DEUXIÈME PARTIE - L'AVIS DE LA DÉLÉGATION

Les multiples réserves qui s'expriment sur l'efficacité des contrats de plan Etat-régions conduisent à examiner les modalités d'une rénovation de ce dispositif.

I. QUEL PÉRIMÈTRE POUR LES CONTRATS DE PLAN ETAT-RÉGIONS ?

Il convient, en premier lieu, de définir ce qui a vocation à faire l'objet des contrats de plan.

A. L'INTÉRÊT D'UNE CONTRACTUALISATION ÉTAT-RÉGIONS DEMEURE

La nouvelle étape de décentralisation conduira mécaniquement à réduire le périmètre de la contractualisation Etat-régions. Ainsi, les routes nationales susceptibles d'être transférées aux départements ne feront plus l'objet d'une contractualisation entre l'Etat et les régions, sans pour autant empêcher celles-ci de contribuer à leur financement dans le cadre de conventions particulières avec les conseils généraux.

De la même manière, le transfert aux collectivités territoriales de compétences portuaire ou aéroportuaire fera sûrement disparaître une partie des crédits contractualisés dans ce domaine qui, rappelons-le, était surtout le moyen pour les régions de faire avancer sur le territoire de leur ressort, des chantiers relevant de la compétence de l'Etat.

La DATAR estime que 40 % des crédits de l'Etat contractualisés aujourd'hui correspondent à des compétences ayant vocation à être décentralisées.

La décentralisation ne fait cependant pas disparaître l'intérêt de la contractualisation . D'abord, parce que l'Etat gardera la maîtrise d'un socle de compétences pour lesquelles, compte tenu du caractère limité de ses ressources, il pourra avoir besoin du concours des régions. En matière d'infrastructures, cela pourrait concerner le réseau routier national dit structurant, les ports autonomes ou les aéroports d'intérêt national.

En outre, la contractualisation garde tout son sens pour faire converger les interventions de l'Etat et des régions dans les domaines où leurs compétences sont partagées ou complémentaires. C'est en particulier le cas en matière de développement économique et de formation.

Mais si le critère de répartition des compétences a une incidence sur le champ potentiel de la contractualisation, il ne peut en être le seul déterminant.

B. SÉLECTIONNER DES PRIORITÉS STRUCTURANTES POUR L'AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE

Il importe de procéder à une certaine sélection des projets contractualisés pour éviter l'écueil de l'émiettement des crédits et du saupoudrage . Il semble qu'en conséquence ne devraient être retenues que les actions d'une certaine envergure et ayant un caractère structurant pour l'aménagement du territoire .

Votre rapporteur soutient l'idée de faire des CPER un outil destiné à mettre en oeuvre des actions bien identifiées et dont la finalité est liée à l'aménagement du territoire . A cet égard, il semble que les secteurs ayant plus particulièrement vocation à figurer dans les contrats de plan Etat-régions sont les infrastructures de transport et de communication (TIC), l'enseignement supérieur et la recherche.

Ainsi, la contractualisation serait justifiée du point de vue tant de l'Etat, qui doit être le garant de la cohérence des choix à l'échelle nationale, que des régions, eu égard à leur compétence particulière en matière d'aménagement du territoire.

Ce choix implique de renoncer à inscrire dans les contrats de plan une multitude de microprojets d'intérêt purement local.

Une telle évolution des CPER serait cohérente avec la réforme envisagée pour les fonds structurels qui, selon les propositions formulées par la Commission européenne 3 ( * ) , prévoit un repositionnement de la politique régionale de l'Union européenne sur un nombre restreint d'enjeux centraux.

C. LA NÉCESSITÉ D'UNE VISION STRATÉGIQUE

1. Au niveau national

Votre rapporteur considère, à cet égard, que l'écueil de l'exhaustivité ne pourra être évité que par une définition claire des priorités au niveau de l'Etat , ce qui implique que celui-ci se dote d'une vision prospective de l'aménagement du territoire . Une telle approche fait aujourd'hui défaut.

Au niveau national, depuis l'abandon en 1992 du plan quinquennal, l'Etat n'a plus de véritable doctrine en ce qui concerne ses priorités en matière d'aménagement du territoire . A l'initiative du Sénat, la loi d'orientation sur l'aménagement et le développement du territoire (LOADT) du 4 février 1995 avait bien prévu l'élaboration d'un schéma national d'aménagement du territoire (SNADT), mais cette ambition n'a jamais été concrétisée.

Les schémas de services collectifs introduits par la suite par la loi « Voynet » du 25 juin 1999, n'ont été qu'une collection d'ambitions, dépourvues de caractère opérationnel et non assorties d'un calendrier de réalisation.

Pour redonner corps à la notion d'Etat stratège , votre rapporteur propose donc que soit élaborée une prospective à long terme (vingt ans) définissant les orientations stratégiques et les évolutions souhaitables pour notre pays en termes d'aménagement du territoire. Cette prospective devrait donner lieu à un schéma national , approuvé par le Parlement.

Il conviendrait, dans cette optique, de doter l'Etat d'un véritable pôle en charge de la prospective, en envisageant peut-être, par exemple, la fusion de la DATAR et du Commissariat général au plan.

2. A l'échelle régionale

L'existence d'un schéma national n'impliquerait cependant pas que les projets retenus dans la contractualisation soient imposés par l'Etat. Il convient, en effet, de laisser à l'ensemble des collectivités concernées, sous l'égide de la région, le soin d'établir un nombre limité de priorités pour leur territoire, en tenant compte des orientations stratégiques définies par l'Etat.

Certaines de ces priorités peuvent, en effet, être très différentes selon les territoires . Ainsi, la région Centre, qui connaît un problème particulier lié au vieillissement de sa population, pourrait souhaiter que l'accent soit mis sur l'accueil et les soins aux personnes âgées en milieu rural. Pour telle autre région, les enjeux touristiques seront prépondérants. D'autres encore voudront privilégier le développement de la recherche ou la formation d'une main-d'oeuvre insuffisamment qualifiée.

C'est pourquoi il serait souhaitable que les priorités régionales soient identifiées et consignées dans un document stratégique d'orientation défini à l'échelle du territoire régional . Ce document pourrait être le schéma régional d'aménagement et de développement du territoire (SRADT) prévu par la loi du 4 février 1995, à condition de rénover celui-ci, en associant plus étroitement l'Etat et les autres collectivités territoriales à son élaboration.

Le rôle-pilote de la région ne paraît pas devoir être remis en cause . De nombreux élus locaux lui reconnaissent en effet le statut d'interlocuteur privilégié de l'Etat , tout en exprimant une aspiration forte, en particulier s'agissant des grandes villes et des départements, à être davantage associés en amont à la sélection des projets. Toutes les collectivités territoriales sur le périmètre régional pourraient ainsi être cosignataires de ce document.

Une fois adopté, ce document stratégique d'orientation régional pourrait être révisé tous les six ans pour tenir compte des opérations réalisées et fixer de nouvelles priorités, cette périodicité présentant l'avantage d'être en phase avec le mandat régional.

Ainsi, les contrats de plan Etat-régions redeviendraient un outil opérationnel , permettant de réaliser en commun un nombre limité de projets structurants recouvrant des priorités locales cohérentes avec des orientations nationales.

* 3 Voir annexe II

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