B. UNE PRÉSENCE ÉCONOMIQUE TROP LIMITÉE PAR RAPPORT AUX PERSPECTIVES DE DÉVELOPPEMENT DE LA ZONE

La présence française apparaît bien modeste au regard du dynamisme dont font montre non seulement la Russie, les Etats-Unis, la Turquie ou la Chine, mais aussi certains de nos partenaires européens tels que l'Allemagne, le Royaume-Uni et l'Italie.

1. La place encore marginale de la France au Kazakhstan

Si les échanges commerciaux avec le Kazakhstan tendent à progresser, nos parts de marché demeurent modestes. En outre, la balance commerciale se traduit par un déficit courant pour la France. Notre pays vend des produits agroalimentaires, des biens de consommation et des biens d'équipement et achète des matières premières et du pétrole. En 2000, les exportations françaises se sont élevées à 1,9 milliard de francs (+ 92 %) et les importations à 3,4 milliards de francs (+ 212 %) en raison notamment du gonflement de la facture pétrolière.

Par ailleurs, avec un stock d'investissements de 115 millions de dollars en 1999, la France se classe au 16 e rang des investisseurs étrangers au Kazakhstan, soit 0,4 % du total des investissements ; la part des Etats-Unis est trente fois supérieure.

Les principaux investissements se concentrent dans le secteur pétrolier, et celui des mines. Le rôle de Total- Fina-Elf au sein du consortium chargé de l'exploitation de l'offshore Caspien a été évoqué plus haut. Dans le secteur minier, la COGEMA a investi depuis mars 2000 dans la construction d'une usine pilote de traitement de minerais d'uranium sur le site de Miyumkum dans le sud du pays (22 millions de dollars sur 2 ans). Par ailleurs, Ciment français (du groupe Italcementi) a pris le contrôle de 65 % de la cimenterie de Chimkent.

Depuis 1998, le Kazakhstan est éligible à la Réserve pays émergents (RPE). Lors de la cinquième commission mixte de coopération économique franco-kazakhe réunie à Astana le 4 octobre 2000, deux protocoles financiers ont été signés sur la base de la RPE :

- un projet de réhabilitation du système d'eau d'Almaty par Vivendi Water (27,4 millions d'euros) ;

- un projet de démercurisation par le BRGM du site pollué de Khimpron à Pavlodar sur l'Irtysh (8,4 millions d'euros).

Ces deux projets connaissent aujourd'hui de réelles difficultés .

Vivendi Water a formé avec le Vodokanal d'Almaty, entreprise municipale de gestion des eaux, une société mixte dont elle possède la majorité des actions et qui doit assurer, conformément à un contrat de gestion délégué, la gestion des eaux d'Almaty pendant 25 ans.

Le financement concessionnel (RPE) a été octroyé au gouvernement kazakh qui doit le rétrocéder à la mairie d'Almaty pour financer la réhabilitation du système. La mise en vigueur du protocole financier franco-kazakh est conditionné à l'obtention d'un cofinancement provenant d'une institution multilatérale -une convention de crédit portant sur 5 millions de dollars a été signée avec la BERD- et à la ratification du protocole par le Parlement kazakh.

Cette ratification rencontre aujourd'hui des résistances qui retardent ainsi l'ensemble du projet. Votre délégation a insisté auprès des autorités et, plus particulièrement, des parlementaires, sur l'importance d'une ratification rapide . Si l'écoute a été attentive, les blocages n'ont pas encore été, à ce jour, surmontés.

De même, le projet du BRGM à Pavolovar est subordonné à une ratification du Parlement, aujourd'hui différée.

L'environnement des affaires reste donc marqué par beaucoup d'incertitudes et n'incite pas toujours nos entreprises à investir.

2. L'Ouzbékistan : un marché dont les potentialités ne peuvent pas être toutes exploitées

L'Ouzbékistan représente pour la France le quatrième débouché commercial au sein de la CEI après la Russie, l'Ukraine et le Turkménistan. Nos parts de marché apparaissent cependant ici encore modestes (2,3 %), loin derrière la Russie qui, malgré le recul enregistré depuis l'indépendance, reste le premier fournisseur du pays avec 14 % des importations, la Corée du Sud (13 %), l'Allemagne (10,7 %), les Etats-Unis (8 %), le Japon et la Turquie (5 %).

Les exportations françaises (477 millions de francs en 2000) portent principalement sur les biens d'équipements professionnels (mécanique, matériel électrique et électronique) et les biens intermédiaires, plutôt que sur les biens de consommation dans la mesure où le gouvernement ouzbek a donné la priorité depuis l'indépendance à une industrialisation rapide du pays ainsi qu'à une diversification des industries.

Les importations françaises -principalement constituées de coton- ont enregistré en 2000 un nouveau recul (417 millions de francs).

L'eau, l'énergie et la défense apparaissent aujourd'hui comme trois des secteurs les plus privilégiés par les investisseurs .

Dans le domaine de l'eau, considéré comme prioritaire par les autorités, les entreprises Degrémont et Sapège ont signé en 1998 un contrat d'assistance technique de 27 millions de francs pour rationaliser la production et la distribution d'eau dans la ville de Samarcande. Ce contrat d'une durée de deux ans, financé sur un prêt concessionnel inscrit au protocole franco-ouzbek de 1998, permet l'installation de gros équipement avec l'appui d'une présence technique française. Ce succès a conduit le groupe Suez-Lyonnaise des eaux à relancer des études de faisabilité sur d'autres villes afin de répondre aux futurs appels d'offre de privatisations ou de contrats d'opération-maintenance.

Dans le secteur énergétique , le groupe Tessag-France a reçu en février 2001 confirmation de l'octroi de la garantie souveraine pour le projet de centrale électrique de Navoïazot en association avec des sociétés japonaises. Alstom négocie pour sa part la construction d'une centrale électrique près de Tachkent.

S'agissant du secteur de la défense , plusieurs projets intéressent aujourd'hui Thales (moyens de télécommunications, modernisation de la défense aérienne), la SAGEM (modernisation des hélicoptères MI 8 et MI 24), la SOFREM (construction d'une cartoucherie).

Au total une cinquantaine d'entreprises sont présentes dans ce pays. Depuis cette année, le pays bénéficie de la Réserve pays émergent pour des projets bénéficiant de cofinancements. A l'occasion de la réunion du comité mixte franco-ouzbek de coopération économique et commerciale en juillet prochain, il serait sans doute opportun que soit signé le premier accord « RPE » (le projet de distribution de l'eau à Namangan, sous la responsabilité de Degremont-Safège, pourrait, à cet égard, retenir toute l'attention).

De nombreux représentants d'entreprises françaises se sont fait l'écho auprès de votre délégation d'un engagement encore trop timoré du ministère français des finances. Le plafond de la politique de crédits français 12 ( * ) , jugé trop faible, limite les projets de nos entreprises qui font valoir que l'Ouzbékistan n'a jamais failli à honorer les échéances de ses remboursements. Certes, les difficultés de l'environnement des affaires peut conduire à une certaine prudence : l'obligation de conversion des recettes en devises a ainsi dissuadé le groupe ACCOR de mener à bien ses projets d'investissements malgré le potentiel touristique des villes de Samarcande, Boukhara et Khiva.

Il n'en reste pas moins vrai que les sociétés occidentales concurrentes paraissent bénéficier d'un soutien plus adapté de leurs Etats respectifs et d'une politique de crédits pragmatique fondée non pas sur un plafond mais sur l'examen au cas par cas des projets. Le cas allemand avec le système Hermès est souvent cité.

Les perspectives de développement économique en Asie centrale justifieraient sans doute une plus grande attention de Bercy à l'égard de cette zone.

* 12 Un plafond de l'ordre de 65 millions de francs pour l'Ouzbékistan, déjà complètement utilisé cette année pour un seul projet.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page