b) La mutation environnementaliste de la PAC et l'agriculture de montagne
(1) L'agenda 2000
La
réforme de la PAC intervenue dans le cadre du programme d'actions dit
Agenda 2000 a eu pour but d'approfondir et d'étendre la réforme
de 1992, en remplaçant les mesures de soutien des prix par des aides
directes et en accompagnant ce processus d'une politique rurale
cohérente fondée sur la constatation suivante :
«
le soutien agricole est réparti de façon
inégale selon les producteurs et les régions avec comme
conséquence un mauvais aménagement de l'espace rural:
déclin de l'activité agricole dans certaines régions, dans
d'autres pratiques agricoles excessivement intensives entraînant
pollution, maladies animales, une moindre sécurité
alimentaire
». Les mesures d'accompagnement financées
précédemment par le
FEOGA
-Garantie ont été complétées par les aides en
faveur des régions défavorisées et les zones en retard de
développement, sans que la spécificité des zones
montagnardes fasse l'objet de nouvelles mesures de soutien spécifique.
A travers la nouvelle organisation commune des marchés dans le secteur
des produits laitiers, l'élément essentiel pour l'agriculture de
montagne est la décision de prolonger le régime des quotas
jusqu'en 2007/2008.
(2) Les démarches au niveau européen en faveur d'une stratégie spécifique aux régions de montagne
Le
Parlement européen, a adopté le 6 septembre 2001 une
résolution sur les vingt-cinq ans d'application de la
réglementation communautaire en faveur de l'agriculture de
montagne
: « considérant le désavantage
permanent imposé par la nature aux agriculteurs de montagne, et dans la
perspective de l'Année de la montagne (2002), le Parlement
européen invite la Commission à concevoir une stratégie
globale de l'Union européenne pour le développement durable des
régions de montagne dans l'Union européenne et dans les pays
candidats à l'adhésion »
.
Reçue à Bruxelles par M. Franz Fischler, commissaire
européen, chargé de l'Agriculture, la mission commune
d'information s'est efforcée, à travers la complexité des
enjeux et des modalités de la politique agricole commune, de
démontrer clairement la nécessité d'un
rééquilibrage en faveur de l'agriculture de montagne. Ainsi,
relevant que la PAC est plus que jamais soucieuse de santé,
d'environnement et de qualité des produits, la mission a souligné
qu'il était paradoxal que les agriculteurs de montagne qui satisfont le
mieux à ces préoccupations perçoivent néanmoins les
revenus les plus faibles (20 à 30 % de moins en France que la
moyenne) et les aides les moins élevées à
l'hectare.
(3) Les perspectives de réforme de la PAC et la montagne
L'agriculture de montagne, fondée sur le système
herbager extensif et la qualité de ses produits, a une logique de
fonctionnement qui la place dans une situation particulière au regard
de la PAC. Ainsi, la configuration actuelle des aides européennes n'a
pas permis de réduire le différentiel de revenu au
détriment des exploitants de montagne. Contestées dans leur
ensemble par la France, les propositions contenues dans le projet de
révision de la PAC présenté en juillet dernier suscitent
également quelques inquiétudes chez les agriculteurs de montagne
notamment en ce qui concerne l'avenir des quotas laitiers après
2008 : leur maintien est, en effet, vital pour l'agriculture de nos
massifs
.
Proposition n°
30.
: Préserver les
quotas laitiers et augmenter les droits à produire en zone de montagne
en prévoyant une affectation prioritaire à l'installation des
jeunes agriculteurs.
En outre, on doit s'interroger sur la prise en considération de la
montagne dans la perspective de l'augmentation des fonds alloués au
développement rural (deuxième pilier) financée par la
« modulation » des aides directes ( premier pilier).
Enfin le renforcement de
« l'éco-conditionnalité » des aides ne pourra
bénéficier aux agriculteurs de montagne que s'ils trouvent les
soutiens nécessaires aux investissements de mise aux normes de leurs
exploitations.
Préparer l'avenir, c'est aussi travailler dès à
présent à mettre en évidence la contribution
environnementale de l'agriculture de montagne, en s'inspirant, au besoin, comme
l'a suggéré le ministère de l'Agriculture, de
l'expérience de nos voisins suisses et autrichiens, ce qui renforcera
tout naturellement la légitimité des contreparties à y
apporter. La qualité de l'environnement et l'attrait pour les produits
agricoles de qualité interagissent fortement. Comme l'a rappelé
M. Bernard Debarbieux, directeur du laboratoire « territoire,
environnement montagnard et organisations sociales » à l'Institut
de géographie alpine : «
cette reconnaissance a
été acquise de longue date en Suisse où historiquement,
le montagnard incarne une figure emblématique de la
nation
». Simultanément, les consommateurs de ce pays
acceptent de payer les produits agricoles de montagne à un prix plus
élevé. Cette situation s'explique, en partie, par l'effort de
démonstration des « aménités »
qu'apportent les agriculteurs à la montagne, et la montagne à
l'ensemble du pays.