E. SYSTÈME CARDIOVASCULAIRE
Peu d'études ont porté sur les effets sur le système cardiovasculaire de l'animal ou de l'homme (pression artérielle, rythme cardiaque). Ces rares études sont négatives. En 1998, le groupe allemand de Braune et coll. Avait publié des résultats montrant des altérations de la pression artérielle chez des volontaires exposés durant 35 minutes. Une réplication récente dans le même laboratoire a montré que des artefacts étaient à la source des résultats positifs initiaux (41 ( * )).
Dans des études récentes citées plus haut sur la BHE sur le rat, la pression artérielle des animaux exposés tête-seule à 3 W/kg (moyenne dans le cerveau) n'était pas altérée de manière significative.
F. SYSTÈMES IMMUNITAIRE ET ENDOCRINIEN
Chez l'homme, aucun effet n'a été décelé sur les paramètres immunitaires et endocriniens. Ainsi récemment, Radon et coll. en Allemagne ont exposé des volontaires à des signaux GSM afin de déterminer des altérations éventuelles des niveaux de mélatonine (hormone des rythmes circadiens), cortisol (hormone du stress), néoptérine et immunoglobuline (facteur immunitaire : anticorps de type IgA) (42 ( * )). Aucune différence significative n'a été observée sur les concentrations des 4 molécules, mesurées dans la salive, entre les phases d'exposition réelle et les phases d'exposition fictive.
Chez l'animal, les résultats récents ne montrent pas d'effets sur les paramètres principaux en accord avec les quelques études publiées précédemment.
G. PROTÉINES DE CHOC THERMIQUE (HSP)
Face à une situation qui peut compromettre la survie cellulaire (hyperthermie, ischémie, processus inflammatoires), les cellules expriment des protéines connues sous le nom de protéines de choc thermique ou heat shock protein (HSP). Les HSPs forment une famille de protéines remarquablement bien conservées au cours de l'évolution. Elles ont été classifiées en fonction de leur poids moléculaire : 27 kiloDaltons (kD), 70 kD, 90 kD, etc. Ces protéines sont exprimées de manière stable (constitutive), mais d'autres sont produites seulement sous l'effet de différents stress physiques, chimiques ou métaboliques (inductibles). La plupart de ces protéines agissent comme des protéines « chaperones » en se liant à des protéines en cours de synthèse, permettant ainsi leur repliement. Elles sont aussi capables de lier des protéines dénaturées afin de rétablir leurs fonctions. Une élévation modérée de température permet l'induction de toute la famille des HSP et l'obtention d'un état dit de « thermo-tolérance ». Cet état permet non seulement à la cellule de se protéger d'un choc thermique mais aussi d'être moins susceptible à d'autres facteurs de stress, par exemple des facteurs pro-apoptotiques.
Quelques résultats d'études récentes ont montré que des protéines de choc thermiques pourraient être une cible des micro-ondes utilisées en téléphonie mobile à des niveaux non-thermiques. Les conséquences physiologiques de ces éventuels effets restent inconnus : il pourrait s'agir d'une réaction cellulaire « classique » de la cellule vivante, commune à différents stimuli extérieurs.
En 1997, Fritze et coll. montraient une induction précoce et transitoire de l'ARN messager hsp27 dans le cerveau de rats exposés localement pendant 4 heures, à un signal continu de fréquence 900 MHz et avec un DAS (43 ( * )) de 7,5 W/kg. L'expression d'hsp27 retournait à son niveau de base 24 heures après la fin de l'exposition. Dans les mêmes conditions, un signal GSM-900 à 0,3 et 1,5 W/kg ne perturbait aucunement le niveau d'hsp27.
De Pomerai et ses collègues en 2000 ont montré que chez des vers nématodes du genre caenorhabditis elegans , transfectés avec une construction comprenant un promoteur du gène Hsp16, une exposition de dix-huit heures à des radiofréquences de 750 MHz à 0,001 W/kg, augmentait l'expression de cette protéine.
Pour comparaison, l'amplitude de cette réponse était similaire à celle obtenue pour une augmentation de température de 3°C, et ce, en l'absence d'échauffement dans les conditions d'exposition.
En Finlande, Leszczynski et son équipe ont récemment publié leurs travaux sur les effets d'un signal GSM-900 à un DAS de 2,4 W/kg sur des cellules endothéliales d'origine humaine (44 ( * )) . Parmi les protéines dont l'expression était augmentée, HSP-27 fut identifiée. De plus, la phosphorylation des protéines était sensiblement affectée. Dans le cas d'HSP-27, l'exposition aux RF entraînait une augmentation transitoire de la forme phosphorylée, ce qui correspond à son activation.
L'activité de recherche est actuellement intense sur ce thème à la fois sur des modèles cellulaires et animaux. Les résultats préliminaires de ces études non publiées sont contradictoires. En conclusion, il semble que certaines cellules et certains organismes simples (au moins modifiés) perçoivent les RF, même à faible niveau, comme un stress. Ces données suggèrent que cette réponse cellulaire serait précoce et transitoire. En revanche, à l'heure actuelle, aucun élément ne permet de présumer des conséquences physio-pathologiques correspondantes, suggérant une réponse de défense ou une adaptation cellulaire efficace au stimulus RF.
Conclusion
Parmi les très nombreuses études (45 ( * )) qui ont été réalisées durant ces dernières années sur les effets biologiques de signaux de la téléphone mobile, seules quelques unes ont révélé des effets biologiques sans que des conséquences sanitaires graves puissent être attendues dans l'état actuel des connaissances.
En ce qui concerne le cancer, le consensus est que les signaux des téléphones mobiles n'induisent pas le cancer et probablement pas non plus l'accélération du développement de tumeurs déjà existantes. L'étude épidémiologique internationale Interphone fournira des éléments d'information sur l'effet éventuel des téléphones mobiles dans deux ans environ.
Si peu d'études ont porté sur les effets potentiels des stations de base, c'est évidemment en raison du très faible niveau d'exposition correspondant. L'essentiel des recherches a donc porté sur le cas des téléphones mobiles qui sont placés près de la tête. Si des effets ont été rapportés sur des paramètres biologiques liés au cerveau (46 ( * )) , en particulier chez l'animal, aucune conclusion nette ne peut être tirée aujourd'hui sur les conséquences sanitaires associées.
La recherche est actuellement très active, surtout en Europe, et, dans deux ans environ, de nombreuses études en cours livreront leurs résultats (environ une centaine). Les organismes nationaux (DGS, AFSSE, ministères, etc.) et internationaux (OMS, CIRC, ICNIRP, COST 281, etc.) tireront le bilan des ces recherches en termes d'effets sanitaires et d'analyse du risque.
Les équipes françaises ont largement contribué à cet effort de recherche et participent activement aux programmes européens (PerformB, Ramp, Reflex, Guard). Des compétences et des moyens importants existent donc en France qui permettront de compléter les connaissances acquises.
* (41) Braune et al. (2002) Radiat. Res. 158, 352-356.
* (42) Radon K. et al., (2001), Bioelectromagnetics, 22, 280-287.
* (43) Débit d'absorption spécifique en W/kg.
* ( 44 ) Leszczynski D. et al. (2002), Differentiation, 70, 120-129.
* (45) Environ deux cents selon la base de données de l'OMS
* (46) Au sein du programme français COMOBIO en particulier