3. Une région de plus en plus riche et creusant les écarts avec la province
La productivité du travail est de 39,9 % plus élevée en Ile-de-France qu'en province (source : INSEE, données 2000). La sur-productivité du travail en Ile-de-France par rapport à la totalité des régions de province est d'environ 30 % sur l'ensemble du secteur marchand, 47,5 % si l'on considère les seuls services marchands, 57 % pour les activités de services rendus aux entreprises.
La quantification des activités au travers des PIB rend compte du niveau de polarisation économique francilienne. La région capitale représente 28,1 % de la valeur ajoutée nationale en 2000 (27,1 % en 1982), contre 22,1 % de l'emploi et 18,2 % de la population. Seconde région au classement, Rhône-Alpes n'en représente que 9,8 %, ce que témoigne une nouvelle fois l'écrasante domination économique de la région francilienne.
Plus encore, les données du recouvrement fiscal de la TVA en 2001 témoignent d'un poids considérable de la région Ile-de-France, atteignant 49,8 % de l'ensemble national (Tableau 2.5). Aux rangs suivants, la somme des contributions de Rhône-Alpes (8,7 %), Nord-Pas-de-Calais (5,0 %) et Provence-Alpes-Côte-d'Azur (4,3 %) ne dépasse guère le tiers de la valeur atteinte par la région francilienne.
La valeur ajoutée par emploi et celle par habitant en Ile-de-France sont nettement supérieures à la moyenne française et l'écart a continué de s'accentuer depuis les années 1980 ; concernant le PIB par emploi, il est supérieur de 22 % à la moyenne nationale et le dépassait de 28,0 % en 2000 (Figure 2.2). Comme la population francilienne compte une proportion importante de jeunes et d'actifs, l'écart est encore plus net, si l'on considère le PIB par habitant, qui dépassait la moyenne nationale de 42 % en 1982, et de 54,0 % en 2000 (Tableau 2.6).
Tableau 2.5 - Recouvrement fiscal de la TVA en 2001 (millions d'euros)
REGION |
TVA |
Variation annuelle en % |
Répartition |
ILE-DE-FRANCE |
59 407 |
2,1 |
49,8 % |
CHAMPAGNE-ARDENNE |
1 736 |
-3,7 |
1,5 % |
PICARDIE |
2 696 |
2,7 |
2,3 % |
HAUTE-NORMANDIE |
1 813 |
-1,1 |
1,5 % |
CENTRE |
2 837 |
2,9 |
2,4 % |
BASSE-NORMANDIE |
1 466 |
3,3 |
1,2 % |
BOURGOGNE |
1 653 |
1,8 |
1,4 % |
NORD-PAS-DE-CALAIS |
5 908 |
4,4 |
5,0 % |
LORRAINE |
2 771 |
1,6 |
2,3 % |
ALSACE |
3 521 |
1,3 |
3,0 % |
FRANCHE-COMTE |
1 104 |
-1,1 |
0,9 % |
PAYS DE LA LOIRE |
4 083 |
2,2 |
3,4 % |
BRETAGNE |
3 004 |
2,7 |
2,5 % |
POITOU-CHARENTES |
1 573 |
1,2 |
1,3 % |
AQUITAINE |
3 260 |
6,6 |
2,7 % |
MIDI-PYRENEES |
2 596 |
1,6 |
2,2 % |
LIMOUSIN |
639 |
2,4 |
0,5 % |
RHONE-ALPES |
10 409 |
6,0 |
8,7 % |
AUVERGNE |
1 208 |
3,2 |
1,0 % |
LANGUEDOC-ROUSSILLON |
2 244 |
2,0 |
1,9 % |
PROVENCE-ALPES-COTE -D'AZUR |
5 144 |
5,3 |
4,3 % |
CORSE |
159 |
5,3 |
0,1 % |
TOTAL FRANCE |
119 615 |
2,7 |
100.0 % |
Source : Cour des Comptes, 2001
Figure 2.2 - PIB régionaux par habitant
Source : DATAR, Aménager la France de 2020 - -
Le Bassin parisien, Paris,
La Documentation française, 2002, p.
21.
Tableau 2.6 - Le PIB en France et en Ile-de-France
PIB |
PIB/emploi |
PIB/hab |
|||||||
1982 |
1990 |
2001 |
1982 |
1990 |
2001 |
1982 |
1990 |
2001 |
|
Rapport entre Ile-de-France et
|
2,68 |
2,99 |
2,95 |
n.d |
1,23 |
1,27 |
1,34 |
1,50 |
1,52 |
Rapport entre Ile-de-France
|
1,26 |
1,28 |
1,29 |
n.d |
1,24 |
1,28 |
1,42 |
1,51 |
1,54 |
n. d. : non disponible Source : INSEE, valeurs 1990 quasi-définitives, 2001 provisoires
La logique territoriale française a toujours fonctionné selon le couple Paris-Province. Jusqu'aux années 1950, la capitale se définissait avant tout comme le lieu du pouvoir, politique et économique, comme siège de l'Etat, des banques et des grandes compagnies. Cette tendance séculaire s'est renforcée.
Le fait nouveau le plus important réside dans le processus de concentration et de sur-représentation des ingénieurs et des cadres supérieurs dans la région capitale (Figure 2.3). Désormais la société parisienne se distingue nettement de celle de province avec une proportion deux fois supérieure de cadres et d'ingénieurs. Les revenus moyens y sont donc plus élevés que dans le reste de la France.
Le marché des cadres est en France encore très unipolaire, alors qu'il est multipolaire en Allemagne mais aussi dans la plupart des autres pays européens (Figure 2.3). Cette trop forte concentration reflète « le sous-encadrement » des régions qui explique certaines des faiblesses de la France, notamment en matière de décisions stratégiques.
Il est incontestable que le processus de mondialisation économique, et en particulier financière, joue dans le sens de la spécialisation de la région francilienne et d'un renforcement de l'hégémonie parisienne. Celle-ci doit s'efforcer de tenir son rang de métropole mondiale, en s'appuyant notamment sur une forte concentration des activités de tertiaire supérieur.
Or, la tendance générale enregistrée s'inscrit en décalage avec une politique d'aménagement qui n'a manifestement pas réduit les déséquilibres du territoire.
Figure 2.3 - Métropoles et organisation territoriale du marché de l'emploi des cadres
Source : DATAR, Aménager la France de 2020 -
Mettre les territoires en mouvement, Paris,
La Documentation
française, 2002, p. 39.