B. QUELLE PLACE POUR LES ASSOCIATIONS DE SUPPORTERS ?

1. Les supporters et le monde sportif

Les clubs et les dirigeants du football ont une attitude parfois ambiguë avec les supporters. En effet, d'une part, le public est sollicité afin de créer l'ambiance dans le stade, de jouer le rôle de douzième homme 22 ( * ) , et d'acheter l'équipement du parfait supporter (écharpes, maillots de joueurs...). En dépit de la moindre importance de la billetterie dans l'économie du football 23 ( * ) , leur présence et leur travail d'animation dans le stade sont une demande des sponsors et les clubs ont souvent favorisé le développement des groupes « ultras » 24 ( * ) . D'autre part, ce public est appelé à rester fair-play et à ne surtout pas intervenir dans la gestion du club. L'équilibre n'est pas forcément aisé. Globalement, les supporters, qui ont des difficultés à se réunir sous une bannière commune (voir supra ), sont peu associés aux décisions des clubs. Ils sont au demeurant peu à revendiquer une telle participation, ce qui crée des difficultés lorsqu'il s'agit de régler des problèmes récurrents tels que l'utilisation des fumigènes. Cette organisation est ainsi très lointaine du modèle incarné par les grands clubs espagnols, où les supporters (les « socios ») détiennent des parts du club et participent à l'élection du président du club, ce qui implique qu'ils sont conscients des risques que présentent les dérives violentes et qu'ils exercent un contrôle interne assez fort.

Certes, à Marseille, afin « d'acheter la paix sportive », les dirigeants du club ont décidé, dans les années 1990, de déléguer à certaines associations de supporters la vente d'une partie des places. Mais les effets pervers de cette pratique, avec la transformation des associations en petites entreprises ont largement dépassé les avantages en termes d'intégration des supporters.

La question de la structuration des mouvements supporters dans les clubs n'est donc pas résolue.

2. Les supporters, enjeu local

A travers les rencontres sportives qui opposent les clubs, ce sont souvent des communautés locales qui entrent en concurrence. Olivier Le Noé évoque à cet égard un phénomène de « réactualisation des guerres de clocher folkloriques » 25 ( * ) , s'agissant des matchs de football. Les exploits des « petits poucets » de la Coupe de France offrent ainsi aux supporters des équipes un espace pour rêver changer de vie et renverser un instant l'échelle sociale.

Autour de Marseille, l'OM est ainsi un véritable ciment d'identification locale . Nombreux sont ceux qui se disent « Fiers d'être marseillais », lorsqu'ils assistent à un match de l'équipe locale. Une cinquantaine d'associations, surtout concentrées en Provence, regroupant 6 000 membres, réunissent ainsi les supporters de l'équipe. Le FC Barcelone est un symbole de la Catalogne, d'où l'importance des confrontations avec le Real Madrid, grand club de la capitale.

Vos rapporteurs estiment que cela doit inciter les collectivités territoriales à s'investir davantage sur la question des supporters.

* 22 Selon C. Bromberger, op. cit., lors de la saison 1985-1986, sur 32 matchs observés en France et en Italie, dans 26 cas, les joueurs locaux ont choisi de débuter la partie dans la moitié de terrain conquise par leurs supporters.

* 23 Les ventes au guichet représentent aujourd'hui 15 % des recettes des clubs, contre presque 100 % en 1970.

* 24 Selon D. Bodin et S. Héas, « Le hooliganisme : de l'impossible catharsis du spectacle sportif à la spectacularisation du supportérisme » , in Le sport en questions. Pour une approche critique du sport, P. Duret, D. Bodin (dir.), Paris, 2004.

* 25 O. Le Noé, « Le football, enjeu local », Pouvoirs, 2002.

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