4. Audition de Mme Gabrielle Gauthey, membre du collège de l'Autorité de régulation des Postes et des Communications électroniques (ARCEP)
Mme Gabrielle Gauthey a tout d'abord fait observer que les « zones blanches », territoires dépourvus d'accès à l'Internet haut débit, étaient en voie de résorption, notamment grâce à l'engagement de France Télécom d'étendre la couverture en adaptant, d'ici à 2006, ses 12.000 répartiteurs à la technologie de l'Asymetric digital subscriber line (ADSL). Rappelant que c'est le développement de la concurrence grâce au dégroupage de la boucle locale qui a favorisé le décollage de l'Internet haut débit en France à des tarifs particulièrement bas, elle a indiqué que 6 millions de Français étaient aujourd'hui abonnés à l'ADSL et que, pour plus de la moitié d'entre eux, le fournisseur d'accès à IInternet était un opérateur alternatif.
M. Alain Fouché a constaté certaines lacunes dans la couverture ADSL de son département et a mis en cause l'insuffisance de la puissance des moyens de diffusion.
S'interrogeant sur la mesure de la couverture en haut débit, M. Claude Biwer a souligné la différence entre la couverture de la population et la couverture du territoire.
Mme Gabrielle Gauthey a précisé que 90 % de la population se trouvait fin 2004 dans une zone couverte par le haut débit et que 98 % devrait l'être à la fin de l'année 2006. En outre, a-t-elle indiqué, 70 % du territoire bâti était couvert fin 2004 et l'objectif est d'arriver à une couverture de 80 % du territoire bâti fin 2006. Elle a fait valoir que la nouvelle technologie hertzienne du World interoperability for microwave access (Wimax) pourrait contribuer à la couverture des zones blanches en complément de l'ADSL, mais aussi être utilisée pour l'Internet mobile dans les zones urbaines denses ainsi qu'en amont, pour les réseaux de collecte. Elle a indiqué qu'une seule fréquence nationale avait pour l'instant été donnée à l'opérateur Altitude Télécom et que l'attribution d'autres fréquences, sans exclure a priori les collectivités territoriales, allait être décidée sous peu. Elle a expliqué que la puissance du Wimax diminuant avec la distance, cette technologie ne permettrait pas d'offrir un débit de plus de 3 Mbit/s au-delà de 20 kilomètres et de proposer des offres dites « triple play » ou « trois en une » (Internet illimité, téléphonie fixe illimitée et télévision).
Puis Mme Gabrielle Gauthey a mis l'accent sur la fracture existant entre les zones dans lesquelles, grâce au dégroupage de la boucle locale, plusieurs opérateurs sont en concurrence et celles dans lesquelles, seul l'opérateur historique propose l'accès au haut débit, soulignant que les offres des opérateurs étaient beaucoup plus variées et compétitives dans les premières. Elle a précisé, à cet égard, que dans les zones non dégroupées, les opérateurs alternatifs présents ne pouvaient que racheter des offres de « gros » de haut débit à France Télécom, qui ne leur permettaient pas de proposer ensuite à leurs clients des offres aussi diversifiées ni des tarifs aussi intéressants que dans les zones dégroupées. Considérant que la persistance d'une telle disparité était lourde d'enjeux à la fois pour les opérateurs et pour les entreprises, elle a souligné que pour ces dernières, la différence de coût d'accès à Internet entre les zones ouvertes à la concurrence et les zones à opérateur unique pouvait être de 40 à 50 %. Aussi bien a t elle plaidé en faveur d'une concurrence par les réseaux, à laquelle, a-t-elle insisté, les collectivités territoriales pouvaient contribuer en mettant des infrastructures de collecte passives à la disposition des opérateurs.
M. Claude Belot, rapporteur , s'étant interrogé sur l'implication respective des différents échelons de collectivités territoriales en matière de technologies de l'information et de la communication (TIC), Mme Gabrielle Gauthey a constaté que si les départements étaient les plus dynamiques, plusieurs communautés d'agglomération et quelques régions, telles que le Limousin et l'Alsace, conduisaient également des actions dans ce domaine. Elle a par ailleurs expliqué qu'en Italie, l'opérateur historique avait explicitement renoncé à construire lui-même le réseau de haut débit sur l'ensemble du territoire et s'en était remis aux collectivités publiques.
Citant l'exemple du département de l'Hérault, M. Claude Belot, rapporteur , a constaté que le développement de projets alternatifs avec l'appui des collectivités territoriales avait certes pour effet de stimuler l'opérateur historique, mais pouvait aussi conduire à un doublement inutile des infrastructures, et donc à un gaspillage d'argent public.
En réponse, Mme Gabrielle Gauthey a établi une distinction entre les infrastructures de télécommunications, dont elle a jugé souhaitable la duplication pour favoriser la concurrence entre opérateurs, et les infrastructures passives de génie civil, telles que les tranchées, fourreaux, fibres ou pylônes, qui ont vocation à être mutualisées, le cas échéant avec l'aide des collectivités territoriales.
Enfin, M. Claude Belot, rapporteur , ayant fait état de la forte demande de conseil émanant des collectivités territoriales en matière de TIC, Mme Gabrielle Gauthey a admis que les compétences de l'Etat en la matière s'étaient appauvries lors de la transformation de la direction générale des télécommunications du ministère de l'industrie en entreprise publique (France Télécom). Elle a toutefois relevé que la nomination de « chargés de mission TIC » auprès des Secrétariats généraux des affaires régionales (SGAR) et l'intérêt manifesté depuis peu par le ministère en charge de l'équipement traduisaient la volonté de l'Etat de réinvestir ce sujet. Après avoir souligné le rôle joué par la Caisse des dépôts et consignations, elle a signalé la création en cours au sein de l'ART d'un « comité des réseaux d'initiative publique » destiné à permettre les échanges d'expériences entre institutions publiques, élus locaux et opérateurs. Enfin, elle a indiqué que l'Assemblée des Régions de France (ARF) réfléchissait à ces questions et souhaitait, elle aussi, une meilleure articulation entre les initiatives de l'Etat et celles des collectivités territoriales.