II. UNE EUROPE QUI EST RESTÉE DÉPENDANTE
Le ralentissement économique en cours conduit à un constat quelque peu « désenchantant », celui de la dépendance persistante de l'Europe à l'égard de l'économie américaine.
L'adoption d'une monnaie unique en Europe, qui fut un événement considérable des années 90, a occulté une réalité de cette période non moins essentielle : le creusement de l'écart de développement économique entre l'Europe et les Etats-Unis et, corrélativement, le rôle moteur de l'économie américaine dans le monde.
En dépit du renforcement des protections des économies européennes, consécutif à l'adoption de l'euro, il apparaît aujourd'hui qu'il était fort hasardeux d'imaginer une « Europe-forteresse » dans un monde de plus en plus interdépendant, une Europe à l'abri des aléas rencontrés par une économie américaine en situation de suprématie.
Il importe évidemment, après avoir pris conscience de cette réalité, de mesurer les chances d'en renverser le cours.
A. MALGRÉ LA MARCHE VERS L'EURO, LE MAINTIEN DE LA DÉPENDANCE ÉCONOMIQUE DE L'EUROPE
Les années 90 ont été marquées par ce que votre rapporteur considère comme un événement aussi majeur que bénéfique, l'adoption en Europe d'une monnaie unique. Mais, force est de constater que cet événement historique s'est déroulé dans un contexte de creusement de l'écart de développement économique entre l'Europe et les Etats-Unis. Votre rapporteur ne peut, dès lors, que constater le maintien d'une forte dépendance de l'Europe à l'égard de l'économie américaine.
1. Les années 90, l'euro en Europe, la croissance aux Etats-Unis
Le processus d'adoption d'une monnaie unique en Europe a, incontestablement, renforcé la stabilité des économies européennes. Il n'a toutefois pas empêché le creusement entre le niveau de développement des Etats-Unis et celui de l'Europe.
a) L'adoption de l'euro a renforcé la stabilité des économies européennes
Sans revenir sur la totalité des avantages escomptés de l'adoption de l'euro, votre rapporteur souhaite mettre en évidence la stabilité renforcée qui s'en est suivie pour l'Europe.
A cet égard, la considération de l'impact sur la croissance européenne de deux crises financières majeures intervenues au cours des années 90, l'une avant la perspective de l'euro - la crise née de la guerre du Golfe -, l'autre contemporaine de cette perspective - la crise asiatique - est sans ambiguïté.
Croissance dans la zone euro et en France
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1992 |
1993 |
1994 |
1995 |
1996 |
1997 |
1998 |
1999 |
2000 |
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Zone euro |
1,4 |
-0,8 |
2,3 |
2,2 |
1,4 |
2,3 |
2,8 |
2,6 |
3,4 |
|
France |
1,3 |
-0,9 |
1,8 |
1,9 |
1 |
1,9 |
3,3 |
3,2 |
3,2 |
Si, au début des années 90, la zone euro n'avait pu échapper à la récession, la crise asiatique n'a fait que ralentir son rythme de croissance.
On soulignera que la France semble avoir particulièrement bénéficié du processus d'adoption de la monnaie unique.
Votre rapporteur est bien conscient que des différences d'une autre nature que celle tenant au processus d'adoption de l'euro peuvent expliquer ces résultats. Il n'en reste pas moins convaincu qu'en évitant le déclenchement des processus d'ajustements monétaires internes à l'Europe, l'adoption de la monnaie unique a permis d'éviter le fardeau de la lutte contre les effets asymétriques des crises de change, qui caractérisaient le fonctionnement du système monétaire européen.
En bref, l'euro (apprécié à partir de ses composantes) s'est sans doute replié, mais sans tensions sur les taux d'intérêt.