PREMIÈRE PARTIE
PRÉSENTATION DES PRINCIPAUX
SECTEURS
Les jeux
d'argent et de hasard en France se développent pour l'essentiel dans
trois domaines très différents : les loteries et jeux
instantanées de la Française des jeux, les jeux de cartes, de
boules et les machines à sous des casinos, cercles et maisons de jeux,
enfin les courses de chevaux.
Pour ces trois domaines il existe trois différences majeures
concernant :
1° Les places respectives du hasard pur et de l'habileté du
joueur ;
2° Leurs impacts économiques variés ;
3° Les comportements diversifiés de l'Etat à l'égard
de chacun des trois opérateurs.
1°
Suivant les jeux, le hasard pur, les connaissances des joueurs,
l'appel aux calculs et à une stratégie, jouent dans des
proportions variables
donnant leur originalité aux jeux et
expliquant les différentes populations de joueurs.
A la Française des jeux
les chances sont exclusivement
liées au hasard et il ne peut entrer aucune notion de calcul ou de
stratégie dans le mental du joueur.
Dans les casinos
, les cercles et les maisons de jeux, les jeux
traditionnels de boules et les machines à sous répondent à
la définition précédente même si les vendeurs de
« martingales » font encore de bonnes affaires
auprès des joueurs débutants ou naïfs.
Seuls les jeux de cartes ménagent une place non négligeable aux
calculs et à la stratégie des joueurs.
Il en est tout autrement
pour les courses de chevaux
; dans ce domaine
les connaissances des parieurs sur les chevaux, les entraîneurs, les
jockeys, le terrain, leur sont vraiment utiles face aux aléas de la
course et aux comportements des jockeys ou des chevaux.
2°
Les éléments qui forment l'impact économique de
ces trois domaines pèsent de manière très
différente.
La Française des Jeux
présente dans ses 42 950 points de
vente une "gondole" d'un petit mètre carré, chargée d'une
trentaine de formulaires de jeux en papier.
On a vu que cette activité était génératrice
d'emplois mais pour la plupart d'entre eux un métier est exigé :
celui de vendeur.
Dans les casinos
et autres établissements de jeux, le
fonctionnement est identique quel que soit le nombre des jeux traditionnels ou
de machines à sous.
Les emplois sont nombreux mais seuls certains demandent une certaine
spécialisation (croupiers, caissiers, physionomistes ).
De plus, faute d'outils de formation de la profession, la formation initiale
est apportée sur place et avec les moyens du bord.
Le tissu économique de
l'Institution des courses est autrement
dense.
Il crée, forme et utilise de nombreux métiers durs et
exigeants : éleveurs propriétaires, entraîneurs de
trot, de plat et d'obstacles, garçons de voyages, métiers
d'écurie, etc.
Il faut ajouter les emplois d'hippodromes : entretien des installations,
gestion des paris et des réunions, restauration, agents du PMU et PMH,
sans oublier les vétérinaires, les biologistes du centre
anti-dopage et, bien entendu, les administratifs de tous les organismes de la
Filière cheval et de la Filière équestre.
Ce monde est très structuré mais complexe ; il représente
des dizaines de milliers d'emplois, son poids économique est
considérable et il tient, dans l'imaginaire des français une
très grande place.
Tout ceci justifie, aux yeux du rapporteur, de donner un large
développement, à coté des données
financières, à toutes les branches de ce grand arbre.
3° L'Etat n'adopte pas la même attitude suivant qu'il s'adresse
à la Fédération française des jeux, aux casinos ou
au PMU.
Il n'y a que deux constantes communes aux trois régimes : l'Etat
prélève pour lui directement ou indirectement un maximum sur le
produit des jeux, et il pèse de tout son poids sur les structures, les
entreprises et les acteurs.
Ces aspects importants seront développés dans les conclusions.
Les casinos intéressent les collectivités locales et, au premier
chef, les communes : ces intérêts seront examinés.
Enfin, le présent rapport, en face des trois grands mondes que sont en
France la FDJ, les courses de chevaux et les casinos, n'oubliera pas
d'évoquer le
petit monde des jeux familiers
qui garde une si
grande importance pour la vie de tous les jours de nos concitoyens.
L'étude d'un domaine aussi vaste et aussi complexe que celui des jeux
d'argent et de hasard est difficile.
En France, l'histoire des courses de chevaux avec paris, celle des loteries et
de la Loterie nationale qui ont précédé la
Française des jeux et son Loto, les cercles de jeux et des casinos qui
leur ont succédé, remontent à la nuit des temps.
Tous les régimes politiques ont été confrontés au
phénomène et ont adopté, c'est le moins que l'on puisse
dire, des attitudes variables dans le temps et dans leur nature, relativement
plus préoccupés qu'ils étaient du rapport pour les caisses
de l'Etat que de la morale publique.
Derrière nombre d'interdictions de principe du jeu
édictées jusque dans la Loi, que de dérogations, que
d'entorses à la règle, que de tolérances profitables.
Pour tenter une présentation claire, le rapport utilisera deux angles
d'attaque : l'observation descriptive et l'analyse
opérationnelle.
La première abordera le jeu (les jeux), phénomène mondial
et historique, la place du hasard et de l'argent dans les jeux, les
comportements des joueurs (y compris celui des joueurs dits
« compulsifs »), le comportement de l'Etat
législateur et contrôleur, celui des opérateurs de jeux,
les perspectives de la mondialisation, les progrès technologiques et
quelques rares comparaisons internationales, faute de temps et de place.
L'analyse opérationnelle se voudra, elle, analytique bien sûr,
mais aussi comparative, critique, prospective et morale (au sens de morale
sociale).
Pour éviter les redites, le plan qui est suivi conjuguera et alternera
ces deux angles d'attaque suivant le besoin.