III. LE JEU À DISTANCE
A. LES CYBERCASINOS
Pour
être apparus après les machines à sous clandestines, les
cybercasinos représentent pour les casinos traditionnels (et les cercles
de jeux) une concurrence encore plus dangereuse.
Sur de tels sites conçus à cet effet, le joueur, devenu
internaute pour satisfaire sa passion, ou l'internaute devenu joueur par
curiosité, tentent leur chance sur le réseau internet .
Géographiquement les sociétés opératrices de jeu
sont implantées dans
les paradis fiscaux rebaptisés
«
zones de
fiscalité
privilégiée
» (!) comme Antigua, Belize, Grenade,
les Keys de Floride, les réserves indiennes des USA (voir plus loin)
avec une mention spéciale pour le Costa Rica où la
législation autorise tout, mais aussi dans des pays plus proches de nous
par la fiscalité plutôt que par la distance, comme l'Islande, la
Finlande, l'Australie ou l'Afrique du Sud.
Contrairement aux déclarations lénifiantes et stériles de
certains (très) grands organismes financiers mondiaux le
nombre des
pays dotés de « zones de fiscalité
privilégiée ne fait que croître » .
Une fois créé (10 millions de francs d'investissement
),
le site est opérationnel sur la « Toile ». Il existe
et devient accessible à plus de 160 pays du monde.
C'est le bien le caractère mondial de cette existence qui constitue le
problème majeur pour les législateurs en mal de
réglementation.
Les USA
, si libéraux pourtant pour toutes les activités
économiques et commerciales, ont pour l'instant
interdit la
création de sites de jeux.
Est-ce simplement dans l'attente d'une sécurisation authentique du mode
de paiement par carte bancaire ?
Quoiqu'il en soit, pour l'instant, les opérateurs se contentent de
s'implanter aux Bahamas ou aux Bermudes pour tourner la loi américaine.
Les grands casinotiers américains ne cachent pas leurs
inquiétudes devant le succès foudroyant de ces casinos d'un
nouveau genre.
On avance des chiffres impressionnants 1 400 sites Internet de casinos
payants, autant de loteries et sports book opérant sur le Web,
2,2 milliards de dollars par an de chiffre d'affaires
.
Selon « Wirend » magazine branché de la
cyberculture, les seuls américains ont joué 500 millions de
dollars en 1995.
Il faut toujours examiner avec le plus grand soin l'impact d'une nouvelle
technologie, d'un nouveau procédé sur la mentalité des
intéressés. A ce titre, comme le souligne encore le Professeur
J.C.G Martignoni Hutin à qui le rapport doit un très grand nombre
d'informations et d'éclairages, (voir Bibliographie) la
clandestinité de ces jeux contourne imparablement (pour l'instant ?) les
législations de tous les pays qui affichent, sincèrement ou non,
leur hostilité aux jeux d'argent et aux passions qu'ils suscitent.
Elle peut également «
lever les inhibitions des
joueurs
» qui, dans l'intimité retrouvée avec leur
seul ordinateur, peuvent se livrer à leur passion, chez eux, sans frais
supplémentaires, en gardant pour eux leur âge et leur casier
judiciaire (terminées les interdictions de jeux ) en ayant en outre la
satisfaction béate de ne pas verser, directement ou indirectement, un
sou à l'Etat.
Aux USA, pour compliquer encore les choses, le gouvernement
fédéral, par commission interposée, recherche des
solutions au problème, mais
a concédé aux tribus
indiennes
(sans doute pour calmer quelques revendications
ethno-catégorielles) un statut spécial les autorisant à
créer, sur leurs territoires, des salles de jeux. Dès que cela
fut possible techniquement les tribus ont immédiatement crée des
sites sur Internet !
Le problème général des cybercasinos aux USA se
réglera-t-il dans les tribunaux ? ou plus vraisemblablement à Las
Vegas à l'occasion de l'une de ces grandes négociations dont les
USA ont le secret ?
Si c'était le cas, se constituerait aussitôt un gigantesque
complexe de jeux américains sur Internet qui ferait subir aux casinos
traditionnels du reste du monde un sort peu enviable.
Anticipant une telle évolution, des concepteurs de logiciels
conçus pour ces serveurs (il y en a d'excellents en France qui piaffent
d'impatience ) ont crée des sites, comme « Virtuel
Vegas », où l'on joue avec de l'argent fictif.
Ces opérateurs « en attente » éduquent de la
sorte et habituent leur future clientèle.
Il y a en France un seul casino gratuit BET in PARIS parfaitement
autorisé depuis deux ans par le ministère de l'intérieur.
La loi française interdit par définition tout casino sur internet
et toute implantation de site serveur sur notre territoire mais elle est
incapable comme les autres pays de sanctionner les français qui jouent
sur la toile.
Les casinos français sont tous demandeurs d'autorisations de
créations de cybercasinos car ils redoutent
, comme tous les autres
industriels du jeu, une concurrence aussi redoutable et ils n'espèrent
pas lutter contre elle avec uniquement les attraits de leurs restaurants et des
animations culturelles que les cahiers des charges leur imposent.
Aucun d'entre eux, bien entendu, n'a pris le risque d'enfreindre la loi,
connaissant par expérience la susceptibilité et la
rapidité d'intervention du ministère de l'intérieur.
Il existe déjà une autre concurrence qui préoccupe les
industriels des Jeux en France : c'est le système des
loteries
gratuites
(voir chapitre deux) qui n'exige pas de mises, distribue un peu
d'argent, et rentabilise ses fichiers de joueurs en vendant les données
personnelles de ceux-ci pour des opérations de marketing
C'est un secteur en plein développement : n'estime-t-on pas à
10 000 les emplois créés ?
Dans l'état actuel des choses, il n'existe, avec ces casinos
cybernétiques, aucune protection des mineurs et aucune
sécurité bancaire ; seules les banques suisses refusent encore
d'honorer des dettes de jeux payées par carte bancaire.
Nous sommes persuadés que les ministères intéressés
travaillent sur ce vaste sujet.
Il est absolument indispensable que l'Etat active ces recherches et conclut,
car la situation actuelle
est préjudiciable à tous : à
l'Etat qui pourrait voir fondre les ressources qu'il tire du jeu, aux grands
industriels du jeu français qui occupent à l'heure actuelle les
uns et les autres des positions exceptionnelles, aux joueurs qu'on enverrait,
si l'on ne faisait rien, se faire embobiner quelque part sur la toile.