D. L'ASSAINISSEMENT DE L'ÉCONOMIE CORÉENNE
1. Une injection de fonds publics à hauteur de 30 % du PIB
Dans le cas de la Corée, les fonds publics injectés en part du PIB ont été encore supérieurs à ceux du Japon, puisque des économistes les évaluent à environ 30 % du PIB (contre 20 % pour le Japon) 33 ( * ) . M. Kwon Tae-shin, vice-ministre de l'économie et des finances, a confirmé cet ordre de grandeur, indiquant à la délégation que le montant précis des fonds publics utilisés avait été de 158 trillions de wons.
Comme au Japon, certaines banques en difficulté ont été nationalisées. Certaines le sont encore, et doivent être prochainement privatisées.
2. La mise en place d'un régulateur unique
En 1998, un régulateur unique a été mis en place pour l'ensemble du secteur financier coréen : la Financial Supervisory Commission (FSC). La régulation financière de la Corée - comme celle du Japon - correspond donc au modèle britannique, un organisme unique étant chargé de l'ensemble de la régulation financière.
3. L'amélioration de la gouvernance des entreprises
La Corée s'est également efforcée d'améliorer la gouvernance de ses entreprises.
a) L'assainissement des chaebols
Les chaebols ont été contraints à se restructurer, à se désendetter, et à faire preuve de davantage de transparence 34 ( * ) .
Les chaebols sont de grands conglomérats, généralement issus de petites entreprises familiales, qui se sont développés sur le modèle des zaibatsus japonais, avec l'appui des pouvoirs publics. Les 30 premiers chaebols représentent environ 15 % du PIB, 30 % du PIB manufacturier, 80 % des exportations et 700.000 emplois. Les cinq principaux chaebols, ou « big five », étaient Hyundai, Samsung, SK, LG et Daewoo, ce dernier ayant fait faillite en 1999.
La crise de liquidité qui a touché la Corée à la fin de 1997 et au début de 1998 a privé les banques locales et, par contrecoup, les conglomérats, des capitaux nécessaires à la poursuite de leur expansion. L'endettement excessif de la plupart des grands groupes et leur incapacité à honorer leur dette ont poussé à la faillite une grande partie du secteur financier coréen.
La crise de 1997-1998 a servi de révélateur à la nécessité d'adaptation des chaebols. Cette restructuration a été très largement imposée par M. Kim Dae-jung, alors président de la République, sous l'impulsion du FMI et de l'OCDE.
Un cadre législatif dérogatoire au droit commun a été imposé aux 30 premiers groupes en termes d'actifs. Les principales mesures ont concerné :
- le désendettement des grands groupes : les autorités coréennes ont imposé aux 30 premiers conglomérats un objectif de ratio dette / capital inférieur à 200 %, alors que le ratio moyen s'établissait à 519 % à la fin de 1997 ;
- l'interdiction des garanties croisées entre filiales d'un même groupe ;
- le recentrage sur quelques métiers de base, par une pression à la baisse sur le nombre total de filiales et par l'interdiction faite aux chaebols de consacrer plus de 25 % de leur capital à de nouvelles prises de participation ;
- la soumission des trente premiers chaebols à une obligation de publication annuelle de leurs comptes consolidés (pour la première fois en juillet 2000) et à un renforcement du contrôle des petits actionnaires sur les résultats financiers des groupes ;
- l'interdiction d'investir dans des filiales financières.
Le groupe Daewoo a fait faillite en 1999.
Plusieurs chaebols ont été démantelés. Tel a en particulier été le cas de Daewoo (après sa faillite) et de Hyundai :
- Daewoo a été scindé en plusieurs entreprises, et sa branche automobile vendue à General Motors 35 ( * ) ;
- Hyundai a été scindé en deux pôles, relatifs respectivement à l'automobile d'une part, à l'industrie et aux services d'autre part 36 ( * ) .
Ce mouvement n'est pas encore achevé.
Par ailleurs, la « moralisation » des chaebols a donné lieu à la condamnation des dirigeants de certains chaebols, dont SK, Hyundai Motor et Daewoo.
M. Cho Kun-ho, président de la Federation of Korean Industries , a estimé devant la délégation que la collusion entre les milieux économique et politique, importante jusqu'en 1997, avait désormais disparu.
* 33 Honoban P. et Klingebiel D., « « Controlling the Fiscal Cost of Banking Crises », Policy Research Working Paper, n° 2441, Banque mondiale, 2000.
* 34 Les développements ci-après s'appuient sur une note rédigée par M. Yves de Ricaud, alors conseiller économique et commercial de l'ambassade de France en Corée, en date du 6 février 2002.
* 35 AFP, 14 juin 2005.
* 36 Libération, 13 mai 2006.