2. Les autres acteurs du système d'assurance maladie
On l'a vu, le système d'assurance maladie organisé autour des obras sociales ne couvre qu'une proportion de la population estimée à environ 52 % de la population. Les statistiques demeurent imprécises mais il semble que les chiffres aient chuté avec la crise économique. De surcroît, cette donnée moyenne ne reflète pas la diversité des situations locales qui varient selon les provinces. Dans la province du nord-est, seuls 40 % de la population sont couverts ; dans les régions les plus riches, ce chiffre atteint 80 %.
Quoi qu'il en soit, il en résulte que les 48 % de la population non pris en charge par les obras sociales doivent être couverts par les deux autres opérateurs du système : les assureurs privés et le service public.
Cette situation fait peser une contrainte particulièrement lourde sur le secteur public qui doit être en mesure de prendre en charge les populations les plus démunies et ce, dans un contexte de crise économique qui entraîne une réduction des ressources financières et l'accroissement du nombre de patients potentiels.
a) Le secteur public et le secteur privé
La position de deux autres acteurs, le secteur privé et le secteur public, est une nouvelle illustration de la fragmentation et de la complexité du système argentin d'assurance maladie. On y trouve d'un côté, le secteur privé, qui offre une couverture santé aux assurés ayant souscrit un contrat, soit dans le cadre d'une démarche individuelle, soit dans le cadre d'une souscription collective, et de l'autre le secteur public, qui n'est en aucun cas un assureur mais un prestataire de soins.
Le secteur privé , contrairement à ce que nous connaissons en France, n'intervient que très peu comme assureur complémentaire ; selon les statistiques disponibles, seuls 10 % des assurés auprès d'une obra sociale et 18 % des assurés pris en charge par le PAMI (les retraités) ont souscrit un contrat complémentaire santé.
Le mode traditionnel d'intervention des assureurs privés est donc identique à celui du régime obligatoire de base qui permet l'accès aux soins pour le souscripteur et ses ayants droit. Les prestations offertes par ces opérateurs privés permettent l'accès à des structures de soins performantes et onéreuses.
Ce secteur assure la couverture de 9 % de la population, pris en charge par près de deux cents opérateurs. Il convient toutefois de souligner que les bénéficiaires de ces contrats sont concentrés à plus de 80 % à Buenos Aires et ses alentours. 65 % des assurés ont effectué une démarche individuelle pour bénéficier d'une couverture privée, les 35 % restants étant affiliés à des contrats collectifs souscrits dans le cadre professionnel.
Le système public demeure largement insuffisant pour offrir un service de qualité aux 39 % de la population qui en dépendent. L'hôpital est la pierre angulaire du secteur public. Il assure les soins des plus démunis et de toutes les franges de la population qui ne disposent pas d'une couverture sociale suffisante. La crise a augmenté le nombre de personnes dépendant de l'hôpital public.
En juin 2002, 42 % de la population globale disposaient des services hospitaliers publics comme seul recours sanitaire.
Le secteur public est gratuit et financé par les régions sur leurs ressources propres. Elles reçoivent également des aides de l'Etat fédéral.
L'offre publique de soins ne correspond pas forcément aux besoins de la population : elle varie suivant les régions et, dans la majorité des cas, les établissements sont situés dans les zones urbaines et peu présents dans les zones rurales. Dans la mesure où le service public doit assurer les soins des populations les plus pauvres, il serait nécessaire de corriger sa répartition territoriale ; les autorités argentines sont conscientes de cette nécessité mais les mesures correctrices sont longues à se mettre en place en raison de la complexité du système de santé, mais également en raison de la faiblesse financière des principaux opérateurs sanitaires publics que sont les régions et les communes.
Le secteur public doit faire face à une difficulté supplémentaire : en effet, outre la prise en charge des personnes ne disposant d'aucune couverture, les hôpitaux assurent des prestations de soins pour le compte des obras sociales ou des assureurs privés. C'est ainsi qu'entre 30 % et 40 % de la patientèle qui accède aux établissements publics bénéficient de la sécurité sociale et ont droit aux services hospitaliers avec un système de tiers payant.
Cette situation est source de déséquilibres pour au moins trois raisons :
- premièrement, elle a pour effet de réduire les capacités hospitalières mises à la disposition des plus démunis. Cette situation est d'autant plus critique dans les régions où l'offre de soins est essentiellement publique ;
- deuxièmement, jusqu'à une période récente, le principe de la gratuité des établissements de santé conduisait à cette situation paradoxale dans laquelle les assurés étaient pris en charge par les établissements publics sans que leur assureur ne débourse d'argent. Les autorités publiques ont pris conscience de cette anomalie et ont mis en place un système de contractualisation entre les assureurs ( obras sociales et médecine prépayée) afin que les hôpitaux soient rémunérés lorsqu'ils délivrent une prestation de soins à une personne bénéficiant d'une couverture sociale ;
- troisièmement, les hôpitaux subissent les conséquences de la fragilité financière, voire de l'impécuniosité des opérateurs du système d'assurance maladie.