2. Envisager une adaptation du cadre juridique et financier de l'enseignement artistique
a) Aller vers des « pôles de ressources » et développer une logique de réseau entre établissements d'enseignement artistique dans le cadre d'EPCC
L'établissement public de coopération culturelle (EPCC) a pour avantage d'être un instrument efficace de décentralisation à la fois fonctionnelle et territoriale.
On rappellera que la loi du 4 janvier 2002 portant création de l'établissement public de coopération culturelle répondait à une forte et longue attente des professionnels de pouvoir disposer d'un instrument de gestion spécifique aux activités artistiques et culturelles. Sur l'initiative de notre collègue Ivan Renar, des améliorations lui ont été apportées en 2006 16 ( * ) .
L'EPCC répond au triple objectif suivant :
- offrir un cadre d'organisation adapté aux spécificités des services culturels et garantissant une certaine stabilité et pérennité ;
- fournir un cadre de gestion associant souplesse de fonctionnement et rigueur de gestion ;
- permettre un partenariat équilibré, sur la base du volontariat, entre les collectivités publiques qui en sont membres.
C'est pourquoi votre rapporteur estime que ce statut juridique pourrait être utilement envisagé dans le domaine des enseignements artistiques, notamment en vue de développer une logique de réseau entre établissements.
Néanmoins, un certain nombre de conditions doivent être remplies pour garantir l'efficacité et le bon fonctionnement d'un tel établissement :
- il ne s'agit que d'un outil : il doit donc être mis au service d'une politique et d'un projet définis préalablement entre collectivités locales souhaitant progresser ensemble dans ce domaine ;
- il suppose une taille critique, son coût n'étant pas nul.
Ainsi qu'il a été suggéré plus haut, un « coup de pouce » financier de l'Etat pourrait inciter à la création d'EPCC ; l'Etat disposerait d'au moins un membre au sein de son conseil d'administration.
Dans des agglomérations d'une taille suffisante, ce statut aurait avantage à être adopté, par exemple dans un cadre intercommunal. Un élu a relevé aussi tout l'intérêt de créer un EPCC à échelle régionale, en particulier dans les régions de taille modeste.
Il apparaît également pertinent pour prendre en compte certaines situations spécifiques, telle que celle de l'Ile-de-France, par exemple.
Votre rapporteur relève, par ailleurs, que les collectivités locales devront avoir recours au cadre juridique de l'EPCC pour les écoles d'art , ce qui est devenu une exigence pour permettre à ces établissements d'enseignement supérieur de délivrer des diplômes, dans le cadre du passage au système Licence-Master-Doctorat (LMD). Cela aura vocation à inscrire de plus en plus l'ensemble de leur action culturelle dans une logique de réseau.
Pour ce qui concerne les enseignements artistiques, la création d'EPCC aurait pour avantage d'encourager l'harmonisation et la mutualisation des enseignements et des pratiques collectives, au travers des orchestres et autres formations. Ce nouveau cadre juridique permettrait de mieux intégrer dans des réseaux l'ensemble des établissements, quelque soit leur statut, y compris les écoles associatives, qui sont souvent insuffisamment prises en compte.
b) Alléger les contraintes fixées par le décret de classement permettrait d'aller dans le sens d'un allègement et d'une mutualisation des coûts dans une perspective d'aménagement pertinent du territoire
Une part non négligeable de l'évaluation à la hausse du coût des CEPI par les acteurs locaux tient aux nouvelles exigences imposées par l'Etat par le biais des textes réglementaires sur les CEPI ou sur les critères de classement des établissements. Des exigences plus élevées sont ainsi fixées aux conservatoires à rayonnement régional ou départemental, s'agissant de la qualification des enseignants et de la nécessité d'enseigner dans les trois disciplines : musique, théâtre et danse. Répondre à ce cahier des charges - dans le délai de sept ans fixé par la note du ministère du 20 juillet 2007, à compter du 12 octobre 2006, date de parution du décret relatif au classement - suppose pour bon nombre d'établissements de développer et structurer l'enseignement de la danse et du théâtre, ce qui exige d'importants efforts financiers.
Si l'on ne peut que respecter l'ambition qui anime ainsi le ministère d'améliorer, quantitativement et qualitativement, l'offre à la disposition de nos concitoyens, il faut néanmoins entendre les réactions de nombreux interlocuteurs auditionnés par votre rapporteur sur le thème : « l'Etat est très fort pour imposer ses exigences sans en supporter les conséquences, notamment financières ».
Au-delà du débat récurrent sur un supposé désengagement de l'Etat - assez peu pertinent au cas présent dans la mesure où l'Etat finance en tout état de cause très minoritairement les établissements d'enseignement artistique - votre rapporteur prône la recherche d'un plus juste équilibre entre les exigences imposées par l'Etat aux collectivités territoriales et la réalité de son engagement financier.
A cette fin, elle suggère, en premier lieu, un assouplissement de certains critères de classement. Le ministère pourrait envisager par exemple :
- de traiter de manière plus différenciée les trois disciplines musique, danse et théâtre ;
- d'alléger les obligations pesant sur les établissements, notamment sur les conservatoires à rayonnement départemental : selon la situation locale, il n'apparaît ni utile ni pertinent d'exiger la mise en place de CEPI dans toutes les disciplines ; il serait, à cet égard, plutôt judicieux de s'assurer de l'existence d'au moins un cursus par département, dans certaines disciplines plus rares.
Elle propose, en second lieu, d'inciter à la constitution de réseaux, au sein desquels des enseignants « référents » satisferaient aux exigences de formation, les autres pouvant disposer de cursus plus divers.
* 16 Voir la proposition de loi modifiant le code général des collectivités territoriales et la loi n° 2002-6 du 4 janvier 2002 relative à la création d'établissements publics de coopération culturelle et la loi n° 2006-723 du 22 juin 2006.