3. Un barème de rétribution en voie d'obsolescence
L'impasse financière décrite par la profession d'avocat est concomitante d' une « usure » progressive du barème retenu pour calculer la rétribution des missions d'AJ.
Au-delà de la problématique de la revalorisation de l'UV, la question se pose, en effet, de la base de référence même de ce barème .
L'UV était à l'origine conçue comme représentative d'une demi-heure de travail de l'avocat. Or, cette correspondance semble avoir perdu de son sens au fil du temps. Au point que, désormais, l'UV ne peut plus que s'apparenter de très loin à la rétribution d'une demi-heure de travail de l'avocat . En réalité, cette référence pratique est désormais devenue largement théorique.
Un tel constat n'est pas sans incidence sur le décalage , vigoureusement critiqué par la profession d'avocat, entre le « point mort horaire » et la rétribution des missions à l'AJ.
4. Des lourdeurs administratives agissant comme autant de circonstances aggravantes
Les revendications des avocats en matière d'AJ, parfois même leur exaspération à l'égard du système en place, ne peuvent se comprendre sans un éclairage sur les difficultés et les lourdeurs administratives auxquelles ils sont confrontés dans l'accomplissement de leurs missions.
En la matière, votre rapporteur spécial n'aura pas la prétention de recenser ici toutes les « péripéties » rencontrées dans la conduite d'une mission d'AJ : les anecdotes qui lui ont été rapportées au cours des auditions qu'il a menées sont innombrables et d'inégale importance. Il souhaite à tout le moins relever les plus révélatrices et les plus emblématiques .
La principale difficulté à laquelle sont confrontés les avocats lors d'une mission d'AJ tient à une délivrance souvent tardive de l'attestation de fin de mission (AFM) .
L'attestation de fin de mission (AFM) L'AFM est délivrée, par le greffier de la juridiction saisie, à l'avocat ayant assisté son client bénéficiaire de l'AJ. Elle mentionne la nature de la procédure, les diligences effectuées et le montant de la contribution de l'Etat à la mission de l'avocat. Une seule attestation, prenant en compte tous les événements survenus pendant le déroulement de l'instance civile ou pénale, est délivrée. Lorsque la mission est achevée avant la saisine du BAJ (cas notamment de l'urgence pénale), l'avocat commis d'office joint à la demande d'AJ l'AFM qui lui a été délivrée. Cette attestation revêt un caractère essentiel pour l'avocat dans la mesure où le paiement qu'il va demander à la CARPA est subordonné à la transmission de cette pièce . En matière d'assistance éducative, l'AFM est délivrée lorsque le juge des enfants rend le jugement sur le fond. |
En 2006, le CNB a réalisé une consultation de la profession par l'intermédiaire d'un questionnaire 33 ( * ) . Ce « sondage », pour autant qu'il puisse être représentatif, met en lumière que le délai moyen de délivrance de l'AFM au greffier de la juridiction par l'avocat est de un mois. Toutefois, ce délai moyen cache manifestement de fortes disparités et 54 % des avocats ayant répondu au questionnaire du CNB ont fait part de difficultés pour obtenir les AFM . Il ressort de la même étude que, dans certains barreaux, le délai de délivrance peut aller parfois jusqu'à « trois, six ou neuf mois » 34 ( * ) . Souvent, dans de tels cas, les retards sont notamment imputables à un défaut de personnels de greffe affectés à ces tâches et / ou à des effectifs de greffe insuffisants.
Une fois l'AFM reçue, le délai de règlement des AJ varient, en outre, de quelques jours à plusieurs mois 35 ( * ) . Ce délai paraît fluctuer de manière aléatoire en fonction des barreaux.
En bout de chaîne, l'avocat ayant réalisée une mission à l'AJ doit, dans certains cas, patienter plusieurs mois, parfois même plusieurs années si le procès est particulièrement complexe et long, avant de se voir rétribué. Cet état de fait peut, on s'en doute, avoir de graves répercussions sur la trésorerie et la santé financière des cabinets, notamment dans le cas des petites structures effectuant un nombre important d'AJ.
* 33 D'après le CNB, le questionnaire a été retourné par 913 avocats. L'analyse de ces retours a été présentée dans une communication de la commission « Accès au droit et à la justice » du CNB en date du 24 octobre 2006.
* 34 D'après la même communication.
* 35 Idem.