4. Rapprocher la fiscalité des entreprises de la norme européenne
Il convient de remarquer que l'évolution du taux français de l'impôt sur les sociétés diffère de celle de la plupart des pays de l'Union européenne 44 ( * ) et que, d'une façon générale, il faut poursuivre, notamment pour les PME, le processus en cours de retour à la moyenne européenne.
La mission tend d'abord à mettre l'accent sur un groupe de mesures ponctuelles particulièrement utiles du point de vue de la compétitivité des entreprises françaises ; pour autant elle ne s'interdit pas ensuite d'appeler de ses voeux des réformes plus lourdes par leurs implications techniques, mais qui semblent de nature, non seulement à clarifier des régimes juridiques longtemps avancés devenus particulièrement confus avec les années, mais encore à nous rapprocher des pratiques de nos concurrents européens.
Il s'agit d'améliorer, au regard du poids des prélèvements mais aussi de la lisibilité des régimes, la compétitivité de notre système fiscal, dont on a vu qu'il était un des critères de localisation des investissements.
a) Les mesures à court terme : amortissements des actifs incorporels et suppression du taux supérieur de la taxe sur les salaires
La mission a constaté à la suite des auditions auxquelles elle a procédé, que deux dispositions fiscales pénalisent particulièrement la localisation des entreprises en France et incitent à des délocalisations d'activités .
Les amortissements des actifs incorporels
Il s'agit d'abord du régime des amortissements des éléments incorporels qui est moins favorable en France que dans certains États de l'Union européenne. En effet, en France, seuls les droits incorporels ayant une durée limitée dans le temps, peuvent faire l'objet d'un amortissement, comme les brevets ou les logiciels. En revanche, ni le fonds de commerce, ni les marques de fabrique ne peuvent faire l'objet d'un amortissement. Cette rigueur risque de pénaliser la localisation de marques en France ou encore d'entreprises gestionnaires de bases de données.
Selon les informations obtenues par la mission, la jurisprudence est en train d'évoluer sur ce sujet 45 ( * ) , ce qui devrait lever les réticences doctrinales résultant du fait qu'on ne peut, en théorie, amortir des biens qui ne se déprécient pas. La mission propose donc d'élargir le champ d'application de l'amortissement des actifs incorporels, notamment en y incluant les marques.
La suppression du taux supérieur de la taxe sur les salaires
Alors que l'ensemble des banques européennes sont exonérées de TVA sur les intérêts, les banques françaises acquittent une taxe sur les salaires, au prorata des opérations exonérées de TVA. Bien qu'elles supportent cette taxe de substitution, les banques françaises n'en sont pas pour autant admises à élargir leurs droits à récupération de TVA.
De fait, la taxe sur les salaires est devenue un impôt spécifique, supporté d'une manière discriminatoire par les banques et sociétés d'assurances françaises notamment. La mission est consciente que la suppression pure et simple de cette taxe à court terme est délicate car elle priverait l'État d'une recette de 50 milliards de francs. Toutefois, elle propose à court terme la suppression du taux supérieur de 13,60 %.
* 44 En 1995 (avant l'adoption de la loi de finances rectificative), le taux de l'impôt sur les sociétés en France s'élevait à 33,33 %. Depuis, il a fait l'objet de multiples modifications et se monte désormais à 36,44 % pour les entreprises dont le chiffre d'affaires est supérieur à 50 millions de francs (et 35,33 % pour les autres).
* 45 Ainsi, dans un arrêt (SA Franco-suisse gestion) du 5 décembre 1995, la Cour administrative d'appel de Paris a admis qu'un élément incorporel du fonds de commerce « peut donner lieu à une dotation annuelle à un compte d'amortissement s'il est normalement prévisible, lors de sa création ou de son acquisition par l'entreprise, que cet élément se déprécie, c'est-à-dire que ses effets bénéfiques sur l'exploitation sont amenés à prendre fin ».