N°
393
SÉNAT
SESSION EXTRAORDINAIRE DE 2002-2003
Annexe au procès-verbal de la séance du 10 juillet 2003
RAPPORT D'INFORMATION
FAIT
au nom de la commission des Finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation (1) sur le rapport de la Cour des comptes relatif aux services déconcentrés du ministère de la culture et de la communication ,
Par M.
Yann GAILLARD,
Sénateur.
(1) Cette commission est composée de : M. Jean Arthuis, président ; MM. Jacques Oudin, Gérard Miquel, Claude Belot, Roland du Luart, Mme Marie-Claude Beaudeau, M. Aymeri de Montesquiou, vice-présidents ; MM. Yann Gaillard, Marc Massion, Michel Sergent, François Trucy, secrétaires ; M. Philippe Marini, rapporteur général ; MM. Philippe Adnot, Bernard Angels, Bertrand Auban, Denis Badré, Jacques Baudot, Roger Besse, Maurice Blin, Joël Bourdin, Gérard Braun, Auguste Cazalet, Michel Charasse, Jacques Chaumont, Jean Clouet, Yvon Collin, Jean-Pierre Demerliat, Eric Doligé, Thierry Foucaud, Yves Fréville, Paul Girod, Adrien Gouteyron, Hubert Haenel, Claude Haut, Roger Karoutchi, Jean-Philippe Lachenaud, Claude Lise, Paul Loridant, François Marc, Michel Mercier, Michel Moreigne, Joseph Ostermann, René Trégouët.
Administration. |
AVANT-PROPOS
En
application de l'article 58-2
1(
*
)
de la loi organique du 1
er
août 2001 relative aux lois de
finances, la commission des finances du Sénat a commandé une
série d'enquêtes à la Cour des comptes.
C'est à ce titre qu'il lui a été remis une
communication sur l'organisation et la gestion des services
déconcentrés du ministère de la culture qui fait l'objet
du présent rapport d'information.
Au-delà de cet intitulé quelque peu austère, il y a une
question qui prend un relief tout particulier dans la perspective de
l'accélération du processus de décentralisation voulu par
le Président de la République et mis en oeuvre par le
gouvernement de M. Jean-Pierre Raffarin.
Il est apparu important, à un moment crucial d'une réforme
annoncée, de bénéficier à la fois des observations
de la haute juridiction financière et de celle du gouvernement qui, en
la personne de M. Jean-Jacques Aillagon, ministre de la culture et de la
communication, a été amené à répondre aux
remarques de la Cour des comptes.
Le présent rapport d'information comporte, en effet, outre la
communication de la Cour des comptes, le compte rendu de la réunion de
la commission des finances du 10 juillet 2003, au cours de laquelle
M. Jean-François Collinet, président de la
3
ème
chambre de la Cour des comptes, ainsi que M. Christian
Sabbe, conseiller référendaire, ont présenté leurs
analyses, les réponses du ministre de la culture qui s'est
expliqué sur les difficultés et les différents arbitrages
auxquels il doit procéder pour accompagner la décentralisation
culturelle.
M. Jean-François Collinet, président de la 3
ème
chambre à la Cour des comptes, a ainsi justifié lors de son
audition l'intérêt de l'audit d'organisation effectué par
la Cour des comptes,
en soulignant le caractère exemplaire du
ministère de la culture, qui s'est engagé, depuis de longues
années, dans un processus associant étroitement
déconcentration et décentralisation, réforme de
l'administration centrale et des échelons déconcentrés
.
On peut regrouper les observations de la Cour des comptes autour de trois
thèmes : l'administration de la culture reste
centralisée ; la décentralisation s'est effectuée
dans des conditions qui ont manqué de cohérence ; les
services déconcentrés n'ont pas toujours les moyens de faire face
à leurs nouvelles missions.
L'administration centrale du ministère de la culture n'est pas encore,
selon la Cour des comptes, véritablement moderne, en ce sens qu'elle
n'est pas en mesure d'assurer son rôle de conception, d'impulsion et
d'évaluation des politiques culturelles. Certes, elle s'efforce
d'inscrire son action dans un cadre cohérent, par
référence, notamment, aux objectifs culturels à 20 ans et
aux contrats de plan, voire aux lettres de missions adressées aux
directeurs régionaux de l'action culturelle, mais les tentatives
d'unification du processus de pilotage ont largement échoué dans
la mesure où la direction de l'administration générale n'a
pas réussi à imposer son autorité sur les directions
fonctionnelles, qui ont maintenu des relations avec leurs représentants
en régions.
Ainsi l'administration centrale reste beaucoup plus une administration de
gestion qu'une administration d'état-major
, comme en témoigne
le nombre relativement important de personnels de catégories B et C par
rapport à ceux de catégorie A.
Le président de la 3
ème
Chambre de la Cour des comptes
a souligné également qu'en dépit de la création du
comité d'évaluation en 1995, la nouvelle culture administrative
ne se met que lentement en place comme le montre le temps pris par la mise au
point du tableau de bord d'activités des directions régionales
des affaires culturelles-DRAC, qui n'a vu le jour qu'en 2003.
La communication de la Cour des comptes a développé l'analyse
selon laquelle la décentralisation du ministère de la culture
s'est caractérisée par des lourdeurs de gestion et un certain
manque de cohérence
: on a peu décentralisé par
blocs de compétences pour multiplier les compétences conjointes,
voire concurrentes. Evoquant l'empilement des dispositifs contractuels, dans un
contexte marqué par l'engagement croissant des collectivités
territoriales -qui dépensaient deux fois plus d'argent que l'Etat
central pour la culture-, le président de la 3
ème
chambre a indiqué, lors de son audition, que
l'on ne dénombre
pas moins de neuf systèmes de partenariat distincts
, en en
soulignant les conséquences défavorables : les agents de
l'Etat passent plus de temps à négocier les termes des contrats
passés avec les collectivités territoriales qu'à
vérifier la façon dont ces derniers sont appliqués. Il
fait également savoir qu'il est difficile de tirer des leçons
pleinement significatives des différentes procédures
expérimentales lancées depuis 2002, compte tenu de la
diversité des domaines et des collectivités territoriales
concernés.
L'audit de la Cour des comptes insiste sur l'inadaptation des structures de
l'administration territoriale de la culture
: les échelons
déconcentrés ne sont pas en mesure de remplir leur mission sur le
terrain et d'être des interlocuteurs directs des collectivités
territoriales. Les DRAC se révèlent des administrations
à la fois disparates et cloisonnées qui voient leur action de
coordination entravée par l'existence d'établissements publics et
de services à compétence nationale menant des politiques
autonomes.
En dépit d'une augmentation de près d'un tiers depuis 1990 de
leur personnel, les DRAC ne sont pas à même de faire face à
leurs tâches, notamment parce que le supplément de personnel ainsi
obtenu a essentiellement porté sur les services patrimoniaux, au point
que l'on peut, globalement, estimer le sous-effectif des autres fonctions du
ministère à un pourcentage compris entre 6 % et 10 %.
Le présent rapport d'information note à ce sujet qu'il n'y a pas
eu de redéploiement significatif de personnel entre l'administration
centrale et les échelons déconcentrés au cours des
années récentes.
Pour la Cour des comptes, réformer l'administration centrale,
accentuer la déconcentration et poursuivre la décentralisation
forment un tout et l'on risque de ne pas réussir, si l'on essaye de
traiter chaque problème séparément.
Ainsi, à travers la question apparemment périphérique de
la gestion des services déconcentrés l'
on voit poindre le
problème plus général de l'adaptation des administrations
d'Etat et de la nécessité d'une réforme en profondeur des
administrations centrales pour faire face au nouvel équilibre des
compétences et des pouvoirs issus de la décentralisation
.