lorsqu'on demande un dossier de prêt dans une banque et qu'on n'est pas assuré au premier niveau, le niveau standard, on passe automatiquement au second niveau et on bénéficie donc de la convention ou même du troisième niveau qui est celui du pool des risques très aggravés.

Mme Marie-Thérèse Hermange, rapporteur : Où ce pool des risques très aggravés fonctionne-t-il ? A l'intérieur de la banque ?

Mme Françoise Palle-Guillabert : Il fonctionne chez les assureurs.

Mme Marie-Thérèse Hermange, rapporteur : Quand le dossier arrive-t-il à la commission de médiation ?

M. Gérard Méneroud : Le client remplit un questionnaire de santé. Premier cas : les réponses lui permettent de rentrer dans la formule standard. C'est ce que l'on appelle le niveau 1. C'est le contrat tel qu'il a été défini entre l'assureur et la banque qui s'applique.

Si le questionnaire de santé ne permet pas de rentrer dans les caractéristiques de cette offre standard, il y a un risque aggravé de santé. Nous sommes dans 10 % des cas. Il y a alors obligation pour l'assureur de réaliser un examen personnalisé et d'apporter une réponse au candidat à l'emprunt

Dans 0,7 % des cas, l'assureur n'a pas seul la solution pour couvrir le risque correspondant. L'ensemble des assureurs et des réassureurs se sont mis en commun pour organiser un pool afin d'offrir une capacité de garantie. C'est ce que l'on appelle le troisième niveau. La tarification n'est plus réalisée pas l'assureur de base mais par les réassureurs, c'est-à-dire des gens qui n'ont de lien ni avec le banquier, ni avec l'assureur et qui travaillent sur le marché financier. Ce sont eux qui élaborent la tarification qui s'impose à l'assureur qui a fait remonter le dossier. L'assureur conserve 50 % des risques et le pool va prendre 50 % des risques en charge.

M. Emmanuel Constans : Quelques mots sur la commission de médiation qui a été érigée par la convention Aeras comme une des trois instances de gouvernance. C'est une commission pleinement autonome et non une sous-commission de la commission de suivi, comme dans le cadre de la commission Belorgey.

Cette commission s'est réunie à peu près tous les deux mois ; le secrétariat, sous l'autorité du président de la commission, exerce une activité permanente de suivi et de traitement des dossiers.

Nous avons là non un médiateur mais une commission de médiation où, en plus du président nommé par les ministres, siègent à égalité des représentants des professionnels de la banque et de l'assurance et des représentants des associations de consommateurs et de malades. C'est donc une instance à la fois représentative et indépendante.

Son rôle, c'est un point très important que l'on essaie de bien faire passer auprès des personnes qui nous saisissent, n'est pas celui d'une instance d'appel des décisions des professionnels en matière d'exclusion d'assurance ou de niveau des surprimes.

L'objectif, tel qu'il figure dans la convention, de la mission de la commission de médiation, est de favoriser un règlement amiable et diligent des réclamations individuelles qui sont adressées par les candidats à l'emprunt et l'assurance dans le cadre du fonctionnement de la convention, donc de veiller à ce que le fonctionnement du dispositif soit bien assuré pour chacun des dossiers qui nous sont présentés. La commission examine, instruit les dossiers en s'adressant aux établissements bancaires et d'assurance pour trouver des solutions lorsque le problème relève de sa compétence.

L'autre rôle est de favoriser le dialogue entre le médecin du candidat à l'emprunt et le médecin conseil de l'assurance, dans le respect des règles déontologiques. Sur cette question, des progrès ont été rapidement accomplis.

Enfin, la commission de médiation constitue un observatoire des difficultés que peut rencontrer le dispositif. On les observe en temps réel puisque il s'agit de personnes qui n'ont pas encore emprunté. Une fois l'emprunt mis en place, la commission n'est plus compétente.

Nous bénéficions d'un secrétariat mis en place à la demande de l'Etat par l'Autorité de contrôle des assurances et des mutuelles (Acam), ce qui donne un élément de grande efficacité.

Quel est le bilan ? Il s'agit d'un premier bilan, 2007 étant l'année de l'installation, par conséquent peu significative du rythme de croisière. Nous avons néanmoins reçu de nombreuses saisines : 1 717, un chiffre sans commune mesure avec les quelques dizaines de cas dont avait été saisie la précédente sous-commission de médiation, soit un rythme d'à peu près 150 par mois.

Ceci est dû à l'effort exceptionnel et très remarquable de communication des professionnels et des pouvoirs publics sur le recours possible à la commission de médiation. Ceci est écrit en toutes lettres dans un certain nombre de documents. C'est une garantie importante qui est donnée à toutes les personnes qui veulent s'assurer et emprunter avec un risque aggravé de santé.

La contrepartie de cet effort de communication et d'information réside dans le fait que beaucoup de personnes saisissent la commission de demandes qui ne sont pas recevables, alors qu'ils devraient s'adresser ailleurs. C'est inévitable et, dans un premier temps, tout à fait normal. La commission de médiation, dans ce cas, procède avec pédagogie pour expliquer son rôle précis et son champ de compétences et réoriente ces demandes, par exemple vers les établissements bancaires ou les médecins conseils. On nous demande parfois les raisons médicales d'une exclusion de garantie d'assurance : ce n'est pas à la commission de médiation de les donner. C'est par erreur que certains dossiers nous sont adressés.

Nous nous sommes d'ailleurs à cet égard retournés vers les établissements pour faire rectifier certains formulaires ou certaines notifications qui pouvaient donner l'impression que la commission de médiation faisait des choses pour lesquelles elle n'est pas compétente.

Néanmoins, nous avons eu un certain nombre de cas de médiation utiles. 308 ont été recevables en 2007 ; 200 ont donné lieu à une information détaillée et à une médiation de premier niveau. 108 des médiations ont été approfondies. A la suite de celles-ci, 60 % des cas ont donné lieu à une satisfaction totale ou partielle des personnes qui ont demandé la médiation. Un taux de satisfaction élevé donc, intéressant, je pense, pour vos travaux.

Nous poursuivons bien entendu un effort d'information important avec l'ensemble des parties concernées sur le champ de compétences de la commission de médiation, pour nous concentrer sur les dossiers recevables où nous pouvons être utiles aux demandeurs.

M. Nicolas About, président : Monsieur Asselain, Mme Lambert vous présentait comme le président de la commission pivot, une commission d'avenir, incontournable. Qu'avez-vous à nous dire ?

M. Bernard Asselain : Merci, madame Lambert, d'avoir rappelé l'importance de cette commission. Si je suis là aujourd'hui, j'espère que c'est parce que j'ai quelques éléments à vous donner, même si le constat n'est pas simple.

En effet, comme vous le savez, notre commission a pour objet de recueillir et d'étudier les données disponibles sur la mortalité et la morbidité occasionnées par les principales pathologies afin de déterminer les surprimes correspondant aux risques aggravés de santé. Il s'agit donc de fournir des éléments statistiques nécessaires à la tarification du risque de décès, mais aussi d'invalidité. Les données en termes d'invalidité, on en a très peu. Les plus gros propriétaires de ces données d'invalidité sont probablement les assureurs et les réassureurs eux-mêmes.

Pour les données disponibles, il y en a dans certaines pathologies et très peu dans d'autres. Des données disponibles de mortalité, on en a pas mal au niveau des cancers, qui sont le premier recours à la convention Aeras, plus de 50 % nous disait-on il y a un instant. Dans d'autres pathologies, on a beaucoup moins d'éléments. Dans les pathologies chroniques telles que le diabète, l'obésité ou encore comme les pathologies cardiovasculaires, il n'y a pas de registre. Nous allons donc partir « à la pêche » de ces données.

Comment la commission fonctionne-t-elle ? Nous avons eu neuf réunions depuis le 28 mars 2007, ce qui n'est pas négligeable, avec la création de deux groupes de travail, l'un sur la mortalité et l'autre sur l'invalidité.

Le sous-groupe « mortalité » s'est intéressé pour le moment, à titre de modèle, à deux pathologies. La première est celle des cancers, pour lesquels on dispose d'une expertise collective de l'Inserm. Je pense d'ailleurs que c'est à ce titre que j'ai été nommé président de cette commission d'appui.

L'Inserm a fait un gros travail d'expertise collective il y a deux ou trois ans pour essayer d'évaluer les risques à long terme et les sur-risques pour les différents types de cancer, à la demande du ministère de la santé et de l'institut national du cancer. Dans ce domaine, on peut avoir des statistiques intéressantes, recoupées avec celles de la Ligue nationale contre le cancer qui, je l'espère, peuvent être utiles et servir d'appui. Le problème du cancer peut donc peut-être servir de modèle.

On a d'abord essayé de se mettre d'accord en termes de méthodologie. Les indicateurs des assureurs ne sont en effet pas forcément les mêmes que ceux des épidémiologistes. Notre commission va bientôt proposer un glossaire permettant de se mettre d'accord sur un sur-risque par rapport à la population générale, ce qui n'est pas toujours clair. Il existe des notions de rapport de risque, de sur-risque absolu ou de sur-risque relatif et on s'y perd un peu quand on n'est pas expert.

Le second exemple qui a été discuté à la commission « mortalité » est celui de la pathologie HIV, où il y a beaucoup de données disponibles mais où l'on sait que des évolutions thérapeutiques récentes ont transformé le pronostic du Sida en quelques années et cela continue encore heureusement.

Pour avoir des données à long terme sur le Sida, il est évident que l'on ne peut répartir des cohortes de patients traités il y a dix ans ; on aurait des choses complètement fausses. On est donc obligé d'extrapoler, de modéliser. Les épidémiologistes du Sida connaissent bien cela pour essayer de prédire ce qui va se passer en 2020 pour des patients traités en 2008. Ces modèles sont, par définition, entachés d'erreurs. L'incertitude n'est pas simple à évaluer.

Dans d'autres domaines, où la définition des pathologies n'est pas si claire que cela - je pense au diabète, où il existe des types différents, certains graves, d'autres moins - on a encore plus d'incertitudes que dans le domaine du Sida, où on a un certain nombre de connaissances.

Pour les cancers, où il y a depuis une trentaine d'années des registres qui fonctionnent, on a des données stables et fiables ; pour d'autres pathologies, on en a beaucoup moins. On va essayer d'en faire le recensement mais nous ne pouvons pas nous substituer à l'institut de veille sanitaire et on fera ce que l'on pourra. On ne pourra avoir des données sur tout, c'est évident.

Un autre problème dans les discussions avec l'assurance est de savoir jusqu'où il faut aller dans le détail du pronostic. Dans le cancer du sein, par exemple, dans le domaine des populations et des registres, on peut avoir des données par strate, par tranche d'âge. Nous ne pouvons avoir des données sur des critères qui sont souvent moins objectifs, comme les récepteurs hormonaux, le grade, critères que vont prendre en compte les assureurs.

Une patiente qui a eu un cancer avec des récepteurs négatifs, un grade 3, ce qui n'est pas de très bon pronostic, va se voir non seulement « reprocher » par les assurances d'avoir un cancer mais en outre d'avoir un cancer grave. Ce détail de finesse va être pris en compte par les assureurs. Moi, épidémiologiste, je peux sortir des papiers d'essais thérapeutiques où l'on sait la valeur du pronostic des grades et des récepteurs hormonaux, mais on ne peut pas parler à propos d'une population générale.

Cela pose une question profonde qui est de savoir jusqu'où aller dans ces interrogatoires et s'il ne faut pas d'une certaine façon mutualiser le risque. Je crois qu'il est politiquement important de dire qu'il va falloir mutualiser ce risque et ne pas entrer dans des détails individuels d'une finesse telle qu'il ne pourra pas y avoir de statistiques.

M. Nicolas About, président : En outre, c'est humainement inadmissible !

M. Bernard Asselain : En effet et si statistiques il y a, elles ne sont pas vérifiables.

M. Nicolas About, président : Les associations souhaitent-elles réagir ?

M. Marc Morel : Le point qu'a soulevé M. Asselain est essentiel. Nous voyons bien, nous, associations, le décalage qu'il peut y avoir entre l'objectivation scientifique et la réalité que vivent les personnes.

Les associations ne peuvent attendre. On l'a vu pour le VIH : en 1996, avec l'arrivée des trithérapies, la morbidité a chuté de 90 % sans que les primes ne changent ! C'est en cela qu'il y a un problème de fond. On ne peut attendre dix ou vingt ans, dans un certain nombre de pathologies, pour que les personnes deviennent assurables. C'est une pratique des assurances qu'il faut faire évoluer.

On a beaucoup « patiné » avec la convention Belorgey, chacun s'opposant ses propres données. Nous avons aussi des données plus noires, qui sont biaisées par nature, 100 % des personnes qui nous sollicitent étant concernées par un risque aggravé mais on est là aujourd'hui pour cela !

Tout à l'heure, M. Méneroud présentait ses chiffres ; on ne les conteste pas mais on est là pour travailler sur les 10 % de risques aggravés.

M. Nicolas About, président : Vous indiquiez que pour le VIH, lorsque la mortalité a chuté, les primes n'ont pas bougé. Qu'en est-il aujourd'hui ?

M. Marc Morel : Aujourd'hui, on est dans une situation d'entre deux. Ce n'est facile ni pour Mme Palle-Guillabert ni pour M. Méneroud de représenter les différentes professions puisqu'il n'y a pas d'homogénéité entre les professionnels.

Si on reprend le problème de l'information, certains réseaux bancaires jouent le jeu, comme le Crédit agricole, qui a fait un effort avec des affiches, des dépliants, tandis que d'autres ne le font pas d'où la difficulté pour Mme Palle-Guillabert qui représente la FBF et l'ensemble des établissements bancaires. Si l'on veut vraiment progresser, il ne faut pas rester sur un niveau superficiel.

Concernant le VIH, on est aujourd'hui dans une situation très paradoxale. Un certain nombre de cas passent avec peu de surprimes, d'autres, quasiment identiques, avec de fortes surprimes et d'autres encore sont rejetés. On a l'impression d'un certain arbitraire, d'où la nécessité impérative que la commission des études et des recherches dégage des lignes directrices et que l'on sorte de l'argument que l'on nous oppose systématiquement qui est de dire que chaque cas est individuel.

Mme Marie-Thérèse Hermange, rapporteur : Comment la commission médicale informe-t-elle les associations et les réseaux bancaires ? Aujourd'hui, en matière de cancer du colon, il apparaît que, après une chirurgie, il existe un nouveau traitement de chimiothérapie qui utilise de nouvelles molécules permettant des progrès très importants en termes d'évolution de la pathologie et d'espérance de vie.

Comment, à partir d'une donnée médicale comme celle-ci, même si on parle d'espérance et même si elle est aléatoire, la commission peut informer les institutions bancaires en temps réel ? Comment un patient « x » pourra-t-il en bénéficier sans attendre la loi générale ?

M. Bernard Asselain : C'est un très bon exemple. Je ne connais pas les tarifs des assureurs dans ce cas mais je peux vous donner l'exemple du cancer des testicules. On a un peu plus de recul parce que la chimiothérapie a transformé le pronostic. D'après ce que j'ai compris, il n'y a plus aucune surprime pour les patients qui ont eu un cancer des testicules. C'est un cancer qui n'est pas très fréquent mais qui frappe des gens dans la force de l'âge. Or, on sait, d'après les données épidémiologiques, avec maintenant pas mal de recul, que le pronostic a été transformé par la chimiothérapie. Dans cet exemple, je parle sous le contrôle du docteur Keller et éventuellement des assureurs, je crois qu'il n'y a plus de surprime. C'est un bon exemple. Il a fallu sans doute pas mal de temps pour y arriver. C'est le problème du délai mais, malheureusement, pour que des données soient stabilisées, avérées sur le plan épidémiologique, il faudra toujours un peu de temps.

M. Gérard Méneroud : Dans ces cas, les décisions sont prises par des médecins qui suivent les évolutions thérapeutiques de manière aussi proche que possible et avec la même compétence que nos amis de la commission des études et des recherches.

Il est vrai, pour reprendre l'exemple de Mme Hermange, qu'avant d'être certain qu'une nouvelle thérapie, qui a six mois, un an ou deux, crée le retour à la situation normale de mortalité à horizon de dix/quinze ans, il faut faire un pari pour ne pas prendre trop tardivement en compte les données ou les changements de thérapie.

Il faut aussi avoir quelques certitudes. C'est ce qui a été fait, peut-être avec un certain délai compte tenu de l'image du HIV mais, aujourd'hui, suivant les politiques de souscription et de risques de chacune des compagnies, on a des situations de prise en compte des trithérapies.

Pour ce qui est du cancer des testicules, les médecins conseils des assureurs ont évolué. C'est ici que le dialogue avec la commission et les associations est important pour bien peser la réalité des avancées médicales et pouvoir les prendre en compte.

M. Marc Keller : Bernard Asselain a estimé qu'il existait de plus en plus de données sur la maladie cancéreuse, ce qui est vrai. M. Méneroud a dit qu'il y a de moins en moins d'acceptation concernant la pathologie cancéreuse au niveau 3. C'est quelque chose que l'on n'arrive pas à comprendre. Des expertises de survie à dix ans ont été publiées. La ligue a financé des études de survie à cinq ans. Ce sont des études issues des registres des cancers français qui ont été mises à disposition des médecins conseils.

Vous parlez de réactivité et du cancer du colon : ce sont des résultats qui ont été portés directement à la connaissance des médecins conseils. Par conséquent, on attend que les assureurs fassent preuve de réactivité, selon le fonctionnement de chaque compagnie.

Nous les avons tenus au courant de l'étude de survie à dix ans ; on nous demande en effet de plus en plus de recul concernant ces études. Cela a été communiqué aux médecins conseils des assurances. Ce sont les médecins qui doivent étudier certains dossiers.

Dans certaines pathologies, on peut déclarer que la guérison se fait à 100 %, comme dans le cas du cancer des testicules. On sait qu'après deux ans, ces personnes sont guéries. Il existe quelques cas, 2 % à 3 %, où il y a des spécificités. Je pense que la commission des études a travaillé sur ce sujet mais on ne va pas aller dans le détail. Si on cherche pourquoi une femme a un récepteur et pourquoi une autre n'en a pas, si on va dans le détail selon l'âge et le stade de la pathologie, on n'y arrivera jamais !

Il faut à un moment ou à un autre, d'une manière globale, mutualiser. On est dans le risque aggravé. On ne va pas rester sur telle pathologie par rapport à telle autre. Il faut prendre en compte, sur le plan scientifique, toutes les pathologies dans leur globalité. Je sais que nos collègues médecins conseils, pour les avoir rencontrés plusieurs fois, ont la volonté de progresser en ce sens. Il est vrai aussi que l'on en attend des résultats. Je pense que c'est pour bientôt.

Mme Marie-Annick Lambert : Pourquoi ai-je souligné l'importance que nous attachons à la commission scientifique ?

Cela fait un certain nombre d'années que nous travaillons ensemble. Avant Aeras, les problèmes étaient les mêmes dans leurs principes ; à l'époque, on avait mené une expérience, avec le consentement de tous les signataires, en réalisant des dossiers types de pathologies et en les soumettant à différents intervenants. On s'était aperçu d'une appréciation totalement hétérogène du même risque.

Nous attendons donc de la commission scientifique de pouvoir obtenir une harmonisation et une référence afin de ne plus avoir cette hétérogénéité, totalement injustifiée, du risque. L'information directe au médecin conseil est effectivement la façon la plus immédiate de réagir car on est tout à fait conscient qu'au niveau de la commission scientifique, on a un décalage dans le temps. Celui-ci est difficile à éviter pour la commission mais peut être en partie pallié par les transmissions directes d'informations au médecin conseil.

M. Bernard Asselain : Un certain degré de mutualisation est en effet impératif. Si l'on va dans les détails d'une pathologie avec des ramifications des critères, il n'y aura plus de moyens de dialogue ; il faut arriver à avoir un cadre sur lequel on puisse s'entendre, sur lequel il y ait des données communes, partageables, transparentes.

M. Nicolas About, président : Vous faut-il un cadre réglementaire, législatif ou êtes-vous capables de vous entendre ?

M. Gérard Méneroud : L'hétérogénéité est chose normale. Tous les assureurs présents n'ont pas le même portefeuille d'assurés sur lequel ils peuvent mutualiser certains risques. Il y a donc des politiques différentes.

M. Nicolas About, président : Peut-être était-ce très divergent...

M. Gérard Méneroud : La mutualisation implique une mutualité constituée ; quand elle ne l'est pas, la réponse peut être différente.

M. Alain Gournac : Comment voyez-vous les choses évoluer si nous n'intervenons pas en tant que législateur ? Je pense que tout cela traîne ! Y a-t-il une possibilité de faire évoluer les choses et comment ? Expliquez-nous ! Je n'ai pas encore compris. Les choses vont-elles s'accélérer ? C'est ce que l'on attend et c'est la raison de ce texte !

Comment allez-vous faire les uns et les autres pour accélérer les choses afin que l'on puisse prêter à ceux qui en ont besoin ? Le constat n'est pas mauvais mais il ne nous donne pas de perspectives d'évolution rapide.

M. Guy Fischer : Un an après, on essaie de faire le point. Lors du débat, j'avais présenté un certain nombre d'amendements pour savoir si, aujourd'hui, on pouvait se satisfaire du simple engagement verbal des partenaires conventionnels. Nous l'avons noté, la volonté est là. C'est pourquoi j'avais posé la question de savoir s'il fallait qu'une référence explicite à la convention, visée dans le code de la santé publique, figure aussi dans le code de la consommation. Je renouvelle ma question.

Le second point que j'avais soulevé est la mutualisation du risque. J'avais dit qu'il convenait de mettre fin au système qui aboutit à intéresser directement les assureurs à la fraude. On nous a dit qu'un certain nombre de cas n'étaient pas déclarés. Ceci apparaît comme une sorte de fraude. J'avais proposé que les primes conservées en cas de déclaration de nullité de contrat d'assurance soient affectées à la prise en charge des surprimes des personnes aux revenus les plus modestes.

Mes questions ont-elles toujours un certain caractère d'actualité ?

M. Michel Esneu : On a évoqué un certain nombre de pathologies mais il se trouve que les accidents cardiovasculaires sont nombreux et présentent de gros risques. Or, on ne les a pas évoqués.

A-t-on des études aussi pointues que pour les cancers concernant ce risque qui peut être considéré comme un risque aggravé et faire obstacle à l'emprunt ?

M. Alain Milon : Cette volonté constante de mutualiser le risque ne créera-t-elle pas une uniformisation qui risque d'entraîner l'absence de concurrence ?

Mme Marie-Thérèse Hermange, rapporteur : M. Keller a employé le terme de délai de réactivité. Par rapport à un référent, à une évolution de pathologie, quel est le délai de réactivité des assureurs et des banquiers ? Sont-ils aussi quelquefois conscients du fait qu'en disant non à une personne, c'est dire au malade qu'il est inapte. Cela ne concourt pas à sa guérison. Une réponse positive fait aussi partie de la guérison.

M. Nicolas About, président : Avoir un projet, c'est avoir de l'avenir !

M. Bernard Asselain : Concernant la pathologie cardiovasculaire, il existe beaucoup de données. Il n'y a pas de registre national ni même départemental des pathologies cardiovasculaires mais on a des études de cohortes portant sur des populations suivies prospectivement. Elles vont nous permettre d'avoir des données à dix ou quinze ans sur le devenir de cette pathologie importante. Je crois que c'est la deuxième ou la troisième pathologie dans le cadre des demandes qui arrivent au niveau 3.

M. Gérard Méneroud : Le délai de réactivité ne se chiffre pas en mois ; il ne faut pas que ce soit en dizaines d'années mais, pour avoir une information et quelques certitudes, on a besoin d'un recul d'un à trois ans, suivant les pathologies, l'intensité des recherches et du dialogue. C'est en cela que la convention nous permet un dialogue plus intense et donc d'accélérer la réactivité.

Il faut rappeler qu'en tant qu'assureurs, nous sommes toujours au regret de ne pas assurer quelqu'un. C'est une activité en moins !

M. Nicolas About, président : C'est aussi une perte en moins !

M. Gérard Méneroud : Si elle est bien tarifée, nous sommes sur une bonne ligne.

En second lieu, nous avons acté dans la convention le fait que l'assurance était le moyen le plus important de sécuriser les opérations d'emprunt mais pas le seul. Il existe des garanties alternatives. La profession bancaire a fait de gros efforts pour les personnes qui ne peuvent pas utiliser ce moyen de sécurité qu'est l'assurance du fait de leur état de santé, afin qu'elles puissent malgré tout réaliser leur projet.

De ce point de vue, les délais de réactivité se sont améliorés grâce au dialogue et à l'échange de données. Il y a des garanties alternatives sur lesquelles la profession bancaire a travaillé.

S'agissant de la mutualisation et de la proposition de M. Fischer, les deux professions ont pris en charge l'écrêtement des surprimes au-delà d'un certain niveau, sur l'ensemble de leur activité, de façon à permettre aux personnes les plus modestes, pour lesquelles la surprime serait insupportable, de réaliser leur projet malgré leur état de santé. Ce mécanisme permet un écrêtement au delà de 1,5 % en taux d'intérêt. Le supplément de prime est directement pris en charge par les banquiers et les assureurs. La personne ne paye donc sa surprime que dans la limite du plafond, sous conditions de ressources, ainsi que cela a été défini dans la convention.

M. Guy Fischer : Cela a-t-il été mis en place dès le début ou par la suite ?

M. Gérard Méneroud : C'est un des progrès de la convention Aeras. Ceci n'existait pas dans la convention Belorgey.

Mme Françoise Palle-Guillabert : La principale difficulté porte sur les crédits immobiliers. Un Français qui s'endette en matière immobilière prend un crédit sur des durées qui vont jusqu'à vingt ou trente ans. Il est donc très important pour lui et pour le banquier que l'opération se déroule de façon satisfaisante jusqu'à son terme.

On est très attentif à ne pas surendetter nos clients. On sait que le surendettement est essentiellement provoqué par les accidents de la vie et, même lorsqu'il y a un risque aggravé de santé, on procède à une analyse de solvabilité très rigoureuse. C'est la même que celle qui s'applique à un client qui n'a pas de risque aggravé mais on devine quand même, quand le dossier revient avec une surprime d'assurance, qu'il y a sans doute une probabilité de risque aggravé de santé. On n'en est pas sûr parce qu'il y a aussi par exemple des sportifs de très haut niveau qui pratiquent des sports à risques et qui ont une surprime d'assurance, alors même qu'ils sont en parfaite santé.

Même s'il est difficile pour le banquier de dire non, cela fait partie de son devoir. Il ne faut pas qu'il engage son client dans un projet immobilier s'il a des raisons de penser que le projet risque de ne pas être mené dans des conditions satisfaisantes jusqu'à son terme.

Il existe également dans la convention Aeras des solutions pour les clients qui n'ont pas trouvé à s'assurer, comme les garanties alternatives. Le banquier propose dans ce cas au client de mettre en quelque sorte en garantie du crédit d'autres éléments que l'assurance. Cela peut être un bien immobilier, un contrat d'assurance-vie, une caution, un portefeuille de valeurs mobilières. C'est une première série de solutions.

Il y a aussi sur le marché français des établissements qui prêtent sans assurance. On le sait. Cela fait partie des solutions qui peuvent exister si les circuits classiques n'apportent pas de réponses satisfaisantes et si l'on est vraiment attaché à son projet immobilier.

Il existe également un établissement qui fait du prêt hypothécaire cautionné qui permet de s'endetter sans assurance.

Quant à la question de l'opportunité de recourir ou non à la loi, nous autres, professionnels banquiers, sommes assez attachés au processus conventionnel. La difficulté consiste à positionner le curseur entre la protection que l'on donne et la responsabilité que l'on doit avoir pour éviter de surendetter les risques aggravés de santé. La position de ce curseur, qui évolue au rythme des améliorations de traitement des pathologies, des progrès que l'on peut faire et des négociations que l'on peut avoir, me paraît plus adaptée à des discussions de type conventionnel - on peut toujours faire bouger la convention avec des avenants - alors que la loi est pérenne, plus rigide, moins souple.

Ce processus conventionnel est unique en Europe ; nos homologues européens n'ont pas de dispositif comme celui-ci. Nous sommes donc plutôt favorables à sa souplesse.

M. Guy Fischer : Donc, pas de modification de la loi !

Mme Marie-Annick Lambert : On était favorable à un encadrement législatif plus serré - la loi et l'encadrement législatif étant deux questions différentes - en particulier avec des reprises dans le code de la consommation. On y est toujours favorable, d'autant que le code de la consommation est en cours de refonte.

En revanche, il faut bien comprendre les limites de la loi. La loi ne ferait avancer les choses que s'il y avait un échec et qu'on aboutisse à un bureau de tarification. C'est la commission scientifique qui peut faire avancer les choses, non la loi.

M. Nicolas About, président : Quelqu'un a-t-il une réponse à la question de l'uniformisation ?

M. Marc Morel : On nous oppose parfois - c'est théoriquement juste mais pratiquement faux - que les personnes pourraient faire jouer la concurrence. Certes, mais imaginez bien que dans une majorité de cas, les gens ne se déplacent pas d'établissement en établissement ou d'assureur en assureur. C'est une vision plus théorique que réelle.

Comme l'a dit Marie-Annick Lambert, les assureurs et les médecins conseils n'ont pas forcément les mêmes bases et la mutualisation n'est donc pas la même. On peut le comprendre mais, de là à avoir un risque accepté dans un cas et refusé dans l'autre, c'est socialement inacceptable et on le dénoncera toujours !

M. Marc Keller : Il y a beaucoup d'intervenants sur cette convention. Il y a les professionnels qui doivent faire leur travail, l'Etat qui doit être présent et les associations.

On a pris des engagements que nous avons à ma connaissance honorés. Je parle ici au nom des associations et de la ligue.

La ligue a mis en place un service entièrement dédié à l'assurabilité. C'est un service gratuit, confidentiel et anonyme, tenu par des professionnels. En d'autres termes, on leur prête main forte en aidant ceux qui appellent à constituer leur dossier en amont, à poser des questions. On a également mis en place un site d'information sur la convention Aeras.

La ligue contre le cancer a mis à disposition des appelants des cancérologues bénévoles - les médecins aussi peuvent faire du bénévolat !

Du fait de notre position et du nombre d'appels - à ce jour, on en a eu plus de 4 500 - nous avons pu réaliser des enquêtes que je mets à la disposition de la commission.

La ligue a également financé des études de survie et de mortalité sur les fonds propres de l'association, qui ne perçoit que ce que versent les donateurs et les malades. Je pense que les engagements des associations ont été honorés ; elles ont fait aussi des efforts. En contrepartie, on aimerait bien qu'il y ait des gestes et surtout des résultats concernant certains dossiers.

Cette problématique n'est pas une problématique de chiffres. L'assurabilité, ce n'est pas que des chiffres. Il faut aussi considérer le problème humain. On a d'ailleurs mis en place tout un accompagnement humain avec des psychologues cliniciens.

Il y a aussi un aspect juridique. Une cellule d'avocats bénévoles informe les gens pour savoir de quelle manière ils peuvent obtenir des informations.

La démarche des associations dans ce processus est très positive et on est prêts à aller au delà.

M. Karim Felissi : J'aimerais attirer l'attention de la commission sur le fait que toutes les difficultés qui ont été évoquées ne concernent qu'une partie du sujet. On parlait tout à l'heure des limites de la loi ; je ne souhaiterais pas que l'on parle des limites de la convention dans quelque temps ! L'une des avancées majeures était quand même la prise en compte de l'invalidité.

C'est un sujet qui, pour nous, est une priorité. Malheureusement, cela ne fonctionne pas comme nous l'aurions souhaité. C'est pour cela que, un peu taquin, je parlais, d'ici quelques années ou quelques mois si l'on est pessimiste, des limites du dispositif conventionnel. Je ne veux toutefois pas me substituer à ce qu'a évoqué le président de la commission scientifique.

M. Bernard Asselain : J'ai très peu parlé du côté invalidité. Je peux en dire rapidement quelques mots.

C'est un problème encore plus difficile que la mortalité. Il n'y a pas de définition standard, simple et claire de l'invalidité. La sécurité sociale la définit comme un revenu potentiel inférieur à un tiers du revenu normal qu'aurait eu le salarié s'il avait pu continuer à occuper son emploi. Les assureurs la définissent à partir de deux référentiels qui sont en fait des échelles d'incapacité. Ce n'est pas la même chose qu'une échelle pragmatique de gains.

On va essayer de recenser ces éléments et de se mettre d'accord. Les deux définitions, quand on y réfléchit, arrivent à se recouper plus ou moins.

Les données sont très peu nombreuses. Les principales proviennent des assureurs eux-mêmes. Il faut donc arriver à obtenir que l'on puisse avoir accès ensemble à ces données. Il y a bien sûr là des problèmes de confidentialité.

Il existe d'autres sources de données qui sont celles de l'assurance maladie. Un premier travail a été fait par la caisse nationale, dans certaines pathologies, pour nous donner quelques chiffres à deux et cinq ans des entrées en invalidité pour des personnes atteintes d'une affection grave, c'est-à-dire d'une affection longue durée déclarée en ALD. Si les assureurs veulent bien nous aider, on peut mettre ces chiffres en parallèle avec les leurs.

Nous avons le projet, dans ce domaine difficile, de lancer un appel d'offres qui est pratiquement prêt. La commission a un petit budget mais nous allons essayer de l'utiliser pour avancer dans ce domaine et mettre en concurrence des équipes d'épidémiologistes qui travailleraient sur ce domaine de l'invalidité, soit à partir des données de la sécurité sociale soit à partir d'études de cohortes. Il y a deux grandes cohortes qui sont suivies depuis maintenant vingt ans. L'une est celle des salariés d'EDF-GDF. Ces données pourraient servir pour essayer d'établir quelques règles et quelques chiffres.

L'autre cohorte est encore plus particulière. Il s'agit d'une cohorte de la MGEN qui porte sur les femmes de l'éducation nationale. Elle est très riche en données, à tout niveau. Elle contient également cette notion d'invalidité et d'incapacité qui pourrait donc être étudiée.

Voilà nos pistes actuelles. C'est un domaine compliqué ; c'est pourquoi je l'avais évoqué sans l'approfondir. On n'espère pas déboucher dans l'année qui vient sur des chiffres totalement concrets. Il y aura quelques éléments fournis par l'assurance maladie mais ils sont à vérifier très soigneusement.

M. Gérard Méneroud : Effectivement, au terme de discussions importantes et nombreuses au sein de la commission de suivi de la convention, nous avons abouti à l'engagement, pour les risques très aggravés, d'offrir des solutions sur l'invalidité quand c'était possible.

Ceci a été mis en place, avec les difficultés scientifiques qui viennent d'être rappelées. Nous avons, pour un nombre de cas relativement limité pour les risques très aggravés, mais beaucoup plus large pour le niveau 2 que l'on évoquait, apporté des réponses en termes d'invalidité. Nous sommes donc prêts à travailler avec la commission scientifique sur les définitions afin de progresser en la matière.

De ce point de vue, un travail épidémiologique est nécessaire pour avoir des éléments permettant de bien mesurer le risque sur ces populations qui sont en nombre faible et qui posent des problèmes d'études statistiques.

Autre élément : on disait que les candidats à l'emprunt ne font pas toujours le tour des différents établissements. Je rappelle que nous avons pris l'engagement que les propositions d'assurance effectuées par un assureur restent valables quatre mois sans autre visite, à partir du moment où elles ont été formulées de façon à donner le temps aux personnes pour qui la réponse n'est pas satisfaisante de se tourner vers d'autres professionnels ou vers des solutions alternatives.

Mme Françoise Palle-Guillabert : Quelques mots sur la concurrence. Il existe sept grands réseaux bancaires français sur le territoire national ; ils sont en concurrence très forte et les clients font largement jouer cette concurrence, en particulier quand ils ont un projet immobilier. Selon nos statistiques, ils contactent au moins trois établissements. Comme je l'indiquais, certains établissements ou assureurs se sont plus particulièrement spécialisés sur tel type de clientèle ou de produits.

Il nous semble donc que le marché français répond bien, en termes de concurrence et de diversité des produits, à ce que peuvent attendre des clients dans des situations très différentes les unes des autres.

M. Nicolas About, président : Partagez-vous ce point de vue, monsieur Morel ?

M. Marc Morel : Pas tout à fait mais nous ne sommes pas ici pour polémiquer !

Je voulais revenir sur les garanties alternatives et sur l'invalidité, qui sont des questions essentielles.

S'agissant des garanties alternatives, nous considérons aujourd'hui que le système ne fonctionne pas. On est dans une forme d'hypocrisie où, de fait, en France, il n'y a pas de prêt sans assurance même si l'assurance n'est pas obligatoire en droit. Les garanties alternatives fonctionnent peut-être pour un tout petit pourcentage de gens qui ont un très gros patrimoine mais on n'est pas là pour régler ce problème. Il y a donc un effort à faire en ce domaine.

Comme l'a dit M. Fischer, il ne faut pas se voiler la face : beaucoup de gens continueront à faire de fausses déclarations car on ne déclare que si l'on est couvert à un taux acceptable.

L'invalidité est vraiment le point majeur. Quinze des trente associations qui forment le CISS ont fait le choix de ne pas signer la convention, dont de très grosses, comme l'association des paralysés de France, considérant que l'on n'arriverait pas à régler ce problème. Cela fait un an et demi qu'on a signé. On ne peut s'enliser dans les travaux de la commission des études et recherches. Nous attendons aussi des assureurs qu'ils devancent les travaux de la commission car, à moins qu'elle ne siège à temps plein pendant quinze ans, elle ne pourra jamais produire des données objectivées sur l'invalidité auxquelles tout le monde adhérera. Les assureurs doivent prendre conscience de l'urgence qu'il y a à ce qu'un certain nombre de dossiers soient couverts pour ce qui est de l'invalidité, avancée principale de la convention Aeras.

M. Pierre Bernard-Reymond : Je suis arrivé récemment au Sénat ; je n'ai donc ni étudié, ni voté la loi qui nous réunit aujourd'hui. Je suis surtout venu pour m'informer et je souhaiterais poser deux questions aux banques et aux assurances.

Tout d'abord, quel pourcentage, dans votre chiffre d'affaires total, représente l'action dont nous parlons aujourd'hui ?

En second lieu, à l'intérieur de vos organismes, comment cette activité est-elle perçue ? Est-ce une entreprise citoyenne ou, au contraire, est-ce perçu comme une activité commerciale classique à laquelle on applique les critères appropriés ?

Je ne porte pas de jugement de valeur sur l'une ou l'autre des deux perceptions car il y a des avantages et des inconvénients pour l'une et l'autre ; si vous vous percevez comme entreprise citoyenne dans cette activité, on stigmatise les personnes mais, en même temps, on élargit les critères d'accessibilité. Tout cela est donc très complexe.

M. Karim Felissi : Je voudrais livrer à la commission deux phrases que j'ai entendues. La première émane du président de la commission scientifique, qui nous a dit en commençant et à juste titre : « Il faut arriver à obtenir que l'on puisse avoir accès aux données des assurances ».

La seconde phrase est de M. Méneroud, qui nous dit : « Nous sommes prêts à travailler avec la commission scientifique ». Je m'en félicite puisque nous sommes dans les jours qui suivent Pâques. C'est un monde nouveau !

Je livre ceci à la réflexion des parlementaires. C'est, sur la question de l'invalidité, assez révélatrice d'une situation qui commence à devenir quelque peu gênante pour la Fnath. Comme Marc Morel l'a dit, il n'est pas souhaitable d'arriver à un enlisement.

M. Nicolas About, président : Peut-on répondre à la question du sénateur Bernard-Reymond ? Est-ce pour vous une activité comme une autre ou cela vaudrait-il la peine de le faire comme une opération de communication ? On peut aujourd'hui faire faire un tour du monde à un bateau à voile. On pourrait se dire qu'après tout, ce serait une façon pour une société de faire sa communication que de dire : « Je prête à des gens qui ont un risque élevé ».

M. Gérard Méneroud : Pour un assureur, s'il n'y a pas de risque, il n'y a pas d'assurance.

M. Nicolas About, président : Il ne faut pas qu'il soit trop gros !

M. Gérard Méneroud : Tout est question de mesure, l'abus en tout est nocif !

Le chiffre d'affaires de l'assurance emprunteur est de 5 milliards d'euros pour un chiffre d'affaires de 150 milliards pour l'ensemble des assurances de personnes. C'est une activité importante mais ce n'est pas la seule. L'activité de risque aggravé représente à peu près 12 % de ces 5 milliards. On est donc sur un chiffre d'affaires de 600 millions. Ce n'est pas négligeable et c'est, de ce point de vue, quelque chose qui nous intéresse. J'ai dit que nous souhaitions assurer le maximum de personnes.

Les risques très aggravés représentent 2 % des 600 millions. On arrive là dans des ordres de grandeur d'une dizaine de millions où nous cherchons à repousser les limites de l'assurabilité tout en faisant notre métier. Quant on est aux limites, on rejoint peut-être des positions d'entreprises citoyennes. C'est pour cela que nous avons voulu travailler et coopérer avec les associations, alors qu'il y a quelques années, on se disputait et on polémiquait.

M. Nicolas About, président : Combien de prêts ne vont pas à leur terme ? Avez-vous si bien calculé le risque que vous n'avez jamais rien perdu ? C'est le fils de banquier qui parle et j'en suis très fier ! Je comprends bien le métier de la banque et de l'assurance mais après tout, c'est l'argent des clients que l'on prête. Prenez-vous réellement un risque ? Est-ce démontré sur les résultats ?

Mme Marie-Thérèse Hermange, rapporteur : Seriez-vous susceptible, à la page 19 du petit document que vous nous avez communiqué, de supprimer ou en tout cas d'amodier cette phrase : « Votre banque fonde sa décision sur le seul critère de votre solvabilité présente et future » ? Je la trouve terrible !

M. Gérard Méneroud : Pour les risques très aggravés, on a aujourd'hui un recul court mais notre prévision est que l'on va être au-delà de 100 % de rapport « sinistres à primes ». Cela signifie que l'on paiera plus que ce que l'on a touché comme primes.

M. Nicolas About, président : Dans 100 % des cas ?

M. Gérard Méneroud : Nous ne paierons pas dans 100 % des cas. Selon notre analyse, nous paierons plus que ce que nous aurons touché. La prime est un pourcentage faible du montant à payer lors du sinistre.

On est, sur les capitaux empruntés, de l'ordre de 1 % en moyenne. Il suffit que 2 % de ces populations décèdent pour que l'on paie plus que ce que l'on a encaissé comme primes. Sur les 2 % de risques très aggravés, nous perdrons de l'argent.

M. Guy Fischer : Et vous vous rattrapez sur le reste...

M. Gérard Méneroud : C'est une activité d'ensemble. C'est la mutualisation dont on parlait. Sur l'ensemble des risques aggravés, nous aurons un rapport « sinistres à primes » de l'ordre de 70 à 80 %. Ensuite, il y a nos frais de gestion, nos marges.

Mme Françoise Palle-Guillabert : On ne peut identifier dans notre portefeuille de prêts immobiliers ceux qui sont consentis à des risques aggravés de santé. Je ne puis donc dire quelle est la proportion. Il y a une confidentialité des données médicales de santé des clients et on ne connaît pas la nature du risque ; la Cnil nous interdirait sans doute de mentionner ceux qui ont des difficultés de santé.

M. Nicolas About, président : Ne pouvez-vous pas vous en douter d'après les surprimes ?

Mme Françoise Palle-Guillabert : Comme je l'indiquais, il y a aussi des surprimes pour des gens en parfaite santé mais qui, par exemple, pratiquent un sport à risques. On a donc une estimation mais le champ du radar est trop large. On n'a pas le droit de le réduire aux risques aggravés de santé. Il faudrait faire une base de données et la Cnil ne nous laisserait certainement pas le faire ; c'est sans doute bien pour la vie privée des clients.

M. Gérard Méneroud : C'est un vrai problème d'éthique.

Mme Françoise Palle-Guillabert : Par ailleurs, une jurisprudence constante de la Cour de cassation sur le devoir d'alerte du banquier qui prête de l'argent à son client a été très récemment réaffirmée.

Le devoir d'alerte est un peu en-dessous du devoir de conseil mais le banquier, quand il examine son dossier et qu'il analyse sa solvabilité, se doit d'alerter son client sur le risque qu'il a de ne pas mener son projet à terme. S'il ne le fait pas, il est déchu de son droit à percevoir des intérêts. Les tribunaux sont extrêmement stricts en la matière. Nous appliquons bien évidemment la jurisprudence de la Cour de cassation.

Cela explique sans doute que le niveau de risque et la sinistralité sur les crédits immobiliers des Français soient assez faibles, de l'ordre de 2 % selon moi, très inférieur sans doute à ce que l'on constate chez nos partenaires européens ou outre-atlantique.

Encore une fois, c'est la juridiction suprême qui nous demande de travailler ainsi ; c'est sans doute en référence à des difficultés de surendettement qu'on a pu constater ici ou là et à une certaine vision de la responsabilité du banquier prêteur vis-à-vis de son client.

La conception que nous avons de la convention Belorgey et de la convention Aeras dans la profession bancaire va bien au-delà de la question de la banque citoyenne. On est bien conscient qu'il y a des attentes de nos clients. Je n'ose pas prononcer le mot « commerciales », sans doute un peu inadapté pour le sujet qui nous occupe mais il y a bien une demande forte de la part de nos clients pour que l'on s'attache à les suivre dans les différentes étapes de leur vie et dans leurs différents projets.

La probabilité qu'un client vienne nous demander un crédit alors même qu'il a un risque aggravé de santé, qu'il l'aura ou qu'il l'a eu, est tellement importante que cela devient un enjeu qui dépasse celui d'une entreprise citoyenne. Il s'agit vraiment de répondre dans les meilleures conditions de sécurité possibles aux demandes qui nous sont faites.

M. Nicolas About, président : Il me reste à vous remercier d'avoir accepté de participer à cette table ronde.

Nous renouvellerons l'exercice pour suivre l'avancement de vos travaux, en particulier ceux de votre commission, monsieur Asselain, qui nous permettront de voir si l'on peut vraiment avancer sur ce sujet délicat.

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