Pour une meilleure transposition des directives
HAENEL (Hubert)
RAPPORT D'INFORMATION 250 (2001-2002) - DELEGATION DU SENAT POUR L'UNION EUROPEENNE
Rapport au format Acrobat ( 109 Ko )Table des matières
- INTRODUCTION
- CONCLUSION
- ANNEXES
- ANNEXE I
- Rapport du groupe de travail
- L'AMÉLIORATION DES PROCEDURES DE TRANSPOSITION
- ANNEXE II
- Lettre du ministre délégué
- aux présidents des délégations pour l'Union européenne
N°
250
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2001-2002
Annexe au procès-verbal de la séance du 19 février 2002
RAPPORT D'INFORMATION
FAIT
au nom de la délégation pour l'Union européenne (1) sur l' amélioration des procédures de transposition des directives communautaires en droit français ,
Par M.
Hubert HAENEL,
Sénateur.
(1) Cette délégation est composée de : M. Hubert Haenel, président ; M. Denis Badré, Mme Danielle Bidard-Reydet, MM. Jean-Léonce Dupont, Claude Estier, Jean François-Poncet, Lucien Lanier, vice-présidents ; M. Hubert Durand-Chastel, secrétaire ; MM. Bernard Angels, Robert Badinter, Jacques Bellanger, Mme Maryse Bergé-Lavigne, MM. Jean Bizet, Jacques Blanc, Maurice Blin, Gilbert Chabroux, Xavier Darcos, Robert Del Picchia, Mme Michelle Demessine, MM. Marcel Deneux, Jean-Paul Émin, Pierre Fauchon, André Ferrand, Philippe François, Yann Gaillard, Emmanuel Hamel, Serge Lagauche, Louis Le Pensec, Aymeri de Montesquiou, Joseph Ostermann, Jacques Oudin, Simon Sutour, Jean-Marie Vanlerenberghe, Paul Vergès, Xavier de Villepin, Serge Vinçon.
Union européenne. |
INTRODUCTION
Mesdames, Messieurs,
A l'automne 2000, le Gouvernement a demandé au Parlement de l'habiliter
à transposer, par voie d'ordonnances, une cinquantaine de directives
communautaires, dont certaines de grande importance. Beaucoup de
députés et de sénateurs ont découvert à
cette occasion l'ampleur du retard français dans la transposition des
textes communautaires et les graves conséquences de cette
situation :
- la fragilisation de la position de la France dans les
négociations communautaires, notre pays se situant à
l'avant-dernier rang pour les mesures de transposition et détenant le
triste record des procédures contentieuses pour non-transposition ou
transposition insuffisante, avec le risque de se voir condamné au
versement d'amendes ou d'astreintes ;
- une forte insécurité juridique, la jurisprudence
développée par la Cour de justice reconnaissant un effet direct
partiel aux directives communautaires lorsque le délai prévu pour
leur transposition a été dépassé ;
- une atteinte à l'esprit communautaire, car la construction
européenne repose sur la confiance mutuelle entre les Etats membres, qui
ont pour l'essentiel la responsabilité de l'application du droit
communautaire ;
- un mauvais « signal » vis-à-vis des pays
candidats, de qui nous exigeons une reprise intégrale de l'acquis
communautaire sans satisfaire nous-mêmes à cette exigence ;
- finalement, une atteinte au fonctionnement équilibré de
notre démocratie, le recours aux ordonnances conduisant à la
transposition de plusieurs dizaines de textes à caractère
législatif sans les garanties qu'apporte l'examen parlementaire.
Les débats, tant à l'Assemblée nationale qu'au
Sénat, ont montré le profond malaise que suscitait la tentative
de régler le problème en recourant aux ordonnances. Ils ont
logiquement conduit à une interrogation sur les causes du retard
français dans la transposition.
Il s'est avéré, tout d'abord, que contrairement à ce que
suggérait le Gouvernement,
ce retard ne résultait pas
principalement de l'encombrement de l'ordre du jour des assemblées, car
deux tiers des textes non transposés dans les délais avaient un
caractère purement réglementaire et n'appelaient donc aucune
intervention du Parlement.
Ensuite, chacun a dû reconnaître que si, pour quelques textes, la
non-transposition résultait de choix (ou de difficultés)
politiques, le problème ne devait pas être placé sur un
terrain partisan, tous les gouvernements qui se sont succédé au
fil des ans ayant une part de responsabilité dans le
phénomène. Celui-ci n'était pas nouveau, puisque certains
textes européens attendaient depuis quelque vingt années une
transposition complète.
Il fallait donc s'attacher à repérer plus
précisément les causes des dysfonctionnements afin de leur porter
remède. A défaut, le stock des textes à transposer
était condamné à augmenter à nouveau.
Cette conclusion des débats du Sénat est encore confirmée
par le dernier
« tableau d'affichage du marché
intérieur »
publié en novembre 2001 par la
Commission européenne.
La France - dix mois après
l'entrée en vigueur de la loi d'habilitation - reste, avec la
Grèce, le pays dont le déficit de transposition est le plus
important, et conserve de très loin la palme des procédures
d'infraction.
De tels résultats appellent, à l'évidence, non point des
lois de circonstance, mais bien une amélioration durable des
méthodes. Après avoir rappelé les initiatives prises en ce
sens, on en examinera les premiers résultats.
I. LES INITIATIVES
A) LE DIAGNOSTIC DE LA DÉLÉGATION DU SÉNAT
Dès la fin du débat sur la loi d'habilitation, la
délégation pour l'Union européenne du Sénat a
publié un rapport (n° 182, 2000-2001) comportant une analyse
des causes du déficit de transposition.
• Relevant que la cause principale de ce déficit est d'ordre
administratif, le rapport observe que le dysfonctionnement administratif en
cause a été repéré depuis longtemps, qu'il a
été autrefois souligné par le Conseil d'Etat, et que pas
moins de quatre circulaires du Premier ministre (une tous les quatre ans de
1986 à 1998 !) ont tenté d'y remédier.
La nature de ce dysfonctionnement est bien connue. D'une part, les
effets
sur le droit interne des projets de directive ne sont pas pris en compte dans
les négociations.
D'autre part,
la coordination
interministérielle n'est pas suffisamment efficace
, de telle sorte
que les désaccords entre administrations aboutissent à des
blocages durables.
Or, les efforts pour améliorer cette situation sont restés lettre
morte. La circulaire du 9 novembre 1998, dernière en date,
précise qu'il est
« nécessaire en particulier de
s'assurer, dès le début de la négociation, que les
formulations ou définitions envisagées ne risquent pas de
soulever des difficultés d'interprétation ou de créer des
incohérences au regard des dispositions existantes en droit
interne ».
Elle prévoit pour cela que chaque proposition
de directive devra faire l'objet d'une
étude d'impact juridique
comprenant :
- la liste des textes de droit interne dont l'élaboration ou la
modification seront nécessaires en cas d'adoption de la directive ;
- un avis sur le principe du texte, sous l'angle juridique et celui de la
subsidiarité ;
- un tableau comparatif des dispositions communautaires et
nationales ;
- si les informations nécessaires sont disponibles, une note de
droit comparé.
La circulaire ajoute que cette étude d'impact juridique
« s'efforcera également d'identifier les difficultés
que pourrait soulever la transposition en droit interne des dispositions de
cette proposition de directive ».
Enfin, le même texte prévoit que la transposition
« préparée, ainsi qu'il a été dit,
dès le stade de la négociation, doit être entreprise
aussitôt que la directive a été adoptée »,
et souligne que
« les difficultés de nature juridique
et administrative traditionnellement rencontrées dans cet exercice sont
principalement dues à des interrogations sur le choix du niveau de texte
adéquat dans la hiérarchie des normes internes ainsi qu'à
des hésitations ou des désaccords sur le rôle qui incombe
à chaque ministère ».
Il est prévu à cet égard que, dans le délai de
trois mois, chaque ministère participant à la transposition
élaborera
« un échéancier d'adoption des
textes relevant de ses attributions accompagné, pour chacun de ces
textes , d'un avant-projet de rédaction et d'un tableau de
concordance permettant d'identifier clairement les dispositions
transposées ».
Or, la délégation a été amenée à
constater que,
plus de deux ans après la publication de cette
circulaire, celle-ci n'avait pas reçu un commencement d'application,
aucune étude d'impact juridique, notamment, n'ayant
été effectuée.
• A côté des causes administratives, le rapport de la
délégation souligne que, dans plusieurs cas, le retard pris dans
la transposition des directives doit être attribué au fait que
les gouvernements se sont constamment dérobés devant certains
arbitrages rendus pourtant nécessaires par les compromis acceptés
à Bruxelles,
et ont mis en avant un prétendu encombrement de
l'ordre du jour des assemblées pour éviter d'avoir à
prendre leurs responsabilités. Et le rapport énumérait les
cas les plus criants :
« Qui nous fera croire que c'est l'encombrement de l'ordre du jour
des assemblées qui a empêché de transposer la directive
« Natura 2000 », alors que chacun sait que ce sont les
protestations que suscitait le projet de créer un réseau
européen écologique qui ont incité à geler
l'application de cette directive ?
« Qui nous fera croire que c'est la durée des débats
parlementaires qui a empêché de transposer plus tôt la
directive de 1976 sur l'égalité de traitement entre les hommes et
les femmes qui autorise celles-ci à travailler la nuit alors que chacun
sait que c'est la peur de mécontenter la CGT et FO qui a fait reculer le
Gouvernement ?
« Qui nous fera croire que c'est la charge de travail du Parlement
qui a retardé la transposition des directives ouvrant le marché
de l'électricité ou du gaz à la
concurrence ? ».
B) LES PROPOSITIONS DE LOI
Le
débat engagé par le rapport de la délégation s'est
prolongé par la discussion par le Sénat, le 14 juin 2001, de deux
propositions de loi qui abordent chacune un des deux volets du
dysfonctionnement observé.
• La première proposition de loi complète l'article 6
bis de l'ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 en vue de permettre un
contrôle du Parlement sur la transposition des directives communautaires.
Elle a été adoptée à l'unanimité par le
Sénat.
Cette proposition de loi repose sur l'idée que la circulaire du
9 novembre 1998 définit les réponses adéquates aux
difficultés d'ordre administratif qui sont la cause de la plupart des
retards de transposition, et que l'objectif à poursuivre doit donc
être de faire en sorte que le Gouvernement mette effectivement en oeuvre
les obligations qu'il s'est lui-même imposées.
Pour cela, il est prévu de reprendre dans un texte législatif les
principales dispositions de la circulaire, c'est-à-dire la
nécessité de procéder à une
étude
d'impact juridique
sur toute proposition de directive, et de tenir un
échéancier d'adoption des textes législatifs
nécessaires à la transposition des directives communautaires
définitivement adoptées. Pour pouvoir donner à ces
dispositions une valeur d'obligation légale, et pour permettre au
Parlement de mieux exercer son contrôle, le texte prévoit de
rendre les délégations pour l'Union européenne de chaque
assemblée destinataires des études d'impact juridique et des
échéanciers d'adoption.
Le texte de la proposition de loi, telle qu'elle a été
adoptée par le Sénat, est le suivant :
Article unique
Après le deuxième alinéa du IV de
l'article 6
bis
de l'ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au
fonctionnement des assemblées parlementaires, sont insérés
deux alinéas ainsi rédigés :
« Sur tout projet ou proposition d'acte des Communautés
européennes ou de l'Union européenne ayant une incidence sur des
dispositions de nature législative, le gouvernement leur communique,
dans le délai de deux mois à partir de la transmission de ce
projet ou de cette proposition au Conseil de l'Union, une étude d'impact
juridique. Cette étude comprend la liste des textes législatifs
de droit interne dont l'élaboration ou la modification sera
nécessaire en cas d'adoption du texte, un avis sur le principe du texte
sous l'angle juridique et celui de la subsidiarité ainsi qu'un tableau
comparatif des dispositions communautaires et nationales. Elle est
adaptée au vu des évolutions qu'est susceptible de
connaître la proposition ou le projet.
« Dans les trois mois suivant la notification d'une directive, le
Gouvernement leur communique un échéancier d'adoption des textes
législatifs permettant sa transposition en droit interne. »
• La seconde proposition de loi qu'a adoptée le Sénat
- sans opposition - est une proposition de loi constitutionnelle,
dont le texte est le suivant :
Article unique
L'article 48 de la Constitution est complété par
un
alinéa ainsi rédigé :
« Une séance par mois est réservée à la
transposition des directives communautaires et à l'autorisation de
ratification ou d'approbation des conventions internationales. L'ordre du jour
de cette séance est fixé par le gouvernement ou, à
défaut, par chaque assemblée. »
Un tel dispositif préserve les attributions du Gouvernement, qui demeure
libre de choisir les projets de loi de transposition qu'il entend inscrire
à l'ordre du jour des assemblées. Néanmoins, dès
lors qu'une séance par mois ne pourra être consacrée
qu'à la transposition de directives ou à l'autorisation de
ratification de conventions, le Gouvernement aura tout intérêt
à l'utiliser pleinement et ne pourra, en tout état de cause, se
prévaloir de l'encombrement de l'ordre du jour des assemblées
pour repousser sans cesse l'inscription à l'ordre du jour des textes de
transposition.
Si le Gouvernement n'utilisait pas la séance mensuelle
réservée, chaque assemblée pourrait alors décider
d'inscrire des projets ou propositions de loi de transposition de directives ou
des projets de loi autorisant la ratification ou l'approbation de conventions
internationales, comme le Sénat l'a fait dans le passé pour la
directive « Natura 2000 ».
C) LA CRÉATION D'UN GROUPE DE TRAVAIL
Bien
qu'il ne se soit pas rallié aux solutions proposées par le
Sénat, le Gouvernement a reconnu que les préoccupations
exprimées par notre assemblée étaient légitimes.
Souhaitant que ces questions fassent l'objet d'un examen serein,
dégagé de toute préoccupation partisane, il a
provoqué la création d'un groupe de travail composé de
fonctionnaires relevant de l'exécutif et de fonctionnaires relevant de
chacune des deux assemblées.
Le groupe de travail a tenu sa première réunion le 29 juin 2001
- deux semaines après les délibérations du
Sénat - et terminé ses travaux le 8 octobre.
II. LES RÉSULTATS
A) LE RAPPORT DU GROUPE DE TRAVAIL
Le rapport (voir annexe I) dégage, d'une part, les améliorations susceptibles d'être apportées au dispositif administratif, et, d'autre part, celles susceptibles d'être apportées au dispositif législatif.
1. Le niveau administratif
Le
groupe a tout d'abord examiné les améliorations susceptibles
d'être apportées
au niveau du dispositif administratif
, en
distinguant le stade des négociations communautaires et celui de la
transposition.
• Pour ce qui est du
stade des négociations communautaires
,
il suggère que, au moins
pour les propositions de textes transmises
aux assemblées au titre de l'article 88-4 de la Constitution, une fiche
d'impact simplifiée soit réalisée par le ou les
ministères chefs de file
. Il ne s'agirait que d'une première
étude destinée à aider à la négociation et
qui ne devrait pas être perçue comme de nature à engager le
ministère concerné.
Le groupe a également examiné la possibilité que, à
la demande des délégations des assemblées, pour les
propositions qui retiennent leur attention, l'envoi de la fiche d'impact
simplifiée soit complétée, dans un délai de un
mois, par
l'envoi d'un avis du SGCI portant sur les textes de droit interne
concernés, les difficultés posées par le texte et les
premiers éléments de la position française.
Cette
analyse demeurerait nécessairement, compte tenu des délais
imposés, une première réaction et devrait être
considérée comme telle, mais elle permettrait d'éclairer
plus complètement les assemblées, à propos des textes qui
retiennent leur attention, sur les enjeux et sur les positions
françaises.
Enfin, le groupe a examiné la question de l'évolution des textes
en cours de négociation. Il a relevé que les
délégations des assemblées souffraient d'un manque
d'information à cet égard. Si l'idée d'envoyer des fiches
actualisées au fur et à mesure de la négociation a
été écartée, du fait de sa lourdeur, il a
estimé qu'il pourrait être utile de prévoir
une
diffusion spécifique au président de chaque
délégation des télégrammes diplomatiques relatifs
aux négociations portant sur les textes adressés aux
assemblées au titre de l'article 88-4.
• Pour ce qui est du
stade de la transposition
, le groupe a
d'abord noté que, en application de l'engagement pris par le ministre
délégué aux Affaires européennes lors des
débats parlementaires,
le SGCI adressait désormais, tous les
deux mois, aux délégations pour l'Union européenne des
deux assemblées, la liste des nouvelles directives publiées avec
leur date de transposition ainsi que, en annexe, les directives
elles-mêmes.
Il est à noter que cette transmission concerne la
totalité des directives (ou décisions-cadres)
adoptées au niveau de l'Union et ne se limite pas à celles qui
impliquent, pour leur transposition, des mesures de nature législative.
En outre, le groupe a suggéré d'
assurer une diffusion plus
large du tableau récapitulatif de l'état des transpositions, tenu
à jour par le SGCI, qui ne bénéficie, à l'heure
actuelle, que d'une diffusion interne à l'administration
. Ce tableau
pourrait être adressé, selon un rythme trimestriel, au Conseil
d'Etat et aux assemblées afin de leur permettre, d'une part, d'exercer
un suivi de l'activité de transposition et, d'autre part, de mieux
prendre en compte, dans le cadre de leurs travaux d'examen des projets de texte
de droit interne, les directives non encore transposées qui
présentent un lien de connexité avec le texte examiné.
2. Le niveau législatif
De
caractère technique, sans légitimité politique propre, le
groupe s'est naturellement borné à examiner les
différentes solutions envisageables en mettant en relief, pour chaque
formule, à la fois les avantages et les inconvénients attendus
ainsi que les implications de leur traduction juridique.
Il a analysé sous cet angle les différentes formes qu'est
susceptible de revêtir l'acte assurant la transposition d'une directive
lorsqu'elle implique l'intervention du législateur et a recensé
quatre modes possibles :
- les lois qui procèdent à la transposition d'une directive
mais dont ce n'est pas l'objet principal ;
- les lois dont la transposition est l'objet principal, voire
exclusif ;
- les lois portant diverses dispositions d'adaptation au droit
communautaire, dites
« DDAC »
; il s'agit de
lois transposant un nombre élevé de directives qui n'ont pas
forcément de liens entre elles, mais qui relèvent de la
compétence d'un même ministère ;
- les ordonnances de l'article 38 de la Constitution.
Par ailleurs, il s'est interrogé sur la possibilité de recourir
aux procédures dérogatoires existantes, et sur
l'opportunité d'en créer de nouvelles.
• Alors que les lois dont la transposition n'est pas l'objet
principal et les lois dont l'objet exclusif est la transposition d'une
directive apparaissent à tous comme les modes normaux de transposition,
le recours le plus large possible à ces formules paraît
entravé par
l'insuffisance de l'information
sur les directives
à transposer, et
l'articulation limitée
, sur le plan
parlementaire, entre l'examen
« en amont »
des
textes européens dans le cadre de l'article 88-4 de la Constitution et
l'examen de ces mêmes textes
« en aval »
lors
de leur transposition.
Sur le premier point, le groupe a noté que la diffusion plus large du
tableau recensant les directives à transposer, notamment auprès
du Conseil d'Etat et des assemblées elles-mêmes devrait
désormais favoriser une meilleure insertion des travaux de transposition
dans la programmation générale des travaux du Gouvernement et du
Parlement. Ainsi, en ce qui concerne le Conseil d'Etat, le rapporteur serait en
mesure, lors de l'examen d'un projet de loi, de vérifier qu'aucune
directive connexe ne se trouve en instance de transposition et, s'il en existe,
de proposer de joindre sa transposition au texte en cause.
Sur le second point, le groupe a remarqué en particulier qu'une solution
pourrait être de favoriser des contacts avant le dépôt du
projet de loi de transposition entre les représentants de
l'exécutif (cabinets et, le cas échéant, services
concernés) et les parlementaires ayant une bonne connaissance des sujets
en cause, notamment dans la mesure où ils auraient suivi la
négociation de la directive dans le cadre de l'article 88-4, afin de
faciliter, grâce à un dialogue précoce, la transposition
des directives les plus difficiles. Il est apparu toutefois que l'initiative de
tels contacts devait revenir à l'exécutif.
• Par ailleurs, le groupe a estimé qu'il convenait de dresser
un bilan nuancé des DDAC.
En effet, même si le recours
à ce type de véhicule législatif ne doit intervenir que
s'il n'a pas été possible de procéder à la
transposition par d'autres moyens, il n'en demeure pas moins que les projets de
lois DDAC permettent d'assurer, à l'occasion d'une même
procédure parlementaire, la transposition de plusieurs directives, tout
en respectant les droits du Parlement, notamment le droit d'amendement.
Le groupe a donc conclu que
le recours aux DDAC, sans être
encouragé, ne devait pas être exclu, surtout pour assurer la
transposition de directives essentiellement techniques ou, tout au moins,
à faible enjeu politique et qui ne pouvaient s'inscrire dans le cadre
d'une loi en cours d'élaboration ni être l'objet exclusif d'une
loi de transposition
. Toutefois, cette procédure devait clairement
apparaître comme subsidiaire par rapport aux procédures classiques.
• Quant au recours aux ordonnances, le groupe a relevé de
manière unanime que, s'il ne saurait être exclu par principe, il
devrait revêtir un caractère exceptionnel, justifié par des
considérations d'urgence et par l'impossibilité d'assurer une
transposition dans des conditions satisfaisantes par les autres modes
examinés. En outre, il devrait être précédé
d'une consultation avec les parlementaires visant à déterminer la
liste des directives susceptibles de faire l'objet de l'habilitation,
étant entendu que seules les directives à caractère
technique et sans enjeu politique pourraient être concernées. Le
groupe a, de plus, estimé que les projets de loi de ratification
devraient, lorsque les assemblées en font la demande, être
inscrits par le Gouvernement à l'ordre du jour des assemblées.
• Enfin, au sujet du
recours éventuel à des
procédures simplifiées
, le groupe a estimé que les
procédures d'adoption simplifiée telles que prévues dans
le règlement de l'Assemblée nationale ne permettraient pas,
compte tenu de leurs limites, d'assurer l'adoption plus rapide des lois de
transposition. Il a relevé que la mise en place de procédures
simplifiées permettant une réelle accélération du
vote des lois de transposition nécessiterait une révision
constitutionnelle.
De plus, le groupe a considéré que
la mise en place d'une
procédure d'adoption simplifiée pour l'adoption des lois de
transposition se heurterait à la difficulté de donner une
définition satisfaisante de la notion de loi de transposition.
Concernant la proposition de loi constitutionnelle adoptée par le
Sénat, le groupe a considéré que ce dispositif
présenterait d'indiscutables avantages sans porter atteinte à
l'équilibre des institutions, mais certains de ses membres ont
estimé que le rythme d'une séance par mois pourrait se
révéler excessif.
B) LA LETTRE DU MINISTRE DÉLÉGUÉ, CHARGÉ DES AFFAIRES EUROPÉENNES
Dans une
lettre adressée, le 24 janvier 2002, aux présidents des
délégations pour l'Union européenne (voir annexe II),
M. Pierre Moscovici a indiqué que, prenant en compte les
conclusions du groupe de travail, il allait veiller à la
« mise en application rapide »
de trois
mesures :
-
chaque texte transmis aux Assemblées au titre de
l'article 88-4 sera systématiquement complété, dans
un délai de trois semaines, par une fiche d'impact
simplifiée
, élaborée par le ministère chef de
file, précisant l'objet de la proposition d'acte et mentionnant les
textes de droit interne concernés en première analyse ;
-
une diffusion spécifique au président de chacune des
délégations des assemblées des télégrammes
diplomatiques rendant compte des négociations relatives aux textes
transmis au titre du 88-4
sera désormais assurée ;
-
le tableau récapitulatif de l'état des
transpositions
, élaboré au sein du SGCI,
sera
communiqué chaque trimestre au Conseil d'Etat et aux
assemblées
. Outre les informations sur l'état des
transpositions, ce tableau mentionnera également les procédures
en manquement éventuellement engagées par la Commission devant la
Cour de Justice des Communautés européennes.
Le ministre rappelle, par ailleurs, les nouvelles dispositions mises en place
en juin 2001 : transmission aux assemblées, tous les deux mois, des
nouvelles directives communautaires nécessitant une transposition,
possibilité offerte aux deux délégations d'adresser des
observations au Gouvernement sur les difficultés éventuelles que
certaines transpositions pourraient présenter, organisation d'une
réunion annuelle de suivi de cette nouvelle procédure pour faire
le point sur l'état des travaux de transpositions.
CONCLUSION
Les
engagements pris par le ministre répondent assez largement aux
préoccupations qui avaient guidé le Sénat dans l'adoption
de la première proposition de loi.
L'information des assemblées sur la situation en matière de
transposition est substantiellement améliorée et la
rédaction systématique d'une fiche d'impact simplifiée
devrait contribuer à sensibiliser l'exécutif comme le Parlement
aux problèmes éventuels de transposition.
En revanche
, la garantie d'inscription à l'ordre du jour des
textes à transposer n'est nullement apportée et
la proposition
de loi constitutionnelle adoptée à cet effet par le Sénat
garde toute sa valeur
. A cet égard, il convient de noter que,
contrairement aux doutes exprimés par certains membres du groupe de
travail,
le rythme d'une séance par mois n'a rien d'excessif
,
compte tenu du fait que, dans le texte adopté par le Sénat, cette
séance serait consacrée non seulement à la transposition
des directives communautaires, mais encore aux textes autorisant la
ratification des conventions internationales. Or, les délais pour la
ratification des conventions internationales sont, eux aussi,
préoccupants, avec un nombre important de textes en instance.
Ainsi,
grâce au dialogue qui s'est instauré entre le
Gouvernement et les assemblées, des progrès ont
déjà été accomplis ; d'autres, plus
significatifs, devraient l'être avec l'entrée en vigueur, dans les
semaines qui viennent, des mesures qui ont été annoncées
par le ministre ; toutefois, il me semble qu'il demeure encore une
amélioration à effectuer sur laquelle il nous faudra sans doute
revenir en temps utile.
*
La délégation a examiné ce rapport le 13 février 2002 et en a autorisé, à l'unanimité, la publication.
ANNEXES
ANNEXE I
Rapport du groupe de travail
L'AMÉLIORATION DES PROCEDURES DE TRANSPOSITION
DES
NORMES COMMUNAUTAIRES EN DROIT FRANÇAIS
RAPPORT DU GROUPE DE TRAVAIL
(8 octobre 2001)
Lors de
sa première séance, le groupe a vérifié l'accord de
ses membres sur le cadre de sa mission. L'unanimité du groupe a pu
être constatée sur les points suivants :
- son champ de réflexion est l'amélioration des mécanismes
de transpositions des directives et des autres mesures communautaires tant en
ce qui concerne le dispositif administratif que législatif : ainsi
la réflexion portera sur l'amélioration des procédures
mises en place par la circulaire du Premier ministre du 9 novembre 1998 mais
aussi sur toute modification de nature législative voire
constitutionnelle pertinente ;
- le groupe, dans la mesure où il présente un caractère
technique sans légitimité politique propre, considère son
rôle comme se bornant à examiner les différentes solutions
envisageables en mettant en relief, pour chaque proposition, à la fois
les avantages et les inconvénients attendus ainsi que les implications
de leur traduction juridique.
1. LES AMÉLIORATIONS SUSCEPTIBLES D'ÊTRE APPORTÉES AU
DISPOSITIF ADMINISTRATIF
Le groupe a examiné les améliorations susceptibles d'être
apportées, au niveau du dispositif administratif, aux mécanismes
de transposition des directives.
a) au stade de la transposition
Le groupe a d'abord noté que, en application de l'engagement pris par le
Ministre délégué aux Affaires européennes, le SGCI
adresse, tous les deux mois, aux délégations, la liste des
directives publiées avec leur date de transposition ainsi que, en
annexe, les directives elles-mêmes. Cette innovation est jugée
utile par le groupe, notamment afin d'assurer une information formelle des
assemblées de l'adoption d'un acte au niveau communautaire et, par voie
de conséquence, de l'ouverture d'un mécanisme de transposition.
Il est à noter que cette transmission concerne la totalité des
directives (ou décisions cadres) adoptées au niveau
communautaire, sans distinguer celles qui impliquent, pour leur transposition,
des mesures de nature législative, des autres.
En outre, le groupe juge utile d'assurer une diffusion plus large du tableau
récapitulatif de l'état des transpositions, tenu à jour
par le SGCI et qui ne bénéficie, à l'heure actuelle, que
d'une diffusion interne à l'administration. Ce tableau pourrait
être adressé, selon un rythme trimestriel, au Conseil d'Etat et
aux assemblées afin de leur permettre, d'une part d'exercer un suivi de
l'activité de transposition et, d'autre part, de mieux prendre en
compte, dans le cadre de leurs travaux d'examen des projets de texte, de
l'existence de directives non encore transposées et présentant un
lien de connexité avec le texte examiné. Le groupe convient que
le tableau adressé aux assemblées pourra ne pas contenir la
totalité des informations contenues dans le tableau adressé aux
administrations, certaines informations relatives aux difficultés
interministérielles rencontrées à l'occasion de la
transposition de telle ou telle directive relevant du travail
préparatoire interne à l'exécutif. En revanche, à
la demande expresse des représentants des assemblées, il est
convenu que le tableau récapitulera la totalité des directives
à transposer et ne sera pas limité aux directives impliquant
l'intervention du législateur.
Par ailleurs, le groupe s'est interrogé sur l'opportunité de
désigner, pour chaque directive, dans le ministère chef de file,
un fonctionnaire responsable de sa transposition afin de donner au SGCI, au
SGG, aux autres ministères un interlocuteur unique. Si cette piste
apparaît séduisante, elle risque d'être difficile à
mettre en oeuvre en pratique. Aussi le groupe estime que ce rôle
centralisateur devrait être dévolu, dans les ministères qui
en sont dotés, à la direction des affaires juridiques.
En revanche, le groupe considère que l'inscription d'une communication
semestrielle en Conseil des ministres sur l'état des transpositions
apparaît peu réaliste, compte tenu de la nature des communications
en partie C.
b) au stade de l'élaboration de la norme communautaire
elle-même
Le groupe a estimé qu'il n'était pas possible de
réfléchir à l'amélioration des processus de
transposition des normes communautaires sans examiner la question de
l'élaboration de la norme communautaire elle-même. En effet, force
est de constater que, dans un grand nombre de cas, les difficultés
rencontrées au stade de la transposition résultent de la
complexité de la norme à transposer ou d'une insertion
problématique au sein de l'ordre juridique français. Le Premier
Ministre en avait d'ailleurs tiré un certain nombre de
conséquences dans la circulaire de novembre 1998, notamment en demandant
la réalisation systématique, dès le début de la
négociation, de fiches d'impact juridique, susceptibles d'être
actualisées, en tant que de besoin, en cours de négociation.
Le groupe a constaté, néanmoins, qu'il s'agissait d'une question
difficile, dépassant largement le seul problème de la
transposition. Il s'est donc efforcé de faire des propositions
pragmatiques, tout en constatant que leur mise en oeuvre risquait de se heurter
aux mêmes difficultés concrètes que celles qui entravent la
bonne application de la circulaire de novembre 1998 (cf. le faible nombre de
fiches d'impact effectivement réalisées).
Le groupe est d'avis que, au moins pour les propositions de textes
communautaires transmis aux assemblées au titre de l'article 88-4 de la
Constitution, une fiche d'impact simplifiée devrait être
réalisée par le ou les ministères chefs de file. Il ne
s'agira que d'une première étude destinée à aider
à la négociation et qui ne devra pas être perçue
comme de nature à engager le ministère concerné, afin
d'éviter que, par mesure de précaution, aucune fiche ne soit
réalisée. Cette fiche devrait comporter :
- une brève analyse de la proposition d'acte ;
- une liste des textes de droit interne concernés, en première
analyse, par la proposition d'acte (en les joignant) ;
- les difficultés juridiques, administratives voire politiques que pose,
en première analyse, la proposition.
Cette fiche devrait être réalisée très rapidement,
afin de confirmer son caractère de « première
réaction », c'est-à-dire dans un délai
inférieure à un mois à compter de la transmission de la
proposition de texte communautaire par le SGCI au ministère chef de
file. A la réception de cette fiche, le SGCI en adressera une copie aux
délégations aux affaires européennes des
assemblées : cette transmission aura le mérite d'une part
d'améliorer l'information des assemblées et, d'autre part,
d'inclure cette fiche dans le cadre d'un processus d'information des
assemblées en lui donnant un caractère plus obligatoire.
Le groupe s'est partagé sur la question du délai
d'élaboration et de transmission de cette fiche aux
assemblées : les représentants de ces dernières
estimant que le délai devait être de 15 jours ; les
représentants du SGCI notamment considérant qu'il n'était
pas réaliste de prévoir un délai inférieur à
un mois. Une voie moyenne correspondant à un délai de 3 semaines
peut également être envisagé.
En tout état de cause, le système n'étant pas susceptible
de présenter de moyen de contrainte comparable à ce qui existe
s'agissant des fiches d'impact juridique à joindre aux projets de textes
en droit interne ne reposera que sur la bonne volonté des acteurs
concernés, au premier titre desquels les ministères. La
transmission aux assemblées peut constituer une contrainte utile mais
certainement pas suffisante. Un effort de persuasion devra également
être mené auprès des ministères, afin notamment de
démontrer l'utilité de ces fiches pour les négociateurs
français et, à terme, pour le ministère concerné
lui-même, responsable in fine de la transposition du texte qui aura
été négocié.
Le groupe a également examiné la possibilité que, à
la demande des délégations des assemblées, pour les
propositions qui retiennent leur attention, l'envoi de la fiche d'impact
simplifiée soit complétée, dans un délai de un
mois, par l'envoi d'un avis du SGCI portant sur les textes de droit interne
concernés, les difficultés posées par le texte et les
premiers éléments de la position française. Cette analyse
demeurerait nécessairement, compte tenu des délais
imposés, une première réaction et devrait être
considérée comme telle, mais elle permettrait d'éclairer
plus complètement les assemblées, sur les textes qui retiennent
leur attention, des enjeux et des positions françaises. Sur la base de
l'année écoulée les délégations des
assemblées ont relevé que le nombre de textes concernés
s'élèverait à quarante. Il a estimé que cela
était susceptible de représenter une charge de travail importante
pour les ministères et le SGCI, déjà mobilisés,
dans cette phase de la négociation par les contraintes communautaires.
Il a néanmoins considéré que cette procédure
était intéressante et pouvait être envisagée,
à titre expérimental.
Le groupe a examiné la question de l'évolution des textes en
cours de négociation. Il a relevé que les
délégations des assemblées souffraient d'un manque
d'information à cet égard. Si la piste d'envoi de fiches
actualisées au fur et à mesure de la négociation a
été écartée, du fait de sa lourdeur, le groupe a
estimé qu'il pourrait être utile de prévoir une diffusion
spécifique des télégrammes diplomatiques relatifs aux
négociations portant sur des textes adressés aux
assemblées au titre de l'article 88-4 au président de chaque
délégation.
Enfin, le groupe s'est interrogé sur le point de savoir si l'on ne
pourrait pas envisager, pour certains textes présentant un
caractère particulièrement important, d'associer un
député et/ou un sénateur, au stade de la
négociation, notamment en le tenant informé de leurs
évolutions et en lui permettant ainsi d'y réagir et de provoquer
les réactions de son assemblée. Toutefois, une telle
évolution poserait un certain nombre de difficultés pratiques et
juridiques et relève d'un choix éminemment politique. Surtout, le
groupe a estimé qu'il se trouvait, sur un tel sujet, aux limites de son
exercice relatif à l'amélioration de la transposition.
2. LES AMÉLIORATIONS SUSCEPTIBLES D'ÊTRE APPORTÉES AU
DISPOSITIF LÉGISLATIF
Le groupe a examiné les différentes formes qu'est susceptible de
revêtir l'acte assurant la transposition d'une directive lorsqu'elle
implique l'intervention du législateur.
Le groupe a considéré que l'on pouvait recenser 4 modes
possibles, dont il a examiné les avantages et les
inconvénients :
- les lois qui procèdent à la transposition d'une directive mais
dont ce n'est pas l'objet principal ;
- les lois dont la transposition est l'objet principal voire exclusif
- les lois dites « DDAC », c'est-à-dire transposant
un nombre élevé de directives sans lien entre elles sauf celui de
relever de la compétence d'un même ministère ;
- les ordonnances de l'article 38 de la Constitution.
Par ailleurs, le groupe s'est interrogé sur la possibilité de
recourir aux procédures dérogatoires existantes, notamment celles
relatives à l'urgence, et à l'opportunité d'en
créer de nouvelles, propres ou non à la transposition.
a) les lois dont la transposition n'est pas l'objet principal
Le groupe estime que ce mode de transposition, fréquemment
utilisé jusqu'en 1995, devrait, sinon redevenir le mode normal de
transposition, du moins être davantage exploité. En effet, il
permet de tirer parti des projets de loi prévus à l'ordre du jour
pour assurer la transposition de directives connexes, par leur sujet, à
l'objet principal du texte et, de la sorte, de banaliser l'exercice de
transposition en l'insérant dans des exercices législatifs
classiques, tout en profitant de la priorité politique accordée
à tel ou tel texte pour accélérer la transposition de
directives connexes.
La diffusion plus large du tableau recensant les directives à
transposer, notamment auprès du Conseil d'Etat et des assemblées
elles-mêmes favoriserait une meilleure insertion des travaux de
transposition dans la programmation générale des travaux du
Gouvernement et du Parlement. Ainsi, en ce qui concerne le Conseil d'Etat, le
rapporteur serait en mesure, lors de l'examen d'un projet de loi, de
vérifier qu'aucune directive connexe ne se trouve en instance de
transposition et, s'il en existe, proposer de joindre sa transposition au texte
en cause.
b) les lois dont l'objet exclusif est la transposition d'une
directive
A l'instar de la procédure précédente, le groupe
considère que le véhicule législatif consistant en une loi
dont l'objet exclusif est la transposition d'une directive, ainsi que des
adaptations législatives directement liées à cette
transposition, devrait demeurer la norme en matière de transposition,
dans la mesure où elle relève de la procédure
législative normale. Toutefois, le groupe est conscient que ce mode de
transposition est adapté aux directives qui, par leur importance, leur
complexité ou leur enjeu politique, justifient qu'une loi soit
consacrée à leur transposition, ce qui n'est pas le cas de toutes
les directives appelant l'intervention du législateur pour leur
transposition.
Le groupe s'est interrogé sur les moyens de faciliter le recours
à ce mode de transposition et d'en améliorer l'efficacité.
Une première piste serait que la transposition d'une directive soit
suivie, autant que possible, par le même parlementaire que celui ayant
examiné le texte au cours de sa négociation dans le cadre de la
procédure prévue par l'article 88-4 de la Constitution.
Toutefois, le groupe estime qu'il convient de faire preuve de prudence sur ce
point et éviter, naturellement, tout caractère
systématique à cette suggestion.
Une deuxième piste pourrait être de faciliter des contacts en
amont du dépôt du projet de loi entre les représentants de
l'exécutif (cabinets et, le cas échéant, services
concernés) et les parlementaires ayant une bonne connaissance des sujets
en cause, notamment dans la mesure où ils auraient suivi la
négociation de la directive dans le cadre de l'article 88-4, afin de
faciliter, grâce à un dialogue précoce, la transposition
des directives les plus difficiles. Le groupe estime que l'efficacité de
tels contacts suppose qu'il appartient à l'exécutif d'en prendre
l'initiative. Il considère que cette solution pourrait être
très utile pour faciliter la transposition des directives les plus
compliquées ou les plus délicates.
Enfin, le groupe s'est interrogé sur la possibilité de favoriser
l'association d'un parlementaire lors des travaux de préparation du
projet de loi de transposition, afin de favoriser l'association de membres des
assemblées le plus en amont possible. Il a toutefois relevé
qu'une telle formule se heurterait à plusieurs difficultés et ne
pourrait s'envisager, dans l'état actuel des textes, qu'à travers
la procédure des parlementaires en mission, ce qui paraît peu
adapté à une simple association au travail de préparation
du projet de transposition, sauf cas exceptionnel.
c) les projets de loi portant DDAC
Le groupe s'est interrogé sur l'opportunité de maintenir cette
procédure, à l'heure où l'on s'efforce, avec plus ou moins
de bonheur, de réduire le recours à ces mécanismes de
« lois balais », dont les inconvénients sont connus.
Le groupe a néanmoins estimé que le DDAC, quels que puissent
être ses inconvénients, demeurait un instrument utile, notamment
pour la transposition de directives techniques, même s'il ne fallait pas
le considérer comme le mode normal de transposition.
En effet, le groupe a estimé qu'il convenait de dresser un bilan
nuancé des DDAC. En effet, même si le recours à ce type de
véhicule législatif n'est pas souhaitable en soi et ne doit
intervenir que s'il n'a pas été possible de procéder
à la transposition par les deux précédents moyens
examinés, il n'en demeure pas moins que les projets de lois DDAC
permettent d'assurer, à l'occasion d'une même procédure
parlementaire, la transposition de plusieurs directives, tout en respectant les
droits du Parlement, notamment le droit d'amendements.
Le groupe est donc d'avis que le recours au DDAC, sans être
encouragé, ne doit donc pas être exclu, surtout pour assurer la
transposition de directives essentiellement techniques ou, tout au moins, a
faible enjeu politique et qui ne peuvent s'inscrire pas dans le cadre d'une loi
en cours d'élaboration ni être l'objet exclusif d'une loi de
transposition. Toutefois, cette procédure doit clairement
apparaître comme subsidiaire par rapport aux procédures
classiques. En tout état de cause, il convient d'éviter que ces
textes ne présentent un caractère trop
hétérogène, notamment en veillant à ce qu'ils
regroupent au maximum les directives relevant de la compétence d'un
même département ministériel.
d) les ordonnances de l'article 38 de la Constitution
Le groupe s'est partagé sur l'opportunité de recourir,
à l'instar de ce qui a été fait avec la loi du 4 janvier
2000, à la procédure de la transposition par ordonnances. Si les
représentants de l'exécutif ont estimé, s'agissant des
directives techniques et à faible enjeu politique, qu'il ne fallait pas
s'interdire de recourir à cette procédure, voire lui donner une
priorité par rapport à la formule des DDAC, les
représentants des assemblées ont soutenu qu'elle ne devait
être envisagée qu'en dernière solution et dans des
circonstances exceptionnelles.
En conclusion, le groupe a relevé de manière unanime que le
recours aux ordonnances, s'il ne saurait être exclu par principe, devrait
revêtir un caractère exceptionnel, justifié par des
considérations d'urgence et par l'impossibilité d'assurer une
transposition dans des conditions satisfaisantes par les autres modes
examinés. En outre, il devrait être précédé
d'une consultation avec les parlementaires visant à déterminer la
liste des directives susceptibles de faire l'objet de l'habilitation,
étant entendu que seules les directives à caractère
technique et sans enjeu politique pourraient être concernées.
Enfin, les projets de loi de ratification devraient, lorsque les
assemblées en font la demande, être inscrites par le Gouvernement
à l'ordre du jour parlementaire.
e) le recours aux procédures simplifiées
Le groupe a estimé que les procédures d'adoption
simplifiée telles que prévues dans le règlement de
l'Assemblée nationale ne permettraient pas, compte tenu de leurs
limites, d'assurer l'adoption plus rapide des lois de transposition. Il a
relevé que la mise en place de procédures simplifiées
permettant une réelle accélération du vote des lois de
transposition nécessiterait une révision constitutionnelle.
Le groupe s'est également penché sur la proposition de loi
constitutionnelle adoptée au mois de juin par le Sénat qui
prévoit la tenue d'une séance par mois consacrée à
l'examen des lois de transposition et des lois d'autorisation de ratification
ou d'approbation d'un traité ou d'un accord international. D'un point de
vue technique, le seul qui relève de sa compétence, le groupe a
relevé que cette proposition présentait un certain nombre
d'avantages : sans porter atteinte à la maîtrise
gouvernementale de l'ordre du jour ni créer une procédure
parlementaire spécifique pour les lois de transposition, elle
permettrait en effet d'assurer un travail régulier de transposition, ce
qui devrait en outre éviter tout recours aux ordonnances. Toutefois, il
a relevé qu'elle comportait également un certain nombre
d'inconvénients : elle peut apparaître
disproportionnée au regard de son objet et, sur un plan plus technique,
le rythme d'une séance par mois peut paraître excessif : un
rythme trimestriel par exemple serait sans doute mieux adapté.
Le groupe relève en conclusion que le Gouvernement, dans le cadre de la
fixation de l'ordre du jour prioritaire, pourrait prévoir de
réserver de manière systématique une séance par
trimestre à l'examen des projets de loi de transposition (ou autorisant
la ratification d'une convention internationale) sans qu'il soit besoin de
réviser la Constitution. Il considère qu'un effort de ce type
serait utile.
Enfin, le groupe a considéré que la mise en place d'une
procédure d'adoption simplifiée pour l'adoption des lois de
transposition, n'était pas pertinente au regard de l'objectif
visé, sans parler de la nécessaire révision
constitutionnelle qu'elle impliquerait. En effet, l'on se heurterait à
la difficulté de donner une définition satisfaisante de la notion
de loi de transposition, et l'on prendrait le risque d'ouvrir un débat
constitutionnel beaucoup plus large. En tout état de cause, le groupe a
considéré qu'il ne lui appartenait d'approfondir sa
réflexion sur ce point sans outrepasser sa compétence. Au
demeurant, il considère que des améliorations importantes peuvent
déjà être apportées aux procédures en cause
sans passer nécessairement par une révision de la Constitution.
*
Composition du groupe de travail
Le groupe de travail était composé de :
M. Fabien Raynaud, conseiller juridique du SGCI ;
M. Jean Laporte, directeur des affaires européennes au Sénat,
M. Jean-Pierre Bloch, chef de division des affaires européennes à
l'Assemblée nationale,
M. Nicolas Boulouis, maître des requêtes au Conseil d'Etat,
M. Alain Barthez, conseiller au SGG,
Mme Elise Launay, rédacteur au ministère des affaires
étrangères (DCE),
Mme Juliette Clavière, chef du secteur Parlements au SGCI.
Réunions du groupe de travail
Le groupe, qui s'est réuni la première fois, au SGCI, le 14 juin,
a tenu 4 réunions de travail :
le 29 juin au SGCI,
le 4 juillet au SGCI,
le 10 septembre au Sénat,
le 8 octobre à l'Assemblée nationale.
Il a établi un compte-rendu de chacune de ses séances.
ANNEXE II
Lettre du ministre délégué
aux présidents des délégations pour l'Union
européenne
Le
Gouvernement, dans le cadre de l'amélioration des procédures de
transpositions de directives communautaires, a souhaité mettre en place,
en juin dernier, un groupe de travail chargé d'élaborer un
certain nombre de propositions.
A l'occasion de la remise du rapport de ce groupe de travail, à
l'élaboration duquel vous avez été associé ainsi
que votre homologue de l'Assemblée nationale, le Président Alain
BARRAU, une réunion s'est tenue, sous la présidence du
Secrétaire général du SGCI, le 7 décembre dernier,
pour faire le point sur les différentes propositions formulées et
déterminer les dispositions administratives qui pourraient, d'ores et
déjà, faire l'objet d'une mise en oeuvre à court terme.
A la suite des travaux du groupe de travail que nous étions convenus de
mettre en place, sous l'égide du SGCI, afin examiner les moyens
d'améliorer l'efficacité des procédures de transposition
des directives communautaires, je souhaite vous confirmer, au nom du
Gouvernement, la mise en application rapide des mesures suivantes.
1) Au stade de l'élaboration de la norme communautaire
Chaque texte transmis aux Assemblées au titre de l'article 88-4 sera systématiquement complété par une fiche d'impact simplifiée, élaborée par le ministère chef de file, précisant l'objet de la proposition d'acte et mentionnant les textes de droit interne concernés en première analyse.
.../
Monsieur
Hubert HAENEL
Président de la Délégation pour
l'Union européenne du Sénat
SENAT
15, rue de Vaugirard
75006 PARIS
Le
délai de transmission de cette fiche pourrait être fixé
à 3 semaines à compter de la saisine du ministère
compétent par les soins du SGCI.
Par ailleurs, sera mise en place une diffusion spécifique au
président de chacune des Délégations des Assemblées
des télégrammes diplomatiques rendant compte des
négociations relatives aux textes transmis au titre du 88-4.
2) Au stade de la transposition
Le tableau récapitulatif de l'état des transpositions,
élaboré au sein du SGCI, sera communiqué chaque trimestre
au Conseil d'Etat et aux Assemblées. Outre les informations sur
l'état des transpositions, ce tableau mentionnera également les
procédures en manquement éventuellement engagées par la
Commission devant la Cour de Justice des Communautés européennes.
Ces mesures ne paraissant pas nécessiter une modification formelle de la
circulaire de novembre 1998 pourront être mise en oeuvre très
rapidement. Complétant les dispositions déjà mises en
place depuis le mois de juin 2001 (transmission aux Assemblées, tous les
deux mois, des nouvelles directives communautaires nécessitant une
transposition, possibilité offerte aux deux Délégations
d'adresser des observations au Gouvernement sur les difficultés
éventuelles que certaines transpositions pourraient présenter,
organisation d'une réunion annuelle de suivi de cette nouvelle
procédure pour faire le point sur l'état des travaux de
transpositions), je ne doute pas que ces nouvelles mesures contribueront
à améliorer de manière significative les conditions
d'examen et de transposition des normes européennes.
Je vous prie d'agréer, Monsieur le Président, l'expression de ma
parfaite considération.
Pierre MOSCOVICI