3. Un accompagnement insuffisant de la réforme
a) Les carences de l'État
Les services du ministère ont réfléchi de longue date à la réforme, ainsi qu'il a été dit précédemment.
On ne peut nier, certes, que des efforts aient été accomplis pour assurer sa mise en oeuvre. Tel a été le cas, notamment, pour ce qui concerne les aides apportées aux départements en vue de l'élaboration des schémas départementaux d'enseignement artistique : le vademecum et la mission pilotée par M. Yvan Sytnik, ont constitué un appui très précieux.
Néanmoins, votre rapporteur ne peut que relayer le constat établi par la quasi-unanimité des personnes auditionnées : celui d'une insuffisante concertation tant en amont qu'en aval de la loi. Indéniablement, l'absence de « feuilles de route » coordonnées à destination des DRAC et, par conséquent, des acteurs - élus et professionnels - est tout à fait regrettable.
Ainsi, nombre d'élus ont dénoncé un déficit de méthodologie , de concertation et d'accompagnement de la part de l'État et de ses services déconcentrés. Mme Sylvie Robert, représentante de l'ARF et par ailleurs élue à la ville de Rennes, a indiqué qu'aucune réunion d'information des élus n'a été organisée par la DRAC de Bretagne. Ce cas ne fait pas exception, même si, dans certaines régions, les élus ont été associés aux concertations. A contrario , certains représentants du ministère ont souligné les difficultés qu'ils rencontraient parfois à mobiliser les élus sur ce sujet.
En tout état de cause, compte tenu de l'inégal investissement des DRAC - et de leurs conseillers musique - sur ce dossier, il est permis de se demander s'il n'aurait pas été opportun que les préfets s'impliquent davantage dans ce volet spécifique de la décentralisation. Votre rapporteur a relevé, en effet, que dans un contexte de mutation de ces services déconcentrés, les représentants du ministère de la culture en région se sont bien souvent retrouvés peu à leur aise face à ce dossier complexe et sensible.
Votre rapporteur s'étonne, par ailleurs, de l'insuffisante prise en compte du bilan des protocoles de décentralisation qui avaient pourtant été engagés à cette fin. Il est vrai, ainsi qu'il a été dit précédemment, que seul l'un d'entre eux - dans la région Nord-Pas-de-Calais - a concerné l'enseignement artistique : mais n'aurait-il pas été d'autant plus facile de s'inspirer de ses conclusions ?
b) Un dossier « technique » apparu peu prioritaire aux yeux d'un certain nombre d'élus
Si le ministère de la culture s'est lui-même emparé tardivement du dossier, votre rapporteur a pu constater que les élus, et notamment les maires, ne se sont que trop rarement, ou faiblement - voire pas du tout - impliqués sur la question.
Il faut voir, sans nul doute, un lien de cause à effet entre ces deux constats.
En outre, le volet « enseignement artistique » s'est retrouvé « noyé » dans un texte de loi comprenant plus de 200 articles, et engageant des transferts de compétences majeurs et de grande ampleur, dans le domaine de l'équipement, de l'action sociale, du logement ou encore de l'éducation, avec par exemple le transfert aux départements et régions des personnels techniciens, ouvriers et de service (TOS) des collèges et des lycées.
On comprend donc aisément que le sujet ne soit pas apparu prioritaire pour une majorité d'élus, dans ce contexte de vastes réformes des compétences locales. Votre rapporteur s'est vue confirmer, par nombre d'entre eux, que ce volet « enseignement artistique » n'est arrivé, en effet, qu'en « fin de liste » pour les collectivités, après les différents « chantiers », tels que ceux cités plus haut ou les autres transferts intervenus dans le domaine de la culture (comme le transfert des services de l'inventaire notamment), traités prioritairement.
De surcroît, l'apparente technicité du dossier a représenté un frein pour un grand nombre d'élus : en parallèle, les professionnels du secteur, à savoir les directeurs de conservatoire notamment, fortement engagés sur la question de la réforme des enseignements artistiques, se sont emparés - avec passion - du sujet, sans doute au détriment des élus. Ces derniers ont, sauf de trop rares exceptions, laissé le dossier aux mains des « techniciens », alors qu'au-delà des aspects certes techniques du sujet, ce sont d'enjeux éminemment politiques dont il est question.