B. UNE PRISE DE CONSCIENCE DANS LES PAYS EUROPÉENS

Cette prise de conscience de l'importance que revêt aujourd'hui la diffusion de la culture scientifique est un phénomène qui dépasse les frontières de notre pays, comme le montrent les réponses qu'a reçues la mission d'information en provenance des services scientifiques des ambassades de France dans plusieurs pays étrangers.

1. Allemagne : une initiative vigoureuse de nombreux scientifiques, l'institution de la fondation « Wissenschaft im Dialog »

L'essor de la culture scientifique est relativement récent en Allemagne, mais il s'est manifesté de manière intense ces dernières années.

Cette mobilisation est partie des milieux scientifiques, qui ont lancé une initiative d'envergure dans le champ de la culture scientifique.

Celle-ci s'est notamment traduite par la constitution, le 27 mai 1999 au Wissenschaftszentrum de Bonn, de la « Wissenschaft im Dialog » (le dialogue avec la science), une fondation largement soutenue par le BMBF -le ministère de la recherche, de l'éducation et de la formation et qui réunit l'ensemble des institutions de la recherche allemande sous l'égide d'un projet et d'un programme d'action communs.

La fondation fédère l'ensemble des manifestations privées autour d'années thématiques avec un temps fort (sur le modèle de notre fête de la science) : l'Eté des sciences localisé dans une grande ville allemande.

2. Belgique : les efforts concomitants des autorités politiques fédérales et fédérées

Les autorités politiques fédérales et régionales de Belgique ont pris conscience de façon concomitante à la fin des années quatre-vingt-dix, de la nécessité d'un renforcement de l'effort en faveur de la culture scientifique et technique, jugé nécessaire à l'entrée du pays dans la société de l'information.

• Les autorités fédérales , qui ont conservé la responsabilité de gérer les dix établissements scientifiques de l'Etat ont décidé d'un important effort de rénovation de ces organismes : un plan décennal intitulé « Horizon 2005 » prévoit une dépense annuelle de 57 millions d'euros complétée par une enveloppe unique de 36 millions d'euros en vue de la rénovation de ces établissements.

• En communauté et région flamandes , la vulgarisation de la science et de la technologie considérée comme une partie essentielle de la politique scientifique globale, fait chaque année l'objet d'un plan d'action ; son budget est passé de 743 000 euros en 1994 à 6 197 000 euros en 2001, soit une multiplication par huit en sept ans !

• La région wallonne a renforcé depuis peu son effort en matière de diffusion de la culture scientifique, et mène actuellement une politique volontariste, à laquelle elle a consacré près de 14,8 millions d'euros en 2001. Elle a en outre inauguré, le 5 mai 2000, un parc d'aventures scientifiques à Frameries (PASS) qui constitue l'établissement belge de référence dans le secteur des loisirs scientifiques, et a déjà accueilli, depuis son ouverture, plus de 200 000 visiteurs. En outre, le musée des sciences et techniques de Parentville à Charleroi a fait l'objet d'un important remaniement en 2001.

3. Pays-Bas : une politique volontariste et la promotion des filières scientifiques

Le ministre de l'éducation, de la culture et de la science (OCEUW) a publié en 2000 un « Livre blanc » dessinant les grandes lignes d'une nouvelle politique de promotion et de diffusion de la culture scientifique et technologique aux Pays-Bas, déterminée conjointement avec le ministère des affaires économiques et de l'agriculture, et celui de l'environnement naturel et de la pêche.

La Fondation néerlandaise pour la diffusion de la culture scientifique et technologique (Stichting Weten) qui a reçu pour mission de mettre en oeuvre le livre blanc, travaille actuellement sur un projet appelé « adoptions » qui réunit les universités et les sociétés de recherche et développement d'une part, et les écoles secondaires de l'autre.

Ce projet est destiné à contrer la diminution du flux des étudiants se dirigeant vers les filières scientifiques, qui est identifié comme un problème majeur pour le futur proche. Les partenariats visés par ces différents organismes sur des projets à caractère éducatif ont notamment pour objet de donner aux élèves une meilleure image des carrières scientifiques.

Les Pays-Bas ont également créé une organisation temporaire, Axis, qui a pour mission d'assurer la promotion des vocations techniques chez les jeunes . Elle privilégie une approche globale -de l'enseignement primaire à l'enseignement universitaire- afin de redéfinir le contenu des formations en y intégrant une approche de la science à travers les autres enseignements (par exemple, l'étude de pièces de théâtre traitant de sujets de société liés aux avancées des sciences). Elle réunit à la fois le Gouvernement, les entreprises privées et le système éducatif.

Son budget est légèrement inférieur à 20 millions d'euros.

4. Grande-Bretagne : la nécessité de restaurer la confiance du public

La diffusion de la culture scientifique et technique repose en Grande-Bretagne sur des institutions souvent anciennes et prestigieuses comme la « Royal institution » créée en 1799, ou la « British association for the advancement of science » (the BA) fondée en 1831, ainsi que de très nombreux conseils et organismes divers.

L'office pour la science et la technologie (OST) qui est rattaché au ministre du commerce et de l'industrie et est responsable des politiques Gouvernementales relatives aux sciences et à l'industrie, s'est doté en 1994 d'une équipe spécialement dédiée à la compréhension mutuelle du secteur scientifique et du grand public, le « Public understanding of science, engineering and technology » (PUSET) ; en 1996-1997, le budget de cette équipe du PUSET s'élevait à 1,25 million de livres, soit environ 2 millions d'euros.

Par ailleurs l'Economic and social research council, qui a notamment vocation à apporter un soutien à une formation et à une recherche de qualité dans le domaine des sciences économiques et sociales, vient de lancer un programme sur cinq ans intitulé « Science and society research program », consacré à l'amélioration des relations entre science et société et doté d'un budget de 4,5 millions de livres soit près de 7 millions d'euros.

Ces efforts paraissent particulièrement nécessaires dans un contexte où la vision de la science a été ternie au Royaume-Uni par une succession d'affaires diverses, comme la crise de la « vache folle », qui a eu un très fort retentissement dans l'opinion, ou encore la crise récente du triple vaccin rougeole/oreillons/rubéole.

5. Irlande : la participation des entreprises à des initiatives de terrain privilégiant les publics scolaires

L'Irlande n'a pas une longue tradition de culture scientifique. L'intérêt pour les questions scientifiques est relativement récent -une dizaine d'années- et l'éducation du public dans ce domaine s'est principalement réalisée à travers les nouvelles technologies et en particulier les biotechnologies, dont la presse se fait l'écho.

Toutefois, en Irlande comme dans le reste des pays européens, les instances éducatives s'inquiètent de la désaffection des jeunes pour les études scientifiques .

Sous l'égide du Forfás , une agence autonome placée sous la tutelle du ministère de l'entreprise et du commerce, le Gouvernement a lancé un programme de mobilisation à destination du grand public et en particulier des jeunes, dont l'objectif est d'amener les citoyens à prendre une part plus active dans le débat scientifique.

Parmi les mesures les plus récentes, on relèvera :

- l'initiative prise par le Gouvernement irlandais d'organiser les premières olympiades de la science à Dublin en avril 2002 :

- le « science bus » financé par la Dublin city university et la fondation Pfizer, lancé en avril 2000, avec un budget de 650 000 euros, qui parcourt les écoles primaires du pays et s'y arrête pour la journée ;

- l'association des industries électroniques de Cork soutient un programme de diffusion de la culture scientifique et technique très centré sur les technologies de l'information et de la communication. Ce programme lancé en 1999 est financé par les entreprises et par le ministère de l'éducation et de la science ; il a développé un réseau de liens entre 23 entreprises actives sur ce secteur d'activité et une quarantaine de lycées et de collèges de la région de Cork, et organise notamment des journées d'information sur les métiers de l'électronique, et de la science en général.

6. Italie : une réforme en cours

Le cadre de l'action gouvernementale en faveur de la diffusion de la culture scientifique, qui était jusqu'alors défini par les dispositions de la loi du 28 mars 1991, vient d'être modifié par la loi du 10 janvier 2000 . Dans la foulée de cette réforme, le Gouvernement étudie actuellement un projet de création d'une agence qui se consacrerait exclusivement à cette mission.

7. Espagne : une politique récente mais volontaire de diffusion de la culture scientifique, relayée par les communautés autonomes

Jusqu'à une date récente, les autorités publiques, les centres de recherche, les nombreux scientifiques et les médias espagnols ne se préoccupaient que fort peu de diffusion de la culture scientifique et technique.

L'instauration d'une véritable politique publique en ce domaine n'est intervenue qu'en 2000.

Celle-ci est apparue dans le Plan National de Recherche et Développement qui doit couvrir les années 2000 à 2003. Celui-ci comporte en effet pour la première fois, un « Programme national de diffusion de la science et de la technologie ».

Dans le même temps, le Gouvernement espagnol a procédé à un profond remaniement des structures administratives chargées de la gestion du plan national de recherche et développement.

La diffusion de la culture scientifique est dorénavant confiée à une Fondation espagnole de la science et de la technologie (FECYT) , spécialement créée à cet effet en janvier 2002.

Les aides du Gouvernement espagnol consacrées à la diffusion de la culture scientifique, en constante progression, sont regroupées dans un appel d'offres intitulé « actions spéciales ».

En outre, le Gouvernement espagnol a organisé pour la première fois, en novembre 2001, une semaine de la science en Espagne. L'organisation de cet événement est surtout revenue aux communautés autonomes. A Madrid et en Catalogne, plus particulièrement, cette semaine de la science a été un grand événement. Il est à noter que la communauté de Catalogne n'avait d'ailleurs pas attendu cette initiative du pouvoir central, puisqu'elle organise une semaine de la science depuis 1996.

8. Grèce : des prémices encore timides

La promotion d'actions de diffusion de la culture scientifique a débuté en Grèce dans les années quatre-vingt-dix : un premier programme opérationnel de recherches et technologies « Plan d'action science et société » couvrant les années 1995 à 2000 avait proposé une première série d'actions d'envergure encore modeste mais les actions projetées dans le cadre du nouveau programme opérationnel de compétitivité, qui couvre les années 2002 à 2006 sont plus ambitieuses et plus diversifiées. Elles prévoient notamment :

- de compléter le musée technique de Thessalonique fondé en 1978 par un nouveau Centre des sciences et musée de la technologie ;

- de créer à Athènes un musée de la science et de la technologie qui serait placé sous la tutelle du ministère du développement et de la culture ;

- de mettre en réseau les musées scientifiques et techniques du pays ;

- de poursuivre des opérations « portes ouvertes » et l'organisation semestrielle d'une semaine de la science ;

- enfin, d'instaurer des Jeux Olympiques scientifiques.

Dans l'ensemble toutefois, cette politique encore récente souffre de son manque de moyens financiers. Elle reste d'ailleurs tributaire des fonds structurels européens. En outre, malgré les atouts dont disposent Thessalonique, ville universitaire, et la Crète, pôle d'excellence par son université et ses centres de recherche, les actions de diffusion de la culture scientifique et technique restent très concentrées sur Athènes.

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