IV. LA PLURIACTIVITÉ EN MONTAGNE : UN RÉVÉLATEUR DES BESOINS D'ADAPTATION, D'EXPÉRIMENTATION ET D'ASSOUPLISSEMENT DES CONTRAINTES

La situation des pluriactifs montagnards illustre au plan social la nécessité de l'adaptation des dispositions de portée générale à la spécificité de la montagne fixées par l'article 8 de la loi du 9 janvier 1985.

La loi montagne énonce en matière de pluriactivité et de travail saisonnier deux principes :

- l'article 59 prévoit une continuité de garantie pour les risques dont la couverture est subordonnée à une durée minimale d'assurance ou un montant minimum de cotisation et précise qu' « afin de préserver les intéressés des excès de complexité que peut engendrer la pluralité des régimes de protection sociale dans les zones de montagne (...) les organismes de sécurité sociale mettent en place des guichets uniques d'information et de conseil destinés aux travailleurs pluriactifs. » ;

- l'article 60 indique que dans les zones de montagne, et sous certaines réserves, l'exercice de plusieurs activités professionnelles par une même personne ne peut, par lui-même, faire obstacle à l'attribution d'aides de l'Etat en vertu de l'une de ces activités.

A. LES PLURIACTIFS MONTAGNARDS ENTRE NÉCESSITÉ ÉCONOMIQUE ET LABYRINTHE ADMINISTRATIF ET SOCIAL

La pluriactivité présente deux caractéristiques spécifiques en montagne : elle y est à la fois plus nécessaire et souvent plus saisonnière qu'en zone de plaine. La pluriactivité est en effet une conséquence directe et traditionnelle des contraintes liées à la modicité de la plupart des revenus montagnards, à l'insuffisance générale de la compensation des surcoûts et à la saisonnalité de l'activité économique en zone de montagne

La pluriactivité répond ainsi à une nécessité économique évidente pour les montagnards et tous ceux qui la pratiquent. En revanche, du point de vue administratif et juridique, rares sont les sujets d'une telle complexité. La pluriactivité perturbe, en effet, à la fois la logique « mono active » du droit social et les cloisonnements administratifs : de manière symptomatique, les quelque 800 pages du Bottin administratif ne font guère référence à un phénomène qui concerne aujourd'hui quelque 2,3 millions de personnes.

La pluriactivité recoupe un très grand nombre de situations différentes et constitue un sujet par nature « interministériel » qu'aucune administration n'est encore en mesure d'envisager à la fois de manière globale et analytique. Les rares instances qui se sont préoccupées de cette question se sont senties impuissantes face à la rigidité des structures administratives, ce sentiment étant partagé depuis longtemps par les montagnards eux-mêmes.

Proposition n° 45. : Mettre en place un « numéro vert » de renseignements et un site internet consacrés aux pluriactifs.

Coordonner étroitement ce dispositif tourné vers l'usager avec une cellule interministérielle ayant vocation à analyser tous les aspects économiques, sociaux, fiscaux et éducatifs de la pluriactivité ainsi qu'à proposer les évolutions nécessaires.


Malgré la difficulté de l'exercice, il est urgent de limiter les anomalies les plus flagrantes et les tracasseries, sans quoi la tentation de recourir au travail non déclaré risque de perdurer. En effet, l'application simultanée de plusieurs régimes sociaux aboutit, dans un grand nombre de cas, à amoindrir la protection des pluriactifs tout en majorant leurs charges, essentiellement par le jeu des minima contributifs.

Cotisant parfois proportionnellement plus que la moyenne des assujettis, les pluriactifs contribuent ainsi, dans une certaine mesure, à l'équilibre financier de certaines caisses. Le statu quo observé par certains organismes de protection sociale et l'impossibilité pendant 17 ans d'appliquer les dispositions de la loi « montagne » sur la mise en place d'une caisse pivot ne sont peut-être pas étrangers à ce phénomène...

Proposition n° 46. : Clarifier l'enjeu financier que représentent les pluriactifs pour les diverses caisses de protection sociale.

En même temps, les tracasseries administratives et le renvoi systématique du travailleur pluriactif d'un organisme de protection sociale à l'autre sont susceptibles de décourager les meilleures volontés.

A défaut de pouvoir réduire la complexité de la réglementation, des expériences pilotes conduites en montagne visent tout au moins à éviter de faire peser le poids des formalités sur les pluriactifs en reportant la gestion sur des organismes pivots, conformément à l'article 59 de la loi « montagne ».

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