b) Des facteurs cumulatifs : les accidents de la vie, le chômage et la montée du phénomène de « pauvreté au travail »
Parmi les ménages pauvres, 35 % sont des ménages dont un des membres a connu une période de chômage au cours des douze derniers mois, soit 2,5 fois plus que parmi l'ensemble des ménages. De même, les ménages qui ont connu un problème professionnel ayant détérioré leurs revenus, un divorce, un décès, un accident ou un problème grave de santé sont sur-représentés parmi les ménages présentant des difficultés importantes de conditions de vie.
Plus particulièrement orienté vers les familles monoparentales et les familles nombreuses, le système redistributif contribue fortement à réduire les situations de pauvreté de ce type de ménages . Il le fait toutefois de manière différente selon la situation vis-à-vis de l'emploi de ces ménages. L'Observatoire national constate la persistance d'un taux de pauvreté significativement plus important après transferts pour les ménages en situation de chômage partiel ou total, quelle que soit la composition du ménage et malgré la générosité des transferts sociaux à destination des ménages initialement les plus modestes.
Malgré leur plus grande générosité, les transferts ne permettent donc pas de compenser la faiblesse des ressources initiales pour une part importante de ces ménages, les limites et les « trous » constatés dans les mécanismes d'indemnisation de la perte d'emploi jouant sans doute, à cet égard, un rôle important.
Les ménages mono-actifs ont également un taux de pauvreté au travail supérieur à celui des ménages bi-actifs. En outre, à situation donnée, la présence de personnes supplémentaires dans le ménage accentue le risque de pauvreté au travail. Les familles nombreuses et monoparentales sont donc particulièrement exposées. Lors de son audition par la délégation, après avoir rappelé que la pauvreté avait été réduite de moitié depuis 30 ans dans notre pays , M. Martin Hirsch, président d'Emmaüs France, a, en revanche, insisté sur l'augmentation de la paupérisation à l'âge actif , en citant l'exemple des femmes travaillant à mi-temps et dont le salaire constituait, autrefois, un revenu d'appoint pour le ménage, mais ne permet plus aujourd'hui à une femme divorcée de vivre dans des conditions décentes avec ses enfants.
Dans la réalité, le chômage et la rupture des couples sont des phénomènes souvent cumulatifs : « l'instabilité professionnelle et le chômage ont un impact fort sur la rupture » , indique le Haut Conseil de la population et de la famille. Une enquête INSEE avait élaboré, en 1986, un « Indice d'instabilité conjugale selon la situation par rapport à l'emploi » qui doublait avec la précarisation de la situation professionnelle du mari. Ce constat semble se vérifier de façon quasi universelle : au Royaume-Uni, il est établi qu'un chômeur a 2 , 3 fois plus de risques de divorcer dans l'année suivant son inscription au chômage qu'une personne n'ayant jamais été à la recherche d'un emploi. Des études américaines indiquent que les couples de chômeurs ont 3,5 fois plus de risques de connaître une séparation ou un divorce que les couples sans chômeur. Il convient cependant de faire observer que la croissance générale du nombre des divorces et des séparations est historiquement corrélée à l'augmentation des taux d'activité féminins .